CONFERENCE DE PLENIPOTENTIAIRES SUR LE STATUT DES REFUGIES ET DES APATRIDES : COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA NEUVIEME SEANCE

Présents :

Président M. LARSEN

Membres :
AustralieM. SHAW
AutricheM. FRITZER
BelgiqueM. HERMENT
CanadaM. CHANCE
ColombieM. GIRALDO-JARAMILLO
DanemarkM. HOEG
EgypteM. MUSTAPHA Bey
Etats-Unis d'AmériqueM. WARREN
FranceM. ROCHEFORT
GrèceM. PAPAYANNIS
IrakM. Al PACHACHI
IsraëlM. ROBINSON
ItalieM. del DR. GO
LuxembourgM. STURM
MonacoM. SOLAMITO
NorvègeM. ANKER
Pays-BasM. de BOETZELAER
République fédérale allemandeM. von TRÜTZSCHLER
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du nordM. HOARE
SuèdeM. PETREN
Suisse (et Liechtenstein)M. ZUTTER
M. SCHURCH
TurquieM. MIRAS
YougoslavieM. MAKIEDO
Observateur :
IranM. KAZEMI
Haut-Commissaire pour les réfugiésM. van HEUVEN GOEDHART
Représentants d'institutions spécialisées et autres organisations intergouvernementales
Organisation internationale pour les réfugiésM. STEPHENS
M. SCHNITZER
Conseil de l'EuropeM. von SCHMIEDEN
Représentants d'organisations non gouvernementales
Catégorie B et Registre
Caritas InternationalisM. METTERNICH
M. BRAUN
Comité de coordination d'organisations juivesM. WARBURG
Comité des églises pour les affaires internationalesM. REES
Conférence permanente des organisations bénévolesM. REES
Congrès juif mondialM. RIEGNER
Conseil consultatif d'organisations juivesM. MEYROWITZ
Conseil international des femmesMme GIROD
Ligue internationale des droits de l'hommeMlle BAER
Ligue internationale de femmes pour la paix et la libertéMlle BAER
Ligue internationale des sociétés de la Croix-RougeM. LEDERMANN
Union catholique internationale de service socialMlle de ROMER
Union internationale des ligues féminines catholiquesMlle de ROMER
Union internationale de protection de l'enfanceM. THELIN
Secrétariat
M. HumphreySecrétaire exécutif
Mlle KitchenSecrétaire exécutive adjointe

EXAMEN DU PROJET DE CONVENTION RELATIF AU STATUT DES REFUGIES (Point 5 a) de l'ordre du jour) (A/CONF.2/1 et Corr.1, A/CONF.2/5 et Corr.1) (suite de la discussion)

Le PRESIDENT annonce que la délégation de l'Australie a déposé le texte d'un article supplémentaire 11 (A), mais le texte français n'en étant pas encore prêt, il suggère d'étudier cette proposition (A/CONF.2/41), qui constitue en quelque sorte un commentaire général sur les articles, 12, 13 et 14, après l'examen de ces articles.

M. SHAW (Australie) déclare que l'attitude qu'il adoptera à l'égard de ces articles dépendra du résultat de l'examen de sa proposition. Il n'a toutefois pas d'objection à ce que la procédure suggérée par le Président soit adoptée.

La proposition du Président est adoptée.

1. Article 12 - Professions salariées (A/CONF.2/31, A/CONF.2/40, A/CONF.2/41, A/CONF.2/47)

Le PRESIDENT appelle l'attention de la Conférence sur les amendements à l'article 12 soumis par les délégations du la Yougoslavie et du Royaume-Uni (A/CONF.2/31 et A/CONF.2/40 respectivement).

M. MAKIEDO (Yougoslavie) fait observer que son amendement ne demande guère d'explications. Il rappelle qu'au cours du débat général, il a déclaré que l'on devrait accorder aux réfugiés les mêmes droits qu'aux ressortissants du pays dans lequel ils résident. La Yougoslavie a déjà adopte ce principe ; il espère que les autres délégations trouveront son amendement recevable.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) qu'une clause relative au statut juridique des réfugiés, analogue quant au fond à l'amendement de la Yougoslavie, a été insérée dans la législation de la République fédérale d'Allemagne.

Le droit d'exercer une profession salariée est accordé aux réfugiés dans les mêmes conditions qu'aux ressortissants allemands. On a l'espoir d'intégrer de manière permanente les réfugiés dans la structure économique du pays. C'est pourquoi il espère que l'amendement yougoslave sera adopté, bien qu'il soulève certaines difficultés pour certaines délégations et il votera en sa faveur.

Selon M. HOARE (Royaume-Uni) le paragraphe 2 de l'article 12 traite des conditions que doit remplir un réfugié afin d'être exempté des mesures de caractère restrictif applicables aux étrangers ; l'une de ces conditions est celle de la résidence. Au Royaume-Uni, la pratique administrative générale consiste à libérer l'étranger de tous ces contrôles au bout de quatre ans de résidence ; toutefois, dans certains cas, ces contrôles sont levés au bout de trois ans. Dans le cas où le léger amendement (A/CONF.2/40) qu'il a proposé d'apporter au paragraphe 2 (a) serait adopté, sa délégation, et d'autres délégations peut-être, s'estimeraient satisfaites sur ce point. S'il n'est pas adopté, le représentant du Royaume-Uni se verra dans l'obligation de faire une réserve particulière à cet égard.

En ce qui concerne la proposition de supprimer l'alinéa c) du paragraphe 2, il souligne qu'il suffit qu'un enfant naisse au Royaume-Uni pour qu'il ait la nationalité britannique. Il existe des cas où des réfugiés ont eu des enfants peu après avoir été admis au Royaume-Uni. Tout en reconnaissant que l'alinéa c) du paragraphe 2 a pour but de garantir qu'un réfugié chef de famille qui est établi de manière définitive dans son pays de réfugié se verra attribuer les droits qui lui reviennent, il ne saurait admettre les conditions arbitraires stipulées dans cet alinéa. Dans le cas où ne serait pas adoptée la proposition qu'il a faite de supprimer l'alinéa c) du paragraphe 2, M. Hoare se verra également dans l'obligation de faire sur ce point une réserve appropriée.

M. GIRALDO-JARAMILLO (Colombie) fait valoir que si l'on adopte l'amendement yougoslave au paragraphe 1 de l'article 12, les paragraphes 2 et 3 de cet article deviennent évidemment inutiles comme l'a reconnu, en fait, la délégation yougoslave elle-même, en proposant de supprimer ces paragraphes. En effet si les Etats contractants accordent aux réfugiés pour l'emploi le même traitement qu'à leurs ressortissants, il n'existe plus de mesures restrictives et, partant, plus d'exception à prévoir à ces mesures.

La constitution colombienne assure aux étrangers les mêmes droits civils qu'aux nationaux, mais il est possible que certains pays européens éprouvent de sérieuses difficultés à accepter les dispositions libérales de l'amendement yougoslave.

M. PETREN (Suède) dit que la Suède, pays d'accueil, se trouve dans une situation particulière. Elle a dû, pour des raisons d'ordre intérieur, maintenir un système d'autorisation de travail pour tous les étrangers. Elle ne peut dans les circonstances présentes renoncer à ce système. La délégation de la Suède ne s'oppose donc pas au principe de l'amendement yougoslave mais elle devra, si cet amendement est adopté, faire des réserves à l'article 12 et, en fait, même si l'amendement yougoslave n'est pas adopté car la Suède ne peut s'engager à faire une exception à ce système en faveur des réfugiés.

La Suède devra également faire une réserve au sujet du paragraphe 1 de l'article 12, parce qu'elle n'est pas en mesure de s'engager à étendre aux réfugiés le traitement préférentiel accordé aux ressortissants des autres pays scandinaves en vertu de traités particuliers.

M. SCHURCH (Suisse) dit que la Suisse se trouve dans une situation analogue à celle de la Suède en ce qui concerne les conditions de travail imposées aux étrangers. Certes le principe dont s'inspire l'article 12 du Projet de convention est équitable. Il faut assurer aux réfugiés des conditions de vie normale, impliquant la liberté d'exercer une activité professionnelle. La situation actuelle du marché du travail en Suisse permet à ce pays d'observer ce principe. Toutefois, la Suisse ne peut s'engager à appliquer peur une durée illimitée les dispositions du paragraphe 2 de l'article 12, notamment en ce qui concerne les obligations imposées par les alinéas a) et b) et elle est contrainte de formuler des réserves sur ce point. Il ne faut pas oublier, en effet, nombre de ressortissants suisses sont obligés de s'expatrier pour trouver du travail. Le Gouvernement fédéral ne manquera pas néanmoins d'examiner avec toute la bienveillance désirable les cas d'espèce qui lui seront soumis.

M. HOEG (Danemark) indique que la délégation du Danemark se trouve sensiblement dans la même situation que les délégations de la Suisse et de la Suède, et qu'elle devra également formuler une réserve au sujet de l'ensemble de l'ensemble de l'article 12. Il existe, au Danemark, une réglementation régissant les permis de travail délivrés aux étrangers ; cette réglementation a été appliquée libéralement dans le passé et le représentant du Danemark espère qu'elle continuera à être interprétée de la même façon à l'avenir. En revanche, le Gouvernement danois ne peut s'engager à respecter les obligations prévues à l'article 12, notamment au paragraphe 2. Le représentant du Danemark ne peut donc appuyer l'amendement yougoslave. Il se déclare toutefois en faveur des amendements à l'article 12 présentés par le Royaume-Uni.

M. FRITZER (Autriche) fait observer que la délégation autrichienne se trouve également dans la même situation. Le Gouvernement autrichien lui a donné pour instruction de faire une réserve à propos de l'article 12 dont il pourrait accepter la disposition en tant que recommandation, mais non à titre obligatoire.

Il y a en Autriche 400 000 réfugiés et, au mois de décembre 1950, le nombre des chômeurs s'élevait à 200 000. Bien que les possibilités de son économie soient limitées, l'Autriche a fait tout ce qui était en son pouvoir pour les réfugiés qui se trouvaient sur son territoire, mais il serait extrêmement difficile pour un pays aussi petit d'accepter les obligations prévues à l'article 12. De 1945 à 1951, 580 millions de schillings ont été dépensés pour les réfugiés, somme qui aurait permis de construire 7000 logements. Au 28 février 1951, 162 000 étrangers avaient été naturalisés parmi lesquels 120 000 étaient des réfugiés ; si l'en compte les familles de ces réfugiés, le chiffre des personnes naturalisées serait à peu près de 177 000.

Pour ce qui est du problème de l'emploi, les réfugiés d'origine allemande (Volksdeutsche) qui sont employés comme domestiques ou comme nurses, par exemple, sont traités comme des ressortissants autrichiens. Il en est de même pour les Volksdeutsche qui ont travaillé pendant trois ans dans le même commerce, dans la même industrie ou dans la même entreprise. La période de trois ans prévue à l'alinéa a) du paragraphe 2 est donc déjà observée, dans la pratique, en Autriche.

Les réfugiés aveugles ou qui se trouvent sans ressources, ou qui ont été blessées au cours de la deuxième guerre mondiale peuvent aussi bénéficier de l'assistance publique, comme les nationaux autrichiens.

Enfin, le gouvernement fédéral autrichien s'occupe activement de résoudre le problème le plus urgent de l'assistance aux réfugiés, c'est-à-dire la construction de logements.

Chaque Etat a le devoir de s'occuper en tout premier lieu de ses propres ressortissants, mais, bien que le fait d'accorder aux réfugiés le même traitement qu'aux nationaux puisse donner lieu à des difficultés, le Gouvernement autrichien promet solennellement de faire tout ce qui est en son pourvoir pour transformer en une solution permanente celle qu'il a donnée provisoirement aux problèmes soulevés par les réfugiés qui se trouvent sur son territoire.

M. HERMENT (Belgique) rappelle que le nombre des chômeurs est élevé en Belgique. Ce pays est cependant disposé à accepter l'article 12 du projet de convention, mais la délégation belge devra faire des réserves sur le paragraphe 1 de cet article en raison des accords économiques et douaniers qui la lient à certains pays voisins.

En ce qui concerne le paragraphe 2, la Belgique présente un amendement (A/CONF.2/47) à l'alinéa b) de ce paragraphe qui, certes, en limite la portée, mais qui apparaît néanmoins indispensable. Il convient d'exiger en effet que le réfugié, pour être dispensé de l'application de mesures restrictives imposées aux étrangers, habite avec le conjoint qui lui apporte cet avantage parce qu'il est ressortissant du pays.

Le PRESIDENT indique que l'amendement belge sera examiné lorsqu'il aura été distribué dans les deux langues de travail.

M. CHANCE (Canada) fait observer au représentant de la Yougoslavie que le texte de l'article 12 - ainsi que celui des autres articles - est le résultat de dix-huit mois de discussions et de réflexion. Lors de la deuxième session du Comité spécial, certaines délégations avaient pensé qu'il serait possible d'accepter une proposition aussi simple que celle qui figure dans l'amendement yougoslave, mais, après de longs débats, il a été estimé que le paragraphe 1, tel qu'il figure dans le document A/CONF.2/1, aurait le plus de chances de recueillir l'approbation générale. Le représentant du Canada demande donc au représentant de la Yougoslavie de ne pas insister pour l'adoption de l'amendement qu'il a proposé, car, s'il insiste, la Conférence s'engagera probablement dans une discussion sans fin.

D'autre part, M. Chance ne parvient pas à partager les appréhensions éprouvées par le représentant du Royaume-Uni à propos de l'alinéa c) du paragraphe 2. Il doute que le problème soulevé soit d'une grande importance, mais, si le représentant du Royaume-Uni a une opinion très arrêtée en la matière, il est prêt à l'appuyer.

M. del DRAGO (Italie) déclare que le Gouvernement italien a toujours eu une opinion très nette sur la question en discussion. Son attitude à l'égard des engagements à prendre en vertu des divers articles du chapitre III du projet de Convention (Exercice des professions) a été précisée aussi bien dans la réponse du gouvernement italien (E/1703/Add.6) faite à la demande du Secrétaire général invitant les gouvernements à lui faire connaître leurs observations sur le rapport du Comité spécial de l'apatridie et des problèmes connexes, que dans la récente déclaration où le représentant de l'Italie a résumé les observations de son Gouvernement.1

L'Italie, pays surpeuplé, et comptant par conséquent un grand nombre de chômeurs, et dont les frontières terrestres de la côte adriatique sont proches de régions de régions constituant une source inépuisable de réfugiés, ne peut absolument pas prendre d'engagements au sujet de l'emploi ou de la naturalisation des réfugiés étrangers, qui ne pourraient qu'ajouter aux difficultés auxquelles se heurte déjà l'économie italienne.

Chaque année, quelque 300 000 étudiants italiens achèvent leurs études et cherchent un emploi. On ne peut refuser la possibilité de trouver un emploi à ces jeunes gens, parmi lesquels certains sont prêts à travailler le samedi et le dimanche.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement italien ne peut faire plus que de permettre aux réfugiés de bénéficier des lois et règlements actuellement appliqués à tous les étrangers résidant en Italie pour ce qui est du travail, de l'emploi, des professions salariées, des assurances, etc.

M. ROCHEFORT (France) félicite le représentant de la Yougoslavie de donner un généreux exemple de libéralisme. Il doute toutefois que l'amendement yougoslave puisse être applique par les pays d'accueil sans soulever une vague d'hostilité de la part des syndicats et un mouvement de xénophobie qui pourrait aboutir à la fermeture des frontières. En fait une telle générosité se retournerait donc contre ceux que l'on cherche à protéger. La politique d'accueil de la France est très large, mais c'est une politique d'étapes qui amène graduellement les réfugiés au bénéfice du droit total au travail. Ce libéralisme repose sur le droit d'asile. L'amendement yougoslave met en cause l'existence même de ce droit et ne reflète donc pas une position très réaliste.

Toute adhésion française devra du reste être subordonnée à des réserves sur l'article 12, comme cela a eu lieu pour l'article correspondant de la Convention de 1933.

En ce qui concerne l'amendement du Royaume-Uni, la délégation de la France préfère conserver l'alinéa a) du paragraphe 2 sous sa forme actuelle. Elle est opposée à l'alinéa c) de ce paragraphe, mais ne s'opposera pas à l'amendement belge à l'alinéa c).

M. SHAW (Australie) indique que ce qui le préoccupe en premier lieu, à propos de l'article 12, c'est l'interprétation à donner à l'expression « résidant régulièrement sur leur territoire » au paragraphe 1. Il estime qu'il faudrait insérer dans la convention un article interprétatif du genre de celui que lui-même propose (A/CONF.2/41).

En Australie, comme dans un certain nombre d'autres pays, il existe plusieurs catégories de personnes ayant un visa pour un séjour temporaire, comme par exemple les étudiants, les malades suivant un traitement médical et les hommes d'affaires qui n'ont pas de domicile permanent dans ce pays leur donnant le droit d'exercer une profession rétribuée. Il se pourrait que ces personnes qui « résident régulièrement » sur le territoire de ces pays, revendiquent plus tard les droits dont jouiraient les réfugiés ; leur revendication pourrait être légitime si, par exemple, une révolution s'était produite dans l'intervalle dans leur pays d'origine. A son avis, toutefois, les étrangers qui séjournent temporairement dans un pays donné ne devraient pas avoir automatiquement le droit de bénéficier des dispositions de la Convention ; il faudrait qu'ils soient tenus tout d'abord de fournir aux autorités la preuve que, par suite de circonstances intervenues, ils sont habilités à bénéficier de ces dispositions. Evidemment, les étrangers, réfugiés compris, qui ont été admis à titre permanent sur un territoire donne sont régulièrement habilités à jouir de ces droits.

C'est pourquoi le représentant de l'Australie a déposé sa proposition visant à insérer dans la convention un nouvel article 11 (A). Sa proposition constitue peut-être une façon compliquée de résoudre la difficulté, et il pense que certains représentants qui ont participé aux travaux des comités spéciaux pourraient être à même de faire des suggestions sur la manière de l'améliorer.

Il épreuve également certains doutes au sujet da l'expression « dans les mêmes circonstances » à la deuxième ligne du paragraphe 1 et il rappelle, à ce propos, la déclaration qu'il a faite précédemment à propos de la situation de l'Australie en tant que pays d'immigration. Il n'est pas question de faire preuve de discrimination à l'égard des réfugiés, et la délégation australienne considère comme acceptable le sens général de l'article 12. Le but de l'Australie est d'assimiler les réfugiés qui se trouvent sur son territoire mais son plan d'immigration prévoit des contrats de travail pour certaines catégories d'immigrants. Environ 160 000 réfugiés sont entrés en Australie en vertu d'un accorde conclu avec l'Organisation internationale pour les réfugiés (OIR) ; ils ont été considérés comme des immigrants assistes et ont dû accepter des contrats de travail de deux ans. Il y a en plus, un afflux annuel de 40 000 à 50 000 immigrants non réfugiés venant de pays avec lesquels l'Australie a conclu des accords bilatéraux et qui ont accepté la condition du contrat de deux ans. En outre, 150 000 étrangers non réfugiés et 50 000 étrangers réfugiés ont été admis depuis la seconde guerre mondiale sans aide ni contrats de travail.

Certains représentants ont affirmé que les réserves formulées par la délégation australienne seraient couvertes par l'expression « dans les mêmes circonstances », cette expression étant considérée comme signifiant que les réfugiés devraient bénéficier du même traitement que les autres étrangers dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire que les réfugiés devraient remplir les mêmes conditions que celles qui sent prescrites pour les ressortissants d'Etats étrangers résidant en Australie. Mais une rédaction aussi vague ne peut résoudre la difficulté envisagée, et des problèmes pourraient naître au sujet des différentes catégories de réfugiés admis aux termes du plan australien d'immigration.

C'est pour toutes ces raisons que le représentant de l'Australie a déposé sa proposition. Il s'est efforcé de la rédiger de telle sorte qu'elle s'applique à un nombre d'articles aussi restreint que possible, à savoir les articles 12, 13, 14 et 21 qui, à son avis, peuvent donner lieu à conflit entre la convention et le système australien des contrats de travail. Il espère avoir ainsi répondu à l'objection selon laquelle sa proposition était rédigée en termes trop larges et trop généraux.

Son attitude à l'égard des articles 12, 13, 14 et 21 dépendra de l'attitude que la Conférence adoptera vis-à-vis de sa proposition ; il réservera donc sa position si ces articles sont mis aux voix avant qu'une décision ait été prise au sujet de son texte.

M. van HEUVEN GOEDHART (Haut-Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés) estime que l'article 12 constitue un élément fondamental du projet de convention et qu'il serait déplorable de l'atténuer par des amendements de fond. Il comprend les motifs qui ont incité la délégation de la Yougoslavie a déposer son amendement. Il n'en appuie pas moins entièrement les observations pertinentes du représentant de la France. Accepter l'amendement de la Yougoslavie serait aller à l'encontre des intentions réelles de la délégation de la Yougoslavie ; en effet, ainsi que l'a déclaré le représentant de la France, certaines délégations se verront alors dans l'obligation de faire des réserves sur l'ensemble de l'article.

Deux réserves appropriées permettront de répondre aux objections soulevées par le représentant du Royaume-Uni. D'une part, l'article 12 dans sa forme actuelle conservera ainsi toute sa force et d'autre part les difficultés prévues par la délégation du Royaume-Uni se trouveront résolues. L'orateur espère que l'article 12 sera adopté sans être amendé et que les délégations qui ne seront pas en mesure de l'accepter dans sa totalité feront les réserves nécessaires. Il faut également espérer que le représentant de la Yougoslavie reconsidérera sa position.

MUSTAPHA Bey (Egypte) tient, au stade actuel des débats, à préciser la position du Gouvernement égyptien quant à l'ensemble des articles groupés au chapitre III du projet de convention sous le titre « Exercice des professions ».

Pour des raisons à la fois d'ordre historique, géographique et politique, l'Egypte possède une colonie étrangère prospère qui forme 5 pour 100 de sa population totale. Cette colonie jouit d'un traitement libéral qui lui permet d'exercer de multiples activités et elle collabore amicalement au développement économique du pays. Mais comme le représentant de l'Egypte l'a déjà indiqué, son pays se trouve aux prises avec de sérieux problèmes démographiques et il est donc dans l'obligation d'exclure certaines professions du champ d'activité des ressortissants étrangers.

L'Egypte n'est ni un pays d'accueil, ni un pays d'immigration et elle est toute disposée à étendre aux réfugiés le bénéfice des dispositions prises en faveur des étrangers. Toutefois, l'Egypte négocie en ce moment des traites d'établissement avec divers pays et elle entend faire figurer dans ces traités une clause lui permettant de fermer l'accès de certains métiers ou de certaines profession aux étrangers. C'est pourquoi la délégation égyptienne présente un amendement (A/CONF.2/43) tendant à ajouter un nouvel article 14 (A), amendement qu'elle expliquera en temps voulu. Elle ne peut donc appuyer l'amendement yougoslave à l'article 12.

Une autre question qui est d'ordre juridique, la préoccupe : celle de la procédure des réserves. L'orateur attire l'attention de la Conférence sur le fait que les Etats qui accéderont à la convention après qu'elle aura été signée ne pourront pas formuler de réserves. Il semble, dans ces conditions, que la conférence ferait mieux de modifier le texte du projet de convention au lieu d'envisager la possibilité de réserves nombreuses.

Le PRESIDENT appelle l'attention du représentant de l'Egypte sur le paragraphe 1 de l'article 36 proposé par le Comité spécial (A/CONF.2/2), et d'après lequel les Etats contactants pourront formuler des réserves à certains articles de la convention au moment de la signature, de la ratification ou de l'adhésion.

M. ANKER (Norvège) dit que la Norvège accepte la principe énoncé à l'article 12 du projet de convention. Elle peut d'autant mieux sa rallier à ce principe que la législation norvégienne du travail accorde aux réfugiés un traitement plus favorable qu'aux étrangers en général. Mais elle ne peut aller plus loin et ne saurait consentir à traiter les réfugiés sur le même pied que ses nationaux pour le travail salarié. Elle ne peut donc accepter l'amendement yougoslave.

Le représentant de la Norvège tient à s'associer aux déclarations faites par les représentants de la Suède et du Danemark en ce qui concerne la politique régionale des pays scandinaves à l'égard du marché du travail. Aussi devra-t-il faire des réserves sur l'article 12 lors de la signature de la convention. Dans le cas où l'article 36 du projet de convention relatif aux réserves ne serait pas adopté, la délégation norvégienne présentera en temps utile un amendement à l'article 12. Elle ne pense pas toutefois que cela sera nécessaire.

Le PRESIDENT déclare qu'en rédigeant l'article 12, le Comité spécial a également songé aux cas où les réfugiés pourraient se rendre temporairement dans un certain pays pour des raisons particulières et pendant une période déterminée, par exemple aux fins d'études. Ce n'est évidemment que justice de ne pas leur accorder le droit d'exercer une activité professionnelle salariée dans une mesure plus grande qu'aux étrangers dont le séjour est régi par des conditions particulières.

Passant à une question de principe général, il déclare que la Conférence peut, en fait, aborder le projet de Convention sous deux angles différents. Elle peut, soit viser à la perfection, soit chercher le plus petit dénominateur commun d'accord. Dans le cas où elle adopterait cette dernière méthode, le gouvernement qui insistera pour obtenir les conditions les plus restrictives sera en mesure de dicter la forme définitive que prendront les dispositions du projet de convention. Si en revanche c'est la première méthode qui est adoptée, bien des gouvernements se verront sans doute dans l'obligation de formuler des réserves ; ce faisant, souligne le président, ils réserveront leur attitude sur des articles considérés dans leur ensemble, sans établir de distinction entre leurs diverses dispositions. Aucune de ces deux solutions ne semble très opportune ; c'est pourquoi le Président demande aux représentants de s'en tenir à une juste moyenne et, si possible, par la persuasion ou l'exemple, d'encourager les autres à retirer ultérieurement leurs réserves. Si la Conférence s'engage dans cette voie, il sera peut-être possible, croit-il, de mettre au point un instrument équitable et efficace.

M. HOARE (Royaume-Uni) a été très frappé par les arguments du représentant de la France relatifs aux alinéas a) et c) du paragraphe 2. Il n'ira pas à l'encontre de la volonté de la majorité en maintenant l'amendement du Royaume-Uni (A/CONF.2/40) qui, a-t-on dit, risquerait d'affaiblir le projet de convention, uniquement afin d'éviter d'éventuelles difficultés dans son propre pays. Il partage entièrement le point de vue du Président : la Conférence devrait s'efforcer de rédiger un texte aussi libéral que possible, compte tenu des possibilités pratiques. Les gouvernements auront évidemment la faculté de formuler des réserves au sujet de telle ou telle disposition. Le représentant du Royaume-Uni retirera donc son amendement.

Le PRESIDENT présume que l'alinéa c) du paragraphe 2 traite aussi bien des enfants illégitimes que des enfants légitimes, étant donné la disposition contenue dans l'article 25(2) de la Déclaration universelle les droits de l'homme.

M. ROBINSON (Israël) estime que l'alinéa c) commençant dans le texte anglais par le pronom masculin « he », il ne peut s'agir que des enfants légitimes. Il serrait d'avis d'ajouter, dans ce cas particulier, les mots « or she » après le mot « he » si l'on veut que la disposition soit applicable aux enfants illégitimes. Il n'est pas nécessaire d'insérer ces mots dans d'autres parties du projet de convention, où il est entendu que le pronom « he » englobe les hommes et les femmes.

M. ROCHEFORT (France) pense que le texte actuel de l'alinéa est satisfaisant. Il serait difficile de préciser davantage.

M. van BOETZELAER (Pays-Bas) estime que les dispositions du paragraphe 3 de l'article 12 constituent plutôt une recommandation qu'une obligation pour les Etats contractants. Or, il ne convient pas de formuler des recommandations dans une convention. Il serait donc souhaitable de reporter les voeux et les recommandations figurant actuellement dans le projet de convention dans un projet de résolution distinct que la Conférence pourrait adopter ultérieurement lors de la signature de l'instrument.

M. MAKIEDO (Yougoslavie) comprend les difficultés auxquelles les gouvernements auront éventuellement à faire face à propos de la disposition contenue dans l'amendement à l'article 12 présenté par la délégation de la Yougoslavie. Néanmoins, il tient à celui des chômeurs ; si l'on n'accorde pas aux premiers la liberté de chercher un emploi sur un pied d'égalité avec les ressortissants du pays, ils n'arriveront pas à trouver du travail. Pendant l'élaboration de la Constitution actuelle de la Yougoslavie, qui contient certaines dispositions relatives au statut des réfugiés, le problème ne se posait pas pour son pays de manière particulièrement aiguë. Depuis lors, le flot de réfugiés venant d'Europe orientale a atteint des proportions appréciables et continue à augmenter ; la situation économique de la Yougoslavie s'est aggravée par suite du blocus économique imposé par les pays du Kominform. Il ne saurait pour autant retirer son amendement à l'article 12, article capital qui traite du droit au travail. Toutefois, étant donné les arguments avancés au sujet de l'article 12, il réexaminera les amendements qu'il a formulés à certains autres articles du projet de convention.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) a été frappé par les objections valables formulées contre l'amendement yougoslave qui, s'il était adopté, risquerait de soulever des difficultés d'application. C'est pourquoi il s'abstiendra de participer au vote.

Le PRESIDENT propose, étant donné qu'aucun autre orateur ne demande la parole dans le débat général, de clore la discussion sur l'article 12.

Il en est ainsi décidé.

Le PRESIDENT met aux voix l'amendement Yougoslavie à l'article 12 (A/CONF.2/31).

Par la voix contre une, avec 4 abstentions, l'amendement yougoslave est rejeté.

Le PRESIDENT déclare qu'il va mettre aux voix l'amendement de la Belgique (A/CONF.2/47), l'alinéa b) du paragraphe 2 de l'article 12 tendant à l'addition des mots « et résider avec le conjoint. »

M. ROCHEFORT (France) voudrait, bien que l'on soit maintenant sur le point de voter sur l'amendement de la Belgique, présenter une observation au sujet de la rédaction de cet amendement. Un réfugié peut se trouver dans l'impossibilité matérielle de résider avec son conjoint et, dans ce cas, le texte de l'amendement belge, s'il est adopté, n'assurera pas à ce réfugié un traitement équitable. Peut-être pourrait-on, pour éviter ce danger, ajouter à l'alinéa b) du paragraphe 2 la phrase suivante : « Le réfugié ne pourra invoquer le bénéfice de cette disposition au cas où il aurait abandonné son conjoint ».

M. HERMENT (Belgique) accepte la suggestion du représentant de la France.

M. HOARE (Royaume-Uni) estime que l'ensemble de la question mérite plus ample examen. Essayer, comme l'a fait le représentant de la France, d'améliorer l'amendement belge soulève de nouvelles difficultés. Par exemple, un réfugié pourrait ne pas avoir abandonné sa femme mais l'avoir traitée avec une telle cruauté qu'elle aura été contrainte de le quitter. De plus, si l'épouse a pu obtenir d'un tribunal, l'octroi d'une pension alimentaire par son mari, il sera évidement souhaitable que le mari continue de jouir de ses droits en matière d'emploi, de manière à pouvoir subvenir à l'entretien de son épouse. Il est très difficile d'envisager toutes les éventualités et il serait donc peut-être sage de s'en tenir à la rédaction originale.

M. ROCHEFORT (France) reconnaît le bien-fondé des observations du représentant du Royaume-Uni. On pourrait sans doute trouver une meilleure formule que la sienne pour donner satisfaction au représentant de la Belgique.

MUSTAPHA Bey (Egypte) suggère de surseoir au vote sur les trois articles du chapitre III en raison de leur interdépendance. La délégation égyptienne présente en effet un amendement à l'article 14 qui vise aussi les articles 12 et 13 et sa position à l'égard de tous les articles du chapitre III dépendra du sort réservé à cet amendement.

M. van BOETZELAER (Pays-Bas) croit que l'en voudrait que le mariage d'un réfugié fût suivi d'une cohabitation durable. Or, ce n'est pas ce qu'exprime l'amendement belge.

M. HERMENT (Belgique) déclare qu'il est bien connu que des mariages ont été contractes uniquement pour obtenir certains avantages. Il serait paradoxal qu'un réfugié qui retire un bénéfice de sa situation de sa famille ne respecte pas les obligations que comporte cette situation. C'est pourquoi le représentant de la Belgique insiste pour que la Conférence adopte son amendement dont on peut sans doute améliorer le texte si sa forme actuelle ne donne pas satisfaction à certaines délégations.

M. ROCHEFORT (France) pense que l'on va au devant de difficultés croissantes et de complications de tout genre. Il se demande s'il ne vaut pas mieux laisser aux autorités des Etats contractants la latitude nécessaire pour refuser en interprétant le paragraphe 2 de l'article 12 le bénéfice de ses dispositions au réfugié qui aurait abandonné son conjoint ou qui ne remplirait pas ses obligations familiales. Dans ces conditions, le représentant de la Belgique n'accepterait-il pas de retirer son amendement ?

M. HERMENT (Belgique) n'est pas en mesure de donner une réponse immédiate sur ce point et examinera la question.

Le PRESIDENT fait observer que sa proposition tendant à clore la discussion générale sur l'article 12 a été adoptée. Il a fait usage des prérogatives de la Présidence pour autoriser le représentant de la France à proposer, au moment même où cet amendement allait être mis aux voix, une nouvelle rédaction de l'amendement belge que le représentant de la Belgique a acceptée. Eu égard aux difficultés qui ont surgi par la suite, le Président estime qu'il serait préférable de passer au vote immédiatement sur le fond et de laisser au Comité du style le soin de trouver une rédaction appropriée.

Par 6 voix contre 5, avec 9 abstentions, l'amendement présenté par la Belgique à l'alinéa b) du paragraphe 2 de l'article 12, tel qu'il a été rédigé à nouveau par le représentant de la France, est adopté, sous réserve des modifications de forme que le Comité du style y apportera.

Par 16 voix contre zéro, avec 4 abstentions, l'article 12 ainsi amendé est adopté.

2. Article 13 - Professions non salariées

M. MAKIEDO (Yougoslavie) retiré l'amendement (A/CONF.2/31) à l'article 13 qu'il avait présenté.

M. van BOETZELAER (Pays-Bas) estime que, dans le texte anglais, l'emploi du terme « engage » ne convient guère dans un article ayant trait aux professions non salariées.

M. HOARE (Royaume-Uni) partage l'avis du représentant des Pays-Bas et juge que le texte gagnerait à être complété par les mots « on his own account » après le mot « engage ».

Il en est ainsi décidé.

Le PRESIDENT précise que cet amendement n'entraîne aucune modification du texte français.

M. SHAW (Australie), pour une explication de vote, déclare qu'il s'abstiendra lorsque les articles 12, 13 et 14 seront mis aux voix en attendant qu'une décision soit prise au sujet de sa proposition (A/CONF.2/41) visant à l'adoption d'un nouvel article de caractère interprétatif.

Le PRESIDENT met aux voix l'article 13.

Par 20 voix contre zéro, avec 2 abstentions, l'article 13 est adopté.

3. Article 14 - Professions libérales

M. van BOETZELAER (Pays-Bas) n'insistera pas pour faire adopter sa proposition antérieure visant à supprimer dans le projet de convention, pour en faire l'objet d'une résolution séparée, les dispositions ayant la forme de recommandations adressées aux gouvernements, telles que celles qui figurent au paragraphe 3 de l'article 12 et au paragraphe 2 de l'article 14 ; néanmoins, le représentant des Pays-Bas se demande s'il est vraiment opportun de faire figurer dans la convention dont le but est de donner un statut juridique aux réfugiés le texte du paragraphe 2 de l'article 14 qui traite de la réinstallation des réfugiés. Toutefois, si la majorité désire maintenir ce texte, M. van Boetzelaer tient à faire observer que les mots « leurs colonies ou protectorats et dans les territoires sous leur tutelle » ne sont pas compatibles avec la teneur de l'article 35 du projet de convention : clause coloniale.

M. ROCHEFORT (France) pense que de toute façon il faut modifier la rédaction de cette clause. On pourrait réserver la question pour la seconde lecture du projet de Convention.

M. HOARE (Royaume-Uni) estime, avec le représentant des Pays-Bas, que le paragraphe 2 de l'article 14 devrait correspondre à la teneur de l'article 35. Il ne s'agit toutefois pas d'une question de fond et la décision pourrait être laissée au Comité du style.

Le PRESIDENT propose que les représentants de la France, des Pays-Bas et du Royaume-Uni examinent ce texte à titre officieux et qu'une nouvelle rédaction soit soumise ultérieurement à la Conférence. Entre temps, la Conférence pourrait passer au vote sur le paragraphe 1 de l'article 14 et sur le fond même du paragraphe 2 de cet article, étant donné que, si ces dispositions étaient rejetées, il n'y aurait pas lieu d'en remanier le texte.

M. ROCHEFORT (France) ne voit pas l'inconvénient à cette façon de procéder mais à condition toutefois que la modification du texte ne se fasse pas au détriment de la terminologie de l'article 35. En tout état de cause, la délégation française s'abstiendra de voter sur un paragraphe dont la forme doit être modifiée.

La proposition du Président est adoptée.

Par 19 voix contre zéro, avec 2 abstention, le paragraphe 1 de l'article 14 est adopté.

Par 16 voix contre zéro, avec 5 abstention, le paragraphe 2 de l'article 14 est adopté, sous réserve des modifications de forme par le Comité du style.

Le PRESIDENT indique que l'article 14 sera mis aux voix dans son ensemble lorsque le texte définitif du paragraphe 2 aura été adopté.

4. Proposition d'un article nouveau 14 (A) (A/CONF.2/43)

MUSTAPHA Bey (Egypte) a peu de choses à ajouter à l'explication qu'il a déjà donnée de la substance de son amendement (A/CONF.2/43). Le but de cet amendement est de donner aux Etats contractants le droit de réserver l'exercice de certaines professions à leurs ressortissants nationaux. Cette faculté est nécessaire pour certains Etats qui, comme l'Egypte, se trouvent aux prises avec de sérieux problèmes démographiques.

M. HERMENT (Belgique) se demande si l'amendement égyptien est bien indispensable pour réserver ces droits. Le projet de convention confère en effet aux réfugiés le régime des étrangers et non pas celui des nationaux.

MUSTAPHA Bey (Egypte) estime que, puisqu'une réserve du même genre figure dans les traités bilatéraux d'établissement que son pays est en train de négocier avec certains autres pays, il ne peut y avoir d'inconvénient à l'inscrire dans la convention et à l'appliquer aux réfugiés étant donné que la tendance est d'assimiler ceux-ci aux étrangers.

M. HERMENT (Belgique) ne s'y oppose pas, mais il ne voit pas encore la nécessité d'introduire cette nouvelle réserve dans le projet de convention. En règle générale, d'ailleurs, il faut, ne serait ce que pour des raisons d'ordre psychologique, éviter d'étendre, dans un instrument comme la convention, les dispositions d'ordre restrictif.

M. HOARE (Royaume-Uni) partage les vues du représentant de la Belgique. Les réfugiés devant bénéficier des mêmes droits que les étrangers, il est inutile de parler des droits réserves aux nationaux et il pourrait être dangereux de mentionner, comme le fait la proposition de l'Egypte, des droits pouvant faire l'objet d'une réglementation spéciale, étant donné que les Etats serraient peut-être incités à prendre de ce fait des mesures de ce genre à l'égard des réfugiés.

Le PRESIDENT met aux voix la proposition égyptienne d'insérer un article 14 (A) nouveau (A/CONF.2/43).

Par 13 voix contre 2, avec 5 abstentions, la proposition égyptienne est rejetée.

Le PRESIDENT propose à la Conférence d'examiner à la prochaine séance la proposition de l'Australie (A/CONF.2/42) visant à insérer un nouvel article de caractère interprétatif.

M. SHAW (Australie) suggère d'étudier tous ensemble les articles de caractère interprétatif ; dans ce cas la Conférence pourrait avoir intérêt à ne pas modifier l'ordre actuel de ses débats et à passer à l'examen de l'article 15.

Il en est ainsi décidé.

La séance est levée à 12 h. 55.


1 Voir le compte rendu analytique de la troisième séance (A/CONF.2/SR.3).