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République démocratique du Congo (RDC) : information sur le traitement réservé aux personnes ayant des troubles de santé mentale; protection et services offerts par l'État

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 14 June 2012
Citation / Document Symbol COD104104.F
Related Document(s) Democratic Republic of the Congo: The treatment of people with mental health disorders; protection and services provided by the state
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, République démocratique du Congo (RDC) : information sur le traitement réservé aux personnes ayant des troubles de santé mentale; protection et services offerts par l'État, 14 June 2012, COD104104.F, available at: https://www.refworld.org/docid/50eac4c92.html [accessed 20 May 2023]
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1. Prévalence des troubles de santé mentale en RDC

Dans un article publié le 14 octobre 2008, le quotidien Kinois Le Potentiel signalait que selon le ministre de la Santé publique de la République démocratique du Congo (RDC), les maladies mentales « sont très courantes » en RDC. Un article de Radio Okapi, la radio des Nations Unies en RDC (Radio Okapi s.d.), souligne que selon des spécialistes, le nombre de personnes ayant des maladies mentales serait en augmentation en RDC (10 oct. 2009). L'article publié en octobre 2008 par le Potentiel signalait que selon les données du Programme national de santé mentale (PNSM), au moins 15 millions de Congolais avaient des troubles mentaux (14 oct. 2008), la population de la RDC étant estimée à 60 millions d'habitants (ibid.; RDC s.d.). De son côté, au cours d'un entretien avec une correspondante du quotidien kinois La Prospérité, le directeur de l'ONG Handicap International section Belgique, qui se consacre notamment à la prévention des handicaps, de même qu'à la réadaptation et à la réinsertion des personnes handicapées, a déclaré que selon des statistiques non datées de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 10 p. 100 des Congolais seraient touchés par un handicap physique ou mental (La Prospérité 4 déc. 2010). Toutefois, d'après un article du Potentiel publié en 2008, un représentant de l'OMS aurait déclaré qu'il y a un « manque de données fiables et à grande échelle » concernant la santé mentale en RDC (14 oct. 2008).

Le Potentiel note que les conflits armés, les violences sexuelles qui les accompagnent ainsi que la pauvreté sont des facteurs qui peuvent expliquer la prévalence des troubles de santé mentale en RDC (14 oct. 2008). De même, l'ONG Conseil information formation/santé soutient que les guerres et l'insécurité ont contribué à l'augmentation de la prévalence des troubles de santé mentale (Radio Okapi 10 oct. 2009).

2. Traitement réservé aux personnes ayant des troubles de la santé mentale en RDC
2.1 Traitement réservé par la société

Le directeur de la section Belgique de l'ONG Handicap International a affirmé que les personnes vivant avec un handicap physique ou mental en RDC seraient victimes de « discrimination » (La Prospérité 4 déc. 2010). De son côté, le Bureau international des droits des enfants, une ONG fondée à Montréal en 1994 qui possède le statut consultatif auprès des Nations Unies, signale que selon des études effectuées entre 2003 et 2005 par les organisations Save the Children et l'Agence américaine pour le développement international (United States Agency for International Development - USAID), en RDC, les enfants touchés par un handicap physique ou mental seraient « souvent stigmatisés » par leur famille ainsi que leur communauté (Bureau international des droits des enfants 2008, page des droits d'auteur, 147). Dans ce rapport, on peut lire ce qui suit :

Ils [les enfants ayant un handicap] sont régulièrement accusés de sorcellerie, malgré le fait que la Constitution congolaise prohibe et punisse ce type d'accusation. Bien que la plupart des handicaps aient des causes physiologiques, les handicaps physiques et mentaux sont perçus comme un mauvais sort et une honte pour les familles. Les enfants sont habituellement cachés ou abandonnés et deviennent souvent des enfants de la rue (ibid.).

Un rapport de l'UNICEF publié en 2010 soulignait que dans certains pays africains, dont la RDC, les enfants ayant un handicap mental sont susceptibles d'être accusés d'être des « enfants-sorciers », et d'être par la suite « stigmatisés à vie » (Nations Unies avril 2010, 5, 19, 48). Le rapport signale également que selon des données fournies par Filip de Boeck lors d'une présentation à l'Université de Toronto en 2003, 23 000 enfants auraient été abandonnés par leur famille pour « sorcellerie »et vivraient dans la rue à Kinshasa (ibid., 19 note 22). De même, d'après Radio Okapi, les enfants nés avec un handicap mental seraient parfois considérés « comme des personnes porteuses d'un mauvais sort » (12 nov. 2009). Radio Okapi ajoute que ces enfants ne bénéficient pas de soins particuliers ni d'éducation élémentaire (12 nov. 2009).

Selon le chef du service des urgences psychiatriques du CNPP, dont les propos ont été recueillis lors d'une entrevue menée en février 2007 et affichés sur le site Internet Congo Forum,

[i]l est rare que les malades mentaux viennent consulter des psychothérapeutes ou des psychiatres en première intention. Ils commencent généralement par les instances informelles que sont les tradipraticiens et les groupes de prières, parce que, dans la conception africaine, on attribue la pathologie mentale à des causes surnaturelles (Congo Forum 15 févr. 2007).

De même, un rapport publié par l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), résumant les renseignements contenus dans un autre rapport portant sur les soins de santé mentale en RDC et publié en juin 2009 par l'OSAR, signale « [qu'e]n RDC, les personnes atteintes de maladies psychiques consultent généralement des guérisseurs traditionnels ou des groupes de prière et, rarement, un psychiatre » (6 oct. 2011, sect. 6.3).

2.2 Accès aux soins

Dans un compte rendu de la 54e Assemblée mondiale de la santé publié en 2001 par l'OMS, on peut lire que le ministre de la Santé publique de la RDC aurait déclaré qu'en RDC, les problèmes de santé mentale auraient été longtemps négligés au profit des problèmes de santé physique, justifiant ce manque d'intérêt par « une conception africaine qui privilégie les problèmes de santé concrets par rapport à ceux qui sont abstraits » (Nations Unies 2001, 137). D'après le ministre de la Santé publique cité par Le Potentiel en 2008, en RDC, « la maladie mentale, autant que les institutions qui s'en occupent, ne bénéficie pas toujours du même soutien que d'autres secteurs de la santé » (14 oct. 2008). Pour sa part, L'Avenir, un des quotidiens de Kinshasa, signale qu'il subsisterait une proportion « importante » de personnes ayant des troubles mentaux qui ne bénéficieraient pas des soins qu'il leur faudrait (12 oct. 2010).

D'après l'Agence congolaise de presse (ACP), lors de la célébration de la Journée de la santé mentale en septembre 2010, le directeur du PNSM, faisant mention des difficultés qui entraveraient le fonctionnement de ce programme, aurait parlé, entre autres, « de l'insuffisance des structures médicales spécialisées et des ressources humaines qualifiées en [s]anté [m]entale, du manque de formation continue des médecins et infirmiers en [s]anté mentale ainsi que de l'absence de collaboration intersectorielle dans la prise en charge des patients » (12 oct. 2010).

En 2008, un neuropsychiatre, également chef du service de neurologie vasculaire au CNPP de l'Université de Kinshasa, déclarait à Radio Okapi qu'en RDC, « il existe des traitements psychiatriques […] lesquels sont dispensés par des spécialistes formés notamment à l'Université de Kinshasa » (CRI Project nov. 2008, sect. 3.6.1). Des sources soulignent que la RDC compterait six institutions hospitalières à l'intention des personnes ayant des troubles mentaux (L'Avenir 12 oct. 2010; Agence de presse Xinhua 15 nov. 2010). Selon le chef du service de neurologie vasculaire du CNPP, des soins sont prodigués aux personnes ayant des troubles de santé mentale au CNPP à Kinshasa, ainsi qu'au Centre de Katwambi [ou Katuambi], dans la province du Kasaï occidental (CRI Project nov. 2008, sect. 3.6.1). Sur le site Internet du CNPP, on peut lire que ce centre aurait une capacité de 420 lits et qu'entre 1973 et 2009, ses départements de neurologie et de psychiatrie auraient offert des consultations spécialisées à 114 178 patients (CNPP s.d.). De même, dans un article publié par l'Agence de presse Xinhua en 2009, on peut lire qu'en RDC, parmi les provinces où l'on offre des soins aux personnes atteintes de troubles de santé mentale, on compte :

  • le Sud-Kivu, au centre psychiatrique Soins de santé mentale de Karhale;
  • le Nord-Kivu, par l'ONG Conseil information formation/santé;
  • le Katanga, au Centre neuropsychiatrique Docteur Joseph Guillain de Lubumbashi, qui offre des soins à plus d'une centaine de patients;
  • le Kasaï occidental, au Centre de santé mentale de Katwambi (13 oct. 2009).

Parmi les sources qu'elle a consultées, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'information sur les soins de santé mentale qui seraient offerts dans d'autres provinces de la RDC. Par ailleurs, l'article publié par l'Agence de presse Xinhua souligne que les centres de soins mentionnés ci-dessus font face à diverses difficultés (Agence de presse Xinhua 13 oct. 2009). Notamment, le centre psychiatrique Soins de santé mentale de Karhale et le Centre de santé mentale de Katwambi seraient « débordé[s] »; ce dernier manquerait également de médicaments, et ses équipements seraient en « désuétude » (ibid.). En outre, le directeur du PNSM aurait souligné le « niveau très réduit » de la prise en charge psychosociale et « l'accessibilité difficile aux soins médicaux » dans les provinces (ACP 12 oct. 2010). De plus, le rapport de l'OSAR souligne ce qui suit :

Les psychothérapies et traitements psychiatriques à la mode occidentale sont quasi inexistants en RDC. Plusieurs organisations locales de femmes qui s'occupent surtout de personnes traumatisées par des viols, ainsi que des psychologues d'organisations internationales, proposent toutefois un encadrement psychosocial dans différentes parties du pays (6 oct. 2011, sect. 6.3).

2.3 Coûts des soins

Selon le chef du service de neurologie vasculaire du CNPP, une consultation coûterait entre 10 et 20 dollars américains dans les institutions publiques, et entre 20 et 30 dollars dans le secteur privé (CRI Project nov. 2008, sect. 3.6.1). Quant aux frais d'hospitalisation, ils s'élèveraient à 300 dollars américains au CNPP; le chef du service de neurologie vasculaire du CNPP n'a toutefois pas précisé pour quelle durée ces frais d'hospitalisation sont exigés (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information sur le coût des soins pour les personnes atteintes de troubles de santé mentale.

Par contre, le rapport de l'OSAR a fourni l'explication suivante au sujet du coût des soins offerts aux personnes atteintes de troubles mentaux :

Les médicaments courants en Europe occidentale pour le traitement des souffrances psychiques sont presque introuvables et hors de prix en RDC. Étant donné qu'en RDC, les patients et leur famille doivent subvenir eux-mêmes aux coûts des médicaments, des traitements, de la nourriture, de la literie et de certaines prestations du personnel soignant, une hospitalisation n'entre pas en ligne de compte pour la grande majorité de la population (6 oct. 2011, sect. 6.3).

Également, le ministre de la Santé publique de la RDC aurait affirmé en 2001 que les « médicaments psychotropes […] sont hors de la portée de la plupart des patients en raison de leur coût trop élevé » (Nations Unies 2001, 137).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Agence congolaise de presse (ACP). 12 octobre 2010. « Bientôt la vulgarisation sur la santé mentale ». [Date de consultation : 5 juin 2012]

Agence de presse Xinhua. 15 novembre 2010. « Un malade mental viole et tue sa mère à Kananga ». [Date de consultation : 17 mai 2012]

_____. 13 octobre 2009. « RDC : les maladies mentales frappent les grandes villes (papier général) ». [Date de consultation : 6 juin 2012]

L'Avenir [Kinshasa]. 12 octobre 2010. « Journée mondiale de la santé mentale : la RDC compte 0,08% des psychiatres pour 1000 habitants ». [Date de consultation : 16 mai 2012]

Bureau international des droits des enfants. 2008. "Profil des droits de l'enfant de la République démocratique du Congo". Faire des droits de l'enfant une réalité dans la région des Grands Lacs africains : les profils nationaux du Burundi, de la République démocratique du Congo et du Rwanda. [Date de consultation : 6 juin 2012]

Centre neuro-psycho-pathologique (CNPP), Université de Kinshasa. S.d. « Présentation du Centre neuro psycho pathologique de l'Université de Kinshasa ». [Date de consultation : 17 mai 2012]

Congo Forum. 15 février 2007. « Entretien avec le Docteur Valentin Ngoma Malanda par Muriel Devey ». [Date de consultation : 13 juin 2012]

Country of Return Information Project (CRI Project). Novembre 2008. Fiche-pays : République démocratique du Congo (RDC). [Date de consultation : 17 mai 2012]

Nations Unies. Avril 2010. Fonds des Nations Unies pou l'enfance (UNICEF). Aleksandra Cimpric. Les enfants accusés de sorcellerie : étude anthropologique des pratiques contemporaines relatives aux enfants en Afrique. [Date de consultation : 14 juin 2012]

_____. 2001. Organisation mondiale de la santé (OMS). « Santé mentale : les ministres appellent à l'action ». [Date de consultation : 6 juin 2012]

Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR). 6 octobre 2011. Peter K. Meyer. République démocratique du Congo : développements actuels. [Date de consultation : 6 juin 2012]

Le Potentiel [Kinshasa]. 14 octobre 2008. Raymonde Senga Kosi. « Au moins 15 millions de personnes atteintes des troubles mentaux en RDC ». [Date de consultation : 6 juin 2012]

La Prospérité [Kinshasa]. 4 décembre 2010. Laetitia Mbuyi. « Journée mondiale de la personne en situation d'handicap : "10% des Congolais seraient affectés par un handicap physique ou un handicap mental…", constate Stéphane Flandrin ». [Date de consultation : 8 juin 2012]

Radio Okapi. 12 novembre 2009. « RDC : comment aider les retardés mentaux à s'intégrer au sein de la communauté? ». [Date de consultation : 8 juin 2012]

_____. 10 octobre 2009. « Maladies mentales en RDC : une tendance inquiétante ». [Date de consultation : 17 mai 2012]

_____. S.d. « À propos ». [Date de consultation : 1er juin 2012]

République démocratique du Congo (RDC). S.d. Amassade de la République démocratique du Congo à Londres. « Politique économique ». http://www.ambardc-londres.gov.cd/index.php?option=com_content&task=view&id=23&Itemid=> [Date de consultation : 1er juin 2012]

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre des représentants des organisations suivantes ont été infructueuses : Association africaine de défense des droits de l'homme, Association pour la promotion des neurosciences, Centre des droits de l'homme et du droit humanitaire, Centre neuro-psycho-pathologique de l'Université de Kinshasa, Collectif des organisations des jeunes solidaires du Congo-Kinshasa, République démocratique du Congo — ministère de la Santé publique, La Voix des sans voix pour les droits de l'homme.

Sites Internet, y compris : Africa Governance Monitoring and Advocacy Project; Afrik.com; Afriqueactu.net; Afriquinfos; Agence France-Presse; AllAfrica.com; Amnesty International; Association africaine de défense des droits de l'homme; Association nationale d'aide aux handicapés mentaux; Association pour la promotion des neurosciences; Chambre de commerce belgo-congolaise; Courrier international; États-Unis — Département d'État; Factiva; Fédération des familles et amis de la personne atteinte de maladie mentale; Fondation des maladies mentales; Freedom House; Global Rights; GrandsLacs.info; Grandslacs.net; Handiplanet; Hospitaliers.org; Human Rights Watch; Jeune Afrique; Inter Press Service; Internal Displaced Persons; Investir en zone franc; Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs; Louvain coopération au développement; Maladies mentales.org; Médecins d'Afrique; Médecins du monde; Médecins sans frontières; Mémoire online; Nations Unies — Centre d'actualités des Nations Unies, Fonds des Nations Unies pour l'enfancem, Programme des Nations Unies pour le développement, Réseaux d'information régionaux intégré; The New York Times; Le Nouvel Observateur; Organisation internationale de la francophonie; Panapress; Radio France internationale; Radio Netherlands Worldwide; RDC-Info.com; RDCongo tourisme; Royaume-Uni — Country of Origin Information Report; Slate Afrique; Societecivile.cd; Statistiques-mondiales.com; Syfia Grands Lacs; Union interafricaine des droits de l'homme; Union nationale des amis et familles de malades mentaux; Ville de Kinshasa.

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