Autrefois sa seule alternative pour fuir la Somalie, la course à pied est aujourd'hui la passion de Guled
Inspiré par l'ancien réfugié et champion olympique Mo Farah, Guled a rejoint un club de course à pied au Caire, sa ville d'adoption, où il a pu poursuivre son rêve.
Le réfugié somalien Guled Nur Hussain, qui coordonne le travail des interprètes au bureau du HCR dans la capitale égyptienne, a découvert sa passion pour la course à pied lorsqu'il était en exil.
© HCR/David Degner
Ces six dernières années, les longues jambes de Guled l'ont transporté dans tous les coins de l'Égypte, son pays d'adoption. Sa précieuse collection de médailles, glissée dans une poche intérieure de son sac à dos, s'est agrandie au fur et à mesure des marathons et autres courses d'endurance auxquels Guled a participé à travers le pays.
« Chaque fois que je cours, je me sens libre, je vis en liberté dans mon propre monde », dit-il en expliquant sa passion pour ce sport. « Et c'est pourquoi courir est si important pour moi ; cela m'aide à surmonter les difficultés ou le stress que j’éprouve en tant que réfugié. »
Ce n'est pas la première fois qu’il doit courir. En 2007, alors qu’un conflit civil dure depuis des décennies, Guled a fui sa Somalie natale, craignant pour sa vie après que des milices ont tué son père et continué à semer la terreur dans les rues du pays.
« S'installer dans un nouveau pays, ce n'est pas facile. »
Guled a quitté la Somalie seul avec l'aide d'un ami de son père défunt, qui a fait en sorte que des passeurs le conduisent de l'autre côté de la frontière jusqu'en Égypte. A son arrivée au Caire, il a trouvé refuge au sein de la communauté somalienne très soudée du quartier de Nasr City, dans la capitale. Il enseignait l'anglais à domicile aux enfants somaliens.
« S'installer dans un nouveau pays, ce n'est pas facile », partage Guled, en se remémorant ses premières années en Égypte. « Au début, ce n’était que des défis ; la langue, les gens, en qui on peut avoir confiance, qui on peut appeler un ami... donc oui, c'était difficile. »
L'Égypte accueille actuellement plus de 244 000 réfugiés et demandeurs d'asile enregistrés, les Somaliens représentant le septième plus grand groupe de population concernée. L'année dernière, la Somalie s'est classée cinquième sur la liste mondiale des réfugiés recensés par pays, après la Syrie, l'Afghanistan, le Soudan du Sud et le Myanmar.
En 2012, lorsque le monde entier a suivi les Jeux olympiques d'été de Londres, un athlète en particulier a retenu l’attention de Guled : le coureur de fond britannique Mo Farah qui, enfant, avait lui-même fui le Somaliland comme réfugié.
En voyant Mo Farah devenir double champion olympique, Guled a ressenti l’envie de rejoindre un groupe de course local au Caire, une initiative qui allait transformer sa vie d'une façon qu'il n'aurait pas imaginée.
« Courir m'a fait sortir de chez moi, de mon quartier, pour la première fois parce qu'avant, je ne connaissais même pas les quartiers du Caire », se souvient-il.
Aujourd'hui, il est fier d'avoir participé à des marathons, décathlons et courses d'obstacles dans des endroits aussi variés qu'Alexandrie, Charm El-Cheikh,
El Gouna, Assouan, Ismaïlia et Fayoum. Il s'est également fait de nombreux amis au sein de la communauté des coureuses et coureurs en Égypte.
Mais la course à pied n'est pas le seul domaine où Guled a réussi. En 2013, il est devenu interprète pour les réfugiés au HCR - l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés - en Égypte, fournissant des services d'interprétariat en anglais et en somali. Son acharnement au travail l'a par la suite amené à devenir coordinateur et assurer la supervision de plus de vingt autres interprètes.
« L'amour et la bienveillance de mes parents me manquent. »
Il a suivi avec succès la formation du Cairo Community Interpreter Project (CCIP) administrée par le Centre for Migration and Refugee Studies (CMRS) de l'Université américaine du Caire, qui s'adresse aux interprètes travaillant dans le secteur de l’aide aux réfugiés et aux migrants.
En Égypte, le HCR offre à ses interprètes réfugiés la formation d’un afin de développer leurs compétences en interprétariat. Les interprètes qui réussissent la formation reçoivent un certificat signé conjointement par le CMRS et le HCR.
Malgré ses nombreuses réussites, la Somalie est toujours présente à l'esprit de Guled. Il parle des membres de sa famille qu'il espère revoir et des endroits qui lui manquent. Pour lui, c'est ce qu’il y a de plus difficile quand on est un réfugié.
« La bienveillance et l'amour de mes parents me manquent », explique-t-il. « C'est de l’émotion et de la douleur. Ne pas pouvoir rendre visite à votre famille et ne pas savoir quand vous les reverrez. »