CRR, 22 septembre 1993, 254 999, M Aziz Nissan Zuheir
Publisher | France: Commission des Recours des Réfugiés (CRR) |
Publication Date | 22 September 1993 |
Citation / Document Symbol | 254999 |
Cite as | CRR, 22 septembre 1993, 254 999, M Aziz Nissan Zuheir, 254999, France: Commission des Recours des Réfugiés (CRR), 22 September 1993, available at: https://www.refworld.org/cases,FRA_CRR,3ae6b6bbb.html [accessed 19 May 2023] |
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COMMISSION DES RECOURS DES REFUGIES
demeurant |
CADA |
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2, rue Roger Thieblemont |
|
10600 LA CHAPELLE SAINT LUC |
ledit recours
enregistré le 22 septembre 1993
au secrétariat de la Commission des Recours des Réfugiés et tendant à l'annulation de la décision par laquelle le directeur de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (O.F.P.R.A)
a rejeté le 25 août 1993 sa demande d'admission au statut de réfugié;
Par les moyens suivants:
Le requérant, natif de Zakho dans le Nord de l'Irak, d'origine assyro-chaldéenne et de confession catholique, a refusé d'adhérer à l'Union des étudiants baasistes et a rejoint, en 1970, les rangs des peshmergas kurdes; fuyant l'insécurité, l'intéressé et sa famille se sont installés, en 1972, à Bagdad où il a été appelé pour effectuer son service militaire; en raison de ses antécédents politiques, il a été envoyé sur le front kurde et menacé de mort par son commandant, il a alors déserté le 15 mai 1974 et a trouvé refuge auprès des peshmergas; apprenant que sa famille était victime de représailles, il s'est rendu aux autorités et a été incarcéré pendant six mois à la prison militaire de Bagdad; en mars 1980, à la suite d'un attentat perpétré dans un cinéma de Bagdad, il a été gardé à vue pendant quarante-huit jours; envoyé en première ligne sur le front irano-irakien en août 1981, il a été détenu pendant deux mois puis condamné à mort pour avoir tenté de fuir les combats à Amara, avant de bénéficier d'une amnistie; en janvier 1986, sa famille qui était sans cesse convoquée, interrogée et menacée par les autorités a regagné la région de Zakho; de nouveau mobilisé en août 1990, à l'occasion de la guerre du Golfe, il a été placé en première ligne dans le but avoué qu'il soit exposé aux tirs des forces alliées occidentales; de retour à Zakho en mai 1992, il a été accusé de trahison par les autorités locales après avoir refusé de former les soldats de l'armée kurde, par ailleurs, des informateurs du régime irakien, auxquels il avait refusé sa collaboration, l'ont dénoncé ce qui lui a valu d'être appréhendé et maltraité par des inconnus armés; craignant alors sérieusement pour sa sécurité et celle des siens, notamment à la suite de l'assassinat de plusieurs assyro-chaidéens, il a fui son pays avec sa famille;
Vu la décision attaquée;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 28 septembre 1993,
le dossier de la demande d'admission au statut de réfugié présentée par l'intéressé au directeur de l'O.F.P.R.A., communiqué par celui-ci sans observations;
Considérant que les pièces du dossier et les déclarations faites en séance publique devant la Commission permettent de tenir pour établi que M. AZIZ NISSAN Zuheir, qui est de nationalité irakienne, d'origine assyro-chaldéenne et de confession catholique, a refusé d'adhérer à l'Union des étudiants baasistes et a rejoint, en 1970, les rangs des peshmergas kurdes; qu'en raison de ses antécédents politiques, il a été envoyé, au cours de son service militaire, sur le front kurde; M qu'il a alors déserté, rejoint les peshmergas mais s'est finalement rendu aux autorités en raison des représailles que celles-ci exerçaient contre sa famille; qu'il a été incarcéré pendant six mois à la prison militaire de Bagdad; qu'à la suite d'un attentat commis en 1980 à Bagdad, il a été affecté dans des unités engagées en première ligne dans les guerres livrées par l'Irak contre l'Iran puis le Kowelil, n'échappant en 1985 à une exécution capitale, en raison de sa fuite devant l'ennemi que par l'effet d'une loi d'amnistie; que la paix revenue, les suspicions dont il demeurait l'objet en raison de son origine ethnique, de sa religion et de son passé militaire, ne lui permettant plus de séjourner en sécurité à Bagdad, il s'est replié en mai 1992 à Zakho où les siens avaient conservé leurs attaches; que malgré son refus notoire d'apporter son assistance à la constitution de milices kurdes, il n'a cessé d'être surveillé et menacé par des informateurs des autorités irakiennes infiltrés dans la région, qu'il a pris peur pour lui-même et pour les siens et a décidé alors de fuir le pays avec eux; que, dans les circonstances de l'espèce, le requérant doit être regardé comme craignant avec raison d'être persécuté au sens des stipulations précitées de la Convention de Genève en cas de retour dans son pays d'origine; que, dès lors, il est fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié:
DECIDE
ARTICLE 1er : La décision du directeur de l'O.F.P.R.A. en date du 25 août 1993 est annulée.
ARTICLE 2 : La qualité de réfugié est reconnue à M. AZIZ NISSAN Zuheir
ARTICLE 3 : La présente décision sera notifiée à M. AZIZ NISSAN Zuheir et au directeur de l'O.F.P.R.A.
Délibéré dans la séance du 25 novembre 1994 où siégeaient:
M. VIDEAU, Conseiller d'Etat honoraire, Président MM GIBERT, PERRET, Conseillers d'Etat Honoraires;
MM. GUIGNABAUDET, ALLAND, THOUVENIN, Représentant du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés;
MM. LEFEUVRE, BUCCO-RISOULAT, PIOT, Représentants du Conseil de l'O.F.P.R.A.
Lu en séance publique le 16 janvier 1995
Le Président: D. VIDEAU
Le Secrétaire Général de la Commission des Recours des Réfugiés: C. JOUHANNAUD
POUR EXPEDITION CONFORME: C. JOUHANNAUD
La présente décision est susceptible d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat qui, pour être recevable, doit être présenté par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la cour de Cassation. Il doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Aucune autre voie de recours n'est ouverte contre les décisions de la Commission des Recours des Réfugiés devant d'autres juridictions.