Cet hiver, le HCR apporte son appui aux autorités grecques pour évacuer les demandeurs d’asile vulnérables depuis des centres d’accueil dans les îles de la mer Égée pour les héberger sur le continent.
Par Anthi Pazianou
LESBOS, Grèce – Sous la bruine, des familles de divers pays déchirés par la guerre empilent des sacs de voyage et des valises cabossées contenant tous leurs effets personnels, à l’entrée du Centre d’accueil et d’identification de Moria (RIC) sur l’île grecque de Lesbos.
Plus de 200 demandeurs d’asile attendent d’être transférés par bateau pour être hébergés sur le continent. Ils remarquent à peine la pluie car ils sont heureux de quitter enfin le centre d’accueil surpeuplé, où ils vivent depuis leur traversée de la mer Egée depuis la Turquie il y a plusieurs mois.
Leur destination est une ancienne station balnéaire au bord du lac Volvi dans le nord de la Grèce. Le site, où avaient été précédemment accueillis des Yazidis d’Irak, a été rouvert par le gouvernement pour alléger la pression sur les îles et fournir aux familles un logement et des conditions de vie décentes durant l’examen de leurs demandes d’asile.
« J’espère et je prie pour que nos conditions de vie à Volvi soient meilleures », déclare Mohammed Al Ahmad, 33 ans, originaire de la province instable d’Idlib en Syrie, alors qu’il aide ses quatre jeunes enfants, sa femme enceinte et sa mère âgée à monter dans un bus loué par le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, pour les conduire au ferry à Mytilène, la principale ville portuaire de Lesbos. Ils ont passé trois mois à Moria.
A l’approche de l’hiver, le HCR a apporté son appui aux autorités grecques pour transférer des milliers de demandeurs d’asile vulnérables depuis Moria et d’autres RIC des îles grecques de la mer Egée vers des logements décents. Depuis le début du mois de septembre, plus de 11 000 personnes ont quitté les îles pour s’installer dans des sites d’accueil, des hôtels et des appartements sur le continent. Le HCR, avec l’aide financière de la Commission européenne, aide aux transferts en assurant le transport par bus des personnes à destination et en provenance des ports maritimes et en achetant les billets de ferry.
« Les coupures d’électricité constantes et l’humidité nocturne rendent la vie très difficile. »
Lesbos et Samos ont reçu la priorité pour l’opération de décongestion sur les autres îles, car les RIC de Moria et de Vathy sont confrontés à une situation désespérée. Plus de la moitié des transferts ont eu lieu depuis Moria. Durant le seul mois de décembre, plus de 1 700 demandeurs d’asile ont été transférés depuis Lesbos avec l’aide du HCR, après avoir reçu, de la part des autorités grecques, l’autorisation de partir.
Depuis l’accélération des transferts, la population de Moria est tombée en dessous de 5 000 pour la première fois depuis avril 2018, mais c’est encore le double de sa capacité initiale d’accueil. Les autorités ont redoublé d’efforts pour améliorer les conditions de vie des personnes qui attendent encore.
« Même si le personnel [à Moria] est qualifié et serviable, la situation est extrêmement mauvaise », explique Mohammed au sujet des conditions de surpopulation. En septembre, lorsque la famille est arrivée, près de 8 000 réfugiés et migrants étaient entassés dans des abris conçus pour accueillir seulement 2 000 personnes.
N’ayant pas assez d’espace à l’intérieur de l’ancienne installation militaire, beaucoup vivaient dans de fragiles tentes dans une oliveraie à proximité. Malgré les récents transferts effectués depuis lors et quelques améliorations, environ 2 000 personnes – dont de nombreux enfants – continuent de déambuler à travers des tas d’ordures non ramassées et des bassins boueux à l’extérieur de leurs tentes, au milieu des oliviers.
Ces dernières semaines, les températures sont tombées en dessous de 10°C après la tombée de la nuit et de fréquentes précipitations ont empiré la vie dans l’oliveraie. L’espace y est précieux, et notamment à l’intérieur des tentes non chauffées et souvent détrempées où les gens dorment, mangent et passent la plupart de leurs journées, alors qu’il est également possible de se déplacer sur l’île.
Les familles se blottissent les unes contre les autres, parmi leurs effets personnels, enveloppées dans des couvertures pour se réchauffer. « Les coupures d’électricité constantes et l’humidité nocturne rendent la vie très difficile », a déclaré le Palestinien Ousama Ouda, qui vit avec sa famille de sept personnes.
Mohammed est reconnaissant de quitter Moria pour rejoindre le continent après seulement 90 jours. Il sait que le temps est précieux. En Syrie, une balle a tué sa fille instantanément. Il ressent toujours la douleur, mais il regarde désormais vers l’avenir.
Publié par le HCR, le 27 Décembre 2018