Le Monde Après les annonces estivales d’Emmanuel Macron, qui propose d’ouvrir une voie légale d’accès en France pour éviter la traversée de la Méditerranée, Vincent Cochetel, l’émissaire spécial pour cette zone de l’Agence des Nations unies chargée des réfugiés (UNHCR), s’impatiente de l’absence d’engagement chiffré.
Emmanuel Macron a annoncé en juillet que la France irait chercher des Africains sur les routes migratoires, avant leur arrivée en Libye, afin d’éviter qu’ils ne risquent la mort en mer. Le HCR se réjouit-il de cette initiative ?
La réinstallation n’est pas la solution au problème migratoire, mais elle fait partie de l’approche globale… Ce message, qui consiste à aller chercher des réfugiés dans les pays voisins de zones de conflits et à leur offrir un avenir, une protection, a été plus ou moins entendu lorsqu’il s’agit des Syriens réfugiés au Liban, en Jordanie ou en Turquie, il ne l’était pas à ce jour pour les réfugiés africains. Nous nous réjouissons que la France organise des opérations avec notre soutien depuis le Tchad et le Niger. La situation est difficile sur ces deux zones, puisque le Tchad accueille un nombre important de réfugiés venus du Soudan (Darfour) ou de Centrafrique, et que le Niger reçoit ceux qui fuient les zones où sévit Boko Haram, mais aussi sur le Mali, où la situation actuelle nous inquiète.
Quel rôle jouez-vous au Tchad et au Niger ?
Nous gérons, avec les autorités, les camps de réfugiés dans les quinze pays qui longent la route migratoire des Africains que nous retrouvons ensuite en Libye. Les Etats y accordent une protection internationale et nous les assistons, ainsi que nos partenaires ONG, dans les services qu’ils offrent à ces populations fragilisées. Dans chaque pays, nous établissons une liste de personnes vulnérables qui nécessitent un transfert. Elle est de 83 500 au Tchad et de 10 500 au Niger, les deux pays dans lesquels la France projette de venir chercher des Africains pour les réinstaller. En plus, nous aimerions que la France et d’autres pays acceptent d’accueillir des réfugiés que nous voulons évacuer en urgence de Libye.
Vous aimeriez que les pays européens en réinstallent 40 000, sélectionnés dans vos listes… La France vous a-t-elle fait part de quotas chiffrés d’Africains qu’elle souhaite accueillir ?
Pas à ce jour. Aussi nous demandons au gouvernement français de clarifier au plus tôt la hauteur de son engagement. Le comptage des réinstallations déjà effectuées depuis ces zones est assez rapide. En 2015 et en 2016, aucun réfugié africain n’a été transféré depuis le Niger et un seul l’a été, vers la France, en 2017. Lorsque l’on s’intéresse au Tchad, 856 ont été réinstallés en 2015, 641 en 2016 et 115 en 2017. Presque aucun vers l’Europe ; la plupart ont été accueillis au Canada ou aux Etats-Unis.
Comment allez-vous travailler avec la France ?
Nous commencerons par envoyer à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides [Ofpra] une liste de dossiers de personnes vulnérables sélectionnées par nos soins comme devant de toute urgence rejoindre l’Europe. Leur cas sera d’abord analysé à Paris. L’Ofpra les étudiera du point de vue des critères de l’asile, et des spécialistes vérifieront les questions de sécurité et si toutes les conditions sont réunies. Ensuite, les équipes françaises de l’Ofpra entendront sur place les personnes sélectionnées. Ces entretiens pourront avoir lieu dans nos locaux avec éventuellement nos interprètes. Pendant que la France préparera leur accueil, une sensibilisation culturelle sur le pays leur sera prodiguée, afin qu’elles disposent d’emblée de quelques éléments de contexte.
Emmanuel Macron a décidé d’intervenir au Niger et au Tchad, mais rêve dans le fond de travailler plus directement avec la Libye. Ce que fait ou tente de faire le HCR…
Il faut que les Etats européens arrêtent de se bercer d’illusions sur les possibilités actuelles de travailler avec ce pays. Notre rôle à nous, agence de l’ONU, y reste malheureusement très limité. Même lorsque nous sommes présents dans les prisons officielles, où entre 7 000 et 9 000 migrants et demandeurs d’asile sont emprisonnés, sur 390 000 présents dans le pays. D’autres subissent des traitements inhumains dans des lieux de détention tenus par des trafiquants. Dans les prisons « officielles », nous n’avons pour l’instant l’autorisation de nous adresser qu’aux ressortissants de sept nationalités (Irakiens, Palestiniens, Somaliens, Syriens, Ethiopiens s’ils sont Oromos, Soudanais du Darfour et Erythréens). Ce qui signifie que nous n’avons jamais parlé à un Soudanais du Sud, à un Malien, à un Yéménite, etc.
L’Organisation internationale pour les migrations a assisté cette année plus de 3 000 personnes arrivées en Libye afin de leur permettre de rentrer chez elles. Nous croyons que cette solution est très utile pour nombre d’entre elles. Il faut garder à l’esprit que 56 % des migrants en Libye disent avoir atteint leur destination finale. Ils espéraient y trouver du travail, ce qui ne s’est pas matérialisé pour beaucoup d’entre eux.
Pour accélérer l’amélioration de la situation, nous œuvrons à la création de centres ouverts de réception qui pourraient être installés en Libye. Il y a urgence compte tenu des conditions existantes dans les centres de détention. Le dossier avance, mais n’est pas bouclé. Ces centres nous permettront également d’évacuer en urgence certains réfugiés vers des pays tiers en vue de leur transfert dans des pays européens ou autres. Cependant, sans clarification rapide des intentions chiffrées des pays de réinstallation, nous ne pourrons pas évacuer ces réfugiés en danger vers des pays de transit susceptibles de les accueillir temporairement.
Forcibly displaced persons (IDPs, refuges, returnees) are estimated at more than 200,000 in the Region of Diffa. 80% of these individuals do not possess any identification, which remains a significant obstacle to their mobility. The provision of documentation which enables individuals to identify themselves is now a real challenge for conflict-affected communities which have not previously been reached by fragile national civil registration systems.
The lack of an effective registration mechanism adapted to the context of forced displacement in Diffa region, has created major obstacles to the humanitarian response by the authorities and humanitarian actors in the region. In spite of the many registration exercises and efforts conducted since 2014 by the General Directorate of Civil Status Registration, Migration and Refugees (DGECM/R) with the support of the UNHCR, the results remain largely unreliable.
On Wednesday 20 September, the General Directorate of Civil Status Registration, Migration and Refugees (DGECM/R), with the support of the UNHCR, launched a biometric registration operation (commonly called BIMS) targeting all the displaced persons in the region of Diffa. This registration method is already functional for Malian refugees. (http://unhcrniger.tumblr.com/post/155713412159/un-enregistrement-de-qualit%C3%A9-est-le-gage-de-la )
The first phase of this operation is being undertaken in the refugee camp of Sayam Forage. The objective of beginning in Sayam Forage is to test the operational system in a relatively stable environment; thus enabling the more than 100 people mobilized to conduct the enrolment to familiarize themselves with the tools before moving on the more challenging out-of-camp stage. This operation will continue until the end of 2017.
BIMS is necessary due to the protection challenges currently faced in the region of Diffa, but will also lay the groundwork for important next steps with regard to the implementation of the NADRA project, officially known as the ‘Administrative Census of Humanitarian Development (NADRA) (http://unhcrniger.tumblr.com/post/160048879384/avec-le-projet-recensement-administratif-de ). This project will move beyond the registration of displaced population by facilitating a census of the entire population of the Region of Diffa and the setting up of an effective and modern national registration and identification system.
Dans la région de Diffa, la production de connaissance reste l’apanage des humanitaires. En dépit de leur importance, ces connaissances restent trop réduites répondant automatiquement à des besoins opérationnels spécifiques et sectoriels. Pour l’UNHCR au Niger, le besoin d’analyse qualitative se pose avec d’autant plus d’acuité pour accompagner les alternatives aux camps de déplacés. Etoffer la grille d’analyse pour en aval développer des interventions suffisamment informées des contextes locaux est incontournable. Il faut donc se « frotter » aux socio-anthropologues. Au Niger, il existe une structure de référence en socio-anthropologique, le LASDEL. Un luxe. Au cours du premier semestre 2017, l’UNHCR a commandité au LASDEL une recherche autour de l’accueil, des solidarités et des reconfigurations économiques en contexte d’insécurité et d’aide humanitaire. Apres deux ateliers de restitution à Niamey et Diffa, Jean Francois Caremel qui a piloté cette recherche répond, sans détour, à nos questions.
A travers le titre que l’on donne à une recherche on souhaite généralement transmettre un élément clés de l’analyse ? Pourquoi ce titre « in Gudun Higira, les gens de l’hégire » ?
Donner ce titre c’est une manière de poser la question : Qu’est ce qui est perdu et gagné en termes de sens lorsque l’on lit la crise à travers le triptyque « déplacé-retourné-réfugié » plutôt qu’à travers les catégories locales ? En s’appelant « in Gudun Higira » les populations font référence à la fuite de Mahomet de la Mecque pour Médine en raison de l’oppression dont son peuple était victime. Etre « in Gudun Higira » définit donc tout à la fois un mouvement et un motif, une fuite face à une menace qui repose sur une oppression religieuse, ici le Boko Haram, une communauté de destin et un régime de solidarité fondé sur l’aide aux plus démunis, la Zakat. Un autre élément intéressant de la désignation, « in Gudun Higira » est qu’elle ne fait pas la distinction entre les populations fuyant Boko Haram et celles déplacées par les mesures de l’Etat d’Urgence par exemple.
Le premier objectif de ce titre était de souligner l’univers de sens social et religieux que recouvre « en Gudun Higira » et les décalages qu’il y a avec les catégories « refugiés-retournés-déplacés » de l’aide qui sont essentiellement opératoires et qui reposent plutôt sur des lectures et des cadres juridiques.
Il y a un deuxième objectif à ce titre. Il vise aussi à insister sur l’importance de la notion de « personne » que l’on retrouve dans « in Gudun Higira » et qui a largement disparu dans les discours courants des acteurs de l’aide sur les « refugiés-retournés-déplacés ». Cette disparition de l’individu dans les manières de désigner les populations qui sont l’objet d’interventions d’aide contribue à réduire les personnes à de simples « bénéficiaires », largement passifs, ce qu’ils ne sont pas…
Ce titre renvoie finalement à une idée clef du rapport qui est aussi une proposition pour améliorer le fonctionnement de l’aide : repartir des catégories locales pour penser les contextes et pour organiser l’aide plutôt que de lire et d’intervenir sur des enjeux locaux, toujours spécifiques, à travers des catégories globales.
Vous proposez une analyse de la crise de Diffa « par le bas » c’est-à-dire a travers le regard des populations. En quoi l’analyse que font les populations est-elle différente de celle des humanitaires ?
Votre question est symptomatique… (sourire) Cette recherche ne propose pas seulement de lire la crise de Diffa à partir du point de vue des « populations ». L’analyse que nous avons commencé à déployer avec ce financement du HCR, et que nous continuons à développer dans d’autres recherches, vise plutôt une analyse qui s’intéresse de manière compréhensive aussi bien aux perceptions et stratégies des populations, en gudun higira et hôtes, qu’à celles des acteurs de l’aide sur le terrain, des pouvoirs publiques, des forces de défenses (que nous n’avons pas pu interroger dans cette étude) … C’est en comprenant la manière dont leurs lectures et stratégies s’agencent que nous pourrons décrypter les dynamiques du contexte et de l’aide et comprendre comment celle-ci ne constitue pas seulement une action ponctuelle mais aussi une politique publique en train de se faire.
Parmi les multiples décalages qui existent entre le regard de populations et celui des acteurs de l’aide sur le contexte de Diffa, on peut en retenir 3 principaux. Tout d’abord, les acteurs de l’aide ont une lecture relativement uniforme du contexte. Ils le découpent pour la plupart entre la phase d’urgence, actuelle, puis de relèvement qu’ils souhaitent amorcer en 2018 avant que le développement ne prenne le relais. Dans la réalité, ces dynamiques coexistent aujourd’hui mais ne sont pas ou peu appréhendées. Les populations ont des lectures plus fines en fonctions des dynamiques générales mais aussi d’enjeux plus locaux. Si l’on adopte le point de vue populaire le contexte de Diffa ressemble au moins autant à une urgence liée à l’insécurité qu’a une situation de crises emboitées : crise de mobilité, crise des solidarités, crise du cosmopolitisme, crise économique, crise de genre et de l’autorité…
Deuxièmement, quand bien même on adopterait la lecture des acteurs de l’aide, celle-ci reste tronquée. Les ONG et agences ont eu tendance à oublier que « les premiers acteurs humanitaires, ça a été les populations hôtes » comme nous le dit un interviewé. Les populations hôtes continuent encore aujourd’hui, malgré l’afflux d’aide à être des acteurs centraux : elles continuent de mettre à disposition des terres, des points d’eau, de ressources naturelles, à accepter que de latrines soient construites dans leurs champs… il est essentiel de garder cela en tête et d’éviter de penser une aide qui serait centrale…
Enfin, un troisième décalage qu’illustre ce rapport est l’importance de la capacité d’initiative / de débrouille, des in gudun higira et la résilience des populations hôtes… qui sont loin d’être des bénéficiaires ou des acteurs passifs. Si l’aide est essentielle à leur survie, elle constitue aussi une ressource dans des stratégies locales qui restent peu documentées et prises en compte par les acteurs extérieurs.
Reconfiguration des activités économiques, reconfiguration des modes de gouvernance communautaire, reconfiguration des relations à la frontière, reconfiguration et reclassement social, reconfiguration de l’unité familiale. Vos analyses démontrent que la région de Diffa a profondément changé au cours de ces dernières années. Plus dur sur la phase post-crise ?
Oui, certaines dynamiques ont fondamentalement évolué du fait de l’insécurité, des déplacements, mais aussi des dynamiques de l’aide. Elles transforment la réalité et complexifient les stratégies de sortie de crise.
Nucléarisation de solidarités familiales, chefferie émiettée par les déplacements et concurrencée les comités de gestion, développement de lectures ethniques de la conflictualité etc. constituent des défis majeurs qui sont malheureusement peu saisis du fait des approches très standardisées et orientées sur les besoins de base.
Mais il y a d’autres enjeux du, mal nommé, « post crise ». Premièrement, d’importants défis rencontrés aujourd’hui dans la région de Diffa sont structurels. La crise les a accentués. Nombre de leurs réponses sont identifiées de longue date dans les recherches qui ont porté sur le bassin du lac Tchad, les plans de développement communaux et de la région, les projets de développement. Malheureusement du fait d’approches très standardisées et des logiques de « table rase » les urgentistes méconnaissant souvent ces solutions.
Deuxièmement, l’aide connait un problème d’efficience. La recherche sur le terrain a permis d’observer les logiques de concurrence, de plantage de drapeau, de saupoudrage dans lesquels les interventions sont inscrites, ce qui pose de problèmes d’efficience importants. Finalement on peut souhaiter que la sortie de crise puisse conduire à renouveler la manière d’aborder la question de la responsabilité et de la redevabilité. L’enjeu est de les sortir des bureaux, des clusters et des tableurs excel pour les ramener sur le terrain.
C’est à ce prix-là que les politiques publiques, notamment celles d’aide, pourront mieux prendre en compte les dynamiques de crise emboitée et agir dessus. Sans cela les acteurs de l’aide, continueront à proposer des solutions « prêt à porter » alors qu’il est plus que jamais temps de faire du « sur mesure »…
En résumé le défi de la phase qui s’ouvre est à mes yeux de sortir d’une réponse basée sur une expertise humanitaire individuelle pour arriver à une réponse reposant sur l’intelligence collective… j’espère que cette recherche et celles qui sont en préparation pourront y contribuer.
Pour consulter l’intégralité de la recherche
Pour consulter la synthèse de la recherche
UNHCR, the UN Refugee Agency, called today for an additional 40,000 resettlement places to be made available for refugees located in 15 priority countries*along the Central Mediterranean route.
“These 40,000 resettlement places, which will complement already existing commitments, will be crucial to help the most vulnerable refugees along the Central Mediterranean route. Of course, resettlement can only be one element of a more global response to increase access to protection and solutions for refugees and mitigate risks they face on their way to Libya and to Europe,” said Filippo Grandi, UN High Commissioner for Refugees.
As part of these global efforts, UNHCR hosted today, Monday 11 September, the first meeting of the Core Group** for Enhanced Resettlement and Complementary Pathways along the Central Mediterranean route, which was chaired by France.
“A comprehensive approach will be critical in reducing onward movements, saving the lives of refugees and avoiding the creation of a pull factor. It is essential that any resettlement response covers all sub-regions affected by these movements, including West, East, North Africa as well as the Horn. Adherence to UNHCR’s resettlement criteria, which puts the emphasis on vulnerability and protection needs, is also key”, said Grandi.
“So far, the response has been very far from adequate, with only 6,700 refugees along the routes to Libya resettled so far this year. There is a need to step up in line with States’ commitment in the New York Declaration to provide resettlement places and other legal pathways on a scale that would meet global annual resettlement needs,” he added.
In 2016, resettlement opportunities were offered to only six per cent of the refugees in need in the 15 priority countries of asylum and transit along the Central Mediterranean route, where total needs are estimated to stand at 277,000.
The movement of refugees and migrants towards Europe continues to take a devastating toll on human life. Since the beginning of the year, over 2,420 people are believed to have died or gone missing while crossing the Mediterranean to reach Europe, with reports of many others perishing en route.
ENDS
*The 15 priority countries of asylum identified along the central Mediterranean route are Algeria, Burkina Faso, Cameroon, Chad, Djibouti, Egypt, Ethiopia, Kenya, Libya, Mali, Mauritania, Morocco, Niger, Sudan and Tunisia.
** The Core Group for Enhanced Resettlement and Complementary Pathways along the Central Mediterranean route includes global resettlement States includes global resettlement States, IOM, the EU and UNHCR. In total, 17 States were present at its opening on Monday, 11 September.
Pour les amateurs de guides de voyages, vous trouverez une trace de Sayam Forage dans les éditions du « Guide du routard » des années 2000. Sayam Forage faisait partie des « choses à voir ». A Sayam est adossé le mot « Forage » car le village dispose d’un forage profond qui en faisait un lieu incontournable pour les éleveurs tant pour abreuver les animaux que pour son marché qui s’est développé autour. Moins connue des itinéraires touristiques qu’Agadez, Diffa n’en est pas moins une région qui a fasciné touristes et coopérants. Aujourd’hui, le Guide du Routard rappelle que le Ministère des Affaires Etrangères français déconseille les deux régions. A côté du village de Sayam Forage, un camp qui porte le même nom accueille 12,000 personnes.
Pour les réfugiés de Sayam Forage, ni touriste bien sûr, ni bétails. Malgré la crise, le spectacle de troupeaux affluant vers le forage le jour de marché existe toujours. Les réfugiés l’observent, peu sont ceux qui possèdent du bétail. Quand à la pèche, pour ceux qui la pratiquaient, elle n’est aujourd’hui, loin du Lac Tchad et de la rivière Komadougou, qu’un lointain souvenir. L’environnement du camp offre la sécurité mais, en pleine zone semi-désertique, peu d’activités.
Sur la photo ci-dessus, derrière les personnes autour du bassin, vous pouvez observer une couverture végétale. C’est la saison des pluies sur la bande sahélienne, une fine couche verte recouvre le sable. Ne vous y m’éprenez cependant pas, dans quelques semaines il n’y aura que du sable à Sayam Forage. Mais le bassin restera et des dizaines d’autres sont en train de voir le jour. En partenariat avec l’Université de Diffa, récemment créé mais qui se positionne comme un acteur central pour le relèvement de la région, l’UNHCR vient de commencer une intervention qui vise à développer la production agro-sylvo-pastorales et …. piscicoles. Près de 500 ménages réfugiés et hôtes sont impliqués.
La situation dans la région de Diffa impose de penser le relèvement et le bien-être des populations différemment de ce qu’il en était avant la crise. Les zones fertiles ont été abandonnées à cause de l’insécurité, l’argent ne circule plus. Les leviers sur lesquels travailler pour accompagner les déplacés à se prendre en charge sont rares. On ne peut attendre un retour à la normale, les populations s’impatientent, la réduction des fonds pour la réponse humanitaire ne devrait pas tarder à frapper à la porte des abris d’urgence.
C’est donc un pari ambitieux que celui de l’UNHCR et de l’Université de Diffa de produire des poissons au milieu du sable. Pari ambitieux qui s’inscrit cependant dans les objectifs que s’est assignée l’Université de Diffa celui notamment d’incuber de telles initiatives à travers la région. Premier essai que le Recteur de l’Université de Diffa voit aussi « comme un laboratoire de support pédagogique pour les enseignements ».
Dans quelques mois, nous reviendrons vers nous pour vous informer si la pèche a été bonne.