Tendances mondiales: baisse notable des demandes d’asile en Suisse, évolution dramatique de la situation internationale

En 2017, 68,5 millions de personnes ont été forcées de fuir en raison de conflits, de persécutions et de violations des droits humains. En Suisse, le nombre de demandes d’asile a en revanche sensiblement baissé en comparaison à 2016.

De jeunes réfugiés rohingyas sur les hauteurs du camp de Palong Khali au sud-est du Bangladesh, près de la frontière avec le Myanmar. Entre les mois d'août et de novembre 2017, près de 600 000 Rohingyas ont fui le Myanmar pour trouver refuge au Bangladesh. © UNHCR/Andrew McConnell

Alors que les demandes d’asile ont sensiblement baissé en Suisse en 2017, les guerres, les violences et la persécution ont propulsé les déplacements forcés dans le monde vers un nouveau record – et ce pour la cinquième année consécutive. Les principales causes de cette hausse sont liées aux effets de la crise en République démocratique du Congo, de la guerre au Soudan du Sud et de la fuite de centaines de milliers de réfugiés rohingyas vers le Bangladesh depuis le Myanmar. Les pays en développement, où vivent 85 % des réfugiés, sont les plus massivement touchés. Au sein de l’Union européenne comme en Suisse, la tendance est à l’inverse à la baisse.

Une personne forcée de fuir toutes les deux secondes

Dans son rapport statistique annuel Global Tends (Tendances mondiales) publié ce jour, le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, dénombre 68,5 millions de personnes déracinées à la fin 2017. Sur ce total, le chiffre de 16,2 millions de personnes devenues déracinées durant la seule année 2017 – pour la première fois ou de manière répétée – atteste de l’ampleur de la population en mouvement, soit 44 500 personnes déracinées par jour ou une toutes les deux secondes.

Plus de réfugiés et de demandeurs d’asile, légère baisse des déplacements internes

Les réfugiés qui ont fui leurs pays pour échapper aux conflits et aux persécutions représentent 25,4 millions sur les 68,5 millions de personnes déracinées, soit un accroissement de 2,9 millions par rapport à 2016 et la plus forte augmentation jamais enregistrée par le HCR pour une seule année. Parallèlement, le nombre de demandeurs d’asile qui étaient toujours en attente de l’obtention du statut de réfugié au 31 décembre 2017 a augmenté d’environ 300 000 pour atteindre 3,1 millions. Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont au nombre de 40 millions, soit un peu moins que les 40,3 millions de déplacés internes en 2016. Les personnes migrantes, qui quittent leur patrie pour des raisons économiques, ne sont pas thématisés par ce rapport et ne s’inscrivent pas dans le mandat du HCR.

Une personne sur 110 est déracinée dans le monde

Le monde comptait ainsi davantage de personnes déracinées en 2017 que la population de la France ou de la Grande-Bretagne. Sur l’ensemble des pays, une personne sur 110 est déracinée.

«Nous nous trouvons à un moment décisif où la réponse appropriée aux déplacements forcés à travers le monde exige une approche nouvelle et plus globale afin que les pays et les communautés ne soient plus laissés seuls face à ces situations», a déclaré le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi. «Toutefois, il y a des raisons d’espérer. Quatorze pays appliquent déjà des modalités novatrices pour la gestion des crises de réfugiés et, d’ici quelques mois, un nouveau pacte mondial sur les réfugiés sera prêt à être adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies. Aujourd’hui, à la veille de la Journée mondiale du réfugié, je m’adresse aux États membres pour leur demander d’appuyer cette approche. Personne ne devient un réfugié par choix, mais chacun de nous peut choisir comment aider.»

Baisse sensible des demandes d’asile en Suisse

L’an passé, 16 665 nouvelles demandes d’asile ont été soumises en Suisse, contre 25 872 en 2016. Il s’agit d’un recul de près d’un tiers en l’espace d’un an seulement. La tendance se poursuit au premier trimestre 2018, pour lequel les chiffres restent en deçà du niveau de l’année précédente.

La Cheffe du Bureau du HCR pour la Suisse et le Liechtenstein, Anja Klug, a remercié la Suisse pour son soutien financier et politique en faveur des réfugiés et des personnes déplacées de force dans le monde: «la Suisse apporte une contribution importante à l’amélioration de la protection des personnes sur place. Il importe cependant que les personnes méritant protection puissent également y avoir accès ici, en Suisse. Les voies d’accès légales, comme le regroupement familial ou la réinstallation, permettent un accès à la protection sans prise de risque. Elles soulagent aussi les pays de premier accueil. D’importants progrès seraient rendus possibles à ce sujet par l’application d’une politique moins restrictive en matière de regroupement familial, et par la poursuite de l’actuel programme de réinstallation.»

Tendances mondiales: un aperçu complet des déplacements forcés dans le monde

Chaque année, le HCR publie son rapport statistique sur les Tendances mondiales dans le monde entier juste avant la Journée mondiale du réfugié (20 juin); le rapport fait le bilan des déplacements forcés sur la base des statistiques recueillies par le HCR, les gouvernements et d’autres partenaires. Il n’examine pas la situation mondiale en matière d’asile, cette question faisant l’objet d’informations distinctes de la part du HCR et témoignant à nouveau en 2017 d’incidents en matière de retours forcés, de politisation et de stigmatisation des réfugiés, de cas de détention ou d’interdiction de travailler – ainsi que de l’existence de plusieurs pays qui contestent l’utilisation même du terme «réfugié».

Quoi qu’il en soit, le rapport sur les Tendances mondiales livre de nombreux enseignements, notamment des cas où la perception des déplacements forcés est en contradiction flagrante avec la réalité, permettant ainsi de déconstruire certains préjugés sur la situation en Europe. On peut citer entre autres l’idée reçue selon laquelle les personnes déracinées à travers le monde se trouveraient principalement dans des pays de l’hémisphère Nord. Les statistiques prouvent l’inverse étant donné que 85 % des réfugiés vivent dans des pays en développement – dont beaucoup sont désespérément pauvres et ne reçoivent qu’un appui limité pour prendre en charge ces populations. Quatre réfugiés sur cinq demeurent dans des pays frontaliers de leur contrée d’origine.

Les déplacements massifs de populations au-delà des frontières sont également moins fréquents que les 68,5 millions de déracinés à travers le monde ne le laissent supposer. Près des deux tiers des personnes contraintes de fuir sont des déplacés internes qui n’ont pas quitté leur propre pays.

Le rapport statistique annuel sur les Tendances mondiales livre également deux autres informations importantes: la plupart des réfugiés vivent en milieu urbain (58 %) et non dans des camps ou en zone rurale, et la population mondiale déracinée est constituée de jeunes – 53 % d’entre eux sont des enfants, dont beaucoup sont non accompagnés ou séparés de leurs familles.

La Turquie principal pays d’accueil; un habitant sur six au Liban est un réfugié syrien

Tout comme le nombre de pays à l’origine des déplacements massifs, le nombre de pays qui accueillent de vastes populations réfugiées est également faible: au niveau mondial, la Turquie demeure le premier pays d’accueil de réfugiés en valeur absolue, avec une population de 3,5 millions de réfugiés, principalement des Syriens, tandis que le Liban accueille le plus grand nombre de réfugiés au regard de sa population nationale. Un habitant sur six y est en effet un réfugié syrien. Au total, 63 % de l’ensemble des réfugiés relevant de la compétence du HCR vivent dans 10 pays seulement.

Le nombre limité de solutions apportées à cette situation est à déplorer. La persistance des guerres et des conflits demeure la cause principale des rares progrès constatés pour le rétablissement de la paix. Environ cinq millions de personnes ont pu rentrer chez elles en 2017 – en grande majorité des déplacés internes – mais nombre d’entre elles ont été rapatriées sous la contrainte ou ont retrouvé des conditions précaires. Vue la baisse du nombre de places de réinstallation offertes, le nombre de réfugiés réinstallés a chuté de plus de 40 %, et concerne environ 100 000 personnes.

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