Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Guinée Conakry
Publisher | International Federation for Human Rights |
Author | Organisation mondiale contre la torture; Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme |
Publication Date | 19 June 2008 |
Cite as | International Federation for Human Rights, Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - Guinée Conakry, 19 June 2008, available at: https://www.refworld.org/docid/486e051343.html [accessed 24 May 2023] |
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Contexte politique
Le début de l'année 2007 a été marqué en Guinée Conakry par une grève générale illimitée déclenchée par plusieurs syndicats le 10 janvier afin de protester contre la vie chère, la corruption, l'impunité des auteurs de délits financiers et plus généralement la mauvaise gouvernance. Face à la réaction répressive du pouvoir, cette grève s'est rapidement transformée en mouvement de révolte populaire contre le régime du Président Lansana Conté, au pouvoir depuis 23 ans, et les revendications se sont élargies à la séparation des pouvoirs, l'indépendance de la justice et un réel changement politique. Ce mouvement de grève avait été initié après que le Président eut libéré en personne, en décembre 2006, M. Mamadou Sylla, un homme d'affaires inculpé de détournement de fonds auprès de la Banque centrale, alors incarcéré à la prison civile de Conakry.
Les manifestations de janvier et février 2007 ont été violemment réprimées par les services de sécurité et l'armée, et se sont soldées par l'instauration de l'état d'urgence et un bilan humain très lourd avec près de 200 morts et plus de 1 500 blessés.1
A la suite de négociations, un accord a été trouvé le 27 janvier 2007, portant sur la formation d'un nouveau Gouvernement autour d'un Premier ministre de consensus qui dispose de pouvoirs exécutifs étendus pour une période transitoire de trois ans, pendant laquelle des élections législatives et présidentielles devraient être organisées. L'accord crée également une Commission d'enquête indépendante chargée de faire la lumière sur les exactions perpétrées au cours des répressions de 2006 et 2007 (exécutions sommaires, détentions arbitraires, viols, etc.). La tension est néanmoins montée d'un cran lorsque le Président Conté a nommé, le 9 février 2007, l'un de ses proches, M. Eugène Camara, au poste de Premier ministre. Cette nomination, vécue comme une provocation, a attisé les émeutes populaires. La grève générale n'a finalement été suspendue qu'à la suite de la nomination de M. Lansana Kouyaté en tant que Premier ministre, le 27 février.
Fin 2007, la tension restait vive en raison du non-respect de la feuille de route du 27 janvier 2007, de l'augmentation du coût de la vie et du report des élections législatives – prévues initialement en décembre 2007 mais reportées en 2008 du fait des retards accumulés dans la mise en place de la Commission nationale électorale indépendante (CENI) exigée par l'opposition. De même, la persistance de l'impunité des auteurs et des responsables des violations des droits de l'Homme constitue un obstacle majeur au rétablissement de la paix sociale, de la confiance et de l'État de droit en Guinée Conakry.
Les syndicalistes dans la ligne de mire des autorités
Les syndicalistes et les responsables syndicaux ont été l'une des principales cibles des autorités en raison de leur rôle dans la mobilisation et l'articulation de la contestation sociale et pacifique du début d'année. Les Bérets rouges, la garde rapprochée du Président de la République, conduits par son fils, M. Ousmane Conté, se sont particulièrement illustrés dans la répression des défenseurs des droits économiques et sociaux, notamment en saccageant l'ensemble des bureaux et des ordinateurs de certains syndicats et par le passage à tabac de nombreux syndicalistes. Ainsi, une vingtaine de dirigeants syndicaux, dont le Dr. Ibrahima Fofana, secrétaire général de l'Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), et Mme Hadja Rabiatou Diallo, secrétaire générale de la Confédération nationale des travailleurs guinéens (CNTG), ont été plusieurs fois arrêtés et battus violemment.
Mme Reine Alapini Gansou, Rapporteure spéciale de la CADHP sur les défenseurs des droits de l'Homme en Afrique, a d'ailleurs exprimé "sa profonde inquiétude suite aux informations reçues concernant le harcèlement des défenseurs des droits de l'Homme dans le cadre de leurs activités syndicales en Guinée".2
L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).
1 Dans sa résolution P6_TA(2007)0057, adoptée le 15 février 2007, le Parlement européen a fermement condamné "l'usage démesuré et excessif de la force par les forces de sécurité guinéennes au cours des récentes manifestations dans différentes parties du pays, entraînant la mort de nombreux civils, faisant de nombreux blessés parmi les manifestants et se soldant par la mise en détention de dirigeants syndicaux et d'autres".
2 Cf. communiqué de presse sur la situation en Guinée de la Rapporteure spéciale de la CADHP sur les défenseurs des droits de l'Homme en Afrique.