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Jordanie et les Émirats arabes unis : information sur le traitement réservé aux femmes divorcées, y compris celles qui vivent avec leur ex-époux, par les membres de leur famille et la société; la violence fondée sur l'honneur, y compris la protection offerte par l'État (2015-août 2017)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 15 September 2017
Citation / Document Symbol ZZZ105955.EF
Related Document(s) Jordan and the United Arab Emirates: Treatment of divorced women, including those living with their ex-husband, by family members and society; information on honour-based violence, including state protection (2015-August 2017)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Jordanie et les Émirats arabes unis : information sur le traitement réservé aux femmes divorcées, y compris celles qui vivent avec leur ex-époux, par les membres de leur famille et la société; la violence fondée sur l'honneur, y compris la protection offerte par l'État (2015-août 2017), 15 September 2017, ZZZ105955.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/5afadefc7.html [accessed 30 May 2023]
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15 septembre 2017
ZZZ105955.EF
Jordanie et les Émirats arabes unis : information sur le traitement réservé aux femmes divorcées, y compris celles qui vivent avec leur ex-époux, par les membres de leur famille et la société; la violence fondée sur l'honneur, y compris la protection offerte par l'État (2015-août 2017)

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

1. Femmes divorcées

Pour obtenir des renseignements sur le divorce en Jordanie et aux Émirats arabes unis, y compris les exigences à satisfaire et la marche à suivre pour l'obtenir, veuillez consulter la Réponse à la demande d'information ZZZ105954 du 6 septembre 2017.

1.1 Jordanie

Des sources soulignent que les femmes en Jordanie font l'objet de discrimination juridique à un certain nombre d'égards, y compris le divorce et la garde d'enfant (É.-U. 3 mars 2017a, 34; Freedom House 2016). Human Rights Watch ajoute que [traduction] « le code sur le statut personnel en vigueur en Jordanie demeure discriminatoire malgré les modifications qui y ont été apportées en 2010 qui prévoyaient entre autres l'élargissement de l'accès des femmes au divorce et à la garde d'enfant » (Human Rights Watch 12 janv. 2017).

Les renseignements contenus dans le paragraphe suivant ont été fournis par un professeur de l'Université de Georgetown qui se spécialise dans les questions liées au genre en Jordanie dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches :

Le traitement réservé aux femmes par les membres de leur famille et la société en Jordanie [traduction] « dépend de la classe sociale et de la région ». Dans le passé, [traduction] « le fait d'être divorcée était mal vu, et pour de nombreuses communautés, c'est toujours le cas ». Les enfants de femmes divorcées peuvent également être stigmatisés ou mal traités. [traduction] « [D]ans de nombreuses communautés, une femme divorcée doit retourner vivre dans sa maison natale avec un parent de sexe masculin et, dans certains cas, sa propre famille refusera de lui permettre d'emmener ses enfants, laissant ces derniers vulnérables aux mauvais traitements » (professeur 28 août 2017).

Les renseignements contenus dans le paragraphe suivant ont été fournis, dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, par un gestionnaire du Sisterhood is Global Institute/Jordan (SIGI-JO), une ONG indépendante et sans but lucratif qui a été créée en 1998 et qui défend les droits et l'autonomisation des femmes et des filles en Jordanie (SIGI-JO 28 août 2017).

Les femmes divorcées éprouvent des difficultés dans leur famille [traduction] « en raison de la culture sociale dominante, qui condamne et accuse les femmes divorcées, de sorte que leurs déplacements sont restreints et dépendent du consentement et de l'approbation de la famille ». Les femmes divorcées issues de familles à faible revenu peuvent être considérées comme un [traduction] « fardeau financier, en particulier si elles sont accompagnées de leurs enfants »; cette situation a des « effets catastrophiques, principalement dans les communautés traditionnelles et rurales » ou lorsque ces femmes ne sont pas instruites et sont sans emploi (SIGI-JO 28 août 2017).

En ce qui concerne les femmes divorcées qui vivent avec leur ex-époux en dehors des liens du mariage, la même source a affirmé ce qui suit :

[traduction]

Le SIGI-JO ne dispose d'aucune information sur les femmes divorcées qui vivent sous le même toit que leur ex-époux, car cette façon de faire est contraire à la loi islamique et aux coutumes et traditions musulmanes. Le comportement le plus courant consiste, pour la femme, à quitter le foyer conjugal dès que le divorce a lieu, même si la charia autorise une femme divorcée à demeurer dans le foyer conjugal jusqu'à la fin de l'« edda » (la charia prévoit une période d'edda de trois mois pour une femme divorcée, pendant laquelle l'époux de celle-ci peut retourner auprès d'elle). Cependant, les coutumes sociales amènent la femme à quitter la maison immédiatement après le divorce (SIGI-JO 28 août 2017).

Le SIGI-JO précise également qu'une femme divorcée peut [traduction] « subir diverses pressions sociales et familiales », notamment les suivantes :

  • la menace d'être privée de ses enfants;
  • la menace de faire l'objet d'actes de violence si elle se comporte mal ou si elle a eu des rapports sexuels sans être mariée, ou si elle a eu une liaison avec un autre homme, même sans avoir de rapports sexuels avec lui;
  • les accusations de comportement répréhensible ou d'inconduite;
  • l'extorsion afin de la priver de son salaire, de son héritage ou de son argent;
  • la menace de l'obliger à épouser un homme qu'elle ne souhaite pas épouser ou qui est beaucoup plus âgé qu'elle (la contrainte de se marier);
  • l'exploitation, en particulier l'exploitation sexuelle ou financière;
  • la menace de la forcer à quitter son emploi (si elle travaille) ou à cesser ses études (si elle fait des études);
  • la restriction de ses déplacements;
  • l'exposition à la réprobation sociale en tant que divorcée;
  • le stress psychologique et émotionnel (SIGI-JO 28 août 2017).

1.2 Émirats arabes unis

On peut lire dans un rapport de 2015 publié par le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (Committee on the Elimination of Discrimination Against Women - CEDAW) [1] que, aux Émirats arabes unis, de [version française des Nations Unies] « nombreuses dispositions de la loi relative au statut personnel […] sont discriminatoires à l'égard des femmes et des filles »; il y a notamment des restrictions dans le domaine du divorce (Nations Unies 24 nov. 2015, paragr. 45). De même, il est écrit dans un rapport de 2014 produit par l'indice Institutions sociales et égalité homme-femme (Social Institutions and Gender Index - SIGI) de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) [2] que le code de la famille des Émirats arabes unis est [traduction] « [d]iscriminatoire » (SIGI 2014b, 1). Le rapport cite des sources universitaires et des sources de l'UNICEF et selon qui, alors que les hommes ont le droit de divorcer [traduction] « unilatéralement » ou de « répudier » leurs épouses, les femmes qui souhaitent divorcer peuvent le faire pour un « nombre très limité de motifs » ou en acceptant de perdre leur dot (SIGI 2014b, 2).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun autre renseignement sur le traitement réservé aux femmes divorcées aux Émirats arabes unis.

2. Violence fondée sur l'honneur en Jordanie

Selon Human Rights Watch, de 15 à 20 femmes et filles environ sont tuées chaque année en Jordanie par des hommes de leur famille parce que l'on considère qu'elles ont enfreint les codes sociaux et ont ainsi sali l'honneur de la famille (Human Rights Watch 27 oct. 2016).

En janvier 2016, la même source a en outre signalé ce qui suit :

[traduction]

[D]es reportages font état du fait qu'au moins 10 femmes et filles ont été tuées par un homme de leur famille en 2015. Par exemple, un père a tiré quatre fois sur sa fille parce qu'elle a quitté le domicile familial et aurait entretenu une relation avec un homme que sa famille refusait de la voir épouser. Les autorités ont arrêté le père sur les lieux de l'incident (Human Rights Watch 27 oct. 2016).

De même, Freedom House écrit que, [traduction] « [d]'après une ONG locale, au moins une dizaine de crimes d'honneur ont été commis en 2015, sans compter plusieurs tentatives » (Freedom House 2016). L'Associated Press (AP) signale que le principal tribunal criminel de la Jordanie [traduction] « a traité 39 meurtres de femmes en 2015, dont 9 étaient considérés comme des "crimes d'honneur" » (AP 24 juin 2017). Il ressort des Country Reports on Human Rights Practices for 2015 publiés par le Département d'État des États-Unis que, en octobre 2015, sept affaires de crimes d'honneur avaient été déférées à une cour de justice depuis le début de l'année et que, en septembre, 14 crimes d'honneur potentiels avaient été signalés par des ONG (É.-U. 13 avr. 2016, 30).

D'après Human Rights Watch, [traduction] « [l]e Sisterhood is Global [Institute], qui fait le suivi des questions touchant les droits des femmes dans le pays, a constaté une augmentation de 53 p. 100 du nombre de crimes d'[honneur] en 2016, 26 crimes "d'honneur" » ayant été commis en date d'octobre 2016, comparativement à 17 en 2015 (Human Rights Watch 27 oct. 2016). Le Guardian souligne que, en décembre 2016, 38 femmes avaient été tuées dans le cadre de crimes [traduction] « d'honneur » commis au cours de l'année (The Guardian 9 déc. 2016). L'AP écrit que 36 femmes ont été tuées en 2016 et que dans 8 cas, il s'agissait de [traduction] « crimes d'honneur » (AP 24 juin 2017). On peut lire dans les Country Reports 2016 que, en date de septembre 2016, 4 affaires de [traduction] « crimes d'honneur » avaient été déférées à une cour de justice, alors que des « ONG avaient signalé 18 crimes d'honneur potentiels » (É.-U. 3 mars 2017a, 32).

Des sources font remarquer que bon nombre d'actes de violence fondée sur l'honneur ne sont pas signalés (É.-U. 3 mars 2017a, 32; AP 24 juin 2017). L'AP, citant les propos de Samar Muhareb, [traduction] « directeur d'un groupe d'aide juridique », ajoute ce qui suit :

[traduction]

[L]es communautés préfèrent traiter ces crimes dans le cadre d'un arbitrage tribal afin d'éviter la honte publique. « Chaque fois qu'il est question de justice informelle, c'est au détriment des femmes » a affirmé Samar Muhareb (AP 24 juin 2017).

Des sources ont fait état des incidents suivants de violence fondée sur l'honneur en Jordanie :

  • Le 15 avril, le procureur général a accusé deux hommes du meurtre prémédité d'une femme de leur famille dans un cas évident de crime d'honneur. Il s'agissait de l'époux et du frère de la victime. L'époux a avoué avoir étranglé son épouse avec l'aide du frère de cette dernière et avoir ensuite brûlé le corps. Il a dit aux enquêteurs qu'il devait la tuer pour laver l'honneur de la famille parce qu'elle quittait souvent le foyer conjugal sans son approbation (É.-U. 13 avr. 2016, 30).
  • Les Country Reports 2015 soulignent que, [traduction] « le 5 mai, le procureur général de la Cour criminelle suprême [(Supreme Criminal Court)] a accusé un homme du meurtre prémédité de sa fille dans un cas évident de crime d'honneur », précisant ceci :
    Le suspect a tiré sur sa fille devant le bureau de l'agent du district de Marka le 4 mai, après que celle-ci eut disparu durant un an et demi. Selon des représentants du gouvernement et des reportages dans les médias, l'homme soupçonnait sa fille d'avoir entretenu une relation amoureuse en dehors des liens du mariage. L'agent de district avait demandé au père de se présenter à son bureau pour signer une promesse de ne faire aucun mal à sa fille afin qu'elle puisse être réunie avec sa famille (É.-U. 13 avr. 2016, 30-31).
  • En 2015, une femme divorcée de 25 ans a été tuée par son frère de 17 ans à Muwaqqar; des sources officielles ont déclaré que [traduction] « [l]e meurtre pourrait avoir été commis pour sauver l'honneur de la famille », précisant que la femme était divorcée depuis trois mois (The Jordan Times 18 oct. 2015).
  • Human Rights Watch signale que, en l'espace d'une semaine en octobre 2016, cinq femmes ont été tuées pour venger [traduction] « l'honneur de la famille », y compris une mère de trois enfants âgée de 36 ans, qui « aurait été battue et étranglée par son ex-époux dans son domicile situé tout juste à l'est de la capitale de la Jordanie, Amman », ainsi qu'une fille de 20 ans qui a été tuée par balle par son frère « dans la ville de Madaba après que celui-ci aurait découvert qu'elle avait un téléphone dont leur famille ignorait l'existence » (Human Rights Watch 27 oct. 2016).
  • Une jeune femme [traduction] « a été mise sous garde préventive après qu'elle eut été poignardée à 17 reprises par son frère qui l'a accusée d'avoir jeté la "honte" sur la famille parce qu'elle a fui un époux violent » (AP 24 juin 2017).

2.1 Protection offerte par l'État

Des sources font observer que les crimes [traduction] « d'honneur » ont tendance à être punis moins sévèrement (Freedom House 2016; The Jordan Times 1er avr. 2017) que les autres types de meurtres (The Jordan Times 1er avr. 2017).

Des sources écrivent que la Jordanie a créé en 2009 un tribunal spécial chargé de traiter les cas de crimes d'honneur (The Jordan Times 1er déc. 2016; Freedom House 2010, 3; Human Rights Watch 10 août 2009). Gulf News, un journal des Émirats arabes unis, explique que ce tribunal a été créé pour [traduction] « accélérer les procès », infliger des « peines plus sévères aux auteurs » et « assurer une référence juridique unifiée » (Gulf News 29 juill. 2009). Il ressort d'un rapport de 2010 intitulé Women's Rights in the Middle East and North Africa: Progress amid Resistance et publié par Freedom House que [traduction] « [l]es enquêtes sur les meurtres de femmes ont été élargies et menées plus sérieusement » (Husseini 2010, 12). Le Jordan Times a écrit en 2016 que par suite de la création de ce tribunal, [traduction] « les auteurs [de crimes d'honneur] ont commencé à se voir infliger des peines allant de sept ans et demi d'emprisonnement à l'emprisonnement à perpétuité », alors qu'ils étaient auparavant condamnés à des peines de trois mois à deux ans d'emprisonnement (The Jordan Times 1er déc. 2016).

Human Rights Watch fait observer que, en 2016, [traduction] « les articles 98 [3] et 340 [4] du code pénal, qui prévoient des peines réduites pour les auteurs de "crimes d'honneur" étaient toujours en vigueur » (Human Rights Watch 12 janv. 2017). D'après l'AP :

[traduction]

Une disposition réduit la peine infligée à un homme qui tue son épouse ou une autre femme de sa famille parce qu'elle aurait eu des rapports sexuels en dehors des liens du mariage. Un autre article précise qu'un homme déclaré coupable de meurtre pourrait n'être condamné qu'à un an de prison s'il agit dans un « état de grande fureur [parce que la victime a commis] un acte illégal et dangereux ». Même cette peine minimale d'un an peut être réduite de moitié si la famille de la victime laisse tomber sa plainte. Certains auteurs de crimes d'honneur en Jordanie n'ont passé que six mois en prison pour avoir tué une fille ou une sœur (AP 24 juin 2017).

Selon la directrice générale de l'Union des femmes jordaniennes (Jordanian Women's Union), dont les propos ont été cités dans un article de 2016 publié dans le Jordan Times, une autre disposition du code pénal [traduction] « permet aux familles de laisser tomber les accusations portées contre les auteurs, de sorte que la peine est réduite de moitié » (The Jordan Times 1er déc. 2016). En avril 2017, la même source a signalé que les tribunaux [traduction] « réduisent souvent les peines, car les familles des victimes leur demandent de faire preuve de clémence. Il en est généralement ainsi parce que les membres de la famille de la victime sont souvent complices du "crime d'honneur" » qui a été commis (The Jordan Times 1er avr. 2017). De même, on peut lire ce qui suit dans les Country Reports 2016 :

[traduction]

[L]orsque la famille de la victime choisit de ne pas donner suite à l'affaire, le gouvernement rejette complètement les procédures. Dans le cas des « crimes d'honneur », la famille de la victime est souvent la même que la famille de l'auteur prétendu du crime, étant donné que celui-ci et la victime sont généralement apparentés (É.-U. 3 mars 2017a, 32-33).

Cependant, l'AP cite les propos d'un juge jordanien, selon qui [traduction] « les tribunaux de la Jordanie ont infligé des peines plus sévères pour ce type de crimes au cours des dernières années; aucun homme déclaré coupable de meurtre n'a été condamné à une peine de moins de 10 ans de prison depuis 2010 » (AP 24 juin 2017). La même source cite les propos du juge selon qui [traduction] « [l]e libellé de la loi n'a pas changé, mais son interprétation n'est plus la même » (AP 24 juin 2017).

Dans un document de 2017 soumis au CEDAW aux fins du sixième rapport périodique de la Jordanie, la Jordanie affirme que [version française des Nations Unies] « selon les statistiques relatives aux décisions judiciaires prononcées dans les affaires de meurtres commis prétendument pour sauver l'honneur et ayant bénéficié de circonstances atténuantes, la peine a été de 10 ans d'emprisonnement au moins » (Jordanie 11 janv. 2017, 14).

Il ressort des Country Reports 2016 que, [traduction] « dans les cas de crimes d'honneur commis au cours des dernières années, [la Cour criminelle suprême de la Jordanie] a habituellement condamné les auteurs de tels crimes à une peine pouvant atteindre 15 ans de prison », mais que la « Cour de cassation [(Cassation Court)], qui examine les décisions de la Cour criminelle suprême, a généralement réduit ces peines de moitié » (É.-U. 3 mars 2017a, 32). Il ressort également des Country Reports 2016 que la [traduction] « Cour criminelle suprême a rendu une décision relativement à un crime d'honneur commis au cours de l'année et a condamné un père à un an de prison pour le meurtre de sa fille » (É.-U. 3 mars 2017a, 32).

Le Jordan Times signale que, le 15 mars 2017

[traduction]

le Cabinet a adopté des réformes proposées par le Comité royal pour le développement de l'appareil judiciaire et le renforcement de la primauté du droit [(Royal Committee for Developing the Judiciary and Enhancing the Rule of Law)] afin, entre autres, d'abroger l'article 340 du code pénal et d'interdire la défense basée sur « l'accès de rage » au titre de l'article 98 dans les cas de crimes commis contre des femmes pour sauvegarder « l'honneur » (The Jordan Times 1er avr. 2017).

La même source signale aussi que, le 21 mars 2017, la Cour de cassation a rendu une [traduction] « décision historique sur les crimes d'honneur », selon laquelle la « peine infligée à deux frères qui avaient empoisonné leur sœur après qu'elle fut tombée amoureuse et ait fui son domicile devait être doublée, passant de 7,5 ans à 15 ans d'emprisonnement pour l'un d'eux et de 10 ans à 20 ans d'emprisonnement pour l'autre » (The Jordan Times 1er avr. 2017). Le même article cite les propos du juge Tarawneh de la Cour de cassation, qui a dit que cette décision [traduction] « créera un précédent » au regard de la manière de traiter les cas similaires à l'avenir (The Jordan Times 1er avr. 2017). L'AP écrit que, le 30 juillet 2017, la chambre basse du Parlement a corrigé la [traduction] « faille juridique qui conférait aux juges le pouvoir discrétionnaire d'infliger des peines légères pour les "crimes [dits] d'honneur" » dans les cas où une « colère terrible » constituait une « circonstance atténuante lorsqu'un homme tuait une femme de sa famille pour sauver "l'honneur de la famille" » (AP 30 juill. 2017).

Des sources soulignent que les femmes jugées à risque d'être victimes d'un crime d'honneur sont souvent emprisonnées en Jordanie (AP 24 juin 2017; The Jordan Times 1er avr. 2017; The Guardian 9 déc. 2016). Le professeur de l'Université de Georgetown a déclaré que la protection offerte par l'État aux femmes qui risquent de subir des actes de violence fondée sur l'honneur en Jordanie [traduction] « n'est aucunement efficace. Les femmes qui sont menacées [d'actes de violence fondée sur l'honneur], et parfois leurs enfants, sont envoyées en prison pour leur propre protection et peuvent y rester indéfiniment » (professeur 28 août 2017). L'AP cite les propos [traduction] « [d']un haut fonctionnaire du système carcéral », qui a dit que « la garde préventive est souvent la seule solution », expliquant que les « autorités envoient la victime en prison plutôt que ses agresseurs potentiels parce que les hommes de sa famille susceptibles de lui faire du mal sont trop nombreux » (AP 24 juin 2017). Le Jordan Times précise que ces [traduction] « femmes peuvent finir par passer des années en prison sans être accusées de quoi que ce soit. Dans certains cas, les membres de leur famille s'engagent à ne leur faire aucun mal, mais les tuent par la suite » (The Jordan Times 1er avr. 2017). Des sources signalent que les plans visant à mettre sur pied des refuges pour protéger les femmes contre la violence fondée sur l'honneur ne se sont pas concrétisés (The Jordan Times 1er avr. 2017; AP 24 juin 2017).

Des médias ont écrit que les autorités religieuses ont aussi dénoncé la violence fondée sur l'honneur (The Guardian 9 déc. 2016; The Jordan Times 1er déc. 2016). Le Jordan Times souligne également que, en 2016, le Service de l'iftaa [fatwa] (Iftaa [Fatwa] Department) de la Jordanie a [traduction] « émis une fatwa interdisant d'assassiner une femme pour sauver l'honneur de la famille », précisant qu'il est « strictement contraire à la charia de tuer une femme de sa famille pour défendre l'honneur de la famille » (The Jordan Times 1er déc. 2016). La même source cite aussi les propos d'un responsable religieux du Service de l'iftaa qui a dit s'opposer au fait d'infliger des peines réduites lorsque [traduction] « la victime était un membre de la famille » ou lorsque le crime était fondé sur des soupçons (The Jordan Times 1er déc. 2016). L'AP signale que le [traduction] « Front islamique d'action [(Islamic Action Front)], un groupe de législateurs associé aux Frères musulmans » (Muslim Brotherhood), a voté en faveur de l'abrogation, en 2017, de l'article 308 du code pénal, qui veut que la victime « épouse son violeur », pour des motifs religieux, faisant remarquer que la « [l]oi religieuse, la charia, n'approuve pas la protection des violeurs » (AP 1er août 2017).

2.2 Services offerts par la société civile

Le responsable du SIGI-JO fait état du rôle des organisations de la société civile pour ce qui est d'offrir une protection aux femmes exposées à un risque :

[traduction]

[L]a société civile et ses diverses organisations constituent un cadre de protection pour les femmes par la diffusion des concepts de droits de la personne, la sensibilisation aux questions relatives aux femmes et à leur liberté, la sensibilisation de la communauté locale et les pressions exercées en vue de développer le système législatif et politique, et l'amélioration des services et des programmes offerts aux femmes (SIGI-JO 28 août 2017).

On compte parmi ces initiatives le fait d'offrir un [traduction] « refuge aux femmes et aux victimes de violence, y compris la violence sexuelle et les menaces de mort »; d'organiser des rencontres mensuelles avec des « décideurs, des représentants officiels, des sociétés civiles et des spécialistes » afin de discuter « des politiques, des lois, des stratégies et des plans nationaux et régionaux qui ont une incidence sur les droits des femmes et des filles; ainsi que,

[traduction]

pour le SIGI, de fournir des services de consultation et une aide juridique, sociale et psychologique aux femmes victimes de violence et de discrimination. Des bureaux et des réseaux ont été mis en place dans diverses régions du Royaume afin de faciliter l'accès aux services de l'Association, dont le Centre Effat [(Effat Center)], le Centre Umm Wasfi ([Umm Wasfi Center)], le bureau d'Aqaba et le bureau de Rumtha (SIGI-JO 28 août 2017).

3. Protection offerte par l'État et violence fondée sur l'honneur aux Émirats arabes unis

Parmi les sources qu'elle a consultées, la Direction des recherches a trouvé peu d'information sur la violence fondée sur l'honneur aux Émirats arabes unis.

Un article de 2016 publié par le National, un journal des Émirats arabes unis, cite les propos de l'avocat Yazan Al Rawashdeh, qui a fait état d'une [traduction] « augmentation du nombre de meurtres, particulièrement ceux commis par la population locale et ceux liés à "l'honneur" », précisant qu'il avait « traité trois cas du genre au cours de l'année » (The National 25 oct. 2016). Selon la même source, parmi les changements apportés récemment au code pénal, on compte [traduction] « l'augmentation de l'amende maximale imposée aux personnes déclarées coupables d'un crime, qui est passée de 100 000 dirhams [33 721 $CAN] à un million de dirhams [337 268 $CAN], et de 30 000 dirhams [10 121 $CAN] à 300 000 dirhams [101 271 $CAN] dans le cas de délits » (The National 25 oct. 2016). Le National cite les propos de M. Al Rawashdeh, qui a affirmé que [traduction] « [l]'auteur du crime se dit : "Je passerai quelques années en prison, puis je sortirai ou je serai libéré parce que j'ai obtenu un pardon", et que « des amendes plus élevées seraient un moyen de dissuasion plus efficace » (The National 25 oct. 2016).

D'après les Country Reports 2016 :

[traduction]

Les Émirats arabes unis ont recours à la surveillance judiciaire pour les personnes considérées comme exposées au risque que des membres de leur famille commettent des crimes d'honneur contre elles ou leur causent d'autres préjudices. La supervision judiciaire comprend généralement l'hébergement des personnes pour assurer leur bien-être ainsi qu'une médiation et une réconciliation familiales (É.-U. 3 mars 2017b, 10).

L'article 334 du code pénal des Émirats arabes unis prévoit ce qui suit :

[traduction]

Tout homme qui surprend son épouse, sa fille ou sa sœur en flagrant délit d'adultère et la tue, tue l'homme adultère ou tue les deux à la fois est passible d'une peine d'emprisonnement; toutefois, s'il agresse son épouse, sa fille ou sa sœur, ou son épouse, sa fille ou sa sœur et l'homme adultère d'une manière qui conduit à un homicide coupable n'équivalant pas à un meurtre, ou qui conduit à une invalidité, il sera puni par la détention.

Toute femme qui surprend son époux en flagrant délit d'adultère dans le foyer conjugal et qui le tue sur-le-champ, ou tue la femme adultère, ou tue son époux et la femme adultère est passible d'une peine d'emprisonnement; toutefois, si elle agresse son époux ou son époux et la femme adultère d'une manière qui conduit à la mort ou à une invalidité, elle sera punie par la détention.

Le droit légitime de défense de sa personne ne peut être utilisé contre quiconque profite d'une telle excuse (Émirats arabes unis 1987).

L'article 56 du code pénal prévoit ce qui suit :

[traduction]

Aucun crime n'est commis si l'acte découle de l'exercice du droit de défense de sa personne. Le droit de défense de sa personne peut être exercé si les conditions suivantes sont remplies :

Premièrement : Il y a un danger immédiat qu'un crime soit commis contre le défendeur, sa propriété, un tiers ou la propriété d'un tiers, ou le défendeur croit qu'il existe un tel danger et sa croyance est fondée sur des motifs raisonnables.

Deuxièmement : Il devient impossible pour le défendeur de s'adresser aux autorités publiques pour prévenir le danger en temps voulu.

Troisièmement : Le défendeur n'a aucun autre moyen de repousser un tel danger.

Quatrièmement : La défense est nécessaire pour repousser l'agression et cadre avec ladite agression (Émirats arabes unis 1987).

Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a trouvé aucun autre renseignement sur la violence fondée sur l'honneur aux Émirats arabes unis.

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Le CEDAW a été créé en 1982 et est [traduction] « composé de 23 spécialistes des questions touchant les femmes partout dans le monde » (Nations Unies s.d.). Le CEDAW [traduction] « surveille les progrès réalisés en faveur des femmes dans les pays signataires de la Convention de 1979 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes [ainsi que] la mise en œuvre des mesures nationales visant à remplir l'obligation [prévue] » (Nations Unies s.d.).

[2] L'OCDE [version française de l'OCDE] « prom[eut] les politiques qui amélioreront le bien-être économique et social partout dans le monde » (OCDE s.d.). Le SIGI examine les [traduction] « variables qui combinent des données qualitatives et quantitatives […] au moyen de l'information sur les lois, les attitudes et les pratiques […] afin de démontrer comment les institutions sociales discriminatoires peuvent contraindre [les femmes] à entrer dans un cycle de pauvreté et de dépendance » (SIGI s.d.).

[3] Selon le Telegraph, l'article 98 se veut [traduction] « une défense basée sur le "crime passionnel" qui est couramment invoquée et qui permet à ceux qui affirment avoir commis un acte de violence dans la fureur du moment d'être condamnés à des peines réduites » (The Telegraph 6 déc. 2009). L'Arab Weeklysouligne que le [traduction] « libellé [de l'article 98] est alambiqué et oblige les juges à accorder une grande importance aux circonstances atténuantes, comme les accès de rage des hommes, au moment de prononcer la sentence » (Arab Weekly 8 mai 2015). Cet article peut faire en sorte qu'une peine réduite soit infligée (The Jordan Times 1er avr. 2017).

[4] Selon le Telegraph, l'article 340 [traduction] « permet une défense basée sur le "flagrant délit" à un homme qui tue son épouse et l'amant de celle-ci s'il les surprend ensemble au lit » (The Telegraph 6 déc. 2009). Des sources précisent que cet article est rarement appliqué (The Telegraph 6 déc. 2009; The Jordan Times 1er avr. 2017).

Références

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The Associated Press (AP). 24 juin 2017. Alice Su. « Jordan to Cancel 'Marry the Victim' Clause Shielding Rapists ». [Date de consultation : 28 juill. 2017]

The Arab Weekly. 8 mai 2015. Roufan Nahhas. « Honour Killings: A Crime in the Name of 'Family Honour' ». No 4, p. 20. [Date de consultation : 28 juill. 2017]

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États-Unis (É.-U.). 13 avril 2016. Department of State. « Jordan ». Country Reports on Human Rights Practices for 2015. [Date de consultation : 31 juill. 2017]

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Human Rights Watch. 10 août 2009. Liesl Gernholtz. « Letter to Jordan's Minister of Justice on 'Honor' Crimes ». [Date de consultation : 1er sept. 2017]

Husseini, Rana. 2010. « Jordan ». Women's Rights in the Middle East and North Africa: Progress amid Resistance. Sous la direction de Sanja Kelly et de Julia Breslin. New York, NY : Freedom House.

The Jordan Times. 1er avril 2017. Rothna Begum. « How to End 'Honour' Killings in Jordan ». [Date de consultation : 31 juill. 2017]

The Jordan Times. 1er décembre 2016. Rana Husseini. « Honour Crimes Anti-Islamic - Fatwa ». [Date de consultation : 28 juill. 2017]

The Jordan Times. 18 octobre 2015. Rana Husseini. « Minor Arrested over Sister's Shooting Death in Alleged Honour Crime ». [Date de consultation : 1er août 2017]

Jordanie. 11 janvier 2017. List of Issues and Questions in Relation to the Sixth Periodic Report of Jordan. Addendum: Replies of Jordan. Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW). (CEDAW/c/JOR/Q/6/Add.1) [Date de consultation : 18 août 2017]

The National. 25 octobre 2016. Haneen Dajani. « Harsher Penalties and up to Dh1 in Fines Make up Sweeping Reforms to UAE Penal Code ». [Date de consultation : 18 août 2017]

Nations Unies. 24 novembre 2015. Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW). Concluding Observations on the Combined Second and Third Periodic Reports of the United Arab Emirates. (CEDAW/C/ARE/CO/2-3) [Date de consultation : 28 juill. 2017]

Nations Unies. S.d. Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW). « Committee on the Elimination of Discrimination Against Women ». [Date de consultation : 1er sept. 2017]

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). S.d. « About the OECD ». [Date de consultation : 1er sept. 2017]

Professeur, Georgetown University. 28 août 2017. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Social Institutions and Gender Index (SIGI). 2014a. « Jordan ». [Date de consultation : 28 juill. 2017]

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Social Institutions and Gender Index (SIGI). S.d. « About the SIGI ». [Date de consultation : 1er sept. 2017]

Sisterhood is Global Institute/Jordan (SIGI-JO). 28 août 2017. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

The Telegraph. 6 décembre 2009. Richard Spencer. « Queen Rania of Jordan Takes on Hardliners over Honour Killings ». [Date de consultation : 28 juill. 2017]

Autres sources consultées

Sources orales : chercheur spécialiste des questions liées au genre et aux droits de la personne; consultants juridiques spécialistes du divorce aux Émirats arabes unis; Dubai Foundation for Women and Children; Jordanian Women's Union; journaliste spécialiste de la violence fondée sur l'honneur; Nations Unies – ONU Femmes; universitaires spécialistes du Moyen-Orient; Women Union Association (Émirats arabes unis).

Sites Internet, y compris : Al Jazeera; Amnesty International; BBC; ecoi.net; Emirates News Agency; Émirats arabes unis – Information and Services; Factiva; FIDH; Global Science Research Journals; Haaretz; Human Rights Quarterly; IRIN; Jordanie – Department of Statistics; Nations Unies – Haut-Commissariat aux droits de l'homme, HCR, Refworld, UNICEF; Radio France internationale; Radio Free Europe; Reuters.

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