Les réfugiés centrafricains en RDC ont besoin de sécurité et de soutien
Durant sa visite en RDC, le chef du HCR Filippo Grandi s'est félicité des efforts inclusifs menés par le pays pour aider les réfugiés centrafricains, tout en appelant la communauté internationale à un soutien accru.
A deux reprises en cinq ans, Fidel, 35 ans, a dû fuir la République centrafricaine (RCA), traverser le fleuve Oubangui et se rendre en République démocratique du Congo (RDC). Sa toute dernière traversée en quête de sécurité a été tragique.
« Cette fois-ci, j'ai perdu mon fils de cinq ans. Il s'est noyé dans la rivière », a-t-il déclaré.
En janvier dernier, alors qu'il traversait la rivière depuis sa maison de Bema jusqu'à Yakoma en RDC, il avait laissé son fils Eric sur la rive du côté centrafricain car sa pirogue était trop petite pour transporter l’ensemble de sa famille de sept personnes en une seule fois. Il a donc dû faire plusieurs allers-retours.
Lorsqu'il revenait sur la rive en RCA, il n'a pas trouvé Eric. Paniqué, il s’est renseigné auprès des pêcheurs qui se trouvaient aux alentours. Ils lui ont confirmé ses pires craintes, car ils avaient identifié le corps.
« J'étais en état de choc », se souvient-il.
Comment reconstruire sa vie quand on a tant perdu ? Les réfugiés centrafricains qui rejoignent des lieux plus sûrs en RDC ont besoin de soutien (Arnold Temple, images / Linda Muruki, productrice / Fabien Faivre, producteur )
Comme d'autres réfugiés centrafricains, Fidel et sa famille ont fui les violences et l'insécurité post-électorales de décembre dernier. Ils ont presque tout abandonné derrière eux. Plus de 117 000 personnes ont déjà afflué dans les pays voisins (Cameroun, Tchad et Congo), la majorité d'entre elles ayant trouvé refuge en RDC. Quelque 164 000 autres personnes sont par ailleurs déplacées en RCA.
« J'ai perdu mon fils de cinq ans. Il s'est noyé dans la rivière. »
Une fois arrivés à Yakoma, dans la province du Nord-Ubangi en RDC, Fidel, sa femme Brigitte et leurs six enfants ont été accueillis par une famille congolaise qui les a hébergés dans leur modeste maison.
La plupart des réfugiés centrafricains sont généreusement accueillis par les communautés locales, qui partagent le peu de ressources dont elles disposent.
La semaine dernière, le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et ses partenaires ont commencé à relocaliser les réfugiés dans des lieux éloignés de la zone frontalière de Yakoma, vers un site plus sûr dans le village de Modale qui peut accueillir jusqu'à 10 000 réfugiés.
La famille de Fidel faisait partie du premier groupe de 335 réfugiés arrivé sur le nouveau site cette semaine. Ils commenceront à s'installer parmi les communautés congolaises locales, qui ont généreusement offert des terres aux familles réfugiées dont ils ont aussi accueilli les enfants dans leurs écoles.
Le HCR met en place de nouvelles installations d'eau et d'assainissement et développe les services de santé et d'éducation, tout en renforçant les infrastructures existantes afin de réduire la pression sur les services qui résulte de l'afflux.
Lors d'une visite à Modale cette semaine, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés Filippo Grandi a salué ces efforts qui aideront les réfugiés à commencer à reconstruire leur vie.
« C’est un très bon exemple d’inclusion. Les réfugiés peuvent semer et cultiver au même titre que les membres de la communauté d’accueil, devenir autonomes, et accéder aux services de santé et aux écoles locales », a-t-il déclaré.
Il a également appelé la communauté internationale à soutenir d’urgence ces efforts.
« Nous avons besoin d’un engagement et d’une solidarité accrus envers la RDC et les membres des communautés locales qui accueillent généreusement des réfugiés et les hébergent chez eux, malgré leurs ressources très limitées », a-t-il ajouté.
« Les réfugiés que j'ai rencontrés veulent rentrer, mais seulement si la paix et la sécurité sont rétablies de façon durable. »
Filippo Grandi a également rencontré Fidel et Brigitte, qui ont partagé avec lui leur expérience tragique.
« Les réfugiés que j'ai rencontrés veulent rentrer, mais seulement si la paix et la sécurité sont rétablies de façon durable. Ils ont peur, ce qui est compréhensible, après avoir été contraints de fuir à plusieurs reprises », a-t-il ajouté.
Il a rappelé sa dernière visite en RCA en décembre 2019, alors que des signes de paix étaient porteurs d'espoir, et a exprimé le souhait qu'une solution soit trouvée pour tous les réfugiés dispersés dans cette région peu accessible.
Il a également lancé un appel à la communauté internationale pour aider la RCA à sortir de la « spirale de violence et de troubles » qui a caractérisé son histoire récente.
« C'est particulièrement important pour sa population, afin qu'elle n'ait pas à fuir », a-t-il déclaré. « Bien qu'ils se sentent aujourd’hui en sécurité ici en RDC, davantage de ressources sont nécessaires. C'est une situation confrontée à une sévère pénurie de fonds, qui nécessite davantage d'attention de la part de la communauté internationale. »
Le HCR n'a reçu que 16% du montant de 204,8 millions de dollars nécessaires à ses opérations en RDC. En collaboration avec la Commission nationale pour les réfugiés (CNR) gérée par le gouvernement congolais, le HCR a déjà enregistré près de 53 000 nouveaux arrivants centrafricains dans les provinces du Bas-Huele, du Nord-Ubangi et du Sud-Ubangi, en date du 22 avril. L'enregistrement est toujours en cours. Selon les autorités de RDC, 92 000 réfugiés sont déjà arrivés en provenance de RCA depuis décembre dernier.