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Égypte : les vendettas appelées « Al-Tar »; la philosophie et les principes sous-jacents; les régions où elles se pratiquent ou les groupes qui y participent; les dispositions de la loi égyptienne relatives à ce problème; la réaction des autorités à l'égard des actes de violence commis dans le cadre de cette tradition

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Author Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Canada
Publication Date 2 March 2004
Citation / Document Symbol EGY42420.EF
Reference 4
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Égypte : les vendettas appelées « Al-Tar »; la philosophie et les principes sous-jacents; les régions où elles se pratiquent ou les groupes qui y participent; les dispositions de la loi égyptienne relatives à ce problème; la réaction des autorités à l'égard des actes de violence commis dans le cadre de cette tradition, 2 March 2004, EGY42420.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/41501c067.html [accessed 19 May 2023]
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D'après plusieurs sources, les Al-Tar, ou guerres de clans, ne sont pas rares en Haute-Égypte (Égypte du Sud) rurale (BBC 10 août 2002; Al-Ahram 15-21 août 2002; The Times 12 août 2002; AP 23 août 2002). Cette région est également reconnue du fait qu'il est très facile de s'y procurer des armes (ibid.). Une autre source a mentionné que les meurtres par vengeance étaient particulièrement fréquents dans les régions rurales du pays (UPI 11 août 2002).

Les conflits territoriaux ou concernant l'argent sont souvent à l'origine des vendettas Al-tar qui peuvent durer plus d'un demi-siècle (Al-Ahram 15-21 août 2002). On justifie les meurtres en invoquant la protection de [traduction] « l'honneur, la fierté ou la terre », mais on se limite généralement à [traduction] « rendre la pareille » à ses ennemis (ibid.; Irish Times 6 sept. 2002). C'est uniquement en tuant un membre de la famille de l'assassin qu'un clan peut recouvrer son honneur et pleurer son défunt (AFP 12 juin 2003; Irish Times 6 sept. 2002). La vendetta, obligatoire pour tous les hommes du clan, ne vise pas nécessairement le véritable assassin, pourvu que la vengeance soit proportionnelle au meurtre initial (Irish Times 6 sept. 2002). Une philosophie sous-jacente de ces meurtres par vengeance semble être le Al-Tar Wala Al-'Aar ou la [traduction] « vendetta vaut mieux que la disgrâce » (Al-Ahram 15-21 août 2002).

En théorie, un assassin peut être pardonné par la famille de la victime en traversant le village nu-pieds et en ayant un linceul sur la tête, linceul qu'il devra déposer aux pieds du chef de la famille rivale afin de demander pardon (AFP 12 juin 2003). Toutefois, en pratique, la famille endeuillée tue souvent les hommes en cours de procession afin d'éviter toute disgrâce supplémentaire (ibid.). D'après un Égyptien du Sud, [traduction] « les gens en Haute-Égypte attendent parfois dix ou vingt ans avant de commettre un meurtre par vengeance [...]. La plupart du temps, la police ne peut rien faire, car ces meurtres font partie des mœurs locales » (The Times 12 août 2002). Certaines vendettas sont reconnues pour être liées à des groupes islamiques fondamentalistes (BBC 10 août 2002; Irish Times 6 sept. 2002).

En 1995, une vendetta accomplie à l'extérieur d'une mosquée de la ville d'El-Minya a entraîné la mort de 24 personnes (Al-Ahram 15-21 août 2002). Trois ans plus tard, sept des personnes qui avaient participé au massacre d'El-Minya ont été assassinées en guise de représailles (ibid.; BBC 10 août 2002).

L'une des principales vendettas oppose les familles El-Hanashat et Abdel-Halim qui habitent dans le village de Beit Allam, situé dans le gouvernorat de Sohag en Haute-Égypte (Al-Ahram 15 août 2002). En 1990, une bagarre entre deux enfants a rapidement dégénéré et entraîné le meurtre de deux membres de la famille El-Hanashat par deux membres du clan Abdel Halim (ibid.). Une décennie plus tard, des membres de la famille El-Hanashat ont tué et blessé deux membres de la famille Abdel-Halim afin de se venger (ibid.). Les autorités ont pris sans tarder des mesures pour désarmer les habitants locaux en saisissant plus de 40 armes, des fusils automatiques pour la plupart (ibid.). Elles ont également organisé plusieurs rencontres de réconciliation entre les El-Hanashat et les Abdel-Halim dans l'espoir d'éviter d'autres meurtres par vengeance, mais leurs efforts ont été vains (ibid.). Le 10 août 2002, un groupe d'Abdel-Halim a tendu une embuscade à un convoi formé de membres de la famille El-Hanashat qui se rendaient au procès de proches accusés d'avoir assassiné des membres du clan Abdel-Halim (ibid.). Vingt-deux membres de la famille El-Hanashat ont perdu la vie lors de la fusillade qui a suivi; il s'agit de la pire tuerie qu'a connue la Haute-Égypte depuis 1995 (ibid.; BBC 10 août 2002; Irish Times 6 sept. 2002).

Cette tuerie était inhabituelle en ce sens qu'on y a enfreint la tradition de l'Al-Tar de plusieurs façons (ibid.). Le nombre de victimes dépasse [traduction] « largement » le ratio [traduction] « coup pour coup » normalement anticipé; de plus, il y avait des femmes et des enfants parmi les victimes, soit deux groupes qui sont habituellement épargnés lors des guerres de clans (ibid.). Par la suite, toute la famille Abdel-Halim s'est enfuie du village de Beit Allam par crainte d'un châtiment inévitable (ibid.). La police n'a pas autorisé la famille El-Hanashat à célébrer les funérailles afin de diminuer les risques d'un autre massacre et a enterré elle-même les victimes (Jerusalem Post 28 août 2002).

Après la tuerie du mois d'août 2002, la majorité des hommes de la famille El-Hanashat qui avaient épousé des femmes de la famille Abdel-Halim ont décidé de divorcer (Al-Ahram 15-21 août 2002). D'après la tradition, le fait que la famille El-Hanashat ait refusé d'accepter les condoléances est un signe qu'elle a l'intention de venger ses défunts en dépit du renforcement des forces de sécurité et des nombreuses tentatives de réconciliation (Irish Times 6 sept. 2002).

Un tribunal a condamné à mort par pendaison six membres de la famille Abdel-Halim pour le rôle qu'ils ont joué dans l'embuscade meurtrière et 10 autres personnes ont été déclarées coupables d'avoir fourni les armes utilisées au cours de la tuerie et ont été condamnées à la prison à perpétuité, sans droit d'appel (AFP 12 juin 2003).

Une source a mentionné l'existence d'une guerre de clans en cours entre deux tribus bédouines qui vivent aux alentours de la frontière israélo-égyptienne, les El Azazmeh et les Tay'a (Jewish News Weekly 26 mars 1999).

Une guerre de clans peut s'aggraver si des musulmans et des Coptes y participent et passer d'une simple vendetta familiale à un conflit religieux (The Estimate 11 févr. 2000). Étant donné que les agents de police sont recrutés dans les régions où ils exercent leurs fonctions, les animosités confessionnelles peuvent influencer leur comportement (ibid.).

En 1998, deux Coptes ont été assassinés dans la ville d'El Kosheh (ibid.). Même si la communauté chrétienne croyait que l'assassin était un musulman cherchant à venger la mort de son frère, les autorités locales ont décidé que le meurtrier inconnu était un chrétien (ibid.), peut-être pour éviter un conflit religieux à grande échelle (Cairo Times 1er oct. 1998). Les policiers ont arrêté entre 500 (d'après l'Organisation égyptienne des droits de l'homme [Egyptian Organization for Human Rights - EOHR]) et 1 200 Coptes (d'après l'évêque copte Wissa) pour les interroger (ibid.). Les villageois prétendent que ces Coptes, une fois sous la garde de la police au poste de police ou dans les montagnes, ont été soumis à [traduction] « diverses formes de torture » (ibid.). Un correspondant a interviewé 54 personnes qui ont affirmé avoir été victimes de torture, et la plupart d'entre elles portaient des cicatrices (ibid.). D'après les personnes interviewées, les policiers ont menacé de viol les femmes détenues, ont extorqué de l'argent aux détenus et ont torturé plusieurs personnes à un tel point que nombre d'entre elles ont dû être hospitalisées (ibid.). Toutes les personnes torturées (ce qui ne comprenait pas tous les détenus) étaient apparemment des Coptes et, d'après les prêtres, tous les policiers étaient musulmans (ibid.). Par conséquent, de nombreux Coptes ont cru être victimes de discrimination en raison de leur confession religieuse (The Estimate 11 févr. 2000).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais prescrits. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile ou de statut de réfugié. Veuillez trouver ci-dessous la liste des autres sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

Agence France-Presse (AFP). 12 juin 2003. « Ten Accomplices Jailed for Life in Egypt ». (Dialog)

Al-Ahram [Le Caire]. 15-21 août 2002. No 599. Jailan Halawi. « "Honour" Drenched in Blood ». [Date de consultation : 19 févr. 2004]

The Associated Press (AP). 23 août 2002. « Prosecutors in Egypt Charge Five Men with Murder in Vendetta Killing ». (Dialog)

British Broadcasting Corporation (BBC). 10 août 2002. « Egypt Feud Ends in Carnage ». [Date de consultation : 20 févr. 2004]

The Cairo Times. 1er octobre 1998. Vol. 2, no 16. Steve Negus. « Village of Fear ». [Date de consultation : 19 févr. 2004]

The Estimate [Falls Church, Virginie]. 11 février 2000. Vol. 12, no 3. « Egypt's Copts After Kosheh ». [Date de consultation : 19 févr. 2004]

The Irish Times [Dublin]. 6 septembre 2002. « Egyptian Feud Sees Family in Court After 22 Killed from Rival Clan ». (Dialog)

The Jerusalem Post. 28 août 2002. « Egypt's "Worst Vendetta in Nearly a Decade" ». (Dialog)

The Jewish News Weekly of Northern California [San Francisco]. 26 mars 1999. « Bedouins Fleeing Egypt Forced Back ». [Date de consultation : 19 févr. 2004]

The Times [Londres]. 12 août 2002. Issandr el-Amrani. « Revenge Killing in Upper Egypt Claims 22 Clan Members ». (NEXIS)

United Press International (UPI). 11 août 2002. « Egypt Ups Security After Vendetta Killing ». (Dialog)

Autres sources consultées

Sites Internet, y compris : Amnesty International, Département d'État des Etats-Unis, Freedom House, Human Rights Watch, The Salt Lake Tribune.

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