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Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - République du Congo

Publisher International Federation for Human Rights
Author Organisation mondiale contre la torture; Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme
Publication Date 19 June 2008
Cite as International Federation for Human Rights, Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, Rapport annuel 2007 - République du Congo, 19 June 2008, available at: http://www.refworld.org/docid/486e05176e.html [accessed 17 October 2017]
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Contexte politique

Les élections législatives de l'été 2007 ont été boycottées par plusieurs partis d'opposition et entachées par de nombreuses irrégularités lors du scrutin. Le parti présidentiel de M. Denis Sassou Nguesso, le Parti congolais du travail a, de ce fait, logiquement obtenu de nouveau la majorité au Parlement. D'après les conclusions de la mission d'observation électorale menée par la Coordination d'appui au processus électoral, une plate-forme regroupant des membres de la société civile congolaise, les dispositions prévues par le Code électoral n'ont pas été respectées. L'indépendance de la Commission nationale d'organisation des élections (CONEL), mise en place tardivement, a été remise en question et le président de la CONEL lui-même a reconnu des difficultés à Brazzaville et à Pointe-Noire.1

D'autre part, le pays reste confronté à de graves problèmes de corruption. En juin 2007, un Observatoire de lutte contre la corruption a été créé pour suivre et évaluer la mise en oeuvre des mesures de lutte contre la corruption et des réformes engagées dans les secteurs pétrolier, minier et forestier notamment. Cet organe devrait être composé de neuf membres, issus du Gouvernement, de la société civile et du secteur privé. Cependant, les défenseurs qui dénoncent les cas de corruption demeurent exposés aux menaces et aux représailles des autorités.

Campagne de discrédit à l'égard des ONG en lien avec l'affaire des disparus du "Beach"

En 2007, les suites judiciaires et politiques de l'affaire des disparus du "Beach"2 et le travail des ONG en faveur des familles des victimes – en premier lieu desquelles l'Observatoire congolais des droits de l'Homme (OCDH) – ont replacé celles-ci dans la ligne de mire des autorités, qui se sont engagées dans des campagnes de discrédit à leur égard. En effet, depuis plusieurs années les autorités et les médias sous leur contrôle assimilent l'action de l'OCDH et du Collectif des familles de disparus dans l'affaire des disparus du Beach à une action de déstabilisation et à de l'antipatriotisme. Par exemple, lors de la demande d'autorisation de commémoration pour les victimes du Beach en novembre 2007, le Ministre de la Communication a qualifié cette initiative de "tentative pour rouvrir la guerre civile au Congo". En outre, le 10 janvier 2007, à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation française relatif à la réouverture en France de la procédure judiciaire du dossier des disparus du Beach, le Président Sassou Nguesso a menacé de représailles les instigateurs de la procédure dans une interview accordée à la télévision nationale. L'Association force citoyenne, créée par le Ministre de la Communication, a également manifesté le 16 janvier 2007 devant l'ambassade de France. Un journal proche du Gouvernement a par ailleurs qualifié M. Marcel Touanga, président de l'Association des parents des personnes arrêtés au Beach et portées disparues et parent d'une victime de disparition forcée du Beach, exilé en France, de "père éploré ou avide d'argent et de pouvoir". Le Gouvernement s'est également servi d'une organisation pro-gouvernementale, l'Association nationale pour la défense des migrants et des femmes (ANEDEM-F), pour dénigrer l'action de l'OCDH lors de la 42e session de la CADHP qui s'est déroulée en novembre 2007 à Brazzaville et mettre en cause le nombre de disparus figurant dans les rapports de l'organisation. Arguant de risques de trouble à l'ordre public, le Ministre de la Sécurité et de l'ordre public a par ailleurs interdit la manifestation de commémoration pour les disparus du Beach qui devait être organisée le 13 novembre 2007 en marge de la CADHP par les ONG et les familles des victimes alors qu'elle avait été autorisée par le préfet de Brazzaville.

Menaces et accusations de ternir l'image du pays à l'égard des défenseurs

A plusieurs reprises, les défenseurs ont été pris à partie en 2007 par les autorités en raison de leurs actions, de la publication de rapports ou de communiqués faisant état de violations des droits de l'Homme dans le pays. Par exemple, à la suite d'un communiqué dénonçant les discriminations à l'égard des minorités autochtones pygmées, le 17 juillet 2007, un représentant de l'État a traité les membres de l'OCDH "d'irresponsables à la recherche du sensationnel". Ces accusations ont redoublé de virulence lorsque les dénonciations des ONG ont, selon les autorités, touché à l'image du pays. Ainsi, le directeur général de la police nationale, le Colonel Ndengue, a, au début de l'année, donné des instructions pour interdire la sortie du pays de MM. Christian Mounzeo et Brice Makosso, coordinateurs de la Coalition "publiez ce que vous payez", qui exige la transparence dans la gestion des revenus issus des industries extractives. De même, le 4 décembre 2007, lors de la publication d'articles sur la corruption dans le secteur forestier, le représentant du ministère de l'Economie forestière s'en est pris aux ONG congolaises, qui ont été accusées d'être "manipulées par les organisations internationales pour salir l'image du pays".

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme est un programme conjoint de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).


1 Cf. rapport de l'Observatoire congolais des droits de l'Homme (OCDH), Contentieux électoral : Silence complice et prolongement de la mascarade par la cour constitutionnelle, 19 octobre 2007.

2 Du fait de la guerre civile, en décembre 1998, plusieurs centaines de milliers de personnes ont fui les combats et les violences des groupes armés dans la capitale congolaise. La majorité des déplacés sont partis dans le Pool, une zone de forêt tropicale au sud de Brazzaville, d'autres ont traversé le fleuve pour se réfugier en République démocratique du Congo (RDC). Entre le 5 et le 14 mai 1999 des disparitions à grande échelle ont été organisées par les autorités congolaises à l'encontre de personnes qui revenaient vers Brazzaville par le port fluvial du Beach, à la suite de la signature d'un accord tripartite entre la RDC, la République du Congo et le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) définissant un couloir humanitaire censé garantir leur sécurité. Cependant, à leur arrivée à Brazzaville des agents publics les ont arrêtées pour interrogatoire, séparées de leurs proches et exécutées. Plus de 50 personnes ont disparu le 5 mai et plus de 200 le 14 mai 1999. Les investigations menées ont permis d'établir que plus de 300 personnes ont disparu dans ce cadre.

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