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Croatie : information sur la loi antidiscrimination, y compris les mécanismes de mise en oeuvre et les autorités responsables; son efficacité, en particulier en tant que mesure visant à contrer la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique (2012-juin 2014)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 14 July 2014
Citation / Document Symbol HRV104894.EF
Related Document(s) Croatia: Anti-discrimination legislation, including implementation mechanisms and responsible authorities; effectiveness, particularly in addressing discrimination based on race or ethnicity (2012-June 2014)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Croatie : information sur la loi antidiscrimination, y compris les mécanismes de mise en oeuvre et les autorités responsables; son efficacité, en particulier en tant que mesure visant à contrer la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique (2012-juin 2014), 14 July 2014, HRV104894.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/53ecc72d4.html [accessed 21 May 2023]
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1. Renseignements généraux sur la loi antidiscrimination

Des sources signalent que la loi antidiscrimination (Anti-discrimination Act - ADA) de la Croatie est entrée en vigueur le 1er janvier 2009 (Réseau européen 2013, 5; Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, 13; Croatie 2009, art. 31). Elle interdit la discrimination [traduction] « fondée sur la race ou l'appartenance ethnique, la couleur [de la peau], le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, la fortune, l'appartenance à un syndicat, l'éducation, le statut social, l'état matrimonial ou la situation de famille, l'âge, l'état de santé, les incapacités, le patrimoine génétique, l'identité autochtone et l'expression ou l'orientation sexuelle » (ibid., art. 1). Elle prévoit une protection contre la discrimination directe et indirecte, le harcèlement, le harcèlement sexuel, l'incitation à la discrimination, la ségrégation, les discriminations multiples et les traitements injustes (Croatie 2009, art. 2-7). Elle prévoit également une protection contre la discrimination dans les domaines suivants : l'emploi; l'éducation; la sécurité sociale et le bien-être social; la santé; le système judiciaire et l'administration; le logement; l'information publique et les médias; l'accès aux biens et aux services; l'appartenance à un syndicat, à une ONG, à un parti politique ou à une autre organisation; l'accès à la culture et aux arts (Croatie 2009, art. 8). Une copie de la loi antidiscrimination est annexée à la présente réponse.

2. Rôle du Bureau de l'ombudsman

Le Bureau de l'ombudsman est l'organisme responsable de la mise en oeuvre de la loi antidiscrimination (CMS 6 juin 2014; Réseau européen 2013, 67; Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, 16). Ses activités sont énumérées au paragraphe 12(2) de la loi :

[traduction]

Dans le cadre de son travail, l'ombudsman :

reçoit les signalements de toutes les personnes physiques et morales visées à l'article 10 de la présente loi;

fournit aux personnes physiques et morales qui ont porté plainte pour discrimination les renseignements nécessaires concernant leurs droits et leurs obligations et la possibilité de bénéficier d'une protection des tribunaux ou d'un autre type de protection;

si aucune action en justice n'a encore été intentée, examine les plaintes individuelles et prend les mesures qui sont de son ressort et qui s'imposent pour éliminer la discrimination et protéger les droits des victimes de discrimination;

informe le public des cas de discrimination signalés;

avec le consentement des parties, entreprend une médiation susceptible d'aboutir à un règlement amiable;

dépose des accusations criminelles relativement aux cas de discrimination auprès du bureau du procureur de l'État compétent;

recueille et analyse des données statistiques sur les cas de discrimination;

informe le Parlement croate des cas de discrimination signalés dans son rapport annuel et, au besoin, dans ses rapports extraordinaires;

mène des enquêtes sur la discrimination, fournit des avis et des recommandations, et propose des solutions juridiques et stratégiques adéquates au gouvernement de la République de Croatie (Croatie 2009, art. 12).

Selon l'information affichée sur le site Internet du Bureau de l'ombudsman, les plaintes peuvent être déposées auprès de l'ombudsman par écrit (par la poste, par télécopie ou par courriel), par téléphone ou en personne (Croatie s.d.a). Il est écrit sur le site Internet que la plainte doit comprendre les renseignements suivants : le nom et l'adresse du plaignant; le nom de l'organisme faisant l'objet de la plainte; le numéro de dossier donné par l'organisme faisant l'objet de la plainte; des copies des documents pertinents; une description du problème précisant en quoi consistent les droits violés et s'il y a eu des recours judiciaires (ibid.). Il est aussi écrit sur le site Internet que le plaignant doit recevoir une réponse de l'ombudsman au sujet des premières mesures prises dans les 30 jours suivant le dépôt de la plainte (ibid.). Il y a trois ombudsmans spécialisés (l'ombudsman pour les personnes handicapées; l'ombudsman pour les enfants et l'ombudsman pour l'égalité des sexes) (Croatie s.d.b). Les plaintes de discrimination se rapportant à leur domaine de compétence respectif leur sont transmises (Croatie s.d.b). Il est possible de déposer une plainte de discrimination anonyme ou de signaler un cas de discrimination au nom d'une autre personne, si celle-ci y consent (Croatie s.d.b).

Selon le Bureau de l'ombudsman, en cas de plaintes pour discrimination, l'ombudsman peut :

[traduction]

Informer le plaignant qu'il n'y a eu aucun acte de discrimination ou le diriger vers un organisme compétent.

Donner suite à une plainte en sa qualité d'ombudsman suivant la loi sur l'ombudsman [Ombudsman's Act] : dans les cas où une personne soutient qu'il y a eu discrimination et où l'ombudsman estime que rien ne permet de soupçonner un acte de discrimination, mais conclut qu'il existe plutôt des éléments justifiant la prise de mesures pour protéger les droits prévus par la loi ou les droits constitutionnels de cette personne.

Si ses soupçons de discrimination sont confirmés :

Donner informer le plaignant qu'il peut intenter des poursuites,

formuler une recommandation ou un avertissement à l'organisme, la personne ou l'entreprise qui a fait preuve de discrimination envers le plaignant et lui fournir des conseils sur la manière d'agir pour éviter que d'autres actes de discrimination soient commis dans le futur,

intenter une action en justice ou déposer des accusations contre l'auteur d'actes de discrimination dans certaines circonstances,

proposer que des modifications soient apportées aux dispositions législatives ou réglementaires discriminatoires.

Agir en tant que tiers intervenant au nom du plaignant lors d'une procédure judiciaire.

Recourir au mode alternatif de règlement des litiges (médiation) à la demande du plaignant (Croatie s.d.b).

Il ressort du rapport intitulé Summary Report on Discrimination Occurrences in 2012 que le Bureau de l'ombudsman a reçu 202 plaintes de discrimination en 2012, dont 60 étaient liées à la race, à l'origine ethnique, à la couleur de la peau ou à la nationalité (Croatie juin 2013, 5-6). En 2012, c'est dans les domaines de l'emploi et des conditions de travail que les [traduction] « actes de discrimination » étaient les plus courants, faisant l'objet de 94 des 202 plaintes déposées (ibid., 6). L'ombudsman a réglé 156 cas en 2012; 137 d'entre eux dataient de 2012 et 19 remontaient aux années précédentes (ibid., 3-5). Ces cas ont été réglés de la manière suivante :

dans 42 cas, [traduction] « il a été établi qu'il n'y a eu aucun acte de discrimination »;

dans 4 cas, « des mesures ont été prises pour éliminer la discrimination conformément à la loi antidiscrimination »;

dans 4 cas, « des réponses aux questions d'ordre plus général ont été fournies »;

dans 7 cas, « une recommandation ou un avertissement ont été formulés »;

dans 8 cas, « le dossier a été traité comme un dossier relevant de la compétence ordinaire de l'ombudsman »;

dans 1 cas, « un jugement de la cour a été rendu »;

dans 5 cas, « une évaluation gratuite a été effectuée suivant l'article 12 »;

dans 15 cas, « la partie a été informée des recours judiciaires, des protections offertes par les tribunaux et des autres possibilités en matière de protection »;

dans 12 cas, « la partie a demandé le retrait de sa plainte »;

dans 9 cas, « une instance judiciaire était en cours »;

dans 2 cas, l'ombudsman « a agi à titre d'intervenant lors d'une instance judiciaire »;

dans 3 cas, « une demande de modification législative ou de prise de mesures législatives subordonnées a été présentée »;

dans 36 cas, « le dossier a été transféré à un ombudsman spécial »;

Acting dans 4 cas, « il a été interdit d'appliquer la loi rétroactivement » (Croatie juin 2013, 4, 5).

Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une ombudsman adjointe du Bureau de l'ombudsman a déclaré qu'en 2013, 249 plaintes ont été déposées auprès du Bureau au titre de la loi antidiscrimination; 57 de ces plaintes, ou 23 p. 100 de toutes les plaintes déposées, concernaient la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique (Croatie 12 juin 2014). En 2013, le Bureau de l'ombudsman a réglé 145 cas :

dans 16 cas, [traduction] « un avis, une recommandation, un avertissement ou un communiqué de presse a été préparé »;

dans 39 cas, il a été établi « [qu']aucun acte de discrimination n'a été commis »;

dans dans 2 cas, « le dossier a été traité comme un dossier ordinaire relevant de la compétence de l'ombudsman »;

dans dans 8 cas, « il a été interdit d'appliquer la loi rétroactivement »;

dans dans 35 cas, « le dossier a été transféré à un ombudsman spécial »;

dans dans 21 cas, « la partie a rejeté la demande »;

dans dans 19 cas, « une instance judiciaire était en cours »;

dans dans 6 cas, « une décision de la cour a été rendue » (Croatie 12 juin 2014).

L'ombudsman adjointe a écrit que les gens portaient plainte auprès de l'ombudsman parce qu'ils avaient [traduction] « l'impression d'être victimes de discrimination », mais que parmi tous les cas qu'il a réglés en 2013, le Bureau de l'ombudsman a conclu qu'il y avait « des motifs raisonnables de soupçonner qu'un acte de discrimination avait été commis » dans 11 p. 100 des cas seulement (ibid.). L'ombudsman adjointe a également précisé que ce sont les tribunaux qui sont investis du mandat de [traduction] « se prononcer sur la discrimination » (Croatie 12 juin 2014).

D'après l'ombudsman adjointe, les Roms et les Serbes sont les deux groupes minoritaires les plus exposés au risque de subir de la discrimination (Croatie 12 juin 2014). Elle a ajouté que, en 2013, les Serbes ont déposé le plus grand nombre de plaintes de discrimination fondée sur l'origine ethnique ou la race, et que la plupart des plaintes concernaient la discrimination dans le domaine de l'emploi (ibid.). Elle a souligné que de nombreux Serbes habitent [traduction] « les régions qui préoccupent particulièrement l'État » [expression juridique pour désigner les régions qui étaient sous le contrôle des forces rebelles serbes durant la guerre (Human Rights Watch 2006)], où il y a peu de possibilités d'emploi (ibid.). Elle a aussi souligné que chaque cas est évalué individuellement (ibid.). On peut lire dans le rapport annuel 2012 de l'ombudsman que les Serbes en Croatie sont particulièrement touchés par la mauvaise situation économique, le taux de chômage élevé et les enjeux liés à la récupération des droits en matière de logement (Croatie juin 2013, 16). Il est écrit dans le rapport que [traduction] « les procédures visant à permettre aux anciens détenteurs de droits de location, principalement des Serbes, d'obtenir un logement se déroulent très lentement » (Croatie juin 2013, 16). La Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (European Commission Against Racism and Intolerance - ECRI) du Conseil de l'Europe a également abordé la question des droits au logement des Serbes qui reviennent au pays, soulignant qu'il y a eu de nombreuses plaintes relatives à [version française du Conseil de l'Europe] « la durée excessive des procédures civiles et administratives » au regard du logement (Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, paragr. 148). L'ECRI a expliqué que plus de 20 000 personnes, en majorité d'origine serbe, ont perdu leurs droits d'occuper un logement social lorsqu'elles ont fui pendant la guerre (ibid. paragr. 145). Human Rights Watch fournit la même information, ajoutant que des milliers de personnes qui jouissaient de droits d'occupation dans les régions sous le contrôle des forces rebelles serbes ont été privées de ces droits aux termes d'une loi adoptée lorsque le gouvernement a repris le contrôle de ces régions (Human Rights Watch 2006). L'ECRI fait observer que 14 000 familles ont présenté une demande d'aide au logement et que 63 p. 100 des demandes émanaient de Croates d'origine serbe (Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, paragr. 145). Le gouvernement a rendu une décision favorable dans 8 000 cas et 8 000 logements ont été attribués, mais l'ECRI estime qu'il faudrait encore 2 750 logements (ibid.).

L'ombudsman adjointe a déclaré que, bien que les Serbes aient déposé de nombreuses plaintes en 2013, les Roms pour leur part n'ont déposé aucune plainte de discrimination auprès du Bureau de l'ombudsman cette année-là, ce qui, à son avis, est attribuable au fait que les Roms ne signalent généralement pas la discrimination qu'ils subissent et sont victimes d'exclusion sociale (Croatie 12 juin 2014). Selon son rapport annuel de 2012, l'ombudsman reconnaît que la discrimination envers les enfants roms dans le domaine de l'éducation nécessite [traduction] « une surveillance spéciale et la prise de mesures pour lutter contre la discrimination » (Croatie juin 2013, 15).

3. Rôle de l'appareil judiciaire

La loi antidiscrimination prévoit des recours judiciaires devant les tribunaux (CMS 6 juin 2014; Réseau européen 2013, sect. 6.1a), y compris des procédures au civil, au criminel ou au correctionnel (ibid.).

D'après l'ombudsman adjointe, 283 affaires de discrimination se sont retrouvées devant les tribunaux en 2013 et 85 décisions finales ont été rendues (Croatie 12 juin 2014). Les affaires de discrimination en 2013 ont notamment donné lieu à des procédures au civil dans 152 cas, à des procédures au criminel dans 17 cas et à des procédures au correctionnel dans 14 cas (ibid.). Il est écrit dans le rapport de l'ombudsman qu'en 2012, un total de 227 affaires de discrimination se sont retrouvées devant les tribunaux; cela comprend les procédures au civil, au criminel et au correctionnel (Croatie juin 2013, 10).

Des sources soulignent qu'il y a deux types d'instances judiciaires individuelles relativement aux affaires civiles de discrimination :

[traduction] « [la] protection accessoire contre la discrimination » (intenter une action en justice en vue de protéger un droit individuel qui a été violé en raison d'un acte de discrimination);

«[l']action individuelle spéciale en cas de discrimination » (intenter une action en justice principalement en vue d'obtenir une décision confirmant qu'il y a eu discrimination) (CMS avr. 2012, 10; Réseau européen s.d.).

Au cours d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, une représentante du Centre d'études pour la paix (Centar za mirovne studije - CMS), ONG de Zagreb qui [traduction] « promeut la non-violence et le changement social au moyen de l'éducation, de la recherche et du militantisme » (HRH s.d.), a dit que la loi antidiscrimination prévoyait désormais également des procédures judiciaires collectives en cas de discrimination, dans le cadre desquelles une organisation peut intervenir au nom d'un groupe ou d'une catégorie de personnes (CMS avr. 2012, 10).

La représentante du CMS a expliqué que, dans les affaires civiles, le tribunal peut se prononcer sur la question de savoir si un acte de discrimination a été commis, interdire la discrimination et accorder une indemnité (CMS 6 juin 2014). Pour ce qui est des affaires criminelles, le requérant peut signaler la discrimination au bureau du procureur public et une sanction pénale peut être imposée (ibid.). Elle a toutefois précisé que peu d'affaires de discrimination étaient jugées au criminel (ibid.). Le Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination souligne que les personnes accusées de discrimination au criminel sont poursuivies d'office et que les peines vont de six mois à cinq ans d'emprisonnement (Réseau européen s.d.).

On peut lire dans le rapport annuel 2012 de l'ombudsman que [traduction] « les propos inadmissibles et discriminatoires en public » visaient particulièrement les minorités nationales (Croatie juin 2013, 34). On peut aussi lire dans ce rapport que la liberté d'expression est protégée, mais que la discrimination est interdite, et que l'appareil judiciaire en Croatie n'a établi aucune [traduction] « limite précise » concernant les propos discriminatoires (ibid.).

Affaires de discrimination devant les tribunaux

Un rapport national sur la Croatie, rédigé pour le Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination dans le contexte d'une étude sur les mesures de lutte contre la discrimination dans les États membres de l'Union européenne, fait état d'un procès qui s'est déroulé en 2012 devant la Cour municipale de Varazdin et où il était question de deux Roms qui étudiaient à l'École de commerce (Business School) de Varazdin et qui se sont vu refuser l'accès à un stage de formation à l'entreprise Branka (Réseau européen 2013, 7, 8). Ce stage de formation était obligatoire dans le cadre de leur programme d'études (ibid.). Elles ont intenté une poursuite pour discrimination, et la Cour a conclu qu'elles avaient été victimes de discrimination en raison de leur origine ethnique rom, a interdit à l'entreprise de continuer à commettre des actes discriminatoires et a accordé à chaque requérante une indemnité de 8 000 HRK [environ 1 535 $ CAN] (Réseau européen 2013, 8). Dans son rapport d'étape 2012 soumis dans le cadre de la Décennie pour l'inclusion des Roms, projet de lutte contre la discrimination mis en oeuvre par des gouvernements européens (Decade of Roma Inclusion s.d.), la Croatie a aussi fait état de cette affaire, soulignant que le Bureau de l'ombudsman et une ONG avaient apporté leur aide aux étudiantes et qu'il s'agissait du premier verdict rendu au titre de la loi antidiscrimination (Croatie 2012, 5). La représentante du Centre d'études pour la paix a dit que son organisation avait gagné une affaire où une école avait fait preuve de discrimination envers des Roms en leur refusant des stages (CMS 6 juin 2014).

Selon le rapport de l'ombudsman, en 2011, il a agi comme tiers intervenant, lors d'un procès pour discrimination, au nom de deux Roms qui étudiaient dans une école secondaire de formation professionnelle à Cakovec; la cour a statué en 2012 qu'il y avait eu discrimination et a accordé une indemnité [aux plaignants] (Croatie juin 2013, 15). Aucun autre détail sur l'affaire n'a été fourni.

Toujours selon le rapport de l'ombudsman, en 2010, l'ombudsman a engagé une procédure au correctionnel pour harcèlement visant les auteurs du graffiti [traduction] « ne touchez pas aux Roms; ils sont contaminés » fait dans une station d'autobus de Zagreb (ibid.). Lors de la procédure en première instance, les auteurs de ce graffiti ont été acquittés, mais l'ombudsman a interjeté appel du jugement en 2012, et la cour d'appel a annulé le verdict d'acquittement et a ordonné la tenue d'un nouveau procès relativement à cette affaire (ibid.).

Il ressort des Country Reports on Human Rights Practices for 2013 publié par le Département d'État des États-Unis que le directeur général d'un club de soccer, alors qu'il accordait une entrevue à la radio, a dit qu'il y avait quelque chose dans [traduction] « les cellules sanguines [du ministre de l'Éducation et des Sports, qui est Serbe] qui faisait en sorte qu'il déteste tout ce qui est croate » (É.-U. 19 avr. 2014, 22). Le directeur général aurait été poursuivi pour avoir enfreint les lois sur les discours haineux; il a été déclaré [traduction] « non coupable », mais la partie poursuivante a interjeté appel du verdict (ibid.).

D'après le Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination, il y a encore peu de jurisprudence se fondant sur la loi antidiscrimination, car elle a été adoptée uniquement en 2009 (Réseau européen 2013, 6).

4. Crimes haineux

Il est écrit dans le Shadow Report 2011-2012: Racism and Related Discriminatory Practices in Croatia du Réseau européen contre le racisme (European Network Against Racism - ENAR), qui a été rédigé par le Centre d'études pour la paix, que la Croatie a adopté une nouvelle loi criminelle en 2011 qui est entrée en vigueur en janvier 2013 et qui prévoit expressément que les crimes haineux seront pris en considération en tant que circonstances aggravantes (ENAR 2012, 39). L'ENAR souligne que la définition de crimes haineux a été ajoutée dans la version modifiée du code criminel en 2006, mais qu'elle [traduction] « a eu, dans la pratique, peu d'incidence au regard des mesures punitives » (ibid.).

Le Bureau des droits de la personne et des droits des minorités nationales (Office for Human Rights and Rights of National Minorities) est l'organisme central chargé de recueillir des données sur les crimes haineux (Croatie juin 2013, 11; ibid. 23 juin 2014). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant de ce bureau a expliqué qu'il avait été mis sur pied en 2012 dans le but [traduction] « [d']effectuer des tâches professionnelles et administratives liées à la protection et à la promotion des droits de la personne et des droits des minorités nationales en République de Croatie », par exemple en appuyant les projets de loi, en surveillant la mise en oeuvre du plan de lutte contre la discrimination, en organisant des séances de formation pour les intervenants et en menant des campagnes de sensibilisation du public (ibid.).

On peut lire dans un rapport de l'ombudsman qu'en 2012, d'après des statistiques provenant du ministère de la Justice, des procédures au criminel ont été engagées relativement à 6 cas de crimes haineux; parmi ces cas, 4 étaient liés à la race ou à la couleur de la peau, à l'origine ethnique ou nationale ou à un autre motif (Croatie juin 2013, 11). De plus, il y a eu 21 procédures au criminel concernant des crimes haineux commis avant la période visée dans le rapport; dans 5 cas, le crime était lié à la nationalité et dans 1 cas, il était lié aux opinions politiques ou religieuses (ibid.). Le représentant du Bureau des droits de la personne et des droits des minorités nationales a écrit que 26 crimes haineux avaient été enregistrés en 2012 et que 3 étaient liés à la race ou à la couleur et 5, à l'origine ethnique ou nationale ou à l'appartenance à une minorité (Croatie 23 juin 2014). Selon le rapport de l'ombudsman et le représentant du Bureau des droits de la personne et des droits des minorités nationales, parmi les 19 cas de crimes haineux pour lesquels des poursuites criminelles ont été intentées en 2012, 15 ont abouti à des déclarations de culpabilité (ibid.; ibid. juin 2013, 11). Reprenant des statistiques du ministère de l'Intérieur dans son rapport d'étape 2012 soumis dans la cadre de la Décennie pour l'inclusion des Roms, la Croatie signale que 26 crimes haineux ont été commis en 2012, dont 2 contre des Roms (ibid. 2012, 5).

Selon les statistiques du ministère de l'Intérieur, 34 crimes haineux ont été commis en 2013 et 31 d'entre eux auraient été résolus (ibid. 2014, 40). Des agressions ayant causé des lésions corporelles ou des lésions corporelles graves, des menaces, des dommages à la propriété, des actes d'extorsion et l'incitation publique à la haine faisaient partie des crimes haineux enregistrés (ibid.). Le représentant du Bureau des droits de la personne et des droits des minorités nationales a déclaré que le ministère de l'Intérieur avait relevé 35 crimes haineux et que le Bureau du procureur de l'État s'était vu confier 57 cas de crimes haineux, dont certains lui avaient été transmis directement étant donné qu'ils répondaient aux exigences préalables (ibid. 23 juin 2014). Parmi les cas que le procureur de l'État a traités, 47 étaient liés à la race, à l'origine ethnique ou nationale ou à l'appartenance à une minorité (ibid.). D'après le représentant, en date du 23 juin 2014, on ne disposait d'aucune statistique sur les crimes haineux commis en 2014 (ibid.).

5. Efficacité de la loi en tant que mesure visant à contrer la discrimination ethnique

De l'avis de la représentante du Centre d'études pour la paix, la loi antidiscrimination est une [traduction] « loi améliorée qui prévoit une protection générale », mais qui « n'est pas encore [mise en oeuvre de manière] très efficace » (CMS 6 juin 2014). Elle a expliqué ainsi certains des problèmes relevés :

[traduction]

De nombreuses personnes ne connaissent pas la loi. Peu d'avocats s'appuient sur elle ou conseillent à leurs clients de l'invoquer. Bon nombre de personnes ne souhaitent pas intenter des poursuites pour discrimination en raison des coûts. Il n'est pas facile de prouver qu'il y a eu discrimination et les facteurs permettant de prouver qu'il y a eu discrimination ne sont pas clairement établis. Certaines personnes hésitent à se servir de cette loi parce qu'elles ne veulent pas que leur origine ethnique ou leur problème soient connus de la collectivité. Les gens ne reconnaissent pas que la discrimination est inacceptable; il s'agit d'un problème généralisé. Ce manque de sensibilisation est problématique tant dans la société qu'au sein de l'appareil judiciaire (CMS 6 juin 2014).

Il est écrit dans le Shadow Report 2011-2012: Racism and Related Discriminatory Practices in Croatia que la Croatie est [traduction] « l'un des pays qui possèdent les dispositions les plus élaborées sur les droits des minorités nationales », mais que « des problèmes importants demeurent en ce qui concerne leur mise en oeuvre, par exemple les capacités limitées de l'appareil judiciaire, des procureurs de l'État et des victimes elles-mêmes, ainsi que le climat social généralement caractérisé par une préférence pour le statu quo » (ENAR 2012, 49).

Selon le Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination, la durée et le coût des procédures sont deux obstacles à la tenue de procès dans les affaires de discrimination (2013, 57). La même source fait observer que les actions en justice s'étendent souvent sur [traduction] « plusieurs années » et qu'elles « respectent rarement les normes d'équité en matière de délai raisonnable » (Réseau européen 2013, 57).

Une journaliste du Balkan Insight, auteure d'un reportage d'enquête sur la discrimination en Croatie, a écrit que la loi n'est pas suffisamment connue ou qu'elle n'est pas respectée (Balkan Insight 10 nov. 2011). Aux fins de son reportage, elle a communiqué avec cinq agences immobilières en Croatie pour leur demander de publier une annonce précisant qu'elle souhaitait louer des locaux à bureaux à des Croates d'origine seulement (Balkan Insight 10 nov. 2011). Une seule des agences a dit que la loi interdisait toute discrimination de cette nature, alors que les autres étaient d'avis que le client avait le droit d'établir les critères à respecter (ibid.).

Au cours d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, le chef de mission pour l'Europe du Sud-Est de la Coalition for Work with Psychotrauma and Peace (CWWPP), ONG de Vukovar dont les activités portent sur [traduction] « les traumatismes psychologiques, la résolution de conflits sans violence, la réconciliation et la société civile » (CWWPP s.d.), a donné son opinion sur l'efficacité de la mise en oeuvre de la loi antidiscrimination compte tenu de ses expériences de travail personnelles auprès de personnes appartenant à divers groupes ethniques (6 juin 2014). Il a dit : [traduction] « La loi antidiscrimination a peu changé la situation concrètement. La Croatie a d'excellentes lois sur papier, mais elles ne sont pas appliquées dans la pratique et aucun contrôle ni aucune vérification ne sont effectués à leur égard » (CWWPP 6 juin 2014).

Il ressort du rapport de l'ombudsman que le fait que les cas de discrimination ne soient pas tous signalés pose problème et qu'un grand nombre de personnes ignorent comment obtenir de l'aide lorsqu'elles sont victimes de discrimination ou ne prennent aucune mesure pour lutter contre la discrimination (Croatie juin 2013, 12, 36).

Dans un rapport publié en 2012, l'ECRI a souligné que la lenteur avec laquelle la loi antidiscrimination est appliquée [version française du Conseil de l'Europe] « pourrait provenir d'une formation insuffisante des juristes aux dispositions de la loi antidiscrimination, et en particulier de la mauvaise détection des pratiques discriminatoires » (Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, 14).

Selon la représentante du Bureau de l'ombudsman, le fait que les cas de discrimination ne soient pas tous signalés, en particulier par les Roms, est la principale difficulté qu'il faut résoudre pour que la loi antidiscrimination puisse être mise en oeuvre de façon appropriée; il faut également renforcer les capacités du Bureau de l'ombudsman en matière de litiges stratégiques (Croatie 12 juin 2014).

Le représentant du Bureau des droits de la personne et des droits des minorités nationales a écrit que le fait que les victimes ne signalaient pas toutes la discrimination qu'elles subissaient, les compressions budgétaires et la faible visibilité dont jouit [traduction] « l'organisme central chargé d'éliminer la discrimination » comptaient parmi les obstacles à la mise en oeuvre de la loi antidiscrimination (ibid. 23 juin 2014).

L'ECRI s'est dite préoccupée par le fait que le Bureau de l'ombudsman ne recevait pas suffisamment de fonds (Conseil de l'Europe 25 sept. 2012, paragr. 51). Des sources signalent que le Bureau dispose du même budget et du même personnel qu'avant, bien qu'il se soit vu confier la tâche supplémentaire de la mise en oeuvre de la loi antidiscrimination en 2009 (ibid.; Réseau européen 2013, 68).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Balkan Insight. 10 novembre 2011. « Croats Hold Roma and Muslims at Arm's Length ». [Date de consultation : 3 juin 2014]

Centar za mirovne studije (CMS). 6 juin 2014. Entretien téléphonique avec une représentante.

_____. Avril 2012. Report on Implementation of the Anti-discrimination Act in 2011. Document envoyé à la Direction des recherches par une représentante le 6 juin 2014.

Coalition for Work with Psychotrauma and Peace (CWWPP). 6 juin 2014. Entretien téléphonique avec le chef de mission pour l'Europe du Sud-Est.

____. S.d. « Coalition for Work with Psychotrauma and Peace ». [Date de consultation : 13 juin 2014]

Conseil de l'Europe. 25 septembre 2012. Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI). ECRI Report on Croatia (Fourth Monitoring Cycle). [Date de consultation : 3 juin 2014]

Croatie. 23 juin 2014. Office for Human Rights and Rights of National Minorities. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par un représentant.

_____. 12 juin 2014. Office of the Ombudsman. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par une représentante.

_____. 2014. Ministry of the Interior. « Statisticki Pregled ». [Date de consultation : 10 juin 2014]

_____. Juin 2013. Office of the Ombudsman. Summary Report on Discrimination Occurences in 2012. [Date de consultation : 2 juin 2014]

_____. 2012. Progress Report 2012. [Date de consultation : 10 juill. 2014]

_____. 2009. The Anti-discrimination Act. [Date de consultation : 2 juin 2014]

_____. S.d.a. Office of the Ombudsman. « Frequently Asked Questions ». [Date de consultation : 2 juin 2014]

_____. S.d.b. Office of the Ombudsman. « Frequently Asked Questions ». [Date de consultation : 2 juin 2014]

Decade of Roma Inclusion. S.d. « Decade in Brief ». [Date de consultation : 11 juill. 2014]

États-Unis (É.-U.). 19 avril 2014. « Croatia ». Country Reports on Human Rights Practices for 2013. [Date de consultation : 3 juin 2014]

European Network Against Racism (ENAR). 2012. Centre for Peace Studies. ENAR Shadow Report. Racism and Related Discriminatory Practices in Croatia. [Date de consultation : 6 juin 2014]

Human Rights House (HRH). S.d. « CMS--Center for Peace Studies ». [Date de consultation : 13 juin 2014]

Human Rights Watch. 2006. « Former Tenancy Right Holders Still Without Homes ». [Date de consultation : 10 juill. 2014]

Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination. 2013. Lovorka Kusan. Report on Measures to Combat Discrimination. Country Report 2012: Croatia. [Date de consultation : 3 juin 2014]

_____. S.d. « Enforcing the Law ». [Date de consultation : 10 juill. 2014]

Autres sources consultées

Sources orales : Les tentatives faites pour joindre dans les délais voulus des représentants des organisations suivantes ont été infructueuses : Croatie - Office for Human Rights and Rights of National Minorities; Croatian Helsinki Committee for Human Rights; Gradanski Odbor za Ljudska Prava; Serbian National Council. Des représentants des organisations suivantes n'ont pas pu fournir de renseignements : Croatie - ambassade de la République de Croatie à Ottawa; Croatian Law Centre.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; Croatie - Ministry of Justice, Office for Human Rights and Rights of National Minorities, Office of the Ombudsman; Croatian Helsinki Committee for Human Rights; Croatian Law Centre; Croatian Times; ecoi.net; European Roma Rights Centre; Gradanski Odbor za Ljudska Prava; Factiva; Nations Unies - Refworld; Radio Free Europe/Radio Liberty; Réseau européen des experts juridiques en matière de non-discrimination.

Document annexé

Croatie. 2009. The Anti-discrimination Act. [Date de consultation : 2 juin 2014]

Copyright notice: This document is published with the permission of the copyright holder and producer Immigration and Refugee Board of Canada (IRB). The original version of this document may be found on the offical website of the IRB at http://www.irb-cisr.gc.ca/en/. Documents earlier than 2003 may be found only on Refworld.

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