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Tunisie : information sur la situation des femmes vivant seules, qu'elles soient célibataires ou divorcées, particulièrement à Tunis; influence de leur statut social, de leur niveau d'éducation et de leur autonomie financière sur leur situation; information indiquant si elles peuvent accéder à un emploi et à un logement; services de soutien qui leur sont offerts (2014-octobre 2016)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 20 January 2017
Citation / Document Symbol TUN105651.F
Related Document(s) Tunisia: The situation of women who live alone, whether they are single or divorced, particularly in Tunis; incidence of their social status, level of education and financial autonomy on their situation; whether they can access employment and housing; support services available to them (2014-October 2016)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Tunisie : information sur la situation des femmes vivant seules, qu'elles soient célibataires ou divorcées, particulièrement à Tunis; influence de leur statut social, de leur niveau d'éducation et de leur autonomie financière sur leur situation; information indiquant si elles peuvent accéder à un emploi et à un logement; services de soutien qui leur sont offerts (2014-octobre 2016), 20 January 2017, TUN105651.F, available at: https://www.refworld.org/docid/5894620b4.html [accessed 22 May 2023]
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Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Situation des femmes en général

Des sources rapportent que des mesures de protection et de promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes sont prévues par la Constitution de 2014 (Freedom House 14 juill. 2016; Bertelsmann Stiftung 2016, 25; AI 2016,12; Human Rights Watch 2016) et par le Code du statut personnel [de 1956] en Tunisie (ibid.; Freedom House 14 juill. 2016). Freedom House signale notamment que le Code affirme l'égalité des femmes et des hommes (Freedom House 14 juill. 2016). La Constitution tunisienne « garantit l'égalité des chances entre l'homme et la femme pour l'accès aux diverses responsabilités et dans tous les domaines » (Tunisie 2015, art. 46).

Cependant, des sources notent que le Code du statut personnel comprend également des dispositions discriminatoires envers les femmes (Human Rights Watch 2016; AI 2016, 12; Bertelsmann Stiftung 2016, 25). Parmi celles-ci, l'identification de l'homme comme chef de la famille (AI 2016, 12; Bertelsmann Stiftung 2016, 25) ou encore dans les prescriptions concernant la garde des enfants et l'héritage (ibid.). Dans son Index de transformation pour 2016, la Fondation Bertelsmann Stiftung [1] déclare que [traduction] « des normes sociales conservatrices sont largement répandues dans le pays », notant particulièrement que « [l]es femmes sont défavorisées dans certains domaines de la loi et [de] sa mise en pratique par les tribunaux, ainsi que dans de nombreux autres domaines de la vie sociale » (Bertelsmann Stiftung 2016, 12). De même, les Country Reports on Human Rights Practices for 2015 du Département d'État des États-Unis déclarent qu'il existe des [traduction] « obstacles sociétaux à la pleine participation économique des femmes » (É.-U. 13 avr. 2016, 1). Cette même source explique que [traduction] « des barrières sociétales et culturelles entravent la participation des femmes au marché du travail, en particulier dans des postes de direction » (ibid., 18).

Un rapport sur une mission en Tunisie, présenté au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies par le Groupe de travail sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique, note toutefois que « les femmes [sont] de plus en plus nombreuses à travailler à l'extérieur et donc à contribuer de manière notable aux charges de la famille » (Nations Unies 30 mai 2013, paragr. 34). Les Country Reports 2015 ajoutent que [traduction] « la loi exige explicitement un salaire égal pour un travail égal [pour les femmes et les hommes], et que la loi est généralement respectée par le gouvernement » (É.-U. 13 avr. 2016, 18).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, la présidente de l'Association Femmes & Leadership, une ONG qui œuvre à renforcer la participation des femmes à la vie publique et professionnelle en Tunisie (Jamaity 29 juin 2015), a déclaré que

[l]a société tunisienne a beaucoup évolué sur [le plan de l'autonomie des femmes] depuis 1956, mais nous vivons également un retour en arrière et un conservatisme dans l'attitude qui a explosé après la révolution de janvier 2011. Nous observons aujourd'hui des phénomènes, heureusement ponctuels, que nous n'aurions jamais crus possibles par le passé [:] viol, harcèlement sexuel, régression des libertés pour certaines femmes, etc. (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

2. Situation des femmes vivant seules
2.1. Femmes vivant seules et accès au logement

La présidente de l'Association Femmes & Leadership a déclaré que « [l]es femmes célibataires (non mères célibataires) et divorcées vivent normalement en Tunisie » (ibid.). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une représentante de la Ligue tunisienne de défense des droits de l'homme (LTDH), qui a également œuvré dans deux associations féministes tunisiennes, a aussi déclaré que

les Tunisiennes sont de plus en plus exposées à vivre seules. Outre [pour des raisons de divorce, de célibat et de veuvage], l'éloignement du milieu familial peut désormais être dicté par la vie professionnelle ou par le cursus de la formation (LTDH 24 oct. 2016).

La représentante a cependant noté que « le statut des divorcées ou des veuves demeure difficile à assumer; c'est pourquoi les femmes ont tendance à appréhender  cette situation. Elles ont néanmoins recours au divorce quand elles le jugent nécessaire » (ibid.). Amnesty International (AI) signale aussi que les femmes divorcées font l'objet d'une « stigmatisation » (AI 25 nov. 2015, 22). L'organisation ajoute que selon un avocat qu'elle a consulté, œuvrant dans le domaine de la violence familiale, « les femmes divorcées sont, en règle générale, mal vues par la société » (ibid.).

La présidente de l'Association Femmes & Leadership a ajouté que les femmes peuvent accéder d'elles-mêmes à tous les services, affirmant qu'« elles n'ont besoin d'aucune tutelle, si elles sont majeures ([plus de]18 ans)» (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016). La représentante de la LTDH a en outre expliqué que

la pression de la vie moderne pousse les femmes (dotées de diplômes et de savoir-faire divers) à assumer toutes leurs responsabilités dans la vie privée et publique. Elles sont ainsi appelées à gérer leurs biens propres et ceux de la famille. Ouvrir des comptes bancaires et louer des locaux sont effectivement des actes qu'elles sont appelées à assurer sans l'aide masculine (LTDH 24 oct. 2016).

La présidente a cependant noté que « le seul hic est le propriétaire de la maison, par exemple, qui pourrait ne pas accepter de louer à une femme célibataire, ce qui est assez courant pour les jeunes femmes surtout » (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

La représentante a pour sa part souligné que « les  libertés des femmes vivant seules demeurent sous le contrôle vigilant de la famille et du regard social; et ce, particulièrement dans les milieux populaires » (LTDH 24 oct. 2016). Selon la présidente,

la situation des femmes célibataires est toujours exposée à des violences plus importantes, notamment de la part des voisins, collègues, etc. Dans certains cas, elles peuvent être agressées chez elles ou devant chez elles, simplement parce qu'elles ont invité des amis, de la famille, et surtout quand il s'agit d'hommes (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Pour des renseignements sur la situation des femmes ayant eu un enfant hors mariage, veuillez consulter la réponse à la demande d'information TUN104988 de décembre 2014.

2.2 Importance du milieu social, du niveau d'éducation et de l'autonomie financière

La représentante a signalé que « la condition des femmes seules (célibataires, veuves ou divorcées) est vécue différemment selon l'appartenance au milieu social » (LTDH 24 oct. 2016). Elle ajoute qu'il existe une

protection assurée aux femmes par leur niveau d'enseignement, leur « surclassement» socioprofessionnel, et leur aisance matérielle. L'autonomie économique des femmes est le garant de leur liberté et de leur invulnérabilité. Cette autonomie renforce la capacité des femmes à assumer le statut de femmes seules et à assurer les charges des familles dites monoparentales. Ce sont là des situations auxquelles les femmes sont de plus en plus exposées en Tunisie (ibid.).

Allant dans le même sens, la présidente a déclaré que les statuts des femmes célibataires et divorcées « diffèrent selon leur CSP (Catégorie socioprofessionnelle). Quand elles sont cadres, éduquées et avec un niveau financier correct, elles s'en sortent sans problèmes, en général » (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016).

2.3 Situation dans les grandes villes, particulièrement à Tunis

Selon la présidente, « les grandes villes [comme Tunis] sont plus ouvertes et moins contraignantes» pour les femmes qui vivent seules (ibid.). Toutefois, la représentante a déclaré que « [d]ans les villes de l'intérieur, les relations sociales sont encore fortement marquées du sceau de la "traditionnalité" et de la culture patriarcale » (LTDH 24 oct. 2016). Elle a ajouté qu'il existe

des distinctions entre le monde rural […] et la bande côtière, où se sont concentrés les efforts en matière d'investissements et d'infrastructure offrant de plus grandes opportunités d'emploi, ce qui a justifié une ruée progressive vers la capitale (ibid.).

Elle a également affirmé qu' « il est relativement plus facile de se frayer un chemin, en tant que femme seule, si on est dans la capitale » (ibid.). De même, la présidente a déclaré que

[l]e grand Tunis se distingue par le fait que c'est la plus grande agglomération et, du coup, [c'est] là où les gens se connaissent moins et [où] on peut se fondre dans la foule. Cependant, ceci dépend aussi des quartiers et des habitants. Les habitations verticales dans les quartiers haut de gamme sont beaucoup moins contraignantes que les quartiers populaires à habitations jumelées et rapprochées (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016).

La représentante a aussi donné comme exemple

[qu'une] femme divorcée, d'un milieu aisé, vivant dans les quartiers riches de la capitale bénéficie de protections multiples : tolérance culturelle, respect de la vie privée, aisance matérielle protégeant contre toutes les promiscuités (LTDH 24 oct. 2016).

2.4 Accès à l'emploi et harcèlement au travail

Selon la présidente, «[s]ur le plan de l'emploi, il n'y a aucune discrimination sur le plan légal ou dans la majorité des pratiques » (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016). D'un autre côté, la représentante a déclaré que « [l]es discriminations dans l'accès à l'emploi et dans l'évolution des carrières concernent les femmes d'une façon générale. Il serait difficile de prouver que les femmes seules s'exposent davantage à être recalées » (LTDH 24 oct. 2016). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans un sens ou dans l'autre.

Cependant, la représentante a ajouté que « les données montrent en revanche [que les femmes seules] sont davantage sujettes au harcèlement sexuel sur les lieux de travail et ailleurs » (ibid.). De même, la présidente a aussi déclaré que

quand la femme est divorcée ou mère célibataire, plusieurs formes de harcèlement ou d'exploitation apparaissent. La gestion de leurs temps de travail n'est pas aménagée en fonction des contraintes [qu'elles vivent]. À ce niveau, la vie privée devient source d'indiscrétion et de non-respect, parfois. (Association Femmes & Leadership 1er nov. 2016).

Les Country Reports 2015 mentionnent aussi que le harcèlement sexuel est [traduction] « un problème » au pays, mais ils précisent que des données pour en mesurer l'étendue ne sont pas disponibles (É.-U. 13 avr. 2016, 17).

3. Services de soutien

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches a trouvé peu d'information sur des services de soutien offerts spécifiquement aux femmes vivant seules. Cependant, la représentante de la LTDH a déclaré que

[l]a question de l'autonomisation des femmes est une thématique centrale dans les préoccupations actuelles des associations féministes qui travaillent sur les questions d'égalité face aux héritages et sur les violences considérées comme des entraves majeures à la pleine jouissance par les femmes de leurs droits humains fondamentaux (LTDH 24 oct. 2016).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Note

[1] La Fondation Bertelsmann est une fondation privée allemande dont l'objectif est de [traduction] « promouvoir la recherche et le développement des connaissances dans les domaines de la religion, de la santé publique [...], des échanges culturels à l'échelle internationale, de la démocratie, de la gouvernance et de l'engagement civique » (Bertelsmann Stiftung s.d.).

Références

Amnesty International (AI). 2016. Tunisie: Communication au Comité des droits économiques, sociaux et culturels [ONU], 59e Session, 19 septembre - 7 octobre 2016. [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Amnesty International (AI). 25 novembre 2015. Les victimes accusées : violences sexuelles et violences liées au genre en Tunisie. (MDE 30/2814/2015) [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Association Femmes & Leadership. 1er novembre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par la présidente.

Bertelsmann Stiftung. 2016. BTI 2016 - Tunisia Country Report . [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Bertelsmann Stiftung. S.d. « The Beliefs Behind our Work ». [Date de consultation : 24 oct. 2016]

États-Unis (É.-U.). 13 avril 2016. Department of State. « Tunisia ». Country Reports on Human Rights Practices for 2015. [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Freedom House. 14 juillet 2016. « Tunisia ». Freedom in the World Report for 2016. [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Human Rights Watch. 2016. Rapport mondial 2016 : Tunisie. [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Jamaity. 29 juin 2015. « Association Femmes & Leadership ». [Date de consultation : 4 nov. 2016]

Ligue tunisienne de défense des droits de l'homme (LTDH). 24 octobre 2016. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par une représentante.

Nations Unies. 30 mai 2013. Conseil des droits de l'homme. Rapport du Groupe de travail sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique : Additif Mission en Tunisie (A/HRC/23/50/Add.2). [Date de consultation : 24 oct. 2016]

Tunisie. 2014. Constitution de la République tunisienne. [Date de consultation : 16 janv. 2016]

Autres sources consultées

Sources orales : Association BEITY; Association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement; Association tunisienne des femmes démocrates; Aswat Nissa; Ligue tunisienne des droits politiques de la femme; Professeure d'histoire et d'études féminines, Université La Manouba; Union nationale de la femme tunisienne; Voix de femmes.

Sites Internet, y compris : Agence Tunis Afrique Presse; Babnet Tunisie; Baya; Crédif; Directinfo; ecoi.net; L'Économiste maghrébien; Érudit; Factiva; Femmes tunisiennes; France – Cour nationale du droit d'asile; FIDH – Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux; HuffPost Tunisie; IRIN; Journal des femmes; Kapitalis; Le Monde; Mosaïque FM; Nations-Unies – Refworld; Nawwat; Overseas Development Institute; La Presse de Tunisie; Réalités; RFI; Le Temps; Tunisie-Radio; Tuniscope; Webdo.tn.

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