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Jamaïque : information sur la législation régissant la violence familiale et sa mise en oeuvre (2004-2007)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Author Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa<br>
Publication Date 30 April 2007
Citation / Document Symbol JAM101753.EF
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Jamaïque : information sur la législation régissant la violence familiale et sa mise en oeuvre (2004-2007), 30 April 2007, JAM101753.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/469cda2fc.html [accessed 5 June 2023]
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Législation

+ la suite d'une déclaration du premier ministre de la Jamaïque qualifiant [traduction] « "le niveau de violence familiale en Jamaïque de très inquiétant" », le parlement jamaïcain a adopté en 2003 la nouvelle loi sur la violence familiale (Domestic Violence Act), promulguée en 2004 (AI 22 juin 2006, sect. 5; voir aussi The Jamaica Observer 16 janv. 2006). La nouvelle loi modifie la première loi sur la violence familiale de la Jamaïque, initialement adoptée en 1996 (Jamaïque 2004). En vertu des dispositions de la nouvelle loi, les femmes victimes de violences conjugales peuvent présenter une demande d'ordonnance de protection en passant par les tribunaux (ibid. 2004, art. 3). Les agents de police jamaïcains ont également le droit de présenter des demandes d'ordonnance de protection au nom d'un enfant ou d'une personne à charge victime de violences familiales (ibid.). Le non-respect d'une ordonnance de protection rendue par un tribunal constitue un délit passible d'une amende de 10 000 JMD (dollars jamaïcains) [ou environ 169,90 $CAN (Canada 5 avr. 2007)] ou d'une peine de prison maximale de six mois ou les deux (ibid., art. 5). Des modifications apportées à la loi prévoient que les femmes divorcées ou séparées ainsi que leurs enfants sont protégés contre la perte de l'aide économique qu'ils pourraient recevoir du père (ou d'autres partenaires masculins en visite) quand ces derniers font l'objet d'une ordonnance d'un tribunal (AI 22 juin 2006, sect. 5, voir aussi The Jamaica Observer 16 janv. 2006). En vertu de la loi, les tribunaux ont également le pouvoir de délivrer des ordonnances d'occupation qui permettent à la personne dont la demande est acceptée de vivre dans le domicile conjugal (Jamaïque 2004, art. 3).

En juin 2006, Amnesty International (AI) a publié un rapport détaillé sur la violence sexuelle en Jamaïque, qui reposait sur les résultats de deux années d'enquêtes (22 juin 2006). Dans ce rapport, AI ajoute qu'en plus de la loi sur la violence familiale, le parlement jamaïcain a adopté en 2004 la loi sur la propriété de la famille (droit des époux) (Family Property (Rights of Spouses) Act) (AI 22 juin 2006, sect. 5). Cette loi prévoit que, dans les cas où la résidence familiale n'est enregistrée qu'au nom d'une seule personne, elle appartient néanmoins aux deux conjoints (ibid.). Dans le même ordre d'idée, la permission des deux conjoints est exigée pour les transactions liées à la propriété, même si la propriété n'est enregistrée qu'au nom de l'un d'entre eux (ibid.). AI souligne que ces dispositions permettent aux femmes de mettre plus facilement fin à une relation violente (ibid.).

AI explique que même si le viol constitue une infraction criminelle en Jamaïque, le viol entre époux ne l'est pas (ibid.; ibid. 23 mai 2006). Cependant, il y a un [traduction] « précédent dans la common law relatif à la protection [contre le viol entre époux] dans certaines circonstances qui est "convaincant, mais non contraignant", et les procureurs peuvent décider de ne pas poursuivre » (ibid., 22 juin 2006, sect. 5; voir aussi AsylumAid juin 2004, 123). Selon AI, l'ouverture de poursuites dans les cas de viol entre époux est [traduction] « difficile, voire impossible [à obtenir] » (AI 22 juin 2006, sect. 5).

Un projet visant à modifier la loi sur les infractions contre les personnes (Offences Against the Person Act) de la Jamaïque, rédigée en 1995, comporterait des modifications qui criminaliseraient le viol entre époux (ibid.; ibid. 23 mai 2006; voir aussi Nations Unies 25 août 2006, paragr. 21). En mars 2007, le Jamaica Observer a signalé qu'un comité parlementaire pense sérieusement à modifierla loi sur les infractions contre la personne, y compris des modifications qui criminaliseraient le viol entre époux (The Jamaica Observer 1er mars 2007). Selon l'article, la police de la Jamaïque (Jamaica Constabulary Force – JCF) a proposé au comité que le dépôt de plaintes contre le viol entre époux obtiennent d'abord l'approbation du directeur des Poursuites publiques (Director of Public Prosecutions -DPP) avant d'aller en procès, car une telle procédure [traduction] « permettrait de préserver cette institution qu'est le mariage » (ibid.) Un sénateur appartenant au parti du gouvernement aurait fait des déclarations semblables avant que le comité ne décide, sous la pression des groupes de défense des droits de la personne, que les plaintes de viol entre époux déposées en vertu de la loi modifiée sur les infractions contre la personne ne seraient pas sujettes à l'approbation du DPP (ibid.).

Application

En 1989, la JCF a mis sur pied le Centre d'enquêtes sur les infractions sexuelles et la violence envers les enfants (Centre for Sexual Offences and Child Abuse – CISOCA) (Jamaïque s.d.a; AI 22 juin 2006, sect. 4.b). Le CISOCA, dont les bureaux sont situés dans des postes de police centraux partout en Jamaïque, a pour rôle d'offrir counselling et appui aux victimes, de prévoir des examens médicaux et de garantir que les preuves recueillies auprès de la victime et de l'agresseur sont conservées dans des endroits séparés (ibid.; voir aussi Jamaïque s.d.a). Le rapport d'AI précise que les agents spécialement formés du CISOCA n'entreprennent pas eux-mêmes d'enquêtes criminelles; celles-ci sont effectuées par des agents de police ordinaires qui n'ont pas nécessairement reçu de formation spécialisée (AI 22 juin 2006 sect. 4.b; voir aussi AI 23 mai 2006). Le site Internet du CISOCA indique toutefois que l'unité [traduction] « garantit [une] enquête rapide et efficace sur les infractions » (Jamaïque s.d.a). Aucune information indiquant si le CISOCA a le mandat de répondre à des plaintes pour violences conjugales ou pour viol entre époux où s'il y répond régulièrement n'a pu être trouvée parmi les sources consultées par la Direction des recherches. Le site Internet du CISOCA fournit de l'information sur certaines infractions sexuelles, mais cette information ne comprend pas la violence conjugale ou le viol entre époux (Jamaïque s.d.a).

Dans les cas de viol entre conjoints, quand l'accusé ne cohabite pas avec la plaignante, AI souligne qu'en règle générale, les agents de police portent des accusations de voies de fait contre les personnes accusées de violences conjugales (22 juin 2006, sect. 5). Dans les cas où l'accusé et la plaignante partagent une résidence, la police propose généralement à l'accusé du counselling (AI 22 juin 2006, sect. 5). Selon AI, les agents de police ont blâmé une femme, qui les avait appelés après avoir été violée chez elle, parce qu'elle portait [traduction] « un haut et des shorts minuscules » (ibid., sect. 4). AI ajoute que les agents de police sont [traduction] « encore moins portés à enquêter sur les cas [de violence sexuelle] quand le suspect adulte et la victime [se] connaissent » (ibid., sect. 4.a). Le Département d'État (Department of State) des États-Unis fait également remarquer que la police hésite à intervenir dans des conflits conjugaux (É.-U. 6 mars 2007).

En ce qui concerne l'appareil judiciaire de la Jamaïque, le site Internet du Service d'information de la Jamaïque (Jamaica Information Service – JIS), administré par le gouvernement, explique qu'en Jamaïque, des tribunaux pour la famille ont été créés dans quatre paroisses (Jamaïque s.d.b). Ces tribunaux ont pour rôle de prendre des décisions sur [traduction] « toutes les questions qui touchent la famille », à l'exception des procédures de divorce; ils peuvent également diriger les demandeurs vers les services sociaux afin de les aider à résoudre leurs plaintes (ibid.).

Au cours des entrevues effectuées en vue de la rédaction du rapport de 2006 d'AI, des membres de la magistrature de la Jamaïque ont expliqué que, dans les cas qui comportent des agressions sexuelles non confirmées, les juges sont tenus de lire l'avertissement suivant qui découle de la tradition de la common law de la Jamaïque :

[traduction]

Madame la présidente du jury et membres du jury, comme il s'agit d'une affaire de viol (violence sexuelle), la loi exige que je vous donne un avertissement. La loi dispose qu'en présence de ce type de cas, il faut obtenir corroboration [...] car l'expérience nous démontre que les femmes et les jeunes filles racontent souvent des mensonges, et c'est pourquoi la loi exige une preuve indépendante. Cependant, s'il n'y a pas de corroboration et que vous croyez que la plaignante dit la vérité, tout en gardant à l'esprit l'avertissement, vous pouvez prendre une décision en vous fondant sur la preuve, même sans corroboration (AI 22 juin 2006, sect. 4.d; ibid., note en bas de page 112; voir aussi AI 23 mai 2006; Jamaïque 6 avr. 2001, 1, 3-6).

AI persiste à dire que les jeunes filles et les femmes sont victimes de discrimination de la part de la police et de la magistrature jamaïcaines et [traduction] « [qu'e]n cour, le témoignage des femmes compte nettement moins que celui des hommes » (AI 22 juin 2006).

En août 2006, le Comité des Nations Unis pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a publié ses observations finales sur le cinquième rapport périodique de la Jamaïque présenté à l'organisme de surveillance de l'application du traité (Nations Unies 25 août 2006). Le Comité indique qu'en Jamaïque, les victimes de la violence fondée sur le genre n'ont pas droit à l'aide juridique (ibid., paragr. 25). Tout en félicitant le gouvernement jamaïcain pour les mesures prises destinés à lutter contre la violence à l'égard des femmes, y compris la nouvelle loi de 2004 sur la violence conjugale, le Comité souligne que la violence contre les femmes [traduction] « n'a pas été réglée de manière globale et systématique, et que les mesures conçues en vue de combattre et d'éliminer toutes les formes de violence à l'égard des femmes ne sont pas mises en ouvre dans la pratique » (ibid., paragr. 15).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Amnesty International. 22 juin 2006. « Sexual Violence Against Women and Girls in Jamaica: Just a Little Sex ». (AMR 38/002/2006) [Date de consultation : 6 févr. 2007]
_____ . 23 mai 2006. « Jamaica ». Amnesty International Report 2006. [Date de consultation : 7 févr. 2007]

AsylumAid. Juin 2004. Safe for Whom? Women's Human Rights Abuses and Protection in 'Safe List' Countries: Albania, Jamaica and Ukraine. [Date de consultation : 6 févr. 2007]

Canada. 5 avril 2007. Banque du Canada. « Convertisseur de devises – taux du jour ». [Date de consultation : 5 avr. 2007]

États-Unis (É.-U.). 6 mars 2007. Department of State. « Jamaica ». Country Reports on Human Rights Practices for 2006. [Date de consultation : 5 avr. 2007]

Jamaïque. 2004. Ministry of Justice. The Domestic Violence Act. [Date de consultation : 7 févr. 2007]
_____ . 6 avril 2001. The Supreme Court of Jamaica. « Supreme Court Criminal Appeal No. 12/98. Regina vs. Derrick Williams ». [Date de consultation : 5 avr. 2007]
_____ . S.d.a. Jamaica Constabulary Force (JCF). « Centre for the Investigation of Sexual Offenses and Child Abuse (CISOCA) ». [Date de consultation : 7 févr. 2007]
_____ . S.d.b. Jamaica Information Service (JIS). « Ministry of Justice ». [Date de consultation : 5 avr. 2007]

The Jamaica Observer. 1er mars 2007. Alicia Dunkley. « No Consent from the DPP ». [Date de consultation : 5 avr. 2007]
_____ . 16 janvier 2006. Margarette May Macauley. « Visiting Relationships and Domestic Violence ». [Date de consultation : 5 avr. 2007]

Nations Unies. 25 août 2006. Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW). Committee on the Elimination of All Forms of Discrimination Against Women. Concluding Comments of the Committee on the Elimination of Discrimination Against Women: Jamaica. (CEDAW/C/JAM/CO/5) [Date de consultation : 6 févr. 2007]

Autres sources consultées

Sources orales : L'Association d'organisations pour femmes de la Jamaïque (Association of Women's Organizations in Jamaica – AWOJA) et Femmes Inc. (Women Incorporated) n'ont pas fourni d'information à la Direction des recherches dans les délais prescrits.

Sites Internet, y compris : Association antillaise pour la recherche et l'action féministes (CAFRA), British Broadcasting Corporation (BBC); Cour interaméricaine des droits de l'homme; European Country of Origin Information Network (ecoi.net); Family Health International; Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR); Independent Jamaica Council for Human Rights; Jamaica Family Planning Association; Jamaica Gleaner; Organisation mondiale contre la torture (OMCT); Organisation mondiale de la santé (OMS); Reliefweb; Réseaux d'information régionaux intégrés (IRIN); U.S. Committee for Refugees and Immigrants (USCRI); Women's Crisis Centre, Kingston.

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