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Haïti : information sur la vengeance excercée par les gangs ou par d'autres structures du crime organisé; capacité des gangs ou des autres structures du crime organisé à suivre la trace de leurs cibles, y compris si elles retournent en Haïti après une longue absence (2014-mai 2015)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 18 June 2015
Citation / Document Symbol HTI105162.F
Related Document(s) Haiti: Revenge committed by gangs or by other organized crime structures; capacity of gangs or other organized crime structures to trace their targets, including if the targets return to Haiti after a long absence (2014May 2015)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Haïti : information sur la vengeance excercée par les gangs ou par d'autres structures du crime organisé; capacité des gangs ou des autres structures du crime organisé à suivre la trace de leurs cibles, y compris si elles retournent en Haïti après une longue absence (2014-mai 2015), 18 June 2015, HTI105162.F, available at: https://www.refworld.org/docid/559265634.html [accessed 19 May 2023]
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Parmi les sources écrites qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé de renseignements sur la vengeance exercée par les gangs ou par d'autres structures du crime organisé en Haïti. Le contenu de cette réponse provient intégralement de renseignements obtenus auprès de ces quatre sources :

une chercheuse affiliée à l'Université du Michigan, à Ann Arbor, qui est également directrice du programme de formation en travail social d'un institut en études sociales à Haïti ainsi que candidate au doctorat, et dont la thèse porte sur les bandes armées en Haïti (candidate au doctorat 3 juin 2015).

le vice-président du Security Governance Group (15 mai 2015). Le Security Governance Group est un organisme privé de recherche et de consultation situé à Kitchener en Ontario, dont les champs d'expertise sont [traduction] « la sécurité et la gouvernance dans le contexte du renforcement de l'État, la consolidation de la paix et la reconstruction post-conflit » (Security Governance Group s.d.).

une consultante indépendante et chercheuse en sécurité publique, travaillant à Port-au-Prince (8 juin 2015).

un représentant de la Plate-forme des organisations haïtiennes des droits humains (POHDH) (1er mai 2015), une ONG haïtienne regroupant huit associations haïtiennes oeuvrant à la promotion des droits de la personne (POHDH s.d.).

1. Vengeance exercée par les gangs ou par d'autres structures du crime organisé

1.1 Prévalence des actes de vengeance

Des sources déclarent qu'il est courant pour les gangs ou pour d'autres structures du crime organisé d'exercer des actes de vengeance (consultante indépendante 8 juin 2015; candidate au doctorat 3 juin 2015). La candidate au doctorat a cependant signalé qu'il y aurait eu une baisse de la fréquence de ces actes de vengeance au cours des dernières années (ibid.). Selon le représentant de la POHDH, il existe une « culture de la vengeance [qui est] généralisée », et ce, non seulement dans « les bandes [du] crime organisé », mais aussi dans la société, au niveau de la vie de quartier (1er mai 2015). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information allant dans ce sens.

1.2 Principaux auteurs et victimes des actes de vengeance

Selon la candidate au doctorat, les auteurs des actes de vengeance appartiennent à [traduction] « des bandes armées urbaines, d'autres groupes politiques armés et des réseaux de criminels organisés, y compris des [réseaux] de trafiquants » (3 juin 2015). D'après le représentant de la POHDH, les bandes du crime organisé qui commettent des actes de vengeance peuvent agir pour le compte du gouvernement ou de la police (1er mai 2015). Selon la candidate au doctorat, au cours des dernières années, parmi les actes de vengeance dénoncés, certains [traduction] « auraient été commis par des membres de groupes d'insurgés affiliés à l'armée haïtienne démantelée » (candidate au doctorat 3 juin 2015). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information allant dans ce sens.

Selon la candidate au doctorat, les victimes des actes de vengeance commis par des gangs ou par d'autres structures du crime organisé en Haïti sont principalement les membres de la famille de la personne ciblée ou d'autres personnes qui comptent pour elle (ibid.). D'après le représentant de la POHDH, la vengeance s'exerce sur la parenté de la personne ciblée lorsque celle-ci « est partie se sauver dans une autre ville, une autre région ou ailleurs » (1er mai 2015). En outre, selon la candidate au doctorat, les victimes d'actes de vengeance sont « généralement des adultes » (3 juin 2015). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information allant dans ce sens.

1.3 Nature et motifs des actes de vengeance

Concernant la nature des actes de vengeance, selon le représentant de la POHDH, ceux-ci peuvent « aller de la récupération par la force de petites sommes d'argent jusqu'à l'assassinat de la personne ciblée » (POHDH 1er mai 2015). Allant dans le même sens, la candidate au doctorat a fourni les détails qui suivent :

[traduction]

Les actes de vengeance commis varient d'un groupe à un autre. Les actes varient également en fonction de la gravité de l'offense, du niveau de certitude quant au fait que la cible a effectivement été impliquée dans l'offense [en question], l'étendue de la menace que la cible peut continuer à poser, ainsi que la perception du pouvoir qu'exerce la cible au sein de la communauté.

[…]

Au cours des cinq dernières années, les types d'actes de vengeance les plus communs qui ont été perpétrés par les groupes armés ont pris, entre autres, les formes suivantes :

la destruction du domicile, de l'entreprise, du véhicule ou d'autres biens importants de la cible, tels que des outils de travail, du bétail, ou le fait d'incendier les récoltes;

le vol de biens de valeur, commis parfois sous la menace d'un pistolet […];

l'agression sexuelle, commise notamment à l'endroit d'une femme vulnérable qui est une proche parente de la cible, et parfois en la présence de la cible;

l'exécution sommaire;

le fait de tirer sur la maison, le véhicule ou la cible elle-même, ou sur des proches de la cible;

l'enlèvement de la cible ou de personnes qui lui sont proches

les coups, la torture physique (y compris les brûlures), et les attaques armées (3 juin 2015).

Selon la consultante indépendante, les motifs à l'origine des actes de vengeance perpétrés par les gangs ou les autres structures du crime organisé en Haïti varient du « plus futile au plus sérieux », par exemple, pour motif amoureux (« partage de copine »), pour des motifs en lien avec un vol, ou en raison de conflits concernant le « butin à partager» (consultante indépendante 8 juin 2015). Selon la candidate au doctorat, les actes de vengeance peuvent consister en

[traduction]

des actes d'intimidation destinés à contrôler les actes d'une personne ou à empêcher une personne de témoigner dans le cadre d'une procédure judiciaire, alors que d'autres actes de vengeance semblent être motivés par une volonté d'étouffer la dissidence au sein de la communauté. Par ailleurs, d'autres actes de vengeance semblent simplement être des « représailles » pour avoir parlé ouvertement, avoir quitté un groupe armé ou avoir cherché la protection de la police contre un groupe armé (candidate au doctorat 3 juin 2015).

Par ailleurs, selon la candidate au doctorat, des chercheurs en sciences sociales auraient recueilli des exemples d'actes de vengeance, qui comprennent les suivants, lesquels ont été perpétrés en 2014 :

[traduction]

Une militante contre les agressions sexuelles, qui avait demandé qu'un juge ordonne la détention d'un présumé violeur (affilié à une bande armée urbaine), a été attaquée à son domicile et forcée d'assister au viol de sa fille adolescente par un groupe d'hommes.

Le domicile qu'une famille avait laissé après que la cible a quitté un gang de criminels a été complètement détruit sous le regard de voisins qui ne sont pas intervenus.

Les champs d'une famille suspectée d'avoir dénoncé un trafic à la police ont été incendiés.

Après avoir accusé un gang armé d'extorsion et avoir cherché l'aide de la police, une femme travaillant dans un marché a été menacée de viol et tout son inventaire a été volé.

Un leader communautaire qui s'est exprimé ouvertement contre un groupe armé opérant dans son quartier en milieu urbain a reçu des tirs, a été menacé de mort et a été cambriolé.

Un homme soupçonné d'avoir fourni des renseignements à la police concernant un réseau de kidnappeurs a été menacé. On a tiré sur sa maison, qui a été cambriolée. Son chien a été tué et jeté devant sa porte d'entrée.

Plusieurs jours après avoir témoigné dans le cas d'un meurtre commandité par un gang, un témoin a été attaqué et poignardé avec une machette par trois hommes armés et masqués qui sont entrés par effraction dans son domicile durant la nuit (ibid.).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements sur les actes de vengeance qui auraient été commis par le crime organisé en Haïti au cours de l'année 2014.

2. Protection offerte par la police

La candidate au doctorat a affirmé que plutôt que de déposer une plainte au criminel, les victimes d'actes de vengeance ont tendance à n'en faire constat auprès de la police que sous la forme d'une « "plent", terme créole dont le sens est proche d'un rapport d'incident fait à la police », laquelle n'est quasiment jamais suivie d'une enquête (candidate au doctorat 9 juin 2015; ibid. 3 juin 2015).

Selon le vice-président du Security Governance Group, la police haïtienne est peu efficace pour résoudre les crimes, car elle dispose de peu de personnel et d'une capacité restreinte à mener des enquêtes (Security Governance Group 15 mai 2015). Allant dans le même sens, la candidate au doctorat a affirmé que faute de moyens, la police ne peut pas [traduction] « documenter et présenter de manière adéquate des plaintes pour infraction pénale » devant la justice, prérequis pour qu'il y ait enquête à la suite du dépôt d'une plainte (candidate au doctorat 3 juin 2015). Elle a par ailleurs expliqué que contrairement à ce qui se passe au Canada, par exemple, les enquêtes criminelles ne sont généralement pas du ressort de la police, [traduction] « étant plutôt menées dans le cadre des enquêtes préliminaires pour les procès au pénal, où le juge et le procureur jouent un rôle important » (ibid.). En outre, la candidate au doctorat a affirmé que les agents de police sont réticents à poursuivre les bandes armées, de crainte de devenir des cibles à leur tour (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans ce sens.

3. Capacité des gangs ou des autres structures du crime organisé à suivre la trace de leurs cibles

Le représentant de la POHDH a déclaré que

[l]es gangs sont capables de retracer leur victime, car Haïti est un très petit pays, et avec peu de moyens et de la motivation, on peut aisément retracer une personne, [et ce,] avec une voiture, un téléphone et grâce aux réseaux d'informateurs informels dans les municipalités [et] les quartiers populaires (1er mai 2015).

Allant dans le même sens, des sources ont souligné la difficulté pour une personne « étrangère » à un territoire de passer inaperçue (candidate au doctorat 3 juin 2015; consultante indépendante 8 juin 2015). La consultante indépendante a déclaré que « tout le monde se connaît. Il est très difficile de se cacher quelque part. Par exemple, les gens parlent » (ibid.). Selon la candidate au doctorat,

[traduction]

dans la culture haïtienne, il est approprié et même souhaitable de détenir des renseignements personnels sur une personne qui vit dans votre voisinage, et ces renseignements vont se propager très vite grâce au bouche-à-oreille […], ce qui permet de localiser et de suivre plus facilement les traces d'une personne (candidate au doctorat 3 juin 2015).

Elle a par ailleurs expliqué que les résidants vont jouer le rôle d'informateurs auprès des bandes armées, [traduction] « de crainte de devenir eux-mêmes des cibles, ou par loyauté » (ibid.). De même, selon elle, les Haïtiens vivant à l'étranger qui peuvent craindre pour leur commerce ou leur parenté en Haïti peuvent aussi jouer ce rôle d'informateurs (ibid.). Elle a toutefois ajouté que les bandes armées s'attaquent [traduction] « très rarement de façon directe » à des personnes ciblées à l'extérieur d'Haïti (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information sur les motivations des habitants à collaborer avec les bandes armées, ni sur les informateurs dans la diaspora haïtienne.

Selon le représentant de la POHDH, il n'existe pas de « "prescription" » concernant la vengeance en Haïti, car « il arrive qu'une personne soit retracée plusieurs années après s'être sauvée, puis kidnappée et torturée, [y compris] après 2, 3, 5 ans » (1er mai 2015). Allant dans le même sens, la candidate au doctorat a déclaré [traduction] « qu' [une] personne ciblée aujourd'hui par un gang peut ne pas être en sécurité en Haïti dans dix ans, même si le chef du gang meurt, car cette personne peut encore être poursuivie par d'autres membres de ce même gang ou par des membres d'un autre gang qui lui était affilié » (candidate au doctorat 3 juin 2015). Selon la même source, au cours de l'année 2014, une personne qui aurait fourni des renseignements à la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) sur les activités d'un réseau de trafiquants dix ans plus tôt et se serait exilée dans un autre pays, aurait par la suite été retracée par ce réseau et aurait fait l'objet d'actes de représailles de sa part (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autre information sur ce cas précis.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Candidate au doctorat et chercheuse. 9 juin 2015. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

_____. 3 juin 2015. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Consultante indépendante et chercheuse en sécurité publique. 8 juin 2015. Entretien téléphonique.

Plate-forme des organisations haïtiennes des droits humains (POHDH). 1er mai 2015. Entretien téléphonique avec un représentant.

_____. S.d. « Présentation de la POHDH ». [Date de consultation : 10 juin 2015]

Security Governance Group. 15 mai 2015. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par le vice-président.

_____. S.d. « About ». [Date de consultation : 10 juin 2015]

Autres sources consultées

Sources orales : La personne suivante n'a pas pu fournir de renseignements pour cette réponse : professeur de sociologie, Wesleyan University, Middletown, États-Unis.

Les tentatives faites pour joindre dans les délais voulus les personnes et les organisations suivantes ont été infructueuses : Comité des avocats pour le respect; Groupe Médialernatif; Regroupement des organisations canado-haïtiennes pour le développement.

Sites Internet, y compris : AlterPresse; ecoi.net; États-Unis - Department of State; Factiva; Fondation Connaissance et Libertés; Haïti - ministère de la Justice et de la Sécurité publique; HaïtiLibre; Haiti Press Network; Haïti progrès; InSight Crime; International Crisis Group; Organisation des États américains; Nations Unies - Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti, Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, Refworld; Le Nouvelliste; Security Sector Reform Resource Centre.

Copyright notice: This document is published with the permission of the copyright holder and producer Immigration and Refugee Board of Canada (IRB). The original version of this document may be found on the offical website of the IRB at http://www.irb-cisr.gc.ca/en/. Documents earlier than 2003 may be found only on Refworld.

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