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Turquie : information sur le traitement que réservent la société et les autorités gouvernementales aux alévis; les mesures prises par l'État en cas de mauvais traitements (2008-mai 2012)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 1 June 2012
Citation / Document Symbol TUR104076.EF
Related Document(s) Turkey: Treatment of Alevis by society and government authorities; state response to mistreatment (2008-May 2012)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Turquie : information sur le traitement que réservent la société et les autorités gouvernementales aux alévis; les mesures prises par l'État en cas de mauvais traitements (2008-mai 2012), 1 June 2012, TUR104076.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/4fead9fb2.html [accessed 4 June 2023]
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D'après la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse dans le monde (United States Commission on International Religious Freedom), les croyances et les pratiques des alévis font l'objet d'un débat au sein de leur groupe ainsi qu'au sein de l'Islam (É.-U. mars 2012, 207). Dans un article paru dans la revue Insight Turkey, le conseiller ministériel et coordonnateur de l'Initiative alévie (Alevi Initiative) a souligné qu'en tant que groupe, les alévis n'ont pas de [traduction] « discours unifié » et ils ne s'entendent pas entre eux sur la question de savoir si l'alévisme est une [traduction] « religion, une culture, une ethnicité ou une structure ethno-religieuse » (Subasi 2010, 169). Selon un article paru dans la revue spécialisée Peace and Conflict, il existe une [traduction] « grande variété de croyances et de pratiques parmi les personnes qui se désignent elles-mêmes comme des alévis » (Yildiz et Verkuyten 2011, 247).

L'alévisme est une secte au sein de l'islam qui allie des aspects de l'islam chiite et du soufisme islamique (Yildiz et Verkuyten 2011, 244; É.-U. 2 févr. 2012, 11; Today's Zaman 29 janv. 2012). Dans l'International Religious Freedom Report for 2010 des États-Unis, on peut lire que l'alévisme comporte des aspects de l'islam sunnite et chiite (É.-U. 13 sept. 2011, sect. 1). La Commission des États-Unis sur la liberté religieuse dans le monde souligne que le gouvernement de la Turquie qualifie les alévis de musulmans hétérodoxes (É.-U. mars 2012, 207). Dans la revue South European Society and Politics, deux universitaires ont écrit que la culture et le style de vie des alévis étaient plus profanes que ceux du groupe sunnite dominant et qu'il y avait des [traduction] « contrastes saisissants » en théologie et en pratique religieuse entre ces deux groupes (Carkoglu et Bilgili juin 2011, 352, 353). Dans un article sur l'alévisme et la politique en Turquie paru dans le Turkish Studies, des universitaires ont écrit que les alévis ne se considéraient pas comme des sunnites (Soner et Toktas sept. 2011, 425). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches le 25 mai 2012, un chercheur en études turques et culturelles de l'université de Chypre à Nicosie, à Chypre, a écrit que, parce qu'ils estiment que la religion alévie est une sorte [traduction] « [d'] athéisme », les sunnites conservateurs n'acceptent pas les alévis. Dans un rapport de recherche du Service de recherche du Congrès (Congressional Research Service) des États-Unis, on peut lire que les alévis estiment que la laïcité de la Turquie est une sorte de protection à l'égard de la majorité sunnite (É.-U. 2 févr. 2011, 11). Historiquement, il y a eu de nombreux affrontements sectaires entre les alévis et les sunnites (Soner et Toktas sept. 2011, 422). D'après le chercheur en études turques, le [traduction] « conflit historique entre les alévis et les sunnites est encore très déterminant dans la relation entre ces groupes » (chercheur 25 mai 2012).

Les estimations de la taille de la population alévie en Turquie varient, allant de 6 millions (Today's Zaman 29 janv. 2012), à 10 et 20 millions (É.-U. 2 févr. 2012, 11), voire jusqu'à 15 à 20 millions d'habitants (Freedom House 2011, 9). Dans l'article du Peace and Conflict, des universitaires ont écrit que la majorité des alévis vivaient en Anatolie (Yildiz et Verkuyten 2011, 244). Dans un article du Today's Zaman, journal turc de langue anglaise, on peut lire que l'alévisme est pratiqué notamment dans les régions suivantes : Elazig, Nevsehir, Malatya, Maras, Sivas et Yozgat (3 nov. 2011). Dans un rapport de recherche de 2009 rédigé par l'université du Bosphore et la Fondation pour une société ouverte (Open Society Foundation) en Turquie, on peut lire que les endroits suivants comptent une forte population alévie : Erzurum, Kayseri, Malatya et Sivas (Toprak 2009, 41).

Plusieurs sources soulignent que les alévis font, depuis toujours, l'objet de discrimination (Subasi 2010, 167; Soner et Toktas sept. 2011, 425; Yildiz et Verkuyten 2011, 245). D'après l'article publié par le Turkish Studies, historiquement, la majorité sunnite a été responsable de la répression de la minorité alévie et continue de l'être (Soner et Toktas sept. 2011, 425; Toprak 2009, 41).

D'après le rapport de Freedom House intitulé Countries at the Crossroads 2011, les alévis signalent [traduction] « des pratiques de discrimination et d'incertitude administrative » (2011, 9). La communauté alévie fait face à de la [traduction] « discrimination juridique et à une politique d'assimilation » (Yildiz et Verkuyten 2011, 246). Par exemple, dans un rapport sur les élections législatives de 2011 en Turquie, le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a souligné que des membres d'associations alévies ont affirmé qu'au cours de la campagne électorale de 2011, leurs croyances religieuses avaient été présentées comme étant [traduction] « inférieures » et que le fait que certains des candidats étaient alévis avait été utilisé contre eux (OSCE 31 oct. 2011, 24).

2. Traitement réservé par la société

Minority Rights Group International (MRG) souligne que les alévis [traduction] « continuent d'être victimes de discrimination à de nombreux égards » ([2010]). On peut également lire dans le rapport des États-Unis sur la liberté religieuse que les alévis font partie des minorités religieuses qui sont victimes d'abus sociétaux et de discrimination (É.-U. 13 sept. 2011). D'après une étude de 2010 appuyée par l'Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme, [traduction] « trois alévis sur quatre ont affirmé avoir été victimes de discrimination au moins une fois au cours de la dernière année, par exemple dans la rue ou relativement au logement ou à la recherche d'un emploi » (Yildiz et Verkuyten 2011, 246). Le chercheur en études turques a souligné que les alévis continuaient de faire l'objet de [traduction] « harcèlement verbal (écrit et de vive voix) » (chercheur 25 mai 2012).

Le chercheur a expliqué que les alévis ne sont généralement [traduction] « pas acceptés dans la société turque » et a ajouté que les musulmans conservateurs considéraient que les alévis faisaient preuve de [traduction] « négligence » autant sur le plan physique que dans leur « comportement moral » (25 mai 2012). De même, dans le rapport de recherche de 2009 rédigé par l'université du Bosphore et la Fondation pour une société ouverte en Turquie, on peut lire, à propos de la discrimination dont font l'objet les alévis en Anatolie, que de nombreuses personnes estiment que les alévis sont [traduction] « malpropres » (Toprak 2009, 44). Ce même rapport contient des exemples où des sunnites ont refusé de la nourriture offerte par des alévis ou de la viande dépecée par un alévi (ibid., 43). Certaines personnes considèrent que les alévis ne sont [traduction] « pas fiables », et de nombreux alévis se plaignent d'être « tenus responsables chaque fois qu'un incident désagréable ou troublant survient dans leur ville » (ibid., 45).

Le rapport de recherche de l'université du Bosphore contient également des exemples de cas où des employés du secteur public et des représentants du gouvernement ont causé des préjudices aux alévis par leurs paroles ou par leurs gestes, par exemple en bénissant un chantier de construction alévi avec des prières sunnites ou en ignorant des demandes visant à remettre des routes en état dans des secteurs habités par des alévis (Toprak 2009, 47, 48). Dans ce rapport, il est également souligné que, même lorsque les alévis adoptent certaines coutumes sunnites afin d'améliorer leurs relations avec la communauté sunnite, comme jeûner pour le ramadan, porter un voile ou fréquenter la mosquée, ils font tout de même l'objet de [traduction] « discrimination » (ibid., 49). Il est également signalé que les alévis sont souvent sans emploi et qu'ils ont de la difficulté à trouver un emploi, tant dans le secteur public que privé, en raison de leur identité (ibid., 50-52). Selon le rapport de recherche de l'université du Bosphore, de nombreux alévis ne dévoilent pas leur identité alévie en public; toutefois, certains noms et lieux de naissance peuvent indiquer qu'ils sont alévis. Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement allant dans le même sens que ceux présentés ci-dessus.

3. Incidents à l'égard des alévis

Selon le Today's Zaman, un autobus transportant un groupe d'alévis qui se dirigeait vers le district de Pazarcik, dans la province de Kahramanmaras, afin de commémorer le massacre survenu à Maras en 1978 au cours duquel 111 alévis ont été tués et des milliers d'autres, blessés, a été arrêté par la gendarmerie (25 déc. 2011). Le ministre de l'Intérieur aurait intercepté ce groupe parce que leur présence pouvait créer une [traduction] « tension » dans la ville (Today's Zaman 25 déc. 2011). Cet incident a donné lieu à des affrontements entre les manifestants et les gendarmes; certains manifestants ont été mis en détention et ont par la suite été relâchés, tandis que les autres ont renoncé à se rendre à Kahramanmaras (Today's Zaman 25 déc. 2011). Cette même source souligne qu'en 2010, un groupe sunnite [traduction] « ultranationaliste » a interrompu la commémoration du massacre par les alévis et que la police a dû intervenir dans plusieurs échauffourées (ibid.). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun renseignement allant dans ce même sens au sujet de ces incidents.

3.1 Vandalisme contre des maisons d'alévis

Des médias turcs font état de plusieurs cas en 2012 où des maisons appartenant à des alévis ont été endommagées (Hurriyet Daily News 8 mai 2012; Today's Zaman 1er avr. 2012). Selon le Hurriyet Daily News, en mai 2012, des croix ont été peintes et le message [traduction] « à mort les alévis » a été inscrit sur deux maisons d'alévis situées à Didim, lieu de villégiature de la région égéenne (8 mai 2012). Selon cette même source, des incidents similaires ont eu lieu à Adiyaman, à Erzincan et à Istanbul (Hurriyet Daily News 8 mai 2012). D'après le Today's Zaman, des maisons d'alévis ont été endommagées dans les provinces d'Adiyaman, de Gaziantep, d'Izmir et d'Erzincan (1er avr. 2012).

Des médias soulignent qu'à la fin de février 2012, des inscriptions ont été peintes sur 45 maisons d'alévis dans les quartiers de Yenimahalle et de Karapinat dans la province d'Adiyaman (Today's Zaman 1er avr. 2012; Hurriyet Daily News 29 mars 2012). Des inscriptions semblables avaient été utilisées juste avant le massacre des alévis qui a eu lieu à Maras en 1978 (ibid.; Today's Zaman 9 mars 2012) et avant les affrontements à Çorum en 1980 (ibid.). Ces inscriptions auraient suscité chez les résidants la peur d'être [traduction] « agressés » (Hurriyet Daily News 4 mars 2012). De même, dans le Today's Zaman, on souligne que ces inscriptions ont fait craindre des actes de [traduction] « violence » potentiels (9 mars 2012). Le ministre de l'Intérieur a affirmé que des enfants étaient responsables de ces inscriptions (Today's Zaman 11 mars 2012; Hurriyet Daily News 2 mars 2012); la police en est arrivé à cette conclusion en raison de la hauteur à laquelle les inscriptions ont été peintes (ibid.). D'après le Today's Zaman, au début mars 2012, des inscriptions en rouge ont été faites sur environ 200 maisons d'alévis de la province d'Adiyaman (11 mars 2012). Un expert en sécurité a souligné que des inscriptions similaires ont été constatées dans la ville de Hatay en février 2012, mais qu'elles n'ont pas été signalées par les médias (Today's Zaman 11 mars 2012).

On peut lire dans le Today's Zaman que, dans le village d'Avcilar, situé dans la province d'Erzincan, des [traduction] « inscriptions à caractère haineux » ont été peintes sur les murs de maisons d'alévis (1er avr. 2012). Dans cet article, il est précisé que des messages ont également été peints sur des maisons dans les quartiers de Kibris, d'Onur et d'Ulas à Gaziantep (Today's Zaman 1er avr. 2012).

4. Traitement réservé par les autorités gouvernementales

D'après le rapport de 2011de l'OSCE, la communauté religieuse alévie n'est pas [traduction] « officiellement reconnue » par la Turquie (31 oct. 2011, 24). Le gouvernement de la Turquie a interprété le Traité de Lausanne de 1923 comme accordant le statut de minorité officiel à trois groupes non musulmans, à l'exclusion des alévis (É.-U. 13 sept. 2011, sect. 2; chercheur 25 mai 2012). D'après l'article paru dans le Turkish Studies, les alévis ont [traduction] « rejeté » l'étiquette de « minorité », mais demandent à bénéficier des mêmes droits et libertés que les groupes minoritaires reconnus (Soner et Toktas sept. 2011, 419).

Toutefois, dans l'article de la revue Insight Turkey, le conseiller ministériel a écrit que le gouvernement de la Turquie avait souligné à diverses occasions qu'il était nécessaire de prendre des mesures visant à [traduction] « mettre fin aux actes de discrimination dont la communauté alévie est victime » (Subasi 2010, 165, 166). Dans le Today's Zaman, il est souligné que

[traduction]

les dirigeants de l'État ont cherché à avoir des relations plus amicales avec les dirigeants alévis et ont effectué de nombreuses visites dans des cemevis [lieux de cultes alévis]; en 2009, le président Abdullah Gul a notamment fait une visite historique dans un cemevi situé à Tunceli, une ville principalement habitée par des alévis. En 2011, le gouvernement a pris la démarche audacieuse de présenter des excuses officielles relativement au massacre de Dersim qui a eu lieu en 1937; il reconnaissait alors que le gouvernement avait tué des milliers de membres de la tribu alévie dans le sud-est de la ville de Dersim (13 mai 2012).

Cependant, le chercheur en études turques a souligné que, malgré le fait que des discussions concernant les droits des alévis, tant à titre de communauté qu'à titre individuel, aient eu lieu, les autorités, dont les gouvernements locaux et national ainsi que la police, [traduction] « ne sont toujours pas prêtes à défendre les droits [des alévis] ni à punir les violations de ces droits » (chercheur 25 mai 2012).

4.1 Initiative d'ouverture envers les alévis

Dans l'article du Turkish Studies, on peut lire qu'après son arrivée au pouvoir en 2007, le Parti de la justice et du développement (Adalet ve Kalkınma Partisi - AKP) a entamé un dialogue avec la communauté alévie appelé [traduction] « "initiative d'ouverture envers les alévis", [qui est] toujours en cours » (Soner et Toktas sept. 2011, 420).

Le conseiller ministériel souligne que le gouvernement de l'AKP a organisé une série d'ateliers entre le gouvernement et les intervenants alévis dans le cadre de l'initiative d'ouverture envers les alévis (Subasi 2010, 165). D'après l'article publié dans le Turkish Studies, l'objectif des sept ateliers, qui ont eu lieu entre juin 2009 et janvier 2010, était de déterminer des paramètres politiques afin de répondre aux besoins des alévis (Soner et Toktas sept. 2011, 429, 430).

D'après certaines sources, les questions suivantes ont fait l'objet de discussions au cours de ces ateliers : la légalisation des cemevis (É.-U. mars 2012, 207, 208; Hurriyet Daily News 16 janv. 2011); l'abolition de l'éducation religieuse obligatoire (É.-U. mars 2012, 207, 208; MRG [2010]); l'arrêt de la construction de mosquées sunnites hanafites dans les villages d'alévis (É.-U. mars 2012, 207, 208); la restitution des propriétés d'alévis confisquées en vertu d'une loi en 1925 (É.-U. mars 2012, 207, 208); l'élimination des politiques [traduction] « [d'] assimilation » (Hurriyet Daily News 16 janv. 2011). En mars 2011, on pouvait lire dans le Hurriyet Daily News qu'au cours d'une réunion avec la commission parlementaire visant à élaborer la nouvelle constitution turque, des représentants alévis ont demandé que le nouveau document comprenne une protection pour les alévis contre les [traduction] « crimes haineux » et que l'identité alévie y soit reconnue (Hurriyet Daily News 6 mars 2012). D'après cette même source, les représentants alévis ont également sollicité la légalisation des cemevis (ibid.).

Des sources précisent que les ateliers n'ont pas mené à des décisions [traduction] « concrètes » (MRG [2010]; Hurriyet Daily News 16 janv. 2011). Par exemple, la demande présentée par les alévis visant à ce que leurs enfants soient exemptés des cours de religion obligatoires axés sur les enseignements islamiques sunnites a été rejetée (MRG [2010]). Dans le Turkish Studies, les deux universitaires ont écrit [traduction] « [qu'] il restait encore beaucoup à faire pour que les alévis puissent bénéficier du même statut juridique, politique et social que les citoyens sunnites » (Soner et Toktas sept. 2011, 431). De même, le chercheur en études turques a affirmé que le gouvernement de la Turquie n'avait pris aucune mesure juridique afin de défendre les alévis (25 mai 2012).

Certains groupes alévis considéreraient que l'initiative d'ouverture envers les alévis constitue de la [traduction] « "manipulation" » politique et ont accusé les alévis qui sont en faveur de cette initiative de s'aligner sur le gouvernement (Subasi 2010, 173). Le Hurriyet Daily News cite le chef d'une organisation alévie importante qui a dit que le gouvernement [traduction] « tentait d'anéantir les traditions alévies avec son "initiative à l'égard des alévis" » (Hurriyet Daily News 16 janv. 2011). Certains alévis auraient également déploré le fait que ces discussions [traduction] « n'incluaient que des groupes communautaires qui collaborent étroitement avec le gouvernement » (É.-U. mars 2012, 207, 208).

Selon l'article du South European Society and Politics, les démarches entreprises par l'AKP afin de répondre à certains besoins de la communauté alévie [traduction] « n'ont pas été appuyées uniformément par les groupes alévis » et « en raison de la multiplicité des voix de la part des deux parties, il a été plus difficile pour l'AKP » de répondre à ces besoins (Carkoglu et Bilgili juin 2011, 360).

4.1.1 Cemevis

En Turquie, les cemevis ne sont pas juridiquement reconnus comme des lieux de culte, et le gouvernement les considère comme des [traduction] « centres culturels » (Freedom House 2011, 9; É.-U. mars 2012, 207, 208). D'après la Commission des États-Unis sur la liberté religieuse dans le monde, en novembre 2011, une cour d'Ankara a conclu que les cemevis pouvaient être publiquement appelés des lieux de culte, mais aucun statut juridique ne leur a été accordé (É.-U. mars 2012, 208). Toutefois, dans l'article de South European Society and Politics, on peut lire qu'en 2008, Kusadasi et Didim, des districts de la province d'Aydin, ainsi que la ville de Tunceli, située dans l'est d'Anatolie, ont officiellement reconnu les cemevis comme des lieux de culte; en 2009, la province d'Antalya a rendu la même décision (Carkoglu et Bilgili juin 2011, 356, 357). D'après l'agence de presse Forum 18, source d'information en ligne d'Oslo, en 2011, les autorités gouvernementales ont entamé des procédures en justice visant à faire fermer l'Association de construction de cemevis de Çankaya (Cankaya Cemevi Building Association), soutenant que, selon sa description, il s'agissait d'un lieu de culte (2 mars 2011). Le Today's Zaman signale que le 16e tribunal de première instance d'Ankara a rendu une décision défavorable dans cette affaire le 4 octobre 2011, soulignant que les cemevis étaient socialement acceptés comme des lieux de culte (2 nov. 2011). Selon les avocats cités dans l'article, cette décision a établi un précédent grâce auquel les cemevis sont considérés au sens de la loi comme des lieux de culte (Today's Zaman 2 nov. 2011). Des sources signalent qu'en janvier 2012, la Fondation Cem (Cem Foundation), organisation alévie, a déposé une requête auprès de la Cour européenne des droits de l'homme visant à faire reconnaître juridiquement les cemevis comme des lieux de culte (É.-U. mars 2012, 208; Today's Zaman 29 janv. 2012).

Plusieurs sources soulignent que les alévis se heurtent à des [traduction] « obstacles » lorsqu'ils tentent d'établir des cemevis (Freedom House 2011, 9; Carkoglu et Bilgili juin 2011, 356; É.-U.13 sept. 2011, sect. 2). Dans un article publié par l'Institut Hudson (Hudson Institute), on peut lire que le gouvernement a refusé des permis pour la construction de cemevis (26 août 2011). Le Today's Zaman signale que, parce que les alévis n'ont pas de statut officiel, ils n'ont [traduction] « pas accès au financement de l'État pour la construction de […] cemevis […] ni aux indemnisations relatives aux dépenses requises pour les gérer » (Today's Zaman 13 mai 2012). Dans l'article de Turkish Studies, on peut lire que certaines municipalités en Turquie ont permis la construction et l'exploitation de cemevis (Soner et Toktas sept. 2011, 423).

D'après le Today's Zaman, en 2011, une décision prise par le conseil de la ville d'Izmir visant le financement d'un cemevi a fait l'objet d'un véto de la part du gouverneur (6 janv. 2012). En janvier 2012, l'assemblée locale de Mersin a décidé de payer pour l'exploitation des cemevis locaux, décision qui a ensuite fait l'objet d'un véto de la part du gouverneur (É.-U. mars 2012, 208; Hurriyet Daily News 12 janv. 2012). En avril 2012, dans le district de Sirrin, le bureau du gouverneur de Sanliurfa a approuvé la construction d'un cemevi et a fourni un soutien financier (Today's Zaman 13 mai 2012).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Références

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Autres sources consultées

Sources orales : Un professeur en anthropologie des cultures et des sociétés de la University of Utrecht n'a pas été en mesure de fournir des renseignements. L'Alevi Institute à Ankara ainsi qu'un chercheur au European Research Centre on Migration and Ethnic Relations de la Utrecht University n'ont pas répondu dans les délais voulus.

Sites Internet, y compris : Amnesty International; Avrupa Alevi Birlikleri Konfederasyonu; ecoi.net; Factiva; Human Rights Watch; Nations Unies — Réseaux d'information régionaux intégrés, Refworld.

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