Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Zambie
Publisher | International Federation for Human Rights |
Author | Organisation mondiale contre la torture; Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme |
Publication Date | 19 June 2008 |
Cite as | International Federation for Human Rights, Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Zambie, 19 June 2008, available at: https://www.refworld.org/docid/486e051cc.html [accessed 7 June 2023] |
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Contexte politique
Le 31 août 2007, la loi créant la Conférence nationale constitutionnelle (National Constitution Conference), exigée par l'opposition et de nombreuses organisations de la société civile, a été présentée devant le Parlement et adoptée par le Président Mwanawasa. Cette approbation a ouvert la voie à la création de la Commission de révision de la Constitution (Constitution Review Commission), en décembre 2007. Composée de 462 membres, elle devrait siéger pendant douze mois. Cependant, plusieurs partis d'opposition, syndicats, églises et associations, en particulier les associations de femmes, refusent de participer à cette Commission et dénoncent la mainmise du pouvoir actuel, dirigé par le Président Mwanawasa et son parti, le Mouvement pour la démocratie multipartite (Movement for Multi-Party Democracy party), sur le processus ainsi que les indemnités allouées aux participants, 250 dollars américains par jour, dans un pays où la majorité des habitants vit quotidiennement avec moins d'un dollar.
Par ailleurs, comme l'a noté le Comité des droits de l'Homme des Nations unies dans ses observations finales en juillet 2007, la diffamation à l'encontre du Président et la publication de fausses nouvelles sont encore considérées comme des crimes et non des délits par le Code pénal.1 Des journalistes continuent ainsi d'être arrêtés et poursuivis en vertu de cette disposition pour la publication d'articles dénonçant la violation des droits des l'Homme par le Gouvernement. Les défenseurs des droits de l'Homme pourraient à leur tour faire les frais de cette législation répressive.
La liberté d'association menacée par un projet de loi sur les ONG
En 2007, les défenseurs se sont fortement mobilisés contre un nouveau projet de loi sur les ONG introduit devant le Parlement le 17 juillet 2007 par le Ministre de la Justice dans le but annoncé de rendre les organisations plus transparentes. N'ayant pas été consultées dans l'élaboration du projet de loi, les organisations de la société civile ont dénoncé la nouvelle législation comme une manoeuvre de l'État pour les réduire au silence et éroder le rôle de la société civile. Celle-ci est en effet régulièrement accusée de mener des activités politiques, sous le couvert des droits de l'Homme. L'introduction de cette loi serait liée à la Conférence nationale constitutionnelle, et viserait à réduire au silence les ONG qui ont exprimé leurs réticences pendant le processus.2
Plusieurs dispositions du projet de loi démontrent la volonté de mise sous tutelle des ONG. Le projet prévoit ainsi "l'enregistrement et la coordination des ONG" (y compris les ONG internationales qui ont des bureaux en Zambie) et donne pouvoir au Ministre de l'Intérieur pour constituer un comité composé de 10 membres du Gouvernement et deux représentants de la société civile, tous désignés par le Gouvernement, pour discuter d'un code de conduite des ONG et harmoniser leurs activités en vue du développement de la Zambie.
Jusqu'alors, les ONG étaient enregistrées auprès du Registre des sociétés. Le Gouvernement disposait de peu de pouvoir pour s'ingérer dans les affaires des ONG et la suspension supposait une longue procédure judiciaire comme dans le cas du Centre sud africain pour le règlement constructif des différends (Southern African Centre for Constructive Resolution of Disputes – SACCORD).3 Le nouveau projet de loi impose également un réenregistrement annuel et la suspension des ONG qui ne présentent pas de rapports trimestriels.
Le 31 juillet 2007, plusieurs ONG internationales ayant des bureaux en Zambie ont envoyé une lettre conjointe au Vice président, s'inquiétant des conséquences de cette loi sur leur travail. Elles regrettaient le manque de consultation et exprimaient leur préoccupation notamment sur le manque de reconnaissance du rôle positif de la société civile, sur le pouvoir discrétionnaire accordé au Ministre de l'Intérieur et sur la désignation du Comité.4 Cette mobilisation a fait reculer le Gouvernement, qui a déféré la présentation du projet de loi. Dans un rapport publié le 4 décembre 2007, une coalition d'ONG nationales a proposé des amendements portant sur la responsabilité des relations avec les ONG qui devrait revenir au ministère du Développement communautaire et des affaires sociales, la composition du Comité chargé des ONG (quatre membres désignés par le ministère, six membres par le Congrès des ONG et un membre du registre des sociétés) ainsi que l'obligation de rapport (annuelle et non trimestrielle).5 Enfin, concernant l'accès au financement étranger comme motif de suspension, la coalition a demandé le retrait de cette disposition ou l'établissement d'une liste des pays en provenance desquels les ONG ne devraient pas accepter de financement. Ce rapport n'a pas donné lieu à des consultations et les ONG ont simplement été informées que la loi devait être présentée à nouveau lors de la session parlementaire du mois de janvier 2008.
L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).
1 Cf. document des Nations unies, CCPR/C/ZMB/CO/3/CRP.1, 19e session, 23 juillet 2007.
2 Notamment le "Oasis Forum" comprenant : L'Association juridique de Zambie (Law Association of Zambia – LAZ) ; les trois églises principales – la conférence épiscopale (Zambia Episcopal Conference), l'Église unie de Zambie (United Church of Zambia) et l'Église évangélique (Zambia Evangelical Fellowship) ; le Comité de coordination des ONG (NGO Coordinating Committee) et d'autres organisations de la société civile.
3 En 2006, le Gouvernement a suspendu l'enregistrement de SACCORD, mais la Cour suprême a par la suite ordonné sa réintégration. La procédure continue puisque cette année le Gouvernement a de nouveau suspendu son enregistrement mais, cette fois, la Cour a autorisé l'ONG à poursuivre ses activités dans l'attente d'un jugement.
4 Cf. observations et préoccupations à propos du projet de loi sur les ONG (Observations and concerns about the proposed NGO Bill 2007), Lusaka, 31 juillet 2007, soumises notamment par les ONG suivantes : Save the Children Norvège, Diakonia, Harvest Help (UK), Christian, Children Fund Inc, Groupe de lobby national des femmes, Voluntary Services Overseas (V. S. O.), Dan Church Aid, Church Aid norvégien, Société pour la féminité, Habitat pour l'humanité, KEPA (Centre de service en Zambie pour le développement et la coopération, Finlande) et MS-Zambia (Association danoise pour la coopération internationale).
5 Cf. soumission de la société civile sur le projet de loi sur les ONG, CPSR/NGOCC/ZCSD, 2007.