Fermeture de deux marchés ruraux à Diffa : entre impératif sécuritaire et nouvelle pression sur l’économie locale

Vue du marché de Gagamari depuis le goudron


Depuis fin avril, le Gouverneur de la région de Diffa a suspendu par arrêté les jours de marché hebdomadaire de Gagamari et Kindjandi. Ces deux grands villages sont d’importants carrefours d’échanges sur lesquels repose l’économie locale. Ils sont aussi des carrefours de mouvements, tous deux accueillant une importante population déplacée.

Les jours de marché hebdomadaire ont toujours été des jours spéciaux pour les populations rurales. De l’installation du marché à sa désinstallation, beaucoup y trouvent leur compte. L’argent circule et, plus que l’assistance, c’est tout à fait ce dont a besoin l’économie de Diffa moribonde depuis l’apparition des violences sur le sol nigérien. L’interdiction de ces grandes messes commerciales hebdomadaires suppose aussi pour les petits producteurs ou encore les pêcheurs de revoir, une fois de plus, la chaine d’écoulement de leurs produits et cela au détriment des bénéfices qu’ils tireront de leurs activités.



A Kindjandi et Gagamari, le déplacés sont venus gonfler les rangs de ceux cherchant sur les marchés quelques nairas, monnaie du Nigéria qui reste toujours plus utiliser que le franc CFA dans la région de Diffa. Malam Issa est l’un deux, il vient du Nigeria et vit aujourd’hui à Gagamari « nous sommes un groupe de dockers avec mes amis. Nous gagnons notre pain le jour du marché hebdomadaire. Notre travail consiste à décharger les véhicules des commerçants qui apportent les denrées alimentaires. Avec la fermeture du marché, rien ne va plus pour nous. Jusqu’à l’arrivée de l’hivernage et de la pluie pour cultiver, nous ne savons pas quoi faire ».

A Gagamari, on trouve aussi nombreuses femmes qui viennent établir des petits commerces de vente d’encens, de condiments et de nourriture prête à la consommation. Atcha Fadji est nigérienne. Elle vivait à Damassak au Nigéria et est revenue au pays lorsque la ville fut attaquée par les insurgés : « la vente de nourriture lors des jours de marché nous fait vivre décemment ma famille et moi. Regardez le nombre de personnes lors du jour de marché à Gagamari, c’est de la clientèle pour mes plats. Si je ne retrouve plus cette clientèle, les besoins de ma famille ne vont plus être couverts. J’ai cinq enfants mais ils ont perdu leur père lors de l’attaque de Damassak ».

Atcha Fadji et sa fille au marché de Gagamari


Depuis quelques semaines, on assiste à une recrudescence des incidents sécuritaires dans la région de Diffa. Avec la saison chaude, la rivière Komadougou qui se tarit ne joue plus son rôle de barrière naturelle entre le Niger et le Nigeria. Les marchés hebdomadaires sont des cibles potentielles. L’arrêté du Gouverneur se cantonne au marché hebdomadaire brassant beaucoup de population et de va-et-vient. Les activités quotidiennes sur les sites des marchés restent cependant autorisées. Les populations affectées acceptent dans un mélange de compréhension et résignation la décision des autorités.

1 Notes

  1. unhcrniger posted this