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Érythrée : information sur la situation des personnes qui retournent au pays après avoir séjourné à l'étranger, demandé le statut de réfugié ou demandé l'asile (2012-août 2014)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 2 September 2014
Citation / Document Symbol ERI104942.EF
Related Document(s) Eritrea: Military identification cards and permits, including appearance (2012-August 2014)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Érythrée : information sur la situation des personnes qui retournent au pays après avoir séjourné à l'étranger, demandé le statut de réfugié ou demandé l'asile (2012-août 2014), 2 September 2014, ERI104942.EF , available at: https://www.refworld.org/docid/54295b554.html [accessed 22 May 2023]
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1. Cartes d'identité militaires et permis

Dans une présentation donnée devant la Direction de l'asile et du retour de l'Office fédéral des migrations de la Suisse, David Bozzini [1] fait état de ce qui suit :

[traduction]

Les cartes d'identité sont utilisées dans toutes sortes de procédures bureaucratiques. Le fait de ne pas avoir de carte d'identité peut empêcher l'accès aux services publics. Toutefois, depuis la guerre avec l'Éthiopie liée à la frontière (1998-2000), les conscrits n'ont besoin que d'un laissez-passer (et non d'une carte d'identité) pour passer aux postes de contrôle.

Les conscrits des deux secteurs du Service national détiennent des laissez-passer (Mänqäsaqäsi), qui sont délivrés par le ministère de la Défense (pour le secteur militaire), une organisation civile ou un autre ministère gouvernemental auquel le conscrit est affecté. Les laissez-passer militaires sont de couleur jaune et ceux des organisations civiles sont blancs. Leur conception et l'information qu'ils présentent peuvent être très différentes, et certains sont de simples lettres.

Des cartes de démobilisation sont délivrées aux membres du Service national qui ont exécuté avec succès le processus de démobilisation. Ces cartes remplacent les laissez-passer. Elles accordent normalement une plus grande liberté de circulation dans le territoire de l'Érythrée. Toutefois, les détenteurs de ces cartes [...] sont toujours affectés à leur poste dans les organisations de l'État et ils n'ont pas le droit de changer de poste ou de trouver un emploi ailleurs. En règle générale, les Érythréens ne font pas la différence entre la période de service national et cette démobilisation dans la mesure où le conscrit n'est pas libéré. De nombreuses personnes doutent qu'elles soient officiellement démobilisées par l'armée (Bozzini 16 févr. 2012, sect. 3.2).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un professeur agrégé de l'Institute of African Affairs du German Institute of Global and Area Studies (GIGA), qui mène des recherches sur la militarisation et la diaspora érythréennes, explique que toutes les recrues reçoivent une carte d'identité militaire lorsqu'elles commencent le service militaire et que ces cartes sont délivrées par le ministère de la Défense (professeur agrégé 14 août 2014). Dans un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, un professeur d'études africaines et de sciences politiques de l'Université d'État de la Pennsylvanie a déclaré que les autorités avaient l'habitude de remettre des cartes d'identité militaires aux conscrits pendant l'entraînement militaire à Sawa [2] et que les cartes étaient de la même taille que la carte d'identité nationale et de couleur jaune (professeur 18 août 2014). Le professeur précise aussi que la carte d'identité militaire a commencé à être délivrée vers 1976 ou 1977, mais il pense qu'elle a cessé d'être délivrée en 2002 ou en 2003 (ibid.). La Direction des recherches n'a trouvé, dans les délais fixés, aucun renseignement allant en ce sens.

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucune information sur les caractéristiques de la carte d'identité militaire.

Au sujet du renouvellement des laissez-passer, David Bozzini a mentionné dans un article publié dans la revue à comité de lecture Surveillance & Society en 2011 que

[traduction]

[p]arfois, les fonctionnaires chargés de délivrer les permis ne sont pas à leur bureau pendant plusieurs jours ou semaines parce qu'ils participent à un atelier ou parce qu'ils sont en congé pour des événements familiaux ou des célébrations. Bien souvent, dans ces cas, les processus de renouvellement sont gelés, parce que les pouvoirs n'ont pas été délégués. D'autres causes sont liées à des problèmes techniques comme le manque d'électricité ou une mauvaise gestion de l'approvisionnement du papier à correspondance officielle [...]. Par conséquent, les personnes du service national s'attendent toujours à des problèmes lorsqu'elles doivent renouveler leur permis, ce qui est fréquent. Enfin, les règlements internes peuvent changer à tout moment sans préavis. Par exemple, la validité géographique des permis est parfois limitée à la ville d'affectation, ce qui empêche les conscrits de rendre visite à des parents. Ce type d'interférence bureaucratique concernant la délivrance de permis aux personnes qui effectuent le service national est généralisé. Lorsque les règlements internes changent dans un bureau, cela peut avoir un effet important sur les activités quotidiennes des fonctionnaires responsables. Dans ces situations, il arrive parfois que chaque responsabilité de base soit gelée puisque personne ne connaît encore les nouveaux règlements ou parce que personne ne sait qui sera chargé de délivrer les permis après le remaniement des postes. Une purge bureaucratique peut aussi avoir lieu de façon inattendue. Une nouvelle équipe de fonctionnaires est alors constituée et celle-ci change habituellement les règles et délivre de nouveaux types de permis qui, de nouveau, éveilleront la méfiance de la police militaire. Les processus de réaffectation d'une organisation à une autre ne sont pas rares pour les personnes du Service national. Dans de tels cas, les personnes affectées se heurtent à de nombreux problèmes pour maintenir un permis valide. Le traitement d'une mutation peut prendre six mois et, pendant ce temps, les personnes touchées peuvent n'avoir que des permis valides pour une semaine. Parfois, elles demeurent même sans permis, puisqu'aucune organisation ne reconnaît leur affiliation pendant la « mutation » (Bozzini 2011, 103-104).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a rien trouvé allant dans le même sens ni aucun autre renseignement à ce sujet.

2. Cartes d'identité militaires et permis frauduleux

D'après David Bozzini,

[traduction]

[d]es stratégies ont été élaborées pour protéger la vie de tous les jours en cas de refus ou d'obstacles bureaucratiques visant le renouvellement des permis. Ces stratégies sont liées à la falsification et à l'acquisition frauduleuse de permis [...]. La falsification est devenue le moyen le plus courant pour tromper la police militaire en Érythrée. Les permis de voyage spéciaux délivrés après 2004 sont même techniquement plus faciles à falsifier et à modifier que les cartes d'identité précédentes. Sans photos qui y sont jointes, les permis sont de simples lettres estampillées portant la signature d'un agent du ministère où les titulaires sont affectés. Par conséquent, la généralisation de tels laissez-passer n'a pas amélioré de façon appréciable l'efficacité du contrôle civil des conscrits du Service national.

Plus récemment, il a été plus facile d'acheter de vrais permis officiels des bureaux de l'armée. Pendant plusieurs années, il y a eu un petit, mais prospère, marché noir pour différents types de permis militaires. Il est possible d'acheter un formulaire de congé vierge portant un timbre et une signature qu'il suffit de remplir en inscrivant le nom du conscrit, l'itinéraire et la période de validité. Toutefois, en 2007, de tels permis étaient encore très coûteux. Les moins chers se vendaient 700 nakfas (environ 40 $US), c'est-à-dire environ la moitié du salaire mensuel d'un fonctionnaire exempté du Service national pour une période de validité de quelques semaines au maximum (Bozzini 2011, 104).

Le professeur agrégé estime que [traduction] « les cartes d'identité frauduleuses et, en particulier, les documents d'exemption du Service national sont communs en Érythrée. Ces documents seraient falsifiés et vendus par des responsables gouvernementaux et militaires sur le marché noir » (professeur agrégé 14 août 2014). Le professeur agrégé pense que

[traduction]

[l]a demande est forte pour des documents qui permettent aux gens de voyager à l'intérieur du pays sans se faire arrêter à l'un des nombreux postes de contrôle, comme les suivants : documents montrant que la personne est en congé de son service militaire, certificats de maladie, exemption du service militaire ou national, et autres (ibid.).

D'après David Bozzini, l'utilisation de documents frauduleux [traduction] « contribue au renforcement de la méfiance de la police militaire et accentue par conséquent la probabilité des rafles au hasard et des détentions arbitraires pour sévir contre ces "irrégularités" » (2011, 104).

Dans sa thèse de doctorat, David Bozzini affirme que la surveillance de la police et de l'armée à Asmara et dans d'autres villes est « quasi omniprésente » et que les contrôles d'identité sont une possibilité à « chaque instant » (23 mai 2011, 124). Selon un rapport préparé par Human Rights Watch sur la répression de l'État et la conscription en Érythrée, un visiteur en Érythrée aurait fait observer qu'en 2008, les autobus étaient [traduction] « fréquemment arrêtés et fouillés » par les autorités, et les passagers devaient présenter leur carte d'identité, certains produisant « des cartes plastifiées montrant qu'ils avaient terminé le service national, tandis que d'autres avaient des lettres les autorisant à voyager vers un lieu particulier et pendant une période limitée » (avril 2009, 63). Dans sa présentation, David Bozzini mentionne [traduction] « [qu']il y a aussi des cas de conscrits qui ont été arrêtés après un changement de l'apparence de leur laissez-passer du fait que la police considérait que la nouvelle version était fausse » (16 févr. 2012, sect. 3.3).

Selon le rapport sur l'Érythrée publié par le Département d'État des États-Unis dans Country Reports on Human Rights Practices for 2013,

[traduction]

[l]es autorités arrêtent parfois des personnes dont les papiers ne sont pas en ordre et les détiennent jusqu'à ce qu'elles présentent la preuve de leur statut de milicien ou de leur démobilisation du Service national. Le gouvernement a communiqué avec des lieux de travail et a utilisé des informateurs pour tenter de trouver des personnes qui ne voulaient pas participer à la milice (27 févr. 2014, 6).

D'après David Bozzini, il est « impossible de ne pas croiser plusieurs fois par jour » un poste de contrôle, et les postes de contrôle des laissez-passer sont « le contrôle étatique par excellence » (23 mai 2011, 126). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a rien trouvé allant dans le même sens ni aucun autre renseignement à ce sujet.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] M. Bozzini est anthropologue politique et juridique et il est actuellement chercheur universitaire invité au Centre des diplômés de l'Université de la ville de New York. Sa recherche porte sur le service militaire et la surveillance de l'État en Érythrée, et il a écrit plusieurs articles sur le sujet dans des revues à comité de lecture (David Bozzini 19 févr. 2014).

[2] Sawa est un camp d'entraînement militaire (professeur agrégé 14 août 2014).

Références

Bozzini, David. 19 février 2014. « About ». [Date de consultation : 20 août 2014]

_____. 16 février 2012. « National Service and State Structures in Eritrea ». Procès-verbal approuvé, présentation donnée devant la Direction de l'asile et du retour, Office fédéral des migrations de la Suisse, Bern-Wabern, 28 juin 2012. [Date de consultation : 11 août 2014]

_____. 23 mai 2011. En état de siège. Ethnographie de la mobilisation nationale et de la surveillance en Érythrée. Thèse de doctorat, Université de Neuchâtel. [Date de consultation : 11 août 2014]

_____. 2011. « Low-tech Surveillance and the Despotic State in Eritrea ». Surveillance & Society. Vol. 9, no 1/2. [Date de consultation : 11 août 2014]

États-Unis (É.-U.), 27 février 2014, Department of State. Country Reports on Human Rights Practices for 2013. « Eritrea ». [Date de consultation : 11 août 2014]

Human Rights Watch. Avril 2009. Service for Life: State Repression and Indefinite Conscription in Eritrea. [Date de consultation : 20 août 2014]

Professeur, Études africaines et sciences politiques, Pennsylvania State University. 18 août 2014. Entretien téléphonique.

Professeur agrégé, Institute of African Affairs, German Institute of Global and Area Studies (GIGA). 14 août 2014. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre trois avocats et représentants locaux des organisations suivantes ont été infructueuses dans les délais fixés pour la présente réponse : Canada - Consulat en Érythrée, ambassade à Khartoum; City University of New York; Eritrean-Canadian Human Rights Group of Manitoba; Érythrée - Ambassade à Washington; Human Rights Concern Eritrea; International Organization for Migration; London South Bank University; Regional Mixed Migration Secretariat.

Un professeur de l'Université de Boston et un représentant de Human Rights Watch n'ont pu fournir de renseignements dans les délais fixés pour la présente réponse.

Un professeur de l'Université de Londres et des représentants du consulat de l'Érythrée à Toronto et du Centre national de documentation de l'Agence des services frontaliers du Canada n'ont pu fournir d'information.

Sites Internet, y compris : Africa Review; All Africa; Asmarino; Bloomberg; British Broadcasting Corporation; Christian Science Monitor; Comité international de la Croix-Rouge; Droit.Afrique.com; ecoi.net; Érythrée - Ambassade à Washington; États-Unis - Department of Defense, Department of Justice; Factiva; Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge; Freedom House; The Globe and Mail; The Guardian; Interpol; Institute for War and Peace Reporting; Jeune Afrique; Middle East Online; Nations Unies - Haut Commissariat pour les réfugiés; Reporters sans frontières; Telegraph.

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