Yannick Vivet
Yannick est devenu apatride à 32 ans suite à une erreur administrative de la part des autorités belges. Son père, de nationalité belge n'était pas marié à sa mère, de nationalité camerounaise. Il est mort avant que la nationalité ne soit attribuée à leurs enfants.
Comme Yannick, au moins 10 millions de personnes sont privées de nationalité aujourd'hui à travers le monde.
© UNHCR/ Benjamin Loyseau
« Lorsque vous perdez tous vos papiers, c’est un peu comme si la vie s’arrête ». Yannick Vivet est né au Cameroun en 1979 et y a grandit, de père belge il devient lui aussi citoyen belge.
Il s’est installé à Paris en 2003 et y habite depuis. Il est devenu apatride à 32 ans suite à une erreur administrative de la part des autorités belges.
Son père, de nationalité belge n’était pas marié à sa mère, de nationalité camerounaise mais il a entrepris un processus de reconnaissance vis-à-vis des enfants, pour leur transmettre sa nationalité. Il est mort avant que la nationalité ne leur soit attribuée.
Cependant, cinq ans après le décès de son père, en 1987, Yannick est informé par l’Ambassade belge que lui et ses deux frères sont désormais citoyens belges. « On grandit avec la nationalité belge sans réellement se projeter, à cet âge-là on n’a pas vraiment de souci de nationalité, administrative et tout, donc on grandit ».
En 2011, lorsqu’un de ses frères se rend à l’Ambassade belge à Paris afin de renouveler son passeport, on lui annonce qu’il y a eu une erreur administrative lors de l’instruction de son dossier, et qu’il faut, s’il souhaite conserver la nationalité belge, faire une demande par possession d’état (i.e. La personne qui a joui de façon constante durant dix années de la possession d’état de Belge peut, si la nationalité belge lui est contestée, acquérir la nationalité belge par une – jouissance de fait). On lui apprend qu’il « n’a plus le droit d’être belge ». « S’il y a une erreur c’est eux qui ont fait l’erreur, pourquoi ça devrait être à nous de subir ? ».
Avant cet incident, la fratrie avait des cartes d’identité, passeports, ils étaient enregistrés à l’ambassade et ont renouvelé plusieurs fois leurs papiers d’identité.
« Là c’est en 2011 […] donc j’ai déjà la trentaine passée […] Donc plus de 20 ans plus tard, plus de 20 ans plus tard, ils arrivent ».
Afin de conserver leur nationalité, les trois frères disposent de 12 mois pour faire leur demande de possession d’état (jouissance de fait) de la nationalité belge. Pour cela, ils ont besoin de leurs actes de naissance, qui sont au Cameroun. Cependant, l’Ambassade refuse de leur donner un laissez-passer pour qu’ils puissent se rendre au Cameroun. « On se retrouve dans un imbroglio administratif qu’on ne comprend pas. On se retrouve bloqués ».
Après de nombreuses difficultés, ils finissent par recevoir leurs actes de naissance, trois semaines après le délai de 12 mois imparti, il est trop tard. « On tombe des nues, parce que bon, lorsque vous perdez tous vos papiers, c’est un peu comme si la vie s’arrête. Surtout ici, tout ce qu’on a le droit de faire, on va toujours d’abord vous demander une pièce d’identité, un justificatif. Et c’est quelque chose qui est dramatique pour la vie de quelqu’un ».
« Lorsque vous perdez tous vos papiers, c’est un peu comme si la vie s’arrête. »
Lorsqu’ils décident de contacter les autorités camerounaises pour faire une demande de nationalité puisqu’ils y sont nés, les autorités les informent que le Cameroun ne reconnait pas la double nationalité et qu’ils y ont donc renoncé à leur majorité.
« C’est très contraignant. Moralement des fois on est même épuisés de se battre, on ne sait pas pourquoi on se bat et pourquoi tous ces malheurs nous tombent dessus ».
Yannick souhaiterait simplement avoir des papiers lui permettant d’avoir une vie normale. « Nationalité ou pas nationalité, franchement, je me rends compte que ça ne sert à rien. C’est juste un truc qui divise et sépare les gens ».