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Ghana : la democratie constitutionnelle et la quatrieme republique

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Author Research Directorate, Immigration and Refugee Board, Canada
Publication Date 1 October 1992
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Ghana : la democratie constitutionnelle et la quatrieme republique, 1 October 1992, available at: https://www.refworld.org/docid/3ae6a83b0.html [accessed 29 May 2023]
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GLOSSAIRE

ADF-      Alliance of Democratic Forces of Ghana [Alliance des forces démocratiques du Ghana]

CDO-      Civil Defense Organization [Organisation de la protection civile]

CDR-      Committee for the Defense of the Revolution [Comité de défense de la révolution]

CPP-       Convention People's Party [Parti populaire de la Convention]

CVC-       Citizens' Vetting Committee [Comité de contrôle des citoyens]

GBA-      Ghana Bar Association [Association du Barreau du Ghana]

INEC-     Interim National Electoral Commission [Commission électorale nationale provisoire]

MFJ-       Movement for Freedom and Justice [Mouvement pour la liberté et la justice]

NIC-        National Investigations Committee [Comité national des enquêtes]

NCD-      National Commission for Democracy [Commission nationale pour la démocratie]

NCP-       National Convention Party [Parti national de la Convention]

NDC-      National Democratic Congress [Congrès démocratique national]

NGA-      New Generation Alliance [Alliance de la nouvelle génération]

NIP-        New Independence Party [Nouveau parti de l'indépendance]

NPP-       New Patriotic Party [Nouveau parti patriotique]

PDC-       People's Defense Committee [Comité de défense populaire]

PHP-       People's Heritage Party [Parti du patrimoine populaire]

PNC-       People's National Convention [Convention nationale populaire]

PNDC-    Provisional National Defense Council [Conseil provisoire de la Défense nationale]

PNP-       People's National Party [Parti national populaire]

PP-          Progress Party [Parti du progrès]

PPDD-    Popular Party for Democracy and Development [Parti populaire pour la démocratie et le développement]

UP-         United Party [Parti uni]

WDC-     Workers' Defense Committee [Comité de défense des travailleurs]

1.               INTRODUCTION

Le Ghana, première colonie britannique de l'Afrique sub-saharienne à avoir accédé à l'indépendance (le 6 mars 1957) sous un régime majoritaire (Europa 1991 1991, 1188), a connu par intermittence un certain nombre de coups d'Etat et de régimes militaires, ainsi que des gouvernements élus démocratiquement. Après plus de dix ans de régime militaire sous la direction du Provisional National Defense Council (PNDC) [Conseil provisoire de la Défense nationale], le pays tiendra des élections présidentielles et parlementaires en novembre et en décembre 1992. Le capitaine de l'armée de l'air Jerry John Rawlings, qui préside le PNDC depuis le coup d'Etat de 1981, subit depuis quelque temps maintenant des pressions pour réformer le système politique. Divers groupes au Ghana exigent un retour au pluripartisme politique, tandis que les pays occidentaux fournissant de l'aide subordonnent de plus en plus leurs engagements financiers à la protection des droits de la personne (New African sept. 1990, 22). Le système juridique du gouvernement et la réputation qu'a ce dernier de pratiquer des emprisonnements politiques ont aussi mené à des demandes, tant à l'intérieur du pays qu'à l'étranger, en faveur de l'abrogation d'un certain nombre de lois répressives et de la réorganisation de l'appareil judiciaire (Amnesty International 18 déc. 1991; Africa Watch 31 janv. 1992). On signale de plus, dans Africa Confidential, que « les réformes entreprises dans d'autres Etats africains semblent avoir influencé la décision du gouvernment de revenir à un régime constitutionnel » (13 sept. 1991, 6).

L'interdiction des partis politiques étant aujourd'hui levée, les divers partis qui apparaissent sur l'échiquier politique se préparent tant bien que mal aux prochaines élections. Rawlings a aussi annoncé récemment qu'il se présentera comme candidat à l'élection présidentielle (Ambassade du Ghana 2 oct. 1992).

2. CONTEXTE

2.1               Les comités révolutionnaires et la CDO

Cherchant à légitimer la « révolution » du 31 décembre 1981, Rawlings, fidèle à ses visées populistes, a rapidement tenté de gagner l'appui des classes inférieures de plus en plus puissantes en les intégrant dans une nouvelle structure étatique (Ninsin 1991, 50-51). Les People's Defense Committees (PDC) [comités de défense populaire] et les Workers' Defense Committees (WDC) [comités de défense des travailleurs] ont été constitués aux « niveaux de la communauté, des lieux de travail, au niveau des districts et aux niveaux régionaux et centraux », en réponse à l'appel de Rawlings pour que l'on forme des comités de défense de la révolution (Current History 1989, 223). La justice populaire devait être exercée par l'entremise des PDC et des WDC, ainsi que par l'intermédiaire d'organismes extrajudiciaires nouvellement créés, comme les Citizens' Vetting Committees (CVC) [comités de contrôle des citoyens], le National Investigations Committee (NIC) [Comité national des enquêtes] et les tribunaux militaires spéciaux (ibid.). (Pour plus de renseignements sur ces organismes et le secteur judiciaire, veuillez consulter deux publications antérieures du CDCISR : Ghana: profil de pays [janvier 1990] et Les comités de défense de la révolution (CDR) et le Conseil d'organisation de la protection civile (CDO) ou « Civil Defense Organization » au Ghana [novembre 1990].)

Face aux critiques de plus en plus nombreuses de la part de la population à l'égard de leur corruption, de leurs mesures coercitives et du fait qu'ils n'avaient pas à répondre de leurs actes, les comités de défense ont été rebaptisés, en décembre 1984, « Committees for the Defense of the Revolution (CDR) » [comités de défense de la révolution] et placés sous l'autorité des conseils régionaux et de district du PNDC (Kraus 1991, 125-126; Legum 1986, B455). Même si l'on a censément réorganisé les comités de défense et qu'on leur a confié un mandat principalement économique (Current History mai 1989, 241), l'efficacité du processus de dépolitisation suscite encore de sérieux doutes. Divers dirigeants du PNDC ont demandé aux CDR de faire preuve de retenue durant la transition au régime constitutionnel; cependant, en 1991, on a continué d'accuser les CDR de s'immiscer dans des questions privées et tribales (Country Reports 1991 1992, 152). Dans une déclaration datée du 19 juin 1991, la Ghana Bar Association (GBA) [Association du Barreau du Ghana] soutient que les CDR demeurent « les organes politiques directs du PNDC, expressément créés pour défendre et promouvoir les intérêts [du gouvernement] »(1).

En 1984, Rawlings a aussi établi le premier groupe de cadres politiques armés et entraînés appelé Civil Defense Organization (CDO) [Organisation de la protection civile] (Legum 1986, B455-456; ibid., 1988, B31-32). Cet organisme paramilitaire, qui s'est vu confier un mandat partiellement socio-économique, est l'auteur d'un certain nombre d'abus depuis sa constitution. En 1988, suite à la réaction de la population face à sa corruption et à l'usage excessif qu'il faisait de la force, l'organisme était, dit-on, en voie de réorganisation et se distanciait de ses activités paramilitaires (West Africa 9-15 janv. 1989, 22).

Malgré la réorganisation signalée, les abus se sont poursuivis. En 1989, Alex Antwi, commandant de la CDO, a fait allusion au fait que des membres de la milice établissaient des tribunaux et imposaient des amendes. Il a déclaré que la CDO ne jouit pas de tels droits et qu'il « regrettait qu'un tel comportement ternissait l'image de la CDO » (West Africa 17-23 avr. 1989, 621). Le Movement for Freedom and Justice (MFJ) [Mouvement pour la liberté et la justice], un organisme non politique constitué en 1990 pour faire campagne en faveur de la démocratie et des droits démocratiques et de la personne au Ghana (ibid. 13-19 août 1990, 2288), soutient que deux membres de la CDO ont tiré sur l'un des membres de son comité exécutif, Daniel Kaba; ce dernier n'a pas perdu la vie, et ses agresseurs ont pris la fuite après avoir fait feu sur lui (MFJ 8 août 1991, 1).

2.2         Les tribunaux publics

En accord avec l'appel à une « justice populaire » de Rawlings, de nouveaux tribunaux spéciaux, appelés « tribunaux publics », ont été constitués au sein de l'appareil judiciaire du pays, en vertu de la Loi no 24 du PNDC de 1982. Contrairement aux tribunaux ordinaires, qui continuent de siéger, ces tribunaux (initialement appelés tribunaux du peuple ou tribunaux de PDC) ont juridiction en matière criminelle (Africa Watch 31 janv. 1992, 3; Amnesty International 18 déc. 1991, 7; Pellow et Chazan 1986, 80). Le système des tribunaux comprend le Bureau des commissaires au revenu, le Tribunal militaire spécial, le Conseil des tribunaux publics et le Comité national des enquêtes, qui a été établi par la Loi no 2 du PNDC et peut faire enquête sur presque toute allégation que lui soumet le PNDC (Country Reports 1991 1992, 151-152). La Loi no 78 du PNDC, qui est entrée en vigueur en août 1984, a abrogé la Loi no 24 et introduit des procédures d'appel contre les décisions rendues par des tribunaux (Africa Watch 31 janv. 1992, 11).

Les tribunaux sont investis de pouvoirs étendus et ont rendu des décisions rapides et sévères à l'endroit de dirigeants de l'ancien People's National Party (PNP) [Parti national du peuple], de hauts fonctionnaires et de dirigeants de sociétés publiques (Pellow et Chazan 1986, 80). Dans un bulletin, dont l'émission coïncidait avec le lancement d'un débat à l'Assemblée consultative du Ghana sur la forme que revêtirait le système juridique sous la nouvelle constitution, Africa Watch a déclaré que :

les tribunaux constituent la pierre angulaire des violations institutionnalisées des droits de la personne par le gouvernement. Ils agissent sous une apparence de légalité qui n'empêche pas les manipulations généralisées du gouvernement, mais qui suffit souvent pour que les Ghanéens aient de la difficulté à protester contre les abus dont ils sont victimes (31 janv. 1992, 2).

Corroborant cette inquiétude, New African publiait récemment un entretien avec Kwaku Boakye Danquah, un ancien président de l'un des tribunaux, qui a fui le pays en affirmant que le gouvernement l'avait harcelé pour avoir refusé de reconnaître la culpabilité de Kwame Safo Adu (juin 1992, 13-14). [Adu, un ancien ministre du gouvernement, avait été arrêté en 1990 et inculpé de sabotage de l'économie (Amnesty International 18 déc. 1991, 9).] Danquah soutient que les tribunaux ont été constitués « pour légaliser certains des actes par ailleurs extrajudiciaires du PNDC » (New African juin 1992, 13). Dans les affaires où des membres supérieurs du gouvernement sont directement intéressés, poursuit-il,

le gouvernement contrôle et surveille le tribunal. Il y a tant d'ingérence dans ces affaires - toutes sont conçues pour mener à une condamnation, surtout lorsqu'elles concernent des opposants politiques et des gens dont l'image ou la structure politique sont considérées comme une menace pour le PNDC (ibid.).

D'autres fonctionnaires judiciaires ont reconnu que l'on avait abusé des pouvoirs judiciaires dans le passé et, aussi, que le gouvernement intervenait souvent dans les procédures des tribunaux (Africa Watch 31 janv. 1992, 15-17).

Depuis 1983, ce sont des tribunaux publics qui ont prononcé la quasi-totalité des 270 peines de mort. De ce nombre, il est un fait établi que 95 sentences ont été exécutées (Africa Watch 31 janv. 1992, 17). Dans un rapport daté du 18 décembre 1991, Amnesty International énumère les procès politiques qui ont eu lieu entre 1983 et 1986. Selon ce document, au moins 90 personnes ont été jugées pour avoir commis des infractions politiques durant cette période; 50 d'entre elles ont été condamnées à la peine capitale et 23 ont été exécutées. La plupart ont été accusées d'être impliquées dans des tentatives avortées de coups d'Etat et dans de prétendues conspirations en vue de renverser le gouvernement. Ce sont des tribunaux publics qui ont entendu presque toutes les affaires (3).

2.3              Les lois du PNDC

Les abus perçus du système des tribunaux en particulier et du PNDC en général ont amené des organisations comme le MFJ à dénoncer un certain nombre de lois ou de décrets du PNDC qu'ils jugent répressifs dans la transition au régime constitutionnel (MFJ 11 janv. 1991, 2) : la Loi no 4 du PNDC sur la détention préventive; la Loi no 91 du PNDC, qui modifie la Loi de l'h abeas corpus de 1964; la Loi no 211 du PNDC sur l'accréditation des journaux; et la Loi no 221 du PNDC, qui porte sur l'enregistrement des organismes religieux.

La Loi no 4 du PNDC a été adoptée en mars 1982, avec effet rétroactif au mois de janvier de la même année. Elle permet de garder en détention illimitée, sans procès, des personnes que l'on soupçonne d'être une menace pour la sécurité nationale. Selon le paragraphe 3(1) de cette loi, « toute personne détenue sous le régime de la présente loi doit être gardée en un lieu et pendant une période qui seront soumis aux conditions que pourra prescrire le Provisional National Defense Council [Conseil provisoire de la Défense nationale] » (Amnesty International 18 déc. 1991, 16). En vertu de cette loi, le PNDC peut exiger que les personnes remises en liberté avisent la police de leur intention de quitter le pays, si tel est le cas, ainsi que « des questions que le Commissaire à la police peut raisonnablement préciser » (Africa Watch 12 août 1991, 2). Certains de ceux qui ont critiqué les politiques du PNDC, notamment de hauts responsables civils, ont choisi de s'exiler plutôt que de courir le risque d'être gardés en détention (ibid., 7).

La Loi no 91 du PNDC a été adoptée le 6 août 1984 en réponse à plusieurs actes d'habeas corpus qui avaient été soumis à la Haute Cour pour le compte de personnes gardées en détention sans inculpation ou procès. Selon cette loi, les tribunaux ne sont plus habilités à s'enquérir des motifs d'un cas de détention aux termes de la Loi no 4 du PNDC. L'ordonnance de détention préventive, qui autorise les détentions, indique seulement que cette mesure est prise dans l'intérêt de la sécurité nationale, mais sans donner de détails sur les actes commis par les personnes détenues. De nombreuses ordonnances de garde préventive n'ont été délivrées ou publiées que plusieurs années après les arrestations (Amnesty International 18 déc. 1991, 17).

Bien que le bruit ait couru que des gens ont été détenus comme prisonniers politiques pendant toute l'année 1991 et même au début de l'année 1992, le Secrétaire de l'Intérieur du Ghana a informé les journalistes, en juin 1991, qu'il n'y avait aucun prisonnier politique au Ghana et que les seuls militaires en détention étaient ceux qui avaient déclaré avoir pris part à des actions « subversives » (Africa Watch 12 août 1991, 6). Selon les Country Reports 1991, de 50 à 90 personnes auraient été gardées en détention pendant une période prolongée en 1991, encore qu'il soit dit dans cette publication qu'il est difficile de déterminer le nombre exact de personnes détenues pour des raisons politiques (1992, 151). Toujours selon cette source, le gouvernement a déclaré que 28 personnes étaient détenues à la suite d'accusations criminelles et 36 autres en rapport avec des tentatives de coup d'Etat. Il est ajouté aussi que « tous ont été, et le sont encore, privés du droit à un procès rapide, équitable et public. Le gouvernement ne donne aucun signe qu'il est disposé à les faire passer en jugement » (151). Amnesty International déclare, dans Report 1992, qu'au moins 50 présumés opposants du gouvernement, arrêtés les années précédentes, sont restés en détention sans inculpation pendant toute l'année 1991 en vertu de la Loi no 4 du PNDC (1992, 121). Africa Watch, dans un rapport daté du 31 janvier 1992, indique qu'environ 70 détenus qualifiés d'éléments subversifs pourraient faire face à la peine de mort (18). Il semble toutefois que le gouvernement ait tout fait, en cette année d'élections, pour éviter qu'on l'accuse de pratiquer des emprisonnements politiques. Dans un entretien téléphonique récent, un chercheur au service d'Amnesty International, à Londres, a déclaré que la quasi-totalité des détenus politiques ont maintenant été libérés (29 sept. 1992). Bien qu'Amnesty International ait indiqué qu'il puisse rester un, peut-être deux, prisonniers en détention, la plupart des prisonniers politiques connus ont été remis en liberté en décembre 1991, ou entre les mois de mars et de mai de la présente année (ibid.). Dans le passé, les détentions ne se limitaient pas qu'aux « éléments subversifs » politiques. Ces deux dernières années, un certain nombre de personnes critiquant le gouvernement ont été arrêtées. Au nombre de ces personnes figuraient des membres du MFJ, un avocat et ancien ministre du gouvernement, un ancien dirigeant du parti au pouvoir dans le gouvernement précédent, ainsi qu'un rédacteur en chef du Christian Chronicle. Un certain nombre de gens d'affaires ont aussi été détenus ou poursuivis pour sabotage, un crime capital d'après la loi ghanéenne (Amnesty International Report 1992 1992, 120-121). A son retour au Ghana en mai 1990, un homme possédant les nationalités américaine et ghanéenne a été détenu au secret pendant près d'un an avant d'être relâché. Aucune explication officielle n'a été fournie relativement à cette détention, bien que l'on allègue que, dans des situations semblables, il est souvent demandé aux détenus « fortunés » de verser une rançon pour obtenir leur libération (ibid. 18 déc. 1991, 2).

Depuis 1981, le PNDC est parvenu à refréner les critiques publiques à l'égard de ses politiques et de ses activités en restreignant la liberté de la presse. Le gouvernement possède les deux grands quotidiens du pays (le People's Daily Graphic et le Ghanaian Times), les deux grands hebdomadaires (le Mirror et le Weekly Spectator), ainsi que tous les réseaux de radio et de télévision. Dans le passé, les rédacteurs en chef de plusieurs journaux indépendants qui critiquaient le gouvernement ont fui le pays, certains d'entre eux après un séjour derrière les barreaux. Les bureaux d'un journal ont été la cible d'une attaque, tandis qu'un autre a vu sa licence révoquée (D'Souza 1991, 19-20). Pas plus tard que le 27 mars 1992, une haute cour d'Accra a refusé de fixer une caution pour George Marshal Naykene, rédacteur en chef du Christian Chronicle. Ce dernier avait été arrêté pour avoir présumément publié un article diffamatoire (Accra Ghana Broadcasting Corporation Radio Network 27 mars 1992).

Le 27 mars 1989, le PNDC a adopté la Newspaper Licensing Regulations Law (PNDC Law 211) [Loi sur l'accréditation des journaux (Loi no 211 du PNDC)] ainsi que le Legislative Instrument L11417 [Instrument législatif L11417], qui exigeaient que tous les journaux et toutes les revues présentent une nouvelle demande de licence. Un certain nombre de journaux sportifs qui, pendant quelque temps, avaient présenté des caricatures et des commentaires politiques sont tombés sous le coup de la loi. L'Independent et sa publication-soeur, Sports Guide, se sont vu refuser leurs demandes de licence (D'Souza, 20-21). Funtime, Life Stories et Ikebe Super Story, une publication nigérienne, se sont heurtés au même refus (West Africa 17-23 avr. 1989, 620). La Loi no 211 a depuis lors été abrogée (Accra Ghana Broadcasting Corporation Radio Network 19 juin 1992).

La Loi no 221 du PNDC a été adoptée en juin 1989. Elle exigeait que tous les organismes religieux s'inscrivent auprès du Comité des affaires religieuses de la Commission nationale de la culture (Country Reports 1991 1992, 154). Le même mois, les biens de quatre églises - deux églises chrétiennes indigènes, les Témoins de Jéhovah et l'Eglise de Jésus-Christ des saints des derniers jours (les Mormons) - ont été bloqués et leur personnel étranger a été expulsé. L'interdiction prononcée à l'endroit des Mormons a été annulée le 30 novembre, et le gouvernement a débloqué les biens des Témoins de Jéhovah un an plus tard (ibid.). (Pour plus de renseignements sur la religion au Ghana, veuillez lire la publication du CDCISR intitulée Ghana : Liberté de religion, mai 1991.)

Selon Akua Kuenyehia et Kofi Kumado, tous deux professeurs de droit à l'Université du Ghana, à Legon, des statistiques récentes sur l'observation de la Loi no 221 du PNDC indiquent que la Commission nationale de la culture a reçu à ce jour 1 736 demandes de la part d'organismes religieux (Kuenyehia 11 sept. 1992; Kumado 9 sept. 1992); de ce nombre, 957 ont été approuvées, 735 ont été mises en doute, 30 sont en suspens et 14 n'ont pas fait l'objet d'une recommandation (Kumado 9 sept. 1992). Selon les Country Reports 1991, le gouvernement du PNDC n'a rien fait pour faire respecter la loi, et les organismes religieux qui ont refusé de s'enregistrer continuent d'exercer librement leur culte (1992, 154). Kuenyehia et Kumado ont tous deux confirmé ce fait. Le premier a déclaré que « [le pays] jouit pour le moment d'une paix et d'une liberté de culte relatives » (11 sept. 1992), tandis que le second a ajouté que le gouvernement n'a pas encore entrepris d'appliquer les sanctions prévues par la Loi no 221 (9 sept. 1992). Cependant, EGLISI, une publication d'une organisation belge appelée Aide aux Eglises martyres, a signalé que dans le nord et le centre du Ghana, les musulmans convertis au christianisme qui tentent d'évangéliser des musulmans ont été victimes d'attaques verbales et physiques (10 août 1992, 10). Selon le chef du Comité de l'Islam du Christian Protestant Council, les musulmans convertis au christianisme « peuvent être assassinés » (ibid.).

3.                LA TRANSITION A LA DEMOCRATIE

Face à la montée des pressions intérieures et extérieures en faveur d'une réforme de l'appareil politique, Rawlings et le PNDC ont été contraints de faire certaines concessions démocratiques, rapprochant ainsi le pays d'un régime constitutionnel. Cependant, ces concessions n'ont pas toujours été véritablement démocratiques, surtout au début. Selon New African, le « débat national », lancé par Rawlings en juin 1990 sur l'avenir politique du Ghana, avait pour thème dominant que le pluripartisme était une notion étrangère au pays. La Conférence des évêques catholiques a sévèrement critiqué le débat (oct. 1990, 19). Un mois plus tard, les dirigeants d'un organisme nouvellement constitué, le MFJ, étaient convoqués par les forces de sécurité et mis en garde que leurs intentions pouvaient menacer la sécurité de l'Etat. Neuf d'entre eux ont fini par être arrêtés, mais on les a relâchés par la suite (ibid. 19-20).

En 1991, le gouvernement a finalement décrété une amnistie pour les exilés politiques, en excluant cependant ceux qui auraient pris part à des « activités subversives » (Africa Research Bulletin 1er-30 juin 1991, 10174-10175). Ces dernières années, le gouvernement a encouragé les dissidents et d'autres Ghanéens à rentrer au pays. D'anciens responsables du gouvernement et du PNDC seraient rentrés au pays et auraient repris « sans difficulté » une carrière hors du milieu de la politique (Country Reports 1991 1992, 151).

Dans d'autres ouvertures démocratiques, le gouvernement a abrogé la Loi no 211 du PNDC - la Loi d'accréditation des journaux - le 18 juin 1992. Il a aussi promulgué une loi constituant la Commission nationale des médias, afin de « promouvoir la liberté, l'indépendance et la responsabilité des médias, tant privés que publics ». Cet organisme sera chargé de faire respecteur des « normes d'excellence » dans les médias et de régler les plaintes déposées à l'endroit de la presse ou d'autres organes d'information (Accra Ghana Broadcasting Corporation Radio Network 19 juin 1992). Selon Eboe Hutchful, un professeur de la Wayne State University qui mène des recherches sur le Ghana, la presse a perdu une bonne partie de son « sentiment de crainte ou d'autocensure ». Non seulement plusieurs journaux qui critiquent le gouvernement du PNDC ont vu le jour, mais même le People's Daily Graphic, qui appartient à l'Etat, s'est « libéralisé » aux yeux de l'opposition (29 sept. 1992).

3.1      Une nouvelle constitution

En mars 1991, la National Commission for Democracy (NCD) [Commission nationale pour la démocratie], un organisme du gouvernement établi en 1982 pour formuler ce que le gouvernement a appelé une démocratie « authentique », a publié en mars 1991 un rapport intitulé « Evolving a True Democracy » (Chazan 1991, 29; West Africa 20-26 mai 1991, 797). Ce rapport insistait sur la nécessité d'un consensus national sur les questions critiques et concluait que, dans les élections des assemblées de district, les candidats ne devaient être affiliés à aucun parti. A la suite de ce rapport, le gouvernement a annoncé qu'il allait constituer un comité de neuf spécialistes en matière constitutionnelle, dont cinq avocats, un juge à la retraite, deux économistes et un chef traditionnel, qui aurait pour tâche de formuler les propositions constitutionnelles du gouvernement en vue de la prochaine assemblée consultative (West Africa 20-26 mai 1991, 797; Dakar PANA 7 juin 1991).

Le 17 mai 1991, le PNDC chargeait l'Assemblée consultative nationale d'ébaucher une constitution pour le pays. L'Assemblée se composerait de 117 personnes provenant des assemblées de district, de 22 personnes nommées par le gouvernement et de 121 représentants élus d'un certain nombre de différents groupes (New African août 1991, 31).

Selon une déclaration de la GBA, l'un des groupes auxquels on avait demandé d'envoyer des représentants, l'Assemblée consultative manquait de légitimité, et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elle comprenait une majorité de sympathisants du gouvernement et de personnes nommées par ce dernier. Non seulement les CDR étaient-ils représentés, mais des personnes nommées par les assemblées de district, où le tiers des membres sont désignés par le PNDC, étaient aussi présentes. Deuxièmement, on n'accorderait pas aux membres de l'Assemblée une immunité totale pour leurs commentaires formulés au cours des séances. Troisièmement, le PNDC pouvait toujours modifier à son gré les recommandations de l'Assemblée. Enfin, le libellé de la loi de constitution de l'Assemblée sous-entendait que cette dernière n'était créée que pour donner son aval à une constitution que le PNDC concevrait (19 juin 1991, 1-6). Au vu de ces faits, la GBA a refusé de participer aux travaux.

Le 12 août 1991, les neuf membres du Comité de spécialistes publiaient un projet de constitution modelé sur celui de la France et prévoyait un président et un premier ministre, un conseil d'Etat et un parlement. Selon le projet, le président nommerait le premier ministre et serait le commandant en chef des Forces armées. Le projet garantissait aussi la liberté individuelle, le pluralisme politique, la liberté de la presse et l'indépendance de l'appareil judiciaire (Africa Research Bulletin 1er-31 août 1991, 10236).

La Commission internationale des juristes a déterminé que la constitution proposée comportait des suggestions « pertinentes et innovatrices » et constituait un premier pas prometteur vers l'avènement d'un gouvernement constitutionnel au Ghana (The Review déc. 1991, 13). Africa Confidential a fait remarquer que l'Assemblée consultative a fait montre d'une indépendance inattendue, « parfois au mécontentement manifeste des hauts responsables du PNDC » (7 févr. 1992, 2).

Le 5 mars 1992, Rawlings a annoncé un calendrier concernant la transition à un régime constitutionnel. Un référendum national destiné à faire approuver la constitution par la population a été tenu comme prévu le 28 avril 1992. Des élections présidentielles étaient prévues pour le 3 novembre 1992 et des élections parlementaires pour le 8 décembre suivant. L'inauguration de la Quatrième République du Ghana devrait avoir lieu le 7 janvier 1993 (West Africa 16-22 mars 1992, 451). Ironiquement, ces deux dernières dates ont été annoncées avant la tenue du référendum national. Rawlings a aussi établi la Interim National Electoral Commission (INEC) [Commission électorale nationale provisoire], à laquelle il a confié la tâche d'enregistrer les électeurs, de tenir des référendums et des élections et d'examiner les limites administratives et celles des circonscriptions électorales (ibid., 452).

Après que l'Assemblée constitutionnelle eut présenté le dernier projet de constitution à Rawlings, certains groupes ont réagi devant un certain nombre de dispositions qui y avaient été incluses sans discussion (ibid. 13-19 avr. 1992, 642). Ces groupes s'inquiétaient particulièrement des articles 33, 34 et 36 des dispositions transitoires du projet de constitution, qui « visent à accorder une amnistie générale et perpétuelle au PNDC et à ses dirigeants » (ibid., 624). Les évêques catholiques romains du Ghana ont non seulement critiqué les dispositions d'amnistie, mais ils ont aussi demandé l'annulation du référendum, car en raison de la complexité du document présenté, la population générale se trouvait dans l'impossibilité de prendre une décision éclairée (AFP 13 avr. 1992). Malgré leurs réserves, la plupart des groupes religieux et d'opposition ont exhorté les Ghanéens à se prononcer en faveur du projet de constitution, ne serait-ce que pour s'assurer que la démarche vers le retour à un régime constitutionnel se poursuivrait (Africa Research Bulletin 1er-31 mai 1992, 10569). Lors de la tenue du référendum, la NCD a indiqué que, sur les 3 680 973 personnes qui avaient voté (43,7 p. 100 des électeurs inscrits), 92 p. 100 s'étaient prononcées en faveur de l'adoption du projet de constitution (ibid.).

Le 18 mai 1992, la Loi no 280 était adoptée, levant 11 années d'interdiction des partis politiques. Cette loi impose toutefois des restrictions sur l'emploi des noms et des symboles d'anciens partis et elle fixe un plafond annuel à la contribution que des particuliers peuvent faire à un parti quelconque. La loi exige aussi que chaque parti ait des sections partout au Ghana et soit représenté dans les deux tiers au moins des districts de chaque région. Les agents exécutifs de chaque parti doivent être élus sous la supervision de l'INEC (New African juill. 1992, 18). Bien que le plafond imposé aux contributions ait été levé sous condition le 29 mai 1992, les strictes exigences de la loi en matière d'enregistrement ont placé les groupes d'opposition privés d'argent dans des positions de négociation fort faibles et ont fait ressortir le besoin de former des coalitions (ibid., 19). La plupart des partis n'ont pas obtenu de certificat de l'INEC, qui leur permet d'agir en tant qu'entité légale, avant le mois de juillet (West Africa 21-27 sept. 1992, 1597).

Depuis la création de l'INEC, il a été demandé de réouvrir le registre électoral national, qui est la liste officielle des personnes ayant le droit de vote aux élections au Ghana. L'Alliance of Democratic Forces of Ghana (ADF) [Alliance des forces démocratiques du Ghana], une organisation-cadre réunissant sept groupes politiques, a indiqué que le registre est à la fois gonflé et inexact et qu'il ne peut constituer le fondement d'élections démocratiques. Certains Ghanéens qui ont le droit de voter ne seront pas en mesure de le faire aux prochaines élections parce qu'ils ne figurent pas dans le registre actuel. L'INEC a jusqu'ici refusé la réouverture du registre à cause de « contraintes de temps et financières » (West Africa 14-20 sept. 1992, 1566). Au début du mois de septembre 1992, une équipe de représentants du Commonwealth était arrivée au Ghana pour discuter avec l'INEC, entre autres groupes, des détails de la mission d'observateurs proposée pour les prochaines élections (ibid. 31 août-6 sept. 1992, 1494).

3.2        Les partis politiques

Les communiqués de presse décrivent souvent les partis politiques en fonction de leur soutien à deux grandes traditions politiques : les loyalistes de Nkrumah, qui attirent des partisans de l'ancien Convention People's Party (CPP) [Parti populaire de la Convention] et du People's National Party (PNP) [Parti national populaire], et les partisans du camp de Danquah-Busia - ou United Party/Progress Party (UP/PP) [Parti uni/Parti du progrès] (Africa Confidential 13 sept. 1991, 6; New African juin 1992, 10). Les partisans de Nkruma sont habituellement considérés comme des gauchistes, qui s'inspirent des idéaux de Kwame Nkrumah, cet homme qui a mené le Ghana à l'indépendance. Le groupe de Danquah-Busia « a toujours été droitiste » et tire son nom de deux hommes, Kofi Abrefa Busia et J.B. Danquah, « porte-drapeaux du libéralisme et de l'économie de marché libre de l'Occident » (New African juin 1992, 10). Dans son numéro du 13 septembre 1991, Africa Confidential indique que si, dans le passé, de nettes différences idéologiques caractérisaient ces deux groupes, les récents événements politiques ont atténué le conflit, « laissant comme terrain d'entente un régime constitutionnel fondé sur le pluripartisme » (6).

Quand, en 1991, il est devenu de plus en plus évident que le Ghana s'orientait vers un régime démocratique et qu'on lèverait probablement l'interdiction des partis politiques, un certain nombre de pseudo-clubs politiques ont commencé à faire leur apparition. Ces groupes « se faisaient passer pour des clubs littéraires, sociaux, de bien-être et de recherche pour contourner l'interdiction, en vigueur depuis 10 ans, de l'activité politique des partis »; ils se composaient du Eagle Club (un groupe financé par le gouvernement), du Danquah Busia Club, du Kwame Nkrumah Welfare Society, du Our Heritage Club et du National Coordinating Committee of Nkrumahists (New African juin 1992, 10).

Le 18 mai 1992, on levait l'interdiction des partis politiques. La Loi sur les partis politiques dispose que 21 anciens partis politiques, dont le Convention People's Party [Parti populaire de la Convention], le Progress Party [Parti du Progrès] et le Unity Parti [Parti de l'Unité], demeurent interdits et qu'il est illégal d'utiliser leurs symboles, leurs noms ou leurs slogans (Africa Research Bulletin 1er-31 mai 1992, 10569). Au 22 juin 1992, plusieurs partis s'étaient inscrits ou étaient en voie de le faire auprès de l'INEC. Dans le camp de Danquah-Busia, ces partis comprenaient le New Patriotic Party (NPP) (Dans son numéro du 29 juin - juillet 1992, West Africa indique que le sigle NPP désigne les mots National Patriotic Party (Parti patriotique national). Dans la plupart des communiqués de press, de même que dans d'autres numéros de West Africa, NPP est l'abréviation de New Patriotic Party (Nouveau parti ipatriote).) [Nouveau parti patriotique] et la New Generation Alliance (NGA) [Alliance de la nouvelle génération], qui, d'après Africa Confidential, est une faction minoritaire qui s'est dissociée du NPP (14 août 1992, 3). [Selon West Africa, cependant, le NPP nie que la NGA ait jamais fait partie de ses rangs (29 juin- 5 juill. 1992, 1087)]. Le National Democratic Congress (NDC) [Congrès démocratique national] a été décrit comme un parti qui « suit la tradition de Rawlings » (West Africa 29 juin-5 juill. 1992, 1087). Le Eagle Club of Ghana a aussi présenté une demande en vue de former le Eagle Party (Dans le nom Eagle Party, le mot «eagle» est parfois écritsans «a» («Egle»), pour Every Ghanaian Living Everywhere. Voir, par exemple, le numéro du 27 juillet-2 août 1992 de West Africa, p. 1247-1248.) [Parti de l'Aigle] (Accra Ghana Broadcasting Corporation Radio Network 17 juill. 1992).

Les quatre partis inscrits auprès de l'INEC, ou en voie de l'être, qui disent représenter la tradition nkrumahiste sont le National Convention Party (NCP) [Parti national de la Convention], la People's National Convention (PNC) [Convention nationale populaire], le New Independence Party (NIP) [Nouveau parti de l'indépendance] et le People's Heritage Party (PHP) [Parti du patrimoine populaire]. Plusieurs autres partis sont également associés aux Nkrumahistes. Un groupe appelé le United Front of Genuine Nkrumahists [Front uni des Nkrumahistes authentiques] allait convoquer une conférence de presse le 25 juin 1992 pour annoncer le nom, le slogan et le symbole d'un nouveau parti politique (West Africa 29 juin- 5 juill. 1992, 1087). Le numéro du 14 août 1992 d'Africa Confidential mentionne le Democratic People's Party [Parti populaire démocratique] qui, est-il dit dans cette revue, agira vraisemblablement comme groupe de pression au sein de l'une des factions nkrumahistes plus étendues (5). La constitution du Popular Party for Democracy and Development (PPDD) [Parti populaire de la démocratie et du développement], qui se dit le « véritable parti nkrumahiste », a été annoncée à la fin du mois de juin (Accra Ghana Broadcasting Corporation Radio Network 26 juin 1992).

Le camp nkrumahiste est divisé, et chacun des partis prétend représenter la concrétisation des idéaux de Nkrumah. Africa Confidential a signalé que l'engagement d'un grand nombre de Nkrumahistes envers le socialisme et le panafricanisme est « théorique ». Selon cette revue, « les différends qui opposent les Nkrumahistes ont davantage trait à une question de personnalité et de stratégie qu'à une question d'orientation » (Africa Confidential 14 août 1992, 4). Cependant, après bien des pourparlers au sujet d'alliances possibles entre divers groupes, trois des partis - le PHP, le NIP et le PPDD, ce dernier non encore inscrit - ont finalement convenu le 10 septembre 1992 de former une alliance qui présenterait aux élections un candidat présidentiel et des candidats parlementaires communs (West Africa 21-27 sept. 1992, 1598).

Le camp Danquah-Busia manifeste plus de cohésion. Il y a peu de différences de stratégie ou d'orientation au sein du NPP, et la NGA est le seul élément dissident. Le leadership du NPP est en faveur de politiques économiques centrées sur le marché et représente le milieu conservateur des affaires qui, croit-il, subit les attaques du PNDC (Africa Confidential 14 août 1992, 3).

Les partisans de Rawlings et du PNDC CONSTITUTIONNELLE ET LA QUATRIEME REPUBLIQUE 3.2 (1992-11)tuent un troisième groupe qui conteste les élections. Le NDC a été « présenté » le 10 juin 1992 (Africa Research Bulletin 1er-30 juin 1992, 10611). Même si ce parti s'est efforcé, semble-t-il, de nier tout appui direct de la part du PNDC, plusieurs secrétaires de ce dernier étaient présents au moment de la présentation (Africa Research Bulletin 1er-30 juin 1992, 10611; West Africa 29 juin-5 juill. 1992, 1087). En outre, son président par intérim, Issifu Ali, a annoncé que le parti emploierait le slogan « Unité, stabilité et développement », le même utilisé plus tôt cette année par le PNDC pour célébrer ses dix années au pouvoir (Africa Confidential 14 août 1992, 3). Ali a aussi déclaré que le parti désire faire fond sur les bases économiques établies depuis la dernière décennie et préserver les politiques et les programmes qui sont à la fois « sains et viables » (Africa Research Bulletin 1er-30 juin 1992, 10611).

Même si le NDC a soutenu, au moment de sa « présentation » en juin, qu'il était une coalition de divers groupes, dont le Eagle Club, ce dernier l'a nié (ibid., 10611-10612). Un porte-parole du Club a déclaré que ce dernier ne fusionnerait jamais avec le NDC (West Africa 29 juin-5 juill. 1992, 1087). Le Eagle Club, qui a demandé l'autorisation de former le Eagle Party (ou Egle Party) a connu un certain nombre de revers. Une série de descentes ont été faites dans ses bureaux et au domicile de ses principaux membres (Africa Confidential 14 août 1992, 4). En juin 1992, la police a effectué une descente au domicile de Michael Soussoudis, un dirigeant de la principale faction du Eagle et un cousin au premier degré de Rawlings, et à qui ce dernier rendait parfois visite. Deux dirigeants du Eagle ont été arrêtés (et libérés par la suite) (BBC World Service 16 juill. 1992; New African sept. 1992, 11). Par ailleurs, certaines de ses figures dominantes sont passées aux rangs du NDC (West Africa 7-13 sept. 1992, 1538). Rawlings, que le parti espérait présenter comme candidat aux élections présidentielles de novembre, mais qui, après la descente chez Soussoudis, s'est distancié du Eagle Club, a récemment été nommé candidat du NDC aux élections présidentielles (Ambassade du Ghana 2 oct. 1992).

4.          PERSPECTIVES D'AVENIR

En 1981, le régime du PNDC faisait face à une économie en pièces (Kraus 1991, 120-121). Pour contrer la situation, il a formulé un programme d'adaptation structurelle économique dans le but d'obtenir l'aide financière du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale et de donateurs étrangers (ibid., 125). Bien que la situation économique au Ghana soit aujourd'hui considérée comme l'une des plus florissantes de l'Afrique (New African sept. 1992, 10), un spécialiste a fait remarquer que les « bénéficiaires de la croissance sont essentiellement ruraux et trop peu nombreux, et l'effet distributif des politiques est souvent inéquitable » (Kraus 1991, 151). En outre, le chômage urbain et l'inégalité se sont accrus et sont fort visibles (ibid.), tandis que les niveaux de rémunération sont demeurés fort bas (Economist Intelligence Unit 1991, 3).

Néanmoins, en tant que dirigeant en fonction, Rawlings jouit de l'appui de quelques fonctionnaires, chefs, dirigeants d'administration locale et d'autres personnes qui espèrent tirer davantage profit de son patronage (New African sept. 1992, 10). Même si les comités de défense de Rawling étaient, aux yeux d'un grand nombre de personnes au pays, à la fois corrompus et coercitifs, ils ont permis à un nombre considérables de gens qui, auparavant, ne participaient pas à la vie politique, de prendre part d'une manière efficace à la gestion de leurs collectivités (Ray 1986, 70). Si le NPP jouit peut-être de l'appui de la classe moyenne urbaine, des entrepreneurs et des riches producteurs de cacao qui désirent que l'adaptation structurelle se poursuive, les idées originales de Rawlings restent toujours convaincantes dans les campagnes éloignées (New African sept. 1992, 12).

Rawlings a rejeté jusqu'ici les demandes de l'opposition pour qu'un gouvernement provisoire soit établi jusqu'à l'inauguration de la Quatrième République. En réponse, le procureur général et le secrétaire de la Justice ont déclaré que le gouvernement ne peut accepter « des demandes irréalisables et obstructionnistes qui ont pour objet de faire obstacle à la transition à un régime constitutionnel » (West Africa 31 août-6 sept. 1992, 1494). En ne tenant pas compte des demandes relatives à l'établissement d'un gouvernement provisoire, Rawlings espère peut-être éviter ainsi d'être appelé à rendre compte de sa conduite passée, chose que les gouvernements provisoires ont souvent demandée aux dictateurs en fonction (Hutchful 29 sept. 1992).

Un aspect plus préoccupant que la victoire de Rawlings aux élections est peut-être la réaction de ce dernier s'il échoue. Selon Eboe Hutchful, qui s'est rendu récemment au Ghana et y a rencontré des dirigeants du PNDC et des membres de l'opposition, on s'inquiète en général du sort des organes révolutionnaires du PNDC et de l'existence possible d'une vaste stock d'armes dans leur arsenal. Dans sa descente au domicile de Soussoudis, la police est tombée sur une importante cache d'armes (BBC World Service 16 juill. 1992; New African sept. 1992, 11).

Il n'est pas sûr que Rawlings, s'il est élu, pourra conserver la présidence sans recourir à ses anciennes tactiques de contrôle militaire. Dans une déclaration faite avant la candidature de Rawlings, Afari Gyang, l'un des deux vice-présidents de l'INEC, aurait dit que Rawlings devra quitter l'armée s'il a l'intention de se porter candidat à la présidence car la constitution interdit à la plupart des fonctionnaires et aux membres des forces armées, de la police, du système judiciaire et du corps des pompiers de se présenter comme candidats à des élections présidentielles ou législatives (West Africa 21-27 sept. 1992, 1622).

Si Rawlings remporte les élections, les Ghanéens surveilleront de près le nouveau régime pour voir si celui-ci, après avoir dirigé le pays par la force pendant plus de 10 ans, est capable d'assumer avec succès le rôle de président élu d'une démocratie constitutionnelle.

5.                ANNEXE :

LISTE DES REGIMES ET DES DIRIGEANTS DU GHANA DEPUIS 1957

Régime    Années au pouvoir

Convention People's Party
(CPP)      1957-1966               [Parti populaire de la Convention], Kwame Nkrumah

National Liberation Council
(NLC)     1966-1969               [Conseil national de la libération],
                Lt.-Gén.J.A.Ankrah

Deuxième République,         1969-1972               K.A. Busia

Supreme Military Council
(MSC)    1972-1978               [Conseil militaire suprme], Col. I.K. Acheampong

Supreme Military
Council II               1978-1979               [Conseil militaire suprême II],
                Lt.-Gen. F. Akuffo

Armed Forces Revolutionary
 Council (AFRC)   1979       [Conseil révolutionnaire des Forces
                armées], Capitaine Jerry Rawlings

Troisième République,        1979-1981               Hilla Limann

Provisional National
 Defense Council (PNDC)   1981-       [Conseil provisoire de la Défense
                 nationale], Capitaine Jerry Rawlings

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