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République démocratique du Congo : information sur la violence conjugale et sexuelle, dont la loi, la protection de l'État et les services offerts aux victimes (2006-mars 2012)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 17 April 2012
Citation / Document Symbol COD104022.EF
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, République démocratique du Congo : information sur la violence conjugale et sexuelle, dont la loi, la protection de l'État et les services offerts aux victimes (2006-mars 2012), 17 April 2012, COD104022.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/4f9e5def2.html [accessed 20 May 2023]
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1. Aperçu de la violence conjugale, dont la violence sexuelle infligée par un partenaire intime

Selon diverses sources, la fréquence des actes de violence conjugale est un problème en République démocratique du Congo (RDC) (RFDA 24 févr. 2012; RI 10 juill. 2011; Peterman et al. juin 2011, 1065). Au cours d'entretiens avec la Direction des recherches, des organisations de femmes en RDC ont décrit la violence conjugale comme « très fréquente » (RFDA 24 févr. 2012) et « si répandue qu'elle est considérée comme normale » (RFDP 1er mars 2012). D'après l'une de ces organisations, le Réseau des femmes pour la défense des droits et la paix (RFDP), qui exerce ses activités au Sud-Kivu (Irenees.net s.d.), la violence familiale peut notamment être de nature physique et verbale, et comprendre des mauvais traitements infligés aux jeunes filles par leurs proches et leurs tuteurs de sexe masculin, en plus d'être de nature sexuelle (RFDP 1er mars 2012). Les spécialistes américaines de la santé Amber Peterman, Tia Palermo et Caryn Bredenkamp, dans leur analyse de l'Enquête Démographique et de Santé (EDS-RDC), réalisée en RDC en 2007, dans l'American Journal of Public Health, concluent que la violence sexuelle infligée par un partenaire intime est la forme de violence contre les femmes la plus répandue en RDC, et que sa fréquence est [traduction] « extraordinairement élevée », ce qui en fait un [traduction] « problème particulièrement important en RDC », surtout lorsqu'on la compare à celle dans les autres pays de la région (juin 2011, 1065). Amber Peterman et al. affirment cependant que le viol conjugal n'est [traduction] « pas un crime qui peut faire l'objet de poursuites » (juin 2011, 1066). Au cours d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, la représentante du Réseau des femmes pour un développement associatif (RFDA), établi au Sud-Kivu (GRIP s.d.), a expliqué que « le droit coutumier ne reconnaît pas le viol conjugal » (29 févr. 2012).

2. Violence sexuelle, dont la violence sexuelle infligée par un partenaire intime
2.1 Fréquence

Des sources soulignent que la violence sexuelle contre les femmes en RDC est élevée [traduction] « de façon alarmante » (RI 10 juill. 2011; The New York Times 11 mai 2011), [traduction] « très répandue » (Steiner et al. 2009), et [traduction] « plus fréquente et de plus en plus brutale ces dernières années » (Peterman et al. juin 2011, 1060). Certaines publications d'organismes de défense des droits de la personne et de sources universitaires se concentrent particulièrement sur la fréquence des actes de violence sexuelle dans l'est de la RDC (RI 10 juill. 2011; Human Rights Watch janv. 2012, 2; Steiner et al. 2009). Amber Peterman et al. signalent que la plupart des cas de violence sexuelle signalés en RDC sont liés au conflit armé au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, ainsi que dans les provinces voisines du Maniema et du Katanga (juin 2011, 1060). Cependant, selon un rapport d'experts des Nations Unies sur la RDC soumis au Conseil des droits de l'homme en 2011, la violence sexuelle est [version française des Nations Unies] « une préoccupation majeure », aussi bien dans l'est que dans le reste du pays (9 mars 2011, paragr. 7). Amber Peterman et al. ont conclu que c'est dans la Province orientale, le Nord-Kivu et l'Équateur que des femmes âgées de 15 à 49 ans ont signalé le plus grand nombre de viols lors de l'EDS-RDC de 2007, et que le taux de viol conjugal était particulièrement élevé dans les provinces de l'Équateur, du Bandundu, du Katanga et du Kasaï-Oriental (juin 2011, 1063).

D'après de nombreuses sources, il n'y a pas de statistiques précises représentatives sur le plan national à propos de la fréquence des actes de violence sexuelle en RDC (RI 10 juill. 2011; Bartels et al. mai 2010, 38; Peterman et al. juin 2011, 1060; The Economist 13 janv. 2011). Selon plusieurs études universitaires sur le sujet, le faible nombre de cas signalés constitue un problème (Steiner et al. 2009; Bartels et al. mai 2010, 38; Peterman et al. juin 2011, 1065). Les Nations Unies auraient recensé 27 000 cas d'agressions sexuelles au Sud-Kivu en 2006 (Bartels et al. mai 2010, 38). Des sources soulignent que le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a signalé 15 996 cas de violence sexuelle en 2008 (Peterman et al. juin 2011, 1060) et 17 500 en 2009 (The Economist 13 janv. 2011). Peterman et al. estiment que, d'après l'EDS-RDC de 2007, le nombre de femmes violées [traduction] « dépasse de plusieurs ordres de grandeur ce qui a été cité dans des études précédentes » et peut se situer entre 3,07 et 3,37 millions (juin 2011, 1063-4).

2.2 Vulnérabilité des femmes à la violence sexuelle

Certaines analyses de données sur la violence sexuelle permettent de conclure que les femmes et les filles de tout âge sont victimes de violence sexuelle (Steiner et al. 2009; Bartels et al. mai 2010, 42). D'autres sources font cependant état de la vulnérabilité particulière des filles âgées de moins de 18 ans (Peterman et al. juin 2011, 1060; Human Rights Watch janv. 2011, 3; ABA juin 2011). Parmi les près de 16 000 cas de violence sexuelle recensés par le FNUAP en 2008, 65 p. 100 des victimes auraient été âgées de moins de 18 ans et 10 p. 100, de moins de 10 ans (Peterman et al. juin 2011, 1060). Selon l'Initiative de primauté du droit (Rule of Law Initiative - ROLI) de l'Association du barreau américain (American Bar Association - ABA), qui offre des programmes portant sur la violence sexuelle et l'accès à la justice dans l'est de la RDC (s.d.), l'âge moyen des victimes de viol semble diminuer, et les viols de fillettes âgées de huit à treize ans sont [traduction] « extrêmement fréquents » (juin 2011).

Dans son analyse des dossiers de 1 851 femmes qui se sont présentées à l'Hôpital de Panzi, à Bukavu, au Sud-Kivu, en 2006 pour recevoir un traitement médical à la suite d'une agression sexuelle, une équipe de médecins de Boston, qui travaille avec le directeur médical de l'Hôpital de Panzi, a conclu que la [traduction] « grande majorité » des femmes qui ont participé à l'étude étaient analphabètes ou n'avaient fait que des études de niveau primaire, et que 77 p. 100 d'entre elles tiraient leur revenu de l'activité agricole (Bartels et al. mai 2010, 37, 40). Dans une autre étude des dossiers de l'Hôpital de Panzi de 2004 à 2008, on signalait que les femmes célibataires, mariées, veuves et enceintes, de toutes les ethnies dans la région, étaient victimes de violence sexuelle (HHI avr. 2010, 35). Amber Peterman et al., dans leur analyse des données de l'EDS-RDC de 2007, ont conclu que [traduction] « la violence [sexuelle] est quelque peu aveugle » et que l'instruction, la richesse et le lieu de résidence (urbain ou rural) n'influaient pas sur la vulnérabilité des femmes à l'égard de la violence sexuelle (juin 2011, 1066). Toutefois, au cours d'un entretien téléphonique avec la Direction des recherches, la représentante du RFDP a affirmé que les femmes des zones rurales étaient beaucoup plus vulnérables à la violence sexuelle que les femmes des zones urbaines, parce qu'elles étaient moins informées à propos de leurs droits et qu'elles étaient isolées des services de sécurité (1er mars 2012).

2.3 Caractéristiques de la violence sexuelle et cas notables

Selon plusieurs sources, le viol est utilisé comme une [traduction] « arme de guerre » dans les zones de conflit en RDC (ABA juin 2011; RI 10 juill. 2011; Bartels et al. mai 2010, 39). Par exemple, Minority Rights Group International (MRG) signale que, d'après diverses sources, des groupes armés ont ciblé des groupes précis de personnes par [traduction] « des viols "de représailles" particulièrement brutaux ou courants [en raison de] la présumée sympathie des victimes pour les factions rivales » (6 juill. 2011, 67). Réfugiés international (Refugees International - RI), organisation indépendante de défense des personnes déplacées (s.d.), souligne cependant que la majorité des cas de violence sexuelle en RDC sont opportunistes et ne sont pas liés à une stratégie militaire précise (10 juill. 2011). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un représentant de la ROLI de l'ABA en RDC a déclaré que la proportion de cas juridiques de la ROLI attribués à un conflit ou un groupe armé s'élevait à quelque 10 à 13 p. 100 (ABA 5 mars 2012).

Diverses sources décrivent les types de cas de violence sexuelle observés et signalés en RDC (RI 10 juill. 2011; Human Rights Watch janv. 2012, 2; Peterman et al. juin 2011, 1060; HHI avr. 2010, 16; Mukengere Mukwege et Nangini déc. 2009, 1-2). Il s'agit notamment de viols collectifs (RI 10 juill. 2011; Human Rights Watch janv. 2012, 2,4), de viols en bandes (Peterman et al. juin 2011, 1060; HHI avr. 2010, 22), de la participation forcée de membres de la famille aux viols (ibid., 23), de la mutilation des organes génitaux des femmes avec des armes (ibid., 36; Peterman et al. juin 2011, 1060; Mukengere Mukwege et Nangini déc. 2009, 1-2), de la transmission volontaire de maladies transmissibles sexuellement (ibid.) et de l'esclavage sexuel (Peterman et al. 2010, 1060). Dans un article sur les viols commis avec une violence extrême au Sud-Kivu publié dans PLOS Medicine, Denis Mukengere Mukwege, directeur médical de l'Hôpital de Panzi, et Cathy Nangini, chercheuse de l'Université de la technologie d'Helsinki, qualifient cette pratique de [traduction] « nouvelle pathologie [appelée] viol commis avec une violence extrême » (déc. 2009, 1).

Des sources signalent que dans le territoire de Walikale, au Nord-Kivu, au moins 380 femmes, hommes et enfants ont été violés en trois jours, de juillet à août 2010, par une coalition de groupes armés (Nations Unies 9 mars 2011, paragr. 7; Human Rights Watch janv. 2012, 4-5). Les auteurs des viols étaient notamment des membres des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) et les milices Mai Mai Cheka (ibid. janv. 2011, 2; Nations Unies 9 mars 2011, paragr. 7). Human Rights Watch fait observer que, en janvier et en février 2011, au moins 65 femmes et jeunes filles ont été violées par des combattants des FDLR au cours de quatre attaques à Bwale, au Sud-Kivu (janv. 2012, 2). De nombreuses sources signalent également que des soldats du gouvernement infligent de la violence sexuelle à la population civile (RI 10 juill. 2011; Steiner et al. 2009; Human Rights Watch janv. 2012, 2; Nations Unies 9 mars 2011, paragr. 7; MRG 6 juill. 2011, 67). Par exemple, dans le territoire de Fizi, au Sud-Kivu, des soldats du gouvernement auraient violé au moins 67 femmes et jeunes filles le 1er janvier 2011 (Human Rights Watch janv. 2012, 2). Un commandant de l'armée a par la suite été déclaré coupable de crimes contre l'humanité pour avoir ordonné l'attaque (Nations Unies 9 mars 2011, paragr. 7; VOA 21 févr. 2011). À Nakiele, au Sud-Kivu, un colonel et au moins 100 des hommes sous son commandement auraient déserté l'armée et violé au moins 120 femmes (ibid. 8 juill. 2011; RNW 5 juill. 2011).

Des sources font aussi état d'une augmentation du nombre de civils qui commettent des actes de violence sexuelle (RI 10 juill. 2011; HHI avr. 2010, 39; ABA juin 2011). Amber Peterman et al. précisent que des hommes de collectivités locales [traduction] « se joignent souvent à l'armée lors de viols collectifs ou tirent parti du conflit pour agresser des femmes sexuellement sans crainte d'être punis » (juin 2011, 1065). Pendant ce temps, selon MRG,

[traduction]

des analystes croient que l'usage répandu du viol, commis par toutes les parties à l'endroit de toutes les ethnies, a mené à la « banalisation » du viol, même parmi la population civile, et s'est traduit par une hausse des niveaux de violence sexuelle en général (6 juill. 2011, 67).

3. Attitudes à l'égard de la violence conjugale et sexuelle et dénonciation

Les représentants des organisations de femmes et d'aide juridique en RDC ont affirmé qu'il est très rare que les femmes dénoncent la violence conjugale (RFDP 1er mars 2012; RFDA 29 févr. 2012; ABA 5 mars 2012). La représentante du RFDA a expliqué que, si une accusation de violence conjugale menait au divorce, la femme n'aurait aucun droit au partage des biens ou de la richesse, perdrait la garde de ses enfants, devrait rembourser la dot payée par le fiancé au moment du mariage, et serait mise au ban de la collectivité (24 févr. 2012). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, une représentante de l'organisation HEAL Africa, qui est établie au Nord­Kivu (s.d.a) et qui offre des services médicaux et sociaux aux victimes de violence (s.d.b), de nombreuses femmes ignorent que la violence sexuelle entre conjoints est illégale et qu'elles peuvent la dénoncer (29 févr. 2012).

Seule une faible proportion de femmes qui ont été victimes de violence sexuelle se font soigner ou dénoncent le crime (Peterman et al. juin 2011, 1065; Steiner et al. 2009). Des sources précisent que les femmes qui ont été agressées sexuellement sont souvent montrées du doigt par leur collectivité et abandonnées ou rejetées par leur mari ou leur famille (ibid.; ABA juin 2011; The Economist 13 janv. 2011). Les femmes peuvent aussi craindre les autorités auxquelles elles devraient signaler les mauvais traitements (Peterman et al. juin 2011, 1066; ABA 5 mars 2012).

4. Protection de l'État

Selon RI, le gouvernement de la RDC a adopté une [version française de RI] « "stratégie globale de lutte contre les violences sexuelles" » dans l'Est qui a été élaborée par l'Action des Nations Unies contre la violence sexuelle dans les conflits et traite de [version française de RI] « [la] prévention et [la] protection, l'assistance multisectorielle aux victimes, [la] lutte contre l'impunité, [la] réforme du secteur sécurité, [les] données et [le] mapping » (10 juill. 2011). La même source précise que la stratégie a encouragé l'appui du gouvernement à l'échelle provinciale, mais [version française de RI] « [l']engagement du gouvernement national reste totalement insuffisant » (RI 10 juill. 2011). Une équipe de chercheurs de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de la RDC, dans des recherches publiées dans Conflict and Health, parle de [traduction] « l'effondrement des services de santé publics » lorsqu'elle affirme que les organismes humanitaires offrent des services aux victimes de viol à cause du manque de programmes gouvernementaux qui portent sur les répercussions de la violence sexuelle (Steiner et al. 2009).

5. Loi

La Constitution de 2006 prévoit l'engagement du gouvernement d'éliminer toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et de combattre toutes les formes de violence contre les femmes, tant dans le domaine public que privé (RDC 2006b, art. 14). Cependant, il n'est fait mention nulle part de la violence conjugale dans le Code pénal de la RDC (ibid. 1940), modifié en 2006 (ibid. 2006a), ou son Code de la famille, modifié en 2003 (ibid. 1987). Dans ses sixième et septième rapports périodiques combinés au Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes de 2011, la RDC reconnaît l'existence de la violence conjugale physique et psychologique, mais ne fait pas mention de lois contre ces types de violence (RDC 20 déc. 2011).

En 2006, la RDC a adopté une loi qui a modifié le Code pénal pour qu'il prévoie une protection contre la violence sexuelle (RDC 2006a). La loi sur les violences sexuelles, comme on l'appelle, interdit notamment le viol et les autres formes d'agression sexuelle, le harcèlement sexuel, l'esclavage sexuel, les mariages forcés, les mutilations sexuelles, la transmission volontaire de maladies transmissibles sexuellement, les relations sexuelles avec des mineurs (enfants âgés de moins de 18 ans) et les grossesses forcées (ibid.). La loi n'interdit pas expressément le viol conjugal (ibid.). La représentante du RFDA a expliqué que la loi traite de la violence sexuelle qui peut s'exercer au sein du couple, mais parce que la culture congolaise ne reconnaît pas le viol conjugal, les femmes ne le dénoncent pas (29 févr. 2012).

Une source précise que les lois qui protègent les femmes sont [traduction] « très peu appliquées » (HEAL Africa 29 févr. 2012), tandis que d'autres soulignent que les lois n'ont pas eu une très grande incidence (The Economist 13 janv. 2011; FMR nov. 2010, 13). La représentante de HEAL Africa a également signalé qu'au Maniema en particulier, la loi tribale est souvent la loi la plus importante et que les femmes ont [traduction] « très peu de droits (voire aucun) sous ce système » (29 févr. 2012).

6. Police et corps judiciaire
6.1 Accès à la justice

Selon de nombreuses sources, les victimes de violence sexuelle et conjugale ont de la difficulté à obtenir justice (RFDA 24 févr. 2012; RFDP 1er mars 2012; RI 10 juill. 2011; Enough févr. 2012, 2; The Economist 13 janv. 2011). Le Projet Enough (Enough Project), organisme d'analyse et de défense de Washington qui s'intéresse aux génocides et aux crimes contre l'humanité (s.d.), attire l'attention sur une culture d'impunité dans le système judiciaire congolais, et fait observer que la police, les procureurs et les juges sont corrompus (févr. 2012, 3, 5). Des sources soulignent aussi qu'un manque de ressources ou de capacités institutionnelles peut faire obstacle à la justice (Enough févr. 2012, 5; The Economist 13 janv. 2012). The Economist précise que le système judiciaire est [traduction] « en pièces » et que la police n'a ni argent ni formation (ibid.). Enough ajoute que les voies judiciaires officielles dans les zones rurales sont pratiquement inexistantes (févr. 2012, 5). Le représentant de la ROLI de l'ABA a dit qu'il n'y a pas suffisamment de tribunaux au Nord-Kivu, au Sud-Kivu, au Maniema et dans la région de l'Ituri, ce qui signifie que les femmes doivent parcourir jusqu'à 400 kilomètres pour y accéder (5 mars 2012). De plus, des sources signalent que l'on a recours à des arrangements à l'amiable pour résoudre les cas de violence sexuelle (RI 10 juill. 2011; ABA 5 mars 2012); le représentant de la ROLI de l'ABA fait remarquer que ces arrangements à l'amiable sont une pratique traditionnelle qui est parfois appliquée contre la volonté de la femme (ibid.).

L'incapacité des victimes de payer pour les services et les procédures juridiques a également été définie comme un obstacle (RI 10 juill. 2011; RFDA 24 févr. 2012; ABA 5 mars 2012). D'après la représentante du RFDA, les femmes qui souhaitent poursuivre leurs agresseurs sont appuyées par des organisations non gouvernementales (ONG) locales de défense des droits des femmes parce que la police exige des pots-de-vin en échange de son aide (24 févr. 2012). Elle a cependant ajouté que les femmes devraient aussi payer pour l'aide juridique des ONG et les frais imposés par le système judiciaire; par conséquent, les femmes qui n'ont pas d'argent ne peuvent pas exercer leurs droits prévus par la loi (RFDA 24 févr. 2012). Le représentant de la ROLI de l'ABA a affirmé la même chose, et a ajouté qu'il se peut que les femmes ne puissent pas non plus se permettre de payer le transport pour se présenter aux divers rendez-vous juridiques de suivi auxquels elles doivent assister (5 mars 2012).

6.2 Poursuites

Des sources soulignent que des poursuites contre des auteurs d'actes de violence sexuelle ont porté fruit (Human Rights Watch janv. 2011, 4; RI 10 juill. 2011; Nations Unies 9 mars 2011, paragr. 7). Refugiés international fait cependant observer que [version française de RI] « il reste de nombreux cas pour lesquels justice n'est pas faite et par conséquent, ces quelques poursuites judiciaires positives ne permettent pas de changer les perceptions générales concernant le manque de justice dans les cas de violences [sic] sexuelle » (10 juill. 2011). The Economist précise qu'il y a eu moins de 20 poursuites pour viol en tant que crime de guerre ou crime contre l'humanité (13 janv. 2011). Selon l'ABA, la ROLI en RDC a aidé à déposer plus de 2 800 plaintes de viol à la police au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et au Maniema (juin 2011). Ces plaintes se sont traduites par la tenue de 645 procès et 434 déclarations de culpabilité (ABA juin 2011). Human Rights Watch signale que, en mars 2011, la Haute Cour militaire de Kinshasa a entrepris le procès du premier général à être arrêté pour le crime de guerre qu'est le viol (janv. 2012, 4).

La représentante de HEAL Africa a affirmé ne pas avoir eu connaissance de poursuites pour violence conjugale en RDC (29 févr. 2012). Le représentant de la ROLI de l'ABA a dit que les victimes de violence conjugale consultent rarement son centre juridique, bien qu'il y ait eu des poursuites fructueuses pour violence conjugale au Nord­Kivu, au Sud-Kivu, au Maniema et dans l'Ituri (5 mars 2012).

7. Services de soutien

Refugiés international signale qu'il n'y a aucun recensement fiable des services pour les victimes de violence sexuelle (10 juill. 2011). Toutefois, plusieurs organismes dans l'est de la RDC assurent des services médico-sociaux : l'organisme Malteser International administrerait un programme de soutien médico-social pour les victimes de violence sexuelle qui comprend des soins médicaux gratuits dans 23 centres (Steiner et al. 2009). L'Hôpital de Panzi fournit aussi des soins gynécologiques aux femmes souffrant de blessures découlant d'un viol (Bartels et al. mai 2010, 39). HEAL Africa gère un hôpital de recours à Goma, au Nord-Kivu, qui offre des traitements post-viol, dont celui des fistules (HEAL Africa s.d.b; ibid. 29 févr. 2012) (trou entre le vagin d'une femme et la vessie ou le rectum, ou les deux [É.-U. s.d.]); il administre également 31 maisons d'hébergement au Nord-Kivu et au Maniema qui donnent des conseils et de l'information aux femmes (HEAL Africa s.d.b; ibid. 29 févr. 2012). La représentante de HEAL Africa a cependant souligné que, à l'extérieur des régions qu'elles desservent, il y a [traduction] « de vastes territoires au pays où il y a peu ou pas du tout de services » (ibid.).

La ROLI de l'ABA offre des conseils juridiques au Sud-Kivu et gère aussi des [traduction] « tribunaux itinérants » temporaires qui sont mis sur pied dans les régions éloignées pour accroître l'accès au système judiciaire (juin 2011). La représentante du RFDA a dit que de nombreuses organisations congolaises défendent les droits des femmes, mais que leurs employées ne sont pas vues d'un bon œil et peuvent être mises en danger en raison de leur travail (24 févr. 2012).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

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_____. 2006a. Loi no 06/018 du 20 juillet 2006 modifiant et complétant le Décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal congolais. [Date de consultation : 15 mars 2012]

_____. 2006b. Constitution de la République Démocratique du Congo. [Date de consultation : 15 mars 2012]

_____. 1987 (modifié en 2003). Code de la famille. [Date de consultation : 15 mars 2012]

_____. 1940 (modifié en 2006). Code pénal congolais. [Date de consultation : 29 mars 2012]

Réseau des femmes pour la défense des droits et la paix (RFDP). 1er mars 2012. Entretien téléphonique avec une représentante.

Réseau des femmes pour un développement associatif (RFDA). 29 février 2012. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches par une représentante.

_____. 24 février 2012. Entretien téléphonique avec une représentante.

Steiner, Birthe, Marie T. Benner, Egbert Sondorp, K. Peter Schmitz, Ursula Mesmer et Sandrine Rosenberger. 2009. « Sexual Violence in the Protracted Conflict of DRC Programming for Rape Survivors in South Kivu ». Conflict and Health. Vol. 3, no 3. [Date de consultation : 15 mars 2012]

La Voix de l'Amérique (VOA). 8 juillet 2011. « Congolese Colonel Surrenders over Mass Rape Accusations ». [Date de consultation : 15 mars 2012]

_____. 21 février 2011. Nico Colombant. « Activists Seek More Justice After Congo Rape Sentencing ». [Date de consultation : 15 mars 2012]

Autres sources consultées

Sources orales : Des représentants de Solidarity with the Victims and for Peace et d'Actions des Femmes pour le Développement, ainsi qu'un chercheur de l'Université d'Ottawa n'ont pu fournir de renseignements dans les délais voulus. Les tentatives faites pour joindre les Héritiers de la Justice, l'Éveil de la Femme et l'Hôpital de Panzi ont été infructueuses.

Sites Internet, y compris : Africa Canada Accountability Commission; L'Afrique pour les droits des femmes; Amnesty International; Campagne des femmes congolaises contre les violences sexuelles en RDC; CNN.com; Droit-Afrique.com; Droitcongolais.info; Forum international des femmes congolaises; Freedom House; Friends of the Congo; GBV Prevention Network; Hot Peach Pages; Kabissa; Leganet.cd; Power of Peace; MEASURE DHS; Nations Unies — Base de données du Secrétaire général de l'ONU sur la violence contre les femmes, Conseil économique et social, Fonds des Nations Unies pour la population, Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo; The World Law Guide; World Legal Information Institute.

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