Un programme d'enseignement en ligne redonne espoir aux étudiants réfugiés

Via son programme InZone, l'Université de Genève propose des cours de niveau licence à ceux qui n'ont pas accès aux études universitaires.

Qusai vit depuis quatre ans dans le camp de réfugiés d'Azraq en Jordanie. Il cherchait désespérément à poursuivre ses études et l'occasion s'est présentée à lui sous la forme d'un cursus menant à une licence d'histoire.
© HCR

La guerre a brutalement mis fin aux efforts de Qusai pour devenir avocat. Il était en première année d'études de droit à l'Université de Dara lorsque les violences ont éclaté dans cette ville du sud de la Syrie, au début du conflit civil qui ravage le pays depuis 2011.


En 2013, il a fui vers la Jordanie avec sa famille et s'est retrouvé loin de tout dans le camp de réfugiés d’Azraq. Qusai a vu s'évanouir tous ses espoirs de poursuivre ses études.

Déterminé à continuer d'apprendre, il s'inscrivait à tous les cours informels qu'il pouvait trouver — anglais, informatique et même réparation de téléphones mobiles. Incapable de payer des frais d'étude ou d'obtenir un visa pour étudier dans un pays tiers, la possibilité de décrocher une licence restait hors de portée.

C'est alors qu'il a entendu parler de l’initiative InZone qui offrait une formation d'histoire de niveau licence, mise au point par l'Université Princeton des États-Unis et appuyée par l'Université de Genève.

« Il s'agissait d'universités prestigieuses et je voulais vraiment suivre cette formation. »

« Ça ne m'était jamais venu à l'idée d'étudier l'histoire, mais il s'agissait d'universités prestigieuses et je voulais vraiment suivre cette formation, » dit Qusai.

Les taux d'inscription dans l'enseignement supérieur augmentent dans le monde entier – 36 pour cent en 2016, contre 34 pour cent l'année précédente – mais l'accès à l'université et aux autres modalités d'enseignement supérieur est hors de portée pour 99 pour cent des réfugiés.

Or, la demande existe clairement : en 2016, plus de 4300 réfugiés ont reçu des bourses d'études DAFI – le programme d'enseignement supérieur offert par le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et appuyé par l'Allemagne – qui leur permettent de suivre des études supérieures dans 37 pays hôtes, soit une augmentation de près de 90 pour cent par rapport à 2015. Toutefois, les frais d'étude, la distance et les obstacles à l'achèvement de leur scolarité secondaire se conjuguent pour exclure de l'enseignement supérieur des dizaines de milliers d'autres réfugiés.

Le programme InZone montre comment l'éducation supérieure peut être apportée à ceux qui n'y auraient pas accès en d'autres circonstances. D'abord offert en 2010 dans le camp de réfugiés de Kakuma au Kenya, cette initiative a été proposée à Azraq en septembre 2016 avec le cursus d'histoire de Princeton.

Aujourd'hui, une formation d'ingénierie de l'Université Purdue, une autre institution américaine, est également proposée. Les cours sont dispensés dans un laboratoire informatique financé par le HCR et dirigé par l'organisation non gouvernementale CARE International.

« Quand on est connecté au monde extérieur de l'université, on a le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand. »

James Casey, doctorant en histoire contemporaine de la Syrie à Princeton, était l'un des professeurs en ligne d’Azraq. Il explique qu’à la différence des habituels cours à distance ou par correspondance où les taux de rétention sont souvent faibles, InZone a pour principe de promouvoir des échanges réguliers entre les professeurs et les étudiants, que ce soit en ligne, en présentiel ou via les réseaux sociaux. C'est ainsi que nous assurons « leur engagement et leur concentration », dit-il.

Les professeurs et directeurs d'étude essaient de rendre visite aux étudiants du camp au début et en fin de formation, d'abord pour faire passer les épreuves de sélection et présenter le cours aux étudiants retenus, puis pour superviser un atelier de fin d'études et les derniers examens.

Outre le laboratoire informatique, les étudiants peuvent utiliser des appareils mobiles et ont accès aux cours par clés USB lorsqu'il n'y a pas de connexion Internet. Des groupes d'études dirigés par les différents professeurs sont établis via le service de messagerie instantanée WhatsApp pour maintenir la communication entre les étudiants et les enseignants même en cas de faible connectivité.

Cette formation a permis à Qusai de rester stimulé intellectuellement, ce qui lui a donné espoir. « Quand on étudie avec des universités prestigieuses et qu’on est connecté au monde extérieur de l'université, on a le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand, et pas d'être un simple numéro dans un camp de réfugiés, » dit-il.

Ces études lui ont également ouvert de nouvelles perspectives. « Nous avons appris comment les pays européens se sont reconstruits après la Seconde guerre mondiale et ça m'a donné l'espoir que nous puissions faire de même en Syrie. »

Découvrez le dernier rapport du HCR sur l'éducation des réfugiés, Left Behind: Refugee Education in Crisis (en anglais).