Projet de loi espagnol sur les expulsions depuis les enclaves : inquiétudes du HCR

Articles d'actualité, 28 octobre 2014

© J. Palazón
Sur un terrain de golf à Melilla, on continue de jouer alors que des personnes escaladent la triple clôture d'enceinte, des grillages hérissés de barbelés, pour tenter d'entrer dans cette enclave espagnole en Afrique du Nord.

MADRID, Espagne, 28 octobre (HCR) Le HCR a fait part vendredi de sa préoccupation concernant un projet de loi espagnol visant à légaliser l'expulsion automatique des personnes tentant de franchir les grillages de la triple clôture d'enceinte qui marque la frontière vers ses enclaves de Ceuta et Melilla en Afrique du Nord.

Dans le cadre de cette initiative, une personne tentant d'accéder clandestinement à Ceuta et Melilla sans les documents requis, serait automatiquement expulsée. Elle n'aurait pas droit aux garanties juridiques prévues dans la législation espagnole et celle de l'Union européenne (UE) concernant le droit d'un individu à déposer une demande d'asile.

Ces deux villes espagnoles sont les seules frontières terrestres entre l'UE et l'Afrique. Depuis l'année dernière, il y a eu une augmentation du nombre d'arrivants clandestins par cet itinéraire. Par ailleurs, une hausse a également été observée dans la proportion des personnes originaires de pays déchirés par la guerre, la violence et la persécution, y compris la Syrie, la République centrafricaine et le Mali.

« En 2013, environ 4 200 personnes sont entrées clandestinement dans les enclaves [par voies terrestre et maritime]. Cette année, plus de 5 000 personnes ont déjà réussi à franchir la frontière, y compris 2 000 personnes qui fuyaient le conflit en Syrie [dont 70% sont des femmes et des enfants] », a indiqué William Spindler, porte-parole du HCR, aux journalistes à Genève.

En réponse à cet afflux, le Gouvernement espagnol a proposé un amendement à la loi actuelle qui serait appliqué exclusivement aux frontières de Ceuta et Melilla. La proposition introduit la notion de « renvoi à la frontière » et vise à légaliser la pratique actuelle de refoulements. Cette pratique ne prévoit aucune possibilité de déposer une demande d'asile de la part des personnes qui fuient les persécutions et les conflits.

« Dans ce contexte, le HCR souligne l'importance de permettre l'accès au territoire afin de donner la possibilité aux arrivants de demander une protection internationale », a déclaré William Spindler. « Le HCR comprend la complexité engendrée par la gestion des frontières à Ceuta et Melilla. Toutefois, le gouvernement devrait veiller à ce que toute initiative juridique soit conforme à ses obligations internationales, notamment selon la Convention de 1951 », a-t-il encore ajouté.

Selon William Spindler, le HCR est également préoccupé par le recours croissant à la violence à la frontière pour dissuader les migrants et les demandeurs d'asile d'entrer. Cette année, plusieurs incidents violents ont été signalés ainsi qu'une hausse des refoulements depuis les enclaves.

Plus récemment, le 15 octobre dernier, des photos ont montré les gardes-frontières ayant recours à la violence envers quelque 200 personnes qui tentaient franchir les grillages frontaliers pour entrer à Melilla. « Le HCR appelle les autorités espagnoles à assurer qu'aucune violence ne soit exercée aux frontières espagnoles qui doivent être gérées dans le plein respect des droits humains et du droit des réfugiés. Le HCR se tient prêt à appuyer les autorités espagnoles », a déclaré William Spindler.

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Repérés au large des îles Canaries

Malgré des dangers considérables, des migrants en quête d'un avenir meilleur, et des réfugiés fuyant la guerre et les persécutions, continuent à embarquer dans des bateaux de fortune pour des traversées en haute mer. L'un des principaux itinéraires vers l'Europe part de l'ouest de l'Afrique vers l'archipel des Canaries, un territoire espagnol.

Avant 2006, la plupart des migrants irréguliers, empruntant cet itinéraire sur l'océan Atlantique, embarquaient sur des pateras, des bateaux pouvant transporter jusqu'à 20 personnes. Les pateras partaient en majorité depuis le Maroc et le Territoire du Sahara occidental, pour une traversée d'une demi-journée. Les pateras ont été remplacés par des bateaux plus importants appelés des cayucos, qui peuvent transporter jusqu'à 150 personnes. Les cayucos partent depuis des ports situés dans des pays d'Afrique de l'Ouest comme la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Sénégal ou la Sierra Leone. Ils prennent plus de trois semaines pour atteindre les Canaries.

Parmi les 32 000 personnes arrivées dans les îles Canaries, seule une petite proportion d'entre elles (359 personnes) ont demandé l'asile en 2006. En 2007, plus de 500 demandes d'asile ont été déposées aux îles Canaries. Ce chiffre est particulièrement significatif, étant donnée la diminution de 75 pour cent de nombre global des arrivées par la mer en 2007.

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