Le centre d’éducation à distance de Bosso ouvre ses portes de nouveau

Le Directeur de centre (à gauche) et le Préfet de Bosso (à droite), lors de la cérémonie


Février 2015, après seulement 3 mois d’existence le Centre d’Education à Distance de Bosso, créé pour les étudiants réfugiés nigérians, fermait ses portes. Bosso était attaquée et vivra dès lors sous la menace permanente des insurgés. Juin 2016, nouvelle attaque, nouveau déplacement. Le centre d’éducation à distance de Bosso est l’un des cinq centres crées par l’UNHCR et son partenaire COOPI dans la région de Diffa. Les autres se situent dans les villes de Diffa, Maine Soroa, Kabelawa et enfin, depuis peu, au niveau du camp de réfugiés de Sayam Forage. Le programme d’éducation à distance qui vise à permettre aux étudiants réfugiés de poursuivre leur étude au Niger en suivant leur curricula nigérian, a bien entendu une forte charge symbolique dans cette crise.

Preuve d’une certaine accalmie, il y a quelques jours le centre de Bosso a ouvert ses portes de nouveau. Un véritable évènement. Au centre des attentions les étudiants bien sûr, 50 élèves dont 10 filles, mais aussi le directeur du centre. Ce dernier avait dû fuir lors de la dernière attaque des insurgés. Dans le contexte de Diffa, les équipes éducatives sont d’autant plus exposées aux menaces. Le Directeur a répondu aux appels des autorités pour revenir. Louant « son courage et sa loyauté », le préfet de Bosso lui a rendu un hommage appuyé lors de son discours qui se termina par l’acclamation d’une foule dense venue assister à la cérémonie de réouverture du centre.

« La condition pour espérer un retour à la vie normale est la relance des activités agricoles et du commerce »



Pour tous les humanitaires ayant travaillé à Bosso, Beram Elh Adam est une personne de référence. Beram est membre du Comité de Développement Communal (nouvelle appellation du Comité d’Action Communautaire). Particulièrement active, Beram, à travers le CAC, était le pilier d’un mécanisme communautaire permettant d’alerter sur les mouvements de population, d’identifier et d’accueillir les déplacés, mais aussi d’accompagner les interventions humanitaires. Beram est attachée à sa ville et n’a jamais vraiment pu la quitter malgré l’insécurité et les pressions qu’elle a pu subir.

Beram, comment va Bosso aujourd’hui ?

70% de la population de Bosso est actuellement de retour. On peut dire qu’environ 8000 personnes sont rentrées. En dehors des autochtones, quelques retournés du Nigéria qui étaient avec nous depuis le début de la crise et ayant déjà construits leurs maisons sont également revenus habiter avec leurs familles. Mais Il faut aussi mentionner que depuis les attaques de juin de nombreuses personnes de Bosso sont restées à N’Gagam, Toumour, Kindjandi et Garin Wanzam pour mener des activités commerciales. Dans ces zones, le marché est plus propice. Moi, je suis de retour à Bosso depuis plus de trois mois et les choses ne se passent pas trop mal au regard de la situation sécuritaire. Le calme est revenu. La ville de Bosso n’a plus connu d’attaques depuis celle qui a fait fuir toute la population en Juin. Seule sa périphérie est concernée par les attaques.

Est-ce que le CAC dont vous étiez une figure centrale est toujours actif ?

On peut dire que nous ne sommes pas actifs. Actuellement, seul le CICR intervient activement à Bosso et il s’appuie sur les volontaires de la Croix Rouge. Tous les partenaires qui intervenaient avant ont quittée à cause de l’insécurité. Bosso ne connait actuellement pas de nouveaux déplacements de populations qui arrivent en dehors de sa population qui revient. Donc les sollicitations pour l’assistance et les facilitations pour lesquelles nous étions des personnes centrales ne sont plus d’actualité. On est quasiment désoccupé depuis un bon moment en tant que CAC mais on continue à être actif dans la communauté en tant qu’individu.

Vous avez côtoyé de près depuis 2013 toutes les différences phases de la crise. Etes-vous optimiste et comment vous projetez vous vers l’avenir ?

On peut présager un changement probable à partir du milieu de l’année 2017 si la situation sécuritaire évolue positivement. Le premier semestre de 2017 est central : la condition pour espérer un retour à la vie normale et la relance des activités agricoles et du commerce. Voyez-vous, aucune activité vitale n’est encore possible à Bosso : pas d’agriculture, pas de pêche ni d’élevage et le commerce qui tend également à disparaitre de Bosso car le jour de marché n’est plus tenu pour des raisons sécuritaires. On vit comme on peut et c’est tout. Pour les populations réfugiées, je n’imagine pas qu’elles puissent retourner chez elles en 2017. Elles seront ici encore avec nous l’année prochaine. Il faut un retour total de la quiétude pour leur assurer de ne pas mettre la vie de leurs enfants en péril. Les choses n’ont pas été faciles pour les réfugiés. Il faut aussi comprendre que les populations retournées et réfugiées ont tout perdu. Elles doivent repartir de zéro et dans un contexte économique aussi fragile ce n’est pas évident.

En février 2015, un reportage sur les CAC était réalisé. Pour le visionner cliquez ici http://unhcrniger.tumblr.com/post/110659790109/les-comités-daction-communautaire-un-engagement

Bosso, ville fantôme meurtrie par Boko Haram

Petit commerçant revenu à Bosso pour voir si les conditions du retour sont réunies. (© UNICEF Niger 2016 / Anne Boher)


AFP: Silence de mort, rues et maisons désertées, cadavres d'humains en putréfaction, carcasses de chiens et de chèvres à l'abandon… Attaquée début juin par Boko Haram, Bosso est depuis une ville fantôme où se croisent l'armée nigérienne et de rares habitants.

Une sandale a été abandonnée au milieu de la cour d'une concession. Des casseroles, marmites et bidons sont éparpillés sur le sol. A l'intérieur d'une des maisons faites de terre et de paille, un matelas et des verres de thé brisés.

Derrière une tôle ondulée, une chèvre se décompose dégageant une odeur nauséabonde. A l'entrée, un sac entier de poisson fumé est éventré. Les habitants sont partis vite.

Attaquée par les jihadistes nigérians de Boko Haram le 3 juin, Bosso, dans le sud-est du Niger, est située à quelques centaines de mètres à peine du Nigeria et des bases arrière du groupe islamiste armé. Elle avait déjà été victime de plusieurs attaques jihadistes par le passé.

La ville de 6.000 habitants, qui accueillait 20.000 réfugiés et déplacés internes, s'est vidée en quelques heures le 4 juin au petit matin.

- Civils tués -
Officiellement, le bilan est de 26 soldats nigériens et nigérians tués, mais des civils aussi ont péri. Le corps d'un homme est encore présent dans un bâtiment du siège communal. Des témoins parlent d'autres corps disséminés dans la ville.

“Les cadavres jonchaient les rues”, explique Abdelaziz Zembada, 50 ans, petit commerçant revenu à Bosso pour voir si les conditions du retour sont réunies.

Il a perdu sa fille de quatre ans. “On habite en face de la gendarmerie ciblée par la secte. Un voisin m'a conseillé d'aller chez lui. J'ai pris deux de mes enfants, Madame en a pris une. On est partis le temps de revenir la chercher (une autre de ses filles, ndlr), c'est là où l'obus est tombé. Ma fille était dedans avec les deux enfants de mon voisin… Elle n'a pas encore été inhumée”, raconte-t-il.

L'armée a été submergée par l'attaque de Boko Haram. La caserne a été saccagée. On y découvre deux véhicules blindés ainsi que plusieurs camions et voitures brûlés. Les bâtiments et notamment les dortoirs ont été incendiés, seuls restent visibles des carcasses de lits.

Tous les bâtiments publics (gendarmerie, préfecture, mairie) ont aussi été saccagés. Comme une école de campagne de l'Unicef et le centre de santé où quelqu'un a marqué à la craie sur un tableau noir: “Boko Haram”. Les jihadistes se sont également emparés de la plupart des 200 tonnes de céréales destinées aux populations dans le besoin et stockées dans un magasin.

- ‘les militaires sont là’ -
L'armée nigérienne dit avoir réinvesti les lieux, sans dévoiler ses effectifs. “Les militaires sont là. Un effectif conséquent, un dispositif nouveau, un autre moral”, assure le ministre de l'Intérieur Mohamed Bazoum qui a conduit dans la cité une délégation d'une trentaine de véhicules, composée de deux ministres, députés et de personnel des agences onusiennes et d'ONG.

“D'ici quelques semaines, nous allons repeupler Bosso et les populations retourneront à leurs activités”, assure-t-il. Sur place, les soldats sourient et lèvent le poing en signe de confiance.

Lors de la visite de la caserne saccagée, une vive discussion oppose le colonel de gendarmerie au préfet. “Partout où vous êtes, il y a un plan de défense. C'est ça qu'il faut mettre en oeuvre. Pas plus!”, déclare le colonel. “C'est facile de dire ça!” lui rétorque le préfet soulignant qu'il a défendu la place jusqu'à 21H00 le 3 juin avant de décrocher.

Dans le dédale des rues sablonneuses, on ne croise personne ou presque. Nourris par l'armée, quelques vieillards qui n'ont pas pu fuir attendent le retour de leurs proches.

Des habitants font le va-et-vient entre les villes voisines pour récupérer des affaires, comme El Hadj Abba Makani qui charge tout ce qu'il peut sur un vieux 4x4. “La nuit du 3, on l'a passée sur le toit et le matin on a fui à pied avec toute la famille”, raconte ce commerçant nigérian, aux deux épouses et dix enfants. “On a peur mais si tout le monde revient, on reviendra”.

“On est découragés. On veut que les gens reviennent”, assure Souleymane Salissa, coiffeur, qui fait aussi fonctionner un petit groupe électrogène pour charger les téléphones. Sa boutique et sa maison ont été pillées mais il est revenu et survit grâce à la clientèle des soldats.

“On veut qu'on nous aide en nourriture, en eau et qu'on arrange la téléphonie mobile et l'électricité”, poursuit-il, confiant en l'avenir: “On voit que ça va mieux même si hier on a entendu des rafales. Si on entend +Allahou Akhbar+ (Dieu est le plus grand, crié par des combattants de Boko Haram), c'est là qu'on doit s'inquiéter!”

Enregistrement en cours des déplacés suite aux dernières attaques

Enregistement d’une famille deplacée à Garin Wazam


Combien de personnes ont été forcées de se déplacer à Diffa, Toumour et sur la route nationale 1 depuis les attaques survenues au début du mois juin dans la commune de Bosso ? Les estimations varient entre 40,000 et 70,000 personnes. Combien aussi sont-elles celles s’étant réfugiées dans la commune de Maine Soroa, à l’ouest de la ville de Diffa, suite à l’attaque, moins médiatisée, du 6 juin sur le village frontalier nigérian de Kanama?

En parallèle de la délivrance de l’assistance d’urgence, depuis le 15 juin, sous l’égide de la Direction Régionale de l’Etat Civil et des Réfugiés des équipes composées d’agents d’enregistrement de l’UNCHR et des agents de l’état civil nigériens se sont déployés sur les différents sites d’accueil. Via le « porte-à-porte », l’objectif de l’intervention est d’identifier, recenser et documenter tous les ménages déplacés. Alors que certains sites accueillaient déjà avant les derniers évènements des populations en provenance de dizaines de villages différents, la participation des représentants des chefferies est aussi centrale dans cet exercice. Les résultats sont attendus en début de semaine prochaine.

At least 17,000 displaced people from the east of the region arrive in Diffa town

UNHCR Field Team registering new arrivals to the town of Diffa, from Bosso, Yebi and Toumour, following recent Boko Haram attacks (UNHCR Diffa)


United Nations agencies, the Regional Directorate of Civil Status and Refugees and NGO partners have been carrying out rapid registrations of displaced persons who continue to arrive to Diffa town, following the eruption of the violence in the south-east part of the region over the weekend. There are currently at least 17,000 people who have been registered, amongst whom at least 2,600 are children. As other groups of displaced continue to arrive in the town, registration activities are ongoing.

The local population of Diffa town is estimated to be around 55,000 inhabitants. The situation and arrival of these people is thus putting extreme pressure on the basic services and infrastructure available. Some displaced people are being hosted by family or relatives in the city, however most of the displaced are settling outdoors in precarious conditions, seeking shade to protect them from the sun and the temperatures exceeding 40 degrees Celsius. Even before this massive population movement, a lot of local households in Diffa town were already hosting displaced families from Nigeria.

The majority of the newly displaced communities are coming from Bosso, Yebi and Toumour, east of Diffa town. They are estimated to be at least 50,0000. For this population, the capacity to reach Diffa is also linked with the availability of funds for transportation. In the whole region, the security situation is currently unclear. UNHCR and other humanitarian actors are working closely with the national authorities to develop a joint emergency response both in and outside Diffa town. However, mobility outside Diffa town and in the east part of region is extremely restricted.

Thousands flee Boko Haram attack on Niger town

Nigerian refugee Boussam installs a pole to start building a shelter in Sayam Forage camp, in Niger’s Diffa region

NIAMEY, Niger, June 7 (UNHCR) - Tens of thousands of people have fled their homes in south-east Niger following a series of attacks in recent days by Boko Haram insurgents on the town of Bosso in the troubled Diffa region, the UN Refugee Agency said today.

The attacks occurred on Friday, Sunday and Monday (June 3, 5 and 6). As of today (June 7) the situation in Bosso is unclear. UNHCR warned last month that the security and humanitarian situation was worsening in the Diffa Region.

“We have not been working directly in Bosso since February 2015, when the insurgency spread from Nigeria to Niger, but we operate through local implementing partners to deliver help,” UN spokesperson Adrian Edwards told a news briefing in Geneva.

Edwards said that the Refugee Agency is working with the authorities and partners on a coordinated response to the displacement. A UNHCR emergency team will be deployed to the Diffa region this week.

The most recent attacks follow rising violence in and around Bosso in recent weeks. An assault on May 31 in the nearby town of Yebi that killed nine people and forced an estimated 15,000 residents and displaced people to seek shelter in Bosso. Many had been evacuated a year ago from islands in Lake Chad for security reasons.

An estimated 50,000 people fled Friday’s attack, mainly walking westwards to Toumour, some 30 kilometres west of Bosso. Many people are traumatized and worried about their safety. People are sleeping in the open and urgently need shelter and other assistance.

Some of the displaced have moved on from Toumour and are heading to the town of Diffa, which is located 140 kilometres west of Bosso, and northwards towards Kabelawa where a camp for the internally displaced is near capacity with some 10,000 people.

“The welfare of these people and others forced to flee the violence in Bosso is of great concern,” Edwards told reporters at the briefing. “Insecurity and lack of access have long hampered humanitarian operations in parts of the Diffa region, though Bosso is the only area where we do not implement projects directly,” he added.

There are at least 240,000 displaced people in Diffa Region, including Nigerian refugees, returnees and the internally displaced. Before the latest attack on Bosso, one in every three inhabitants of the Diffa region was forcibly displaced.

Since February last year, UNHCR has been providing protection and assistance to the displaced in Bosso through local and international NGO partners.

Edwards stressed that additional support from the donor community is urgently required. “This is a desperately poor area where the general insecurity has destroyed the socio-economic fabric. The self-reliance capacity of the displaced and their hosts is extremely limited,” he said.

The attacks on Bosso came just ahead of the start of a high-level meeting from Monday to Wednesday in Abuja to discuss the major protection challenges in the Lake Chad basin, including Niger.

Organized by the Nigerian government, with technical support from UNHCR, the dialogue participants include senior officials from Nigeria, Chad, Cameroon and Niger.

A Bosso, les effets et les défis de la stratégie hors camp

Alima, réfugiée du Nigéria et vendeuse de poisson à Bosso, Niger © UNHCR / B.Moreno

Dans la région de Diffa, il n’existe pas de camp pour les populations ayant fui le Nigéria. Installer un camp est une des options pour appuyer les réfugiés. Elle a ses avantages et ses inconvénients. La stratégie hors camp en est une autre. Elle rend difficile la mise en place opérationnelle et logistique des interventions mais permet de ne pas inhiber les initiatives individuelles et les arrangements communautaires tout comme elle favorise, dès la phase d’urgence, l’intégration socio-économique des réfugiés. La ville de Bosso située à quelques pas du Nigéria et du Lac Tchad en est un exemple intéressant.
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Le Niger confronté à l'arrivée de réfugiés en provenance du Nigeria
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Portraits of Nigerian displaced families and children who sought refugee in Niger.