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Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Birmanie

Publisher International Federation for Human Rights
Author Organisation mondiale contre la torture; Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme
Publication Date 19 June 2008
Cite as International Federation for Human Rights, Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Birmanie, 19 June 2008, available at: https://www.refworld.org/docid/486e05274b.html [accessed 7 June 2023]
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Contexte politique

L'élément saillant de l'année 2007 a été sans nul doute le mouvement de protestation pacifique sans précédent depuis 1988, déclenché par la décision du Gouvernement, le 15 août 2007, d'augmenter le prix du carburant, ce en dépit d'une situation économique et sociale déjà très dégradée. Ces manifestations appelant à une amélioration du niveau de vie et à un dialogue avec le Gouvernement sur les réformes politiques, initiées à Rangoon, se sont ensuite rapidement multipliées, rassemblant des dizaines de milliers de personnes. Conduites par des moines bouddhistes, elles ont également été violemment réprimées par la police, l'armée et des membres de l'Association pour une union solidaire et le développement (Union Solidarity and Development Association – USDA), l'aile civile du Gouvernement militaire. Dans la soirée du 25 septembre 2007, les autorités ont instauré un couvre-feu et ont commencé à descendre de façon systématique dans les monastères. Plusieurs milliers de personnes auraient été arrêtées, dont des moines, des étudiants, ainsi que des membres du "Groupe des étudiants de la génération 88" (88 Generation Students) et de la Ligue nationale pour la démocratie (National League for Democracy – NLD).1

Cette répression brutale de la part des autorités birmanes a rappelé à la communauté internationale la dureté du Gouvernement militaire birman dirigé par le Conseil étatique pour la paix et le développement (State Peace and Development Council – SPDC) et a été sévèrement condamnée, notamment par Mme Louise Arbour, Haut commissaire aux droits de l'Homme,2 le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies3 et ses procédures spéciales,4 le Conseil de sécurité des Nations unies,5 le Conseil d'administration du Bureau international du travail (BIT),6 l'Association des nations de l'Asie du sud-est (Association of Southeast Asian Nations – ASEAN)7 et l'Union européenne (UE).8

En outre, la Convention nationale de Birmanie, chargée depuis 1993 d'établir les principes d'une nouvelle constitution, a achevé ses travaux le 3 septembre 2007, mais en tenant la plupart des partis politiques à l'écart de ce processus et en interdisant par la loi toute critique de la convention.

En 2007, en dépit de ce climat répressif et de la persistance de violations graves, continues et systématiques, le SPDC a, pour la première fois depuis 2003, autorisé le Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'Homme au Myanmar à effectuer une visite dans le pays, à la suite de la pression internationale sans précédent exercée sur le régime. Toutefois, depuis lors, le Rapporteur n'a pas pu y retourner, ce qui est également le cas du Conseiller spécial du Secrétaire général des Nations unies, en dépit des appels en ce sens par le Conseil de sécurité, le 14 novembre 2007 et le 17 janvier 2008.

Répression de toute activité de défense des droits de l'Homme

En Birmanie, il reste pratiquement impossible de mener des activités de défense des droits de l'Homme en raison de la forte répression dont continuent de faire l'objet les défenseurs. Par exemple, le 21 mai 2007, Mme Phyu Phyu Thin, militante luttant contre le HIV/SIDA, a été arrêtée par la police spéciale et placée en détention au centre Kyaikkasan, à Rangoon, pour avoir protesté contre le manque d'accès aux antirétroviraux dans les hôpitaux gouvernementaux, et a été questionnée sur ses activités. Libérée le 2 juillet 2007, à aucun moment les autorités lui ont signifié les raisons de sa détention.9 Par ailleurs, le 24 juillet 2007, six membres de l'association "Défenseurs et promoteurs des droits de l'Homme" (Human Rights Defenders and Promoters – HRDP), MM. Ko Myint Naing (alias Myint Hlaing), Ko Kyaw Lwin, U Hla Shien, U Mya Sein, U Win et U Myint, ont été condamnés à des peines de quatre à huit ans de prison pour "tentative de perturber l'ordre public". Le 17 avril 2007, les six hommes avaient activement participé à l'organisation d'un séminaire de formation aux droits de l'Homme.

Les dirigeants syndicaux sont eux-aussi visés par cette répression. Ainsi, le 7 septembre 2007, MM. Thurein Aung, Kyaw Kyaw, Wai Lin, Myo Min, Kyaw Win et Nyi Nyi Zaw, six défenseurs des droits du travail et des libertés syndicales, ont été reconnus coupables d'"incitation à la haine et au mépris à l'encontre du Gouvernement" et certains d'entre eux d'être membres d'"associations illégales".10 MM. Thurein Aung, Kyaw Kyaw, Wai Lin et Nyi Nyi Zaw avaient été arrêtés le 1er mai 2007 après avoir organisé une célébration de la fête du travail et projeté d'organiser des discussions sur des sujets liés au travail et aux libertés syndicales au Centre américain de l'ambassade des États Unis à Rangoon. Cet événement avait été immédiatement annulé après ces arrestations. Le 10 mai 2007, MM. Kyaw Win et Myo Min avaient été arrêtés alors qu'ils se rendaient à la frontière thaïlandaise dans le but d'informer la communauté internationale de ces arrestations. De même, le 28 novembre 2007, M. U Tin Hla, membre de la Fédération des syndicats birmans (Federation of Trade Unions of Burma – FTUB) et du Syndicat du chemin de fer birman (Burma Railway Union), a été arrêté avec sa famille, par la police spéciale, à son domicile. La police a accusé M. U Tin Hla d'avoir encouragé les cheminots à se joindre aux manifestations de septembre 2007.

En 2007, la politique en matière d'Internet et à l'encontre des cyberdissidents, ces défenseurs qui utilisent Internet pour promouvoir les droits de l'Homme et la démocratie, a également continué d'être extrêmement répressive. Les sites du Myanmar Wide Web, un Intranet national composé de sites agréés par le régime, sont ainsi les principaux – voire les seuls – auxquels les Birmans ont accès. De surcroît, lors des manifestations d'août-septembre, les connections Internet ont été très réduites, quand elles n'ont pas été complètement coupées, après que les Birmans eurent utilisé Internet afin d'envoyer des images ou des nouvelles de la violente répression des manifestations. Les cybercafés de Rangoon ont également été fermés. Par ailleurs, le 30 novembre 2007, M. Aung Gyi (aka Aung Thwin) a été arrêté dans un cybercafé à Rangoon alors qu'il envoyait des photos prises la veille des forces de sécurité délogeant de force des moines du monastère de Maggin. Depuis ces manifestations, les autorités ont cherché à imposer de nouvelles restrictions sur l'utilisation d'Internet. Les propriétaires de cybercafés auraient ainsi reçu l'ordre de copier chaque semaine les données de leurs ordinateurs et de les envoyer à la police spéciale.11

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).


1 Selon l'Association pour l'assistance aux prisonniers politiques birmans (Assistance Association for Political Prisoners in Burma – AAPPB), au 1er décembre 2007, 706 personnes restaient détenues suite aux manifestations, en plus des 1 158 prisonniers politiques qui étaient détenus avant le 5 août 2007.

2 Le 2 octobre 2007, Mme Louise Arbour a rappelé que "les protestations pacifiques des dernières semaines [...] n'étaient que les manifestations récentes de la répression des droits et libertés fondamentales qui a lieu depuis près de 20 ans en Birmanie" (Traduction non officielle).

3 Le 2 octobre 2007, le Conseil des droits de l'Homme a adopté, lors de sa cinquième session spéciale, une résolution dans laquelle il "déplore la répression violente de manifestations pacifiques en Birmanie" et "appelle le Gouvernement birman à libérer sans délai les personnes arrêtées et détenue suite à la récente répression des protestations pacifiques" (Cf. document des Nations unies A/HRC/S-5/L.1/Rev.1, 2 octobre 2007. Traduction non officielle).

4 Le 28 septembre 2007, M. Philip Alston, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Mme Asma Jahangir, Rapporteur spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, Mme Hina Jilani, Représentante spéciale du Secrétaire général sur la situation des défenseurs des droits de l'Homme, M. Ambeyi Ligabo, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, M. Manfred Nowak, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Paulo Sérgio Pinheiro, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'Homme au Myanmar, et Mme Leila Zerrougui, Présidente-rapporteure du Groupe de travail sur la détention arbitraire, se sont dits "gravement préoccupés par le nombre croissant de morts et de blessés graves parmi les manifestants, dont des moines et des passants" (Cf. communiqué de presse des Nations unies, 28 septembre 2007. Traduction non officielle).

5 Le 11 octobre 2007, le Conseil de sécurité a ainsi "déplor[é] vivement l'utilisation de la violence contre des manifestations pacifiques" et "soulign[é] l'importance de la libération rapide de tous les prisonniers politiques et des autres détenus" (Cf. communiqué des Nations unies CS/9139, 11 octobre 2007).

6 Le Conseil d'administration a ainsi "exprimé sa profonde inquiétude devant la répression exercée par le gouvernement en réponse aux récentes contestations pacifiques" et "a noté avec un profond regret que des personnes exerçant leur droit fondamental à la liberté d'association et à la liberté d'expression qui en découle ont été emprisonnées", "[invitant] le Gouvernement à libérer immédiatement ces personnes" (Cf. 300e session du Conseil d'administration du BIT, Conclusions concernant le Myanmar, novembre 2007, GB.300/8 (& Add.)).

7 Les Ministres des Affaires étrangères de l'ASEAN ont ainsi prié le Gouvernement birman "de cesser de faire usage de la violence contre les manifestants" et ont dit leur "répugnance" après avoir été informés que les manifestations ont été réprimées par la force (Cf. déclaration du président de l'ASEAN, 27 septembre 2007. Traduction non officielle).

8 Cf. déclaration de la présidence de l'UE du 28 août 2007 et résolutions du Parlement européen des 6 et 27 septembre 2007 sur la Birmanie, P6_TA(2007)0384 et P6_TA(2007)0420.

9 Cf. AAPPB, juillet 2007.

10 MM. Thurein Aung, Wai Lin, Myo Min et Kyaw Win ont été condamnés à 28 ans d'emprisonnement, et MM. Nyi Nyi Zaw et Kyaw Kyaw à 20 ans.

11 Cf. Campagne américaine pour la Birmanie (US Campaign for Burma).

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