Une ONG brésilienne aide les réfugiés à reprendre leur carrière
Une organisation partenaire du HCR aide des réfugiés à s'orienter dans le processus complexe de reconnaissance de leurs qualifications professionnelles.
Salim Alnazer et Salsabil Matouk, des réfugiés syriens, jouent avec Jury, leur ainée, dans leur maison de São Caetano, à São Paulo. Ce couple de pharmaciens à Damas est arrivé au Brésil en 2014. Leurs diplômes en pharmacie ont été validés au Brésil grâce à l'aide de l'ONG Compassiva.
© HCR/Gabo Morales
Salim Alnazer emprunte tous les jours deux métros, deux trains et un bus pour aller travailler. Ce réfugié syrien de 32 ans quitte sa maison de São Caetano do Sul, dans la banlieue proche de São Paulo, à sept heures du matin pour être certain d’arriver à l'heure.
Sa journée de travail commence au rez-de-chaussée, avec cinq autres employés de Jadlog, une entreprise de transport et de logistique dont il est le pharmacien attitré.
Il vérifie la sécurité sanitaire des paquets de médicaments et de compléments alimentaires avant qu'ils ne soient acheminés vers les pharmacies. Il passe souvent l'après-midi dans son bureau du deuxième étage, occupé à des tâches administratives et à la préparation des journées suivantes.
Salim Alnazer et son épouse Salsabil Matouk sont tous deux pharmaciens, originaires de Damas. Ils sont venus s'installer à São Paulo il y a trois ans avec leur aînée Jury, grâce à la politique brésilienne d’accueil des Syriens qui fuient le conflit dans leur pays.
Les procédures simplifiées d'octroi de visa offertes dans les consulats du Brésil au Moyen-Orient ont permis à la famille de se rendre dans le plus grand pays d’Amérique latine, où ils ont ensuite pu présenter une demande d'asile.
Ils pensaient qu’ils devraient renoncer à leur métier et à leur carrière. Leurs diplômes syriens devaient être certifiés et la procédure allait être coûteuse et complexe. Salim a donc trouvé du travail dans un magasin d'accessoires pour téléphones portables et Salsabil s'est lancée dans la préparation et la vente de plats syriens.
Mais ils n'ont pas baissé les bras. Salim a essayé d'obtenir les informations nécessaires auprès des universités chargées de la validation de diplômes, mais elles-mêmes n'étaient pas toujours certaines de la procédure à suivre.
Il a alors recherché des conseils en ligne sur un forum de Syriens vivant au Brésil. Quelqu'un lui a conseillé de s'adresser à Compassiva, une organisation non gouvernementale qui, en partenariat avec le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, avait déjà aidé des réfugiés à faire reconnaître leurs diplômes.
Cette procédure peut s’avérer longue et laborieuse mais l'aide offerte à Salim et Salsabil, et notamment les cours de portugais pour les aider dans leur recherche d’emploi, leur ont rendu espoir.
« La validation d'un diplôme est le premier pas pour que ces gens retrouvent leur dignité et leur identité. »
« C'est bien plus qu'une simple feuille de papier », explique André Leitão, le président exécutif de Compassiva, « la validation d'un diplôme est le premier pas pour que ces gens retrouvent leur dignité et leur identité. »
L’ONG a aidé quelque 60 réfugiés à présenter des demandes et 20 d'entre eux ont obtenu la reconnaissance de leurs diplômes. Aux débuts du programme, 90 pour cent des demandes étaient présentées par des Syriens, dont de nombreux ingénieurs, des médecins et des dentistes. Aujourd'hui, ils ne représentent plus que 50 pour cent car les réfugiés d'autres pays ont également commencé à demander de l'aide.
Quelques jours après la fin de leur attente et la validation de leurs diplômes, alors que Salim et Salsabil vendaient des plats syriens lors d’une réception de Compassiva, un directeur de Jadlog à la recherche d’un pharmacien a pris contact avec l'ONG. Salim dit qu'il a eu la chance d'être là ce jour là, mais de l’avis de son patron, c'est sa compétence comme pharmacien qui lui a permis de décrocher le travail.
« Il a fait cinq ans d'études pour devenir pharmacien et c’est ce qui s'est passé chez lui qui l’a mené au Brésil », explique Genivan Borges, le propriétaire de la franchise Jadlog où travaille Salim.
« Si on ferme ses portes [aux réfugiés] et qu'on dit non, on risque de passer à côté d'une formidable opportunité. Pour moi, cette opportunité c'était Salim. C'est quelqu'un de très professionnel. »
Jadlog prévoit de lui organiser un stage à temps partiel dans une pharmacie pour lui permettre de se familiariser avec les pratiques professionnelles du Brésil et lui donner l'occasion d’être en contact avec la clientèle brésilienne.
Jury, leur fille qui a six ans maintenant, passe ses journées à l'école, mais Walid, 3 ans, et Yasmin, huit mois, leurs deux autres enfants nés au Brésil, sont encore à la maison avec leur mère. Elle acceptera peut-être l’offre que lui a faite Jadlog une fois que ses enfants seront tous à l'école, pense-t-elle.
Dans l'immédiat, tous les membres de la famille sont heureux de vivre dans un endroit où ils ont été bien accueillis et où ils ont eu l'occasion de reconstruire leur vie.
« De nombreux pays sont en paix. J'aurais pu trouver ça dans de nombreux endroits », explique Salim. « Mais ici, j’ai trouvé bien plus que la paix. J'ai aussi trouvé un avenir. »
- Voir aussi : Les Syriens qui recommencent leur vie au Brésil