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Burundi : information sur l'aide offerte aux victimes de violence, y compris la protection offerte par l'État (2013-février 2015)

Publisher Canada: Immigration and Refugee Board of Canada
Publication Date 10 March 2015
Citation / Document Symbol BDI105087.EF
Related Document(s) Burundi: Recourse available to victims of violence, including state protection (2013-February 2015)
Cite as Canada: Immigration and Refugee Board of Canada, Burundi : information sur l'aide offerte aux victimes de violence, y compris la protection offerte par l'État (2013-février 2015), 10 March 2015, BDI105087.EF, available at: https://www.refworld.org/docid/551ceb004.html [accessed 3 November 2019]
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1. Aperçu

Selon des sources, la situation générale en matière de sécurité au Burundi est [traduction] « stable » (É.-U. 2014) ou [version française des Nations Unies] « relativemen[t] stabl[e] » (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20). D'après un sondage d'opinion publique mené en 2013 par Afrobaromètre (Afrobarometer) [1] auprès de 1 200 citoyens burundais sur les conditions économiques, la sécurité et la bonne gouvernance au Burundi, environ 70 p. 100 des répondants ont signalé que, au cours des 12 derniers mois, ils n'avaient pas craint pour leur sécurité, tandis que 30 p. 100 ont signalé que, au cours de la même période, ils avaient craint pour leur sécurité au moins une fois (Afrobarometer avr. 2013, 6, 20). Le Report of the Secretary-General on the United Nations Office in Burundi (BNUB), en date de janvier 2015, fait état [version française des Nations Unies] « d'une recrudescence temporaire de la criminalité et d'inquiétudes accrues concernant d'éventuels attentats terroristes » au Burundi en 2014 (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20). Toutefois, on peut lire dans la même source que [version française des Nations Unies] « le nombre d'exécutions extrajudiciaires et de cas de torture et de mauvais traitements, ainsi que d'actes à motivation politique commis par les Imbonerakure, la ligue des jeunes du CNDD-FDD [Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie], le parti au pouvoir, a fortement diminué » (ibid., paragr. 33). Des sources donnent des exemples des types de délits les plus courants au Burundi, y compris les suivants :

le vol, le vol qualifié et le vol à main armée (Canada 25 mars 2014; É.-U. 2014), ce dernier type se produisant [traduction] « tous les jours » et entraînant des décès et des blessures graves (ibid.);

les agressions (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20);

le banditisme de grand chemin (É.-U. 2014) ou les détournements de voiture à main armée (Canada 25 mars 2014);

les violations de domicile (É.-U. 2014; Afrobarometer avr. 2013, 20, 37);

les violences sexuelles et la violence familiale, qui sont décrites par des sources comme étant un problème [traduction] « grave » (Freedom House 2014) ou [traduction] « endémique » (Bertelsmann Stiftung 2014, 15);

les [version française du gouvernement du Canada] « actes de banditisme », le trafic d'armes et les enlèvements (Canada 25 mars 2014);

les attaques par des groupes armés (APRODH janv. 2015, 8) et les attaques à la grenade (ibid.; Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20).

Dans un rapport intitulé Burundi 2014 Crime and Safety Report, le Conseil consultatif de sécurité outre-mer (Overseas Security Advisory Council - OSAC) des États-Unis signale que les crimes violents et les incidents de [traduction] « violence politique ciblée » continuent de se produire au Burundi (É.-U. 2014). Sur son site Internet consacré aux avis aux voyageurs, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD) du Canada affirme que des attaques contre des civils perpétrées par [version française du gouvernement du Canada] « d'anciens soldats, des rebelles et des gangs de jeunes » ont été signalées (Canada 25 mars 2014). Dans son World Report 2015, Human Rights Watch fait état de [version française de Human Rights Watch] « passages à tabac » et « d'autres actes de violence et d'intimidation » par des membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, appelés Imbonerakure, en 2014 (Human Rights Watch 2015, 130). Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches, un chercheur établi à Nairobi et rattaché à l'Institut d'études de sécurité (Institute for Security Studies - ISS) qui s'intéresse à la résolution des conflits au Burundi a affirmé que les crimes à motivation politique sont [traduction] « les plus préoccupants », car les Imbonerakure, la police et les services du renseignement ont été accusés de « mauvais traitements et d'exécutions extrajudiciaires à l'encontre de gens perçus comme étant liés à l'opposition » (chercheur 25 févr. 2015). Pour obtenir des renseignements sur la relation entre les Imbonerakure et les autorités, y compris la police de Bujumbura, veuillez consulter la Réponse à la demande d'information BDI104343. L'indice de transformation de Bertelsmann Stiftung (Bertelsmann Stiftung Transformation Index - BTI), qui [traduction] « examine la transition vers la démocratie et l'économie de marché ainsi que la qualité de la direction politique dans 129 pays », souligne qu'au Burundi, le gouvernement « nie l'existence de la violence politique et décrit les attaques comme étant de simples délits ou du terrorisme » (Bertelsmann Stiftung 2014, 7). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

Le MAECD du Canada affirme que les taux de criminalité au Burundi sont [version française du gouvernement du Canada] « élevés » (Canada 25 mars 2014). Dans son rapport annuel de 2013, la Commission nationale indépendante des droits de l'homme (CNIDH) du Burundi a signalé qu'en dépit des avancées constatées sur le plan de la sécurité, la criminalité « a[vait] persisté » au Burundi au cours de l'année (CNIDH 29 août 2014, 57). Le rapport de la CNIDH renferme les statistiques suivantes sur les assassinats et meurtres, fournies par la police : 349 en 2011, 338 en 2012 et 390 en 2013 (ibid.). D'après des statistiques de l'Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH), une ONG de surveillance des droits de la personne dotée de 17 bureaux régionaux, 409 personnes ont été tuées au Burundi en 2014 et 608 ont été blessées dans des attaques (APRODH janv. 2015, 5, 29). Selon des sources, la criminalité est courante dans les régions suivantes :

Bujumbura (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20; Canada 25 mars 2014);

les communes de Bujumbura, y compris Cibitoke, Mutakura (É.-U. 2014), Kinama, Kamenge, Kanyosha (ibid.; Canada 25 mars 2014), ainsi que Kinindo et Musaga, où il y a [version française du gouvernement du Canada] « un risque de violence politique de faible niveau » (ibid.);

les provinces de Bururi et de Mwaro (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 20).

De plus, le MAECD du Canada déconseille les déplacements dans les provinces de Bubanza et de Cibitoke, près de la frontière avec la République démocratique du Congo (Canada 25 mars 2014).

D'après des statistiques recueillies par l'APRODH en 2014, au total, 409 personnes ont été tuées et 608 ont été blessées au Burundi : environ 58 p. 100 des homicides ont été commis par des civils (236 décès), environ 28 p. 100 par des agresseurs inconnus (114 décès), environ 9 p. 100 par des groupes armés (38 décès), et 5 p. 100 par les forces militaires et policières (21 décès) (APRODH janv. 2014, 30). Selon un avertissement aux voyageurs publié par le Département d'État des États-Unis relativement au Burundi, les activités criminelles au Burundi [traduction] « sont souvent commises par des groupes de bandits armés ou des enfants de la rue » (É.-U. 30 oct. 2014). L'OSAC signale que [traduction] « [d]es personnes portant l'uniforme des forces policières ou militaires commettent des crimes partout dans le pays et de nombreux policiers, militaires, criminels et combattants démobilisés gagnent leur vie ou se procurent un revenu d'appoint en volant la population du Burundi ou en lui extorquant de l'argent » (ibid. 2014). De même, le MAECD du Canada précise que des criminels [version française du gouvernement du Canada] « se font passer pour des forces de sécurité et érigent de faux barrages routiers pour solliciter des pots-de-vin » (Canada 25 mars 2014). Il ressort des Country Reports on Human Rights Practices for 2013 publiés par le Département d'État des États-Unis que les policiers eux-mêmes [traduction] « se livrent souvent à des activités criminelles, y compris l'acceptation de pots-de-vin » (É.-U. 27 févr. 2014, 6). Il est écrit dans un article en date du 2 septembre 2014 du People's Daily Online, un média chinois, que 192 policiers burundais étaient alors en prison pour avoir commis des infractions, notamment le vol, le commerce illicite ou d'autres infractions professionnelles.

2. Protection offerte par l'État

L'OSAC signale que la présence policière est concentrée dans les centres urbains du Burundi (É.-U. 2014). D'après le plan stratégique du ministère de la Sécurité publique du Burundi pour 2013-2016, la Police nationale du Burundi dispose de 139 postes de police dans tout le pays, dont la majorité est logée dans des infrastructures « plus ou moins dégradées » (Burundi [2013], 28).

Selon des sources, il est fréquent que des activités criminelles au Burundi ne soient pas signalées (Freedom House 2014; chercheur 25 févr. 2015), car le citoyen ordinaire au Burundi [traduction] « fait peu confiance à la police » et perçoit la police comme étant inefficace (ibid.). De plus, le chercheur de l'ISS a déclaré que [traduction] « les gens font encore appel à la police selon leur situation personnelle, selon la gravité de l'infraction et, surtout, selon l'identité de l'auteur présumé de l'infraction », en précisant que si l'auteur de l'infraction est un agent de l'État, « les chances [que l'infraction soit signalée à la police] seront peut-être plus faibles » (chercheur 27 févr. 2015).

Il ressort de l'avertissement aux voyageurs pour le Burundi (Burundi Travel Warning) du Département d'État des États-Unis [traduction] « [qu']il est fréquent que les autorités locales à l'échelle du Burundi ne soient pas en mesure d'intervenir en temps voulu en cas d'urgence » (É.-U. 30 oct. 2014). Selon les Country Reports 2013, les policiers du Burundi sont [traduction] « mal formés, sous-équipés, insuffisamment rémunérés et peu professionnels » (ibid. 27 févr. 2014, 6). L'OSAC signale que la capacité d'enquête de la police est faible et que, [traduction] « [e]n raison du manque de formation et de ressources, la Police nationale du Burundi a de la difficulté à exercer les fonctions policières traditionnelles telles que les interventions liées aux accidents de la route ou aux situations d'urgence dans une résidence » (ibid. 2014). Il est écrit dans le rapport annuel 2013 de la CNIDH que la police et l'appareil judiciaire engagent « habituellement » des poursuites contre les auteurs présumés des crimes, mais que le non-aboutissement des enquêtes pourrait compromettre, de l'avis de la CNIDH, la sécurité de la population (CNIDH 29 août 2014, 57-58). Le même rapport fait état de trois cas distincts d'homicide où la police avait omis d'ouvrir un dossier (ibid., 58).

2.1 Protection des témoins

D'après le chercheur de l'ISS, [traduction] « il y a peu de protection, sinon aucune, pour les témoins d'actes criminels » (25 févr. 2015). De même, la CNIDH signale que, pour certains dossiers qu'elle a documentés, elle a fait face au problème de la protection des témoins et des victimes ayant été « intimidés » et « menacés de mort » (CNIDH 29 août 2014, 29). Human Rights Watch affirme que, en 2013, un chef de police jugé pour [version française de Human Rights Watch] « meurtre, torture et tentative de meurtre » a été acquitté des accusations de meurtre et de torture après qu'au moins deux témoins ont refusé de témoigner « en raison d'un manque de protection adéquate » (Human Rights Watch 2015, 131). En janvier 2015, le Conseil de sécurité des Nations Unies a signalé que les efforts visant à assurer et à renforcer la protection des témoins [version française des Nations Unies] « se sont poursuivis », tout en soulignant la participation de 30 personnes, y compris des représentants du secteur de la justice, de la police, de la société civile et des milieux universitaires, à un atelier des Nations Unies sur la protection des victimes et des témoins (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 30, 32). La même source a aussi signalé qu'un projet de loi sur la protection des victimes et des témoins avait été élaboré et présenté au gouvernement en novembre 2014 (ibid., paragr. 32).

2.2 Efficacité et corruption de la police

D'après la Bertelsmann Stiftung, [traduction] « les services de police et de sécurité sont, la plupart du temps, corrompus et imprévisibles, et le CNDD-FDD s'en sert pour faire avancer ses propres intérêts » (Bertelsmann Stiftung 2014, 9). De même, les Country Reports 2013 signalent que, aux yeux de la population au Burundi, la police est [traduction] « hautement politisée et attentive aux volontés du CNDD-FDD » (É.-U. 27 févr. 2014, 6). Des sources affirment que la [traduction] « corruption à petite échelle » est « particulièrement marquée » (Bertelsmann Stiftung 2014, 32) ou [traduction] « étendue » au sein de la police du Burundi (É.-U. 27 févr. 2014, 6). D'après les Country Reports 2013, cela est attribuable à la faiblesse des salaires (ibid.). Selon l'OSAC, [traduction] « [l]a pauvreté, le manque de ressources et la corruption omniprésente favorisent la criminalité, qui reste souvent impunie » (ibid. 2014). L'avertissement aux voyageurs publié par les États-Unis attire l'attention sur le fait que la corruption est [traduction] « endémique » et que les agents de l'État peuvent demander des pots-de-vin pour des services courants (ibid. 30 oct. 2014). De plus, la même source souligne que [traduction] « des criminels ayant soudoyé les autorités locales peuvent se livrer à leurs activités sans crainte de poursuites » (ibid.). En janvier 2015, les Nations Unies ont signalé que le gouvernement avait pris des mesures en vue de lutter contre la corruption, qui est qualifiée de [version française des Nations Unies] « très répandue », mais que les politiques établies à cette fin n'avaient « donné que peu de résultats » (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 26).

Les Nations Unies écrivent que la CNIDH, en collaboration avec les Nations Unies, a dispensé une formation de trois mois aux forces de sécurité du Burundi afin de [version française des Nations Unies] « mettre leurs compétences au niveau » des normes internationales en matière de droits de l'homme et, grâce à cette formation, 35 membres des forces militaires, policières et du renseignement ont obtenu leur certificat de « formateur en matière de droits de l'homme » en septembre 2014 (ibid., paragr. 23). D'après le sondage mené en 2013 par Afrobaromètre, 59 p. 100 des 1 200 répondants estimaient que la performance du gouvernement était [traduction] « bonne » en matière de réduction de la criminalité, tandis que 40 p. 100 estimaient qu'elle était « mauvaise » (Afrobarometer avr. 2013, 27).

2.3 Détentions arbitraires, torture et exécutions extrajudiciaires

Des sources affirment que les services de police continuent de commettre des violations des droits de la personne (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 66; chercheur 27 févr. 2015). Au cours de l'année 2013, la CNIDH a enregistré 14 allégations de détention « arbitraire ou illégale »; de 2011 à 2013, l'organisation a reçu 80 plaintes de ce genre : 30 de ces dossiers ont été clos, 49 font l'objet d'un suivi et 1 a été rejeté (CNIDH 29 août 2014, 27). La CNIDH a aussi signalé avoir enregistré 10 plaintes distinctes de « torture » en 2013, dont 8 ont été retenues comme ayant constitué effectivement des violations avérées (ibid., 29).

Des sources font observer qu'il y a eu des [traduction] « exécutions extrajudiciaires » commises par des forces de sécurité, y compris la police (É.-U. 27 févr. 2014, 1; Freedom House 2014); selon Freedom House, le nombre de ces exécutions est [traduction] « inhabituellement élevé » depuis quelques années, même s'il y en a eu moins en 2013 que de 2010 à 2012 (ibid.). Les Nations Unies ont enregistré 138 cas d'exécutions extrajudiciaires depuis 2011, dont 34 ont vu leurs auteurs jugés devant un tribunal (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 36.). D'après des sources, [traduction] « l'impunité » pour la brutalité policière demeure « très répandue » au Burundi (Freedom House 2014; É.-U. 27 févr. 2014, 6) et, selon les Country Reports 2013, le gouvernement hésite et tarde à faire enquête et à intenter des poursuites dans les cas [traduction] « de torture, d'homicide et d'exécution extrajudiciaire » impliquant des policiers (ibid.). De même, les Nations Unies affirment que, en ce qui a trait aux cas d'exécutions extrajudiciaires et de torture, [version française des Nations Unies] « [a]ucun véritable progrès n'est à noter en matière de lutte contre l'impunité » (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 36).

On peut lire dans un rapport en date de septembre 2014 préparé conjointement par huit organisations de la société civile du Burundi concernant les droits civils et politiques au Burundi que la CNIDH a été saisie de 20 cas d'allégations de torture en 2012 et qu'un agent de police a été condamné à 10 ans de prison (Coalition des OSC 12 sept. 2014, 10).

2.4 Contrôle civil des services policiers

Les Nations Unies signalent [version française des Nations Unies] « l'insuffisance » du contrôle civil des services de police (Nations Unies 19 janv. 2015, paragr. 66). Selon les Country Reports 2013, [traduction] « aucune entité n'a examiné les exécutions par les forces de sécurité » pour vérifier si elles s'étaient produites d'une manière justifiée (É.-U. 27 févr. 2014, 2). D'après un audit de l'inspection générale de la sécurité publique (IGSP) du Burundi, mené en 2014 en collaboration avec les gouvernements du Burundi et des Pays-Bas et le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées - Genève (Geneva Centre for Democratic Control of Armed Forces - DCAF) [2], il y a de multiples services en matière de contrôle de la police [au sein de la force policière ou du ministère de la Sécurité publique lui-même, ainsi que de la brigade spéciale anticorruption], mais « aucune institution indépendante n'est officiellement chargée de traiter les plaintes [...] des citoyens à l'encontre des policiers » et il n'y a pas de structure externe à la police elle-même pour les citoyens souhaitant déposer une plainte à l'encontre d'un policier (Burundi et al. 13 mai 2014, 8).

Selon des sources, il est possible de déposer des plaintes concernant la corruption, y compris la corruption policière, auprès de la brigade spéciale anticorruption du gouvernement (ibid.; chercheur 25 févr. 2014). Toutefois, d'après le chercheur de l'ISS, la brigade anticorruption dispose de [traduction] « ressources limitées » et « n'a pas la latitude requise pour agir de façon plus efficace » (ibid.).

2.5 Appareil judiciaire

L'appareil judiciaire du Burundi est [traduction] « entravé par la corruption, par un manque de ressources et de formation, et par l'ingérence du pouvoir exécutif dans les affaires juridiques » (Freedom House 2014). De même, la Bertelsmann Stiftung note que les membres des niveaux inférieurs de l'appareil judiciaire sont [traduction] « mal formés et mal équipés » (Bertelsmann Stiftung 2014, 15). Selon Freedom House, le système judiciaire [traduction] « peine à fonctionner de manière efficace ou indépendante et n'est pas en mesure de traiter le nombre élevé de causes en instance, dont bon nombre sont délicates sur le plan politique » (Freedom House 2014). La Bertelsmann Stiftung ajoute que les membres de l'appareil judiciaire subissent des [traduction] « pressions » de la part de responsables gouvernementaux par l'entremise de la police, des services secrets et de membres des Imbonerakure (Bertelsmann Stiftung 2014, 15). Il ressort d'une étude en date de 2011 sur l'accès à l'assistance judiciaire au Burundi préparée par Avocats sans frontières (ASF), une ONG internationale ayant pour objectif de contribuer à la mise en place d'institutions et de mécanismes permettant l'accès à une justice indépendante et impartiale (ASF juin 2011, 3), qu'il y a un manque d'impartialité chez les juges et une « très large inexécution des jugements rendus » (ASF juin 2011, 28).

Le rapport annuel 2014 de l'APRODH fait état du cas d'un chef de police dans la commune de Kinyinya qui a été jugé puis condamné à purger cinq ans de prison pour torture et à verser une amende et une indemnité à la victime (APRODH janv. 2015, 18). L'APRODH signale que « le jugement n'a pas été mis en application » et la victime a fait appel à une ONG pour obtenir de l'aide (ibid.). Le procureur général de la Cour d'appel de Gitega a arrêté le chef de police et l'a conduit à la prison; l'instruction de l'affaire a été reportée à plusieurs reprises (ibid.). Selon Human Rights Watch, le chef de police a été jugé en 2013 sur des accusations de meurtre, de torture et de tentative de meurtre, [version française de Human Rights Watch] « [d]ans un rare cas de poursuites en justice contre une autorité pour violations des droits humains » (Human Rights Watch 29 janv. 2015, 131). Il a été acquitté de meurtre et de torture, mais déclaré coupable de coups et de blessures, et condamné à trois mois de prison; toutefois, il a été libéré, car il avait déjà passé un an en prison (ibid.).

La Coalition des OSC attire l'attention sur le cas en 2010 d'un agent des renseignements qui a été reconnu coupable du viol d'une fille d'âge mineur et condamné à une peine de 20 ans d'emprisonnement, mais qui demeure en liberté « suite à des pressions [de] supérieurs » entraînant sa libération (Coalition des OSC 12 sept. 2014, 16). Parmi les sources qu'elle a consultées dans les délais fixés, la Direction des recherches n'a pas trouvé d'autres renseignements allant dans le même sens.

3. Autres mesures d'aide pour les victimes d'actes criminels

3.1 Commission nationale des droits de l'homme et Bureau de l'Ombudsman

D'après une étude de 2013 sur les institutions d'ombudsman en Afrique francophone publiée par le DCAF et rédigée par Athanese Ndikumana, un [traduction] « expert national de la gouvernance démocratique » au sein du Programme des Nations Unies pour le développement au Burundi (Bayala et al. 2013, 95) [3], la CNIDH dispose d'un [version française du DCAF] « large mandat » qui l'autorise à recevoir des plaintes touchant des violations des droits de la personne, à faire enquête sur ces plaintes, à transmettre des dossiers au procureur public et à « attirer l'attention du [g]ouvernement sur tous les cas de violations des droits de l'homme, quel que soit le lieu où il se produisent et proposer toutes les mesures de nature à favoriser la protection de ces droits » (Ndikumana 2013, 52). Selon la même source, la CNIDH et le Bureau de l'Ombudsman ont pour mission [version française du DCAF] « [d']agir en tant que médiateurs » (ibid., 50). Des sources affirment que la CNIDH a ouvert trois bureaux régionaux (É.-U. 27 févr. 2014, 18; CNIDH 29 août 2014, 11), à Makamba, à Gitega et à Ngozi; et ces derniers sont chargés de faire enquête sur les violations à l'échelle du pays (ibid.).

Une plainte peut être déposée à la CNIDH par toute personne (CNIDH s.d.; Ndikumana 2013, 60) ou par une ONG, ou elle peut faire l'objet d'une enquête à l'initiative de la CNIDH (ibid.). Selon le site Internet de la CNIDH, une plainte peut être présentée verbalement, au moyen d'une lettre à la CNIDH, au moyen du service d'assistance téléphonique de la CNIDH ou par « tout autre moyen utile et pratique », dans la langue choisie par l'auteur de la plainte (CNIDH s.d.).

Athanese Ndikumana précise que la CNIDH [version française du DCAF] « comprend » sept membres et que le bureau de la Commission comprend un président, un vice-président et un secrétaire (Ndikumana 2013, 59). La Bertelsmann Stiftung signale que la CNIDH [traduction] « ne dispose pas des ressources matérielles et humaines requises pour mettre en oeuvre son programme de manière efficace » (Bertelsmann Stiftung 2014, 14). Par ailleurs, la CNIDH a fait remarquer qu'elle doit faire face à des « contraintes majeures » en raison de l'insuffisance de ses ressources matérielles, humaines et financières, notamment l'inadéquation de ses moyens de déplacement qui réduisent la mobilité de la Commission pour ce qui est de vérifier les allégations signalées partout au pays (CNIDH 29 août 2014, 11).

D'après le rapport annuel 2013 de la CNIDH, l'organisation a reçu 251 plaintes relatives à des violations des droits de la personne au cours de l'année, dont le plus grand nombre avait trait à des requêtes « d'orientation et d'assistance » (soit 98), suivies des allégations d'atteinte au droit à la liberté et à la sécurité de sa personne (soit 27) et des demandes d'assistance judiciaire (soit 43) (CNIDH 29 août 2014, 16). Le même rapport signale que la CNIDH a reçu un total de 121 demandes d'assistance judiciaire entre 2011 et 2013 (ibid., 21). La CNIDH affirme qu'elle « ne dispose pas de moyens suffisants pour répondre favorablement à toutes les demandes » d'assistance judiciaire (CNIDH 29 août 2014, 21). De même, le chercheur de l'ISS a fait observer que la CNIDH [traduction] « serait sous-financée » (chercheur 27 févr. 2015).

Un particulier peut présenter une plainte à l'Ombudsman, par écrit ou verbalement, en cas de [version française du DCAF] « fautes de gestion et de violations des droits des citoyens », mais une ONG ne le peut pas (Ndikumana 2013, 56). Athanese Ndikumana écrit que, en date de 2013, le Bureau de l'Ombudsman est représenté au niveau provincial seulement dans la province de Ngozi (ibid.). La source note que le Bureau ne dispose pas [version française du DCAF] « de moyens humains propres pour exercer sa mission » (ibid., 62).

D'après les Country Reports 2013, la CNIDH et le Bureau de l'Ombudsman sont [traduction] « généralement perçus à la fois par les Burundais et les partenaires internationaux comme étant impartiaux et efficaces » (É.-U. 27 févr. 2014, 18). Toutefois, la Bertelsmann Stiftung affirme que [traduction] « l'indépendance » de la CNIDH et du Bureau de l'Ombudsman sont « fragiles », car ces deux institutions sont « dirigées par des gens proches du gouvernement » (Bertelsmann Stiftung 2014, 14). De même, Athanese Ndikumana signale que, au sein du Bureau de l'Ombudsman, [version française du DCAF] « les titulaires [...] sont des mandataires politiques, et non des experts indépendants » (Ndikumana 2013, 56). La même source qualifie la [version française du DCAF] « politisation » de la CNIDH de « faiblesse » institutionnelle parce que le « mode de sélection de ses membres [...] les rattache à un parrain invisible » (ibid., 63).

3.2 Assistance judiciaire

D'après une étude de base sur l'assistance judiciaire au Burundi préparée par ASF, il y a 170 avocats au Burundi, si bien qu'il y a 47 000 personnes par avocat au sein d'une population de 8 millions d'habitants (ASF juin 2011, 33). L'étude note que la totalité des avocats au Burundi se trouvent dans les milieux urbains (ibid.). La Coalition des OSC signale que plusieurs ONG offrent des services d'assistance judiciaire au Burundi, y compris ASF, Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT) et le Centre Seruka (Coalition des OSC 12 sept. 2014, 33). On peut lire dans le rapport de l'APRODH que cette dernière avait neuf projets à l'échelle du Burundi qui offraient des services d'assistance judiciaire ainsi que des services de counseling et d'orientation (APRODH janv. 2015, 52). Selon le chercheur de l'ISS, lorsque les Burundais ne font pas appel à la police, ils se tournent vers [traduction] « les chefs ou les tribunaux traditionnels, les organisations locales assurant la sécurité, ou leurs parents et amis » pour obtenir de l'aide et, si les gens renoncent à une démarche judiciaire officielle, y compris le fait de signaler un crime à la police, une réparation juridique est « peu probable » (27 févr. 2015).

Il est écrit dans l'étude d'ASF que les services d'assistance judiciaire au Burundi sont « presque exclusivement » assurés par des organisations de la société civile nationales et internationales, sont financés par des fonds extérieurs et font appel à la participation bénévole d'avocats et de parajuristes (ASF juin 2011, 9). Selon des sources, les programmes d'assistance judiciaire des ONG ne sont pas toujours disponibles en raison des ressources limitées de ces organisations (Coalition des OSC 12 sept. 2014, 33; chercheur 27 févr. 2015).

Cette réponse a été préparée par la Direction des recherches à l'aide de renseignements puisés dans les sources qui sont à la disposition du public, et auxquelles la Direction des recherches a pu avoir accès dans les délais fixés. Cette réponse n'apporte pas, ni ne prétend apporter, de preuves concluantes quant au fondement d'une demande d'asile. Veuillez trouver ci-dessous les sources consultées pour la réponse à cette demande d'information.

Notes

[1] Afrobarometer est un réseau de recherches panafricain financé par diverses organisations, dont des agences de développement gouvernementales de la Suède, des États-Unis et de la Grande-Bretagne (Afrobarometer avr. 2013, 5).

[2] Le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées - Genève (Geneva Centre for the Democratic Control of Armed Forces - DCAF) contribue à [traduction] « améliorer la gouvernance du secteur de la sécurité grâce à la réforme de ce secteur » et tâche de « soutenir des secteurs de la sécurité efficaces et efficients qui sont responsables devant l'État et ses citoyens » (DCAF s.d.).

[3] Athanase Ndikumana, un ancien fonctionnaire burundais, est un consultant indépendant sur les questions liées à la consolidation de la paix, à la sécurité et au développement; il a également agi à titre d'expert national en gouvernance démocratique pour les Nations Unies au Burundi et il exerce des activités d'enseignement à l'Institut supérieur de commerce à l'Université du Burundi (Ndikumana 2013, 95). Le chapitre consacré aux institutions d'ombudsman du Burundi, rédigé par Athanase Ndikumana, est publié dans le rapport intitulé Ombuds Institutions for the Armed Forces in Francophone Africa: Burkina Faso, Burundi and Senegal, publié par le DCAF et l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), qui sont des organisations engagées dans le développement des institutions d'ombudsman dans les forces armées (ibid., 4).

Références

Afrobarometer. Avril 2013. Les conditions économiques, les performances du gouvernement, la sécurité et la bonne gouvernance au Burundi: Résultats du sondage du round 5 de Afrobaromètre au Burundi. [Date de consultation : 19 févr. 2015]

Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH). Janvier 2015. Rapport annuel 2014. [Date de consultation : 18 févr. 2015]

Avocats sans frontières (ASF). Juin 2011. Étude de base sur l'aide légale au Burundi. [Date de consultation : 18 févr. 2015]

Bertelsmann Stiftung. 2014. Transformation Index. BTI 2014: Burundi Country Report. [Date de consultation : 20 févr. 2015]

Burundi. [2013]. Ministère de la Sécurité publique. Plan stratégique du Ministère de la Sécurite publique 2013-2016. [Date de consultation : 18 févr. 2015]

Burundi, Pays-Bas et Geneva Centre for Democratic Control of Armed Forces (DCAF). 13 mai 2014. Audit de l'inspection générale de la sécurité publique du Burundi - Rapport final. [Date de consultation : 18 févr. 2015]

Canada. 25 mars 2014. Ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD). « Burundi ». [Date de consultation : 20 févr. 2015]

Chercheur, Institute for Security Studies (ISS), Nairobi, Kenya. 25 février 2015. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

_____. 27 février 2015. Communication écrite envoyée à la Direction des recherches.

Coalition des organisations de la société civile : Actions des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT-Burundi); Association des femmes juristes du Burundi (AFJB); Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH); Association pour la recherche sur l'environnement, la démocratie et les droits de l'homme au Burundi (AREDDHO-Burundi); Forum pour le renforcement de la société civile burundaise, Forum pour la conscience et le développement (FOCODE), Observatoire Ineza des droits de l'enfant, Coalition burundaise pour la Cour pénale internationale (CB-CPI). 12 septembre 2014. Rapport alternatif de la société civile sur la mise en oeuvre du pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). [Date de consultation : 19 févr. 2015]

Commission nationale indépendante des droits de l'homme (CNIDH). 29 août 2014. Rapport Annuel 2013. [Date de consultation : 19 févr. 2015]

_____. S.d. « Procédure de plainte ». [Date de consultation : 20 févr. 2015]

États-Unis (É.-U.). 30 octobre 2014. Department of State. « Burundi Travel Warning ». [Date de consultation : 20 févr. 2015]

_____. 27 février 2014. « Burundi ». Country Reports on Human Rights Practices for 2013. [Date de consultation : 22 févr. 2015]

_____. 2014. Overseas Security Advisory Council (OSAC). Burundi 2014 Crime and Safety Report. [Date de consultation : 20 févr. 2015]

Freedom House. 2014. « Burundi ». Freedom in the World. [Date de consultation : 19 févr. 2015]

The Geneva Centre for the Democratic Control of Armed Forces (DCAF). S.d. [Date de consultation : 9 mars 2015]

Human Rights Watch. 29 janvier 2015. « Burundi ». World Report 2015: Events of 2014. [Date de consultation : 20 févr. 2015]

Nations Unies. 19 janvier 2015. Conseil de sécurité. Report of the Secretary-General on the United Nations Office in Burundi. (S/2015/36). [Date de consultation : 10 févr. 2015]

Ndikumana, Athanase. 2013. « Chapter 2: Burundi ». Ombuds Institutions for the Armed Forces in Francophone Africa. Sous la direction de Delphine Hayim. Genève : The Geneva Centre for the Democratic Control of Armed Forces (DCAF). [Date de consultation : 18 févr. 2015]

People's Daily Online. 2 septembre 2014. « Burundi : 192 policiers en prison pour des infractions ». (Factiva)

Autres sources consultées

Sources orales : Les sources suivantes n'ont pas pu fournir de renseignements dans les délais voulus pour la présente réponse : Burundi - Brigade anticorruption; Ligue des droits de l'homme Iteka.

Les tentatives faites pour joindre les organisations suivantes dans les délais voulus ont été infructueuses : Abuco-Transparency International; Actions des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT-Burundi); Association burundaise pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH); Association des femmes juristes du Burundi (AFJB); Avocats sans frontières Burundi; Bureau de représentation LDGL Bujumbura; Burundi - ambassade à Ottawa, Bureau de l'Ombudsman, Commission nationale indépendante des droits de l'homme, Police nationale du Burundi; CENAP; COSOME; Hadassa Women Development Initiatives; International Bridges to Justice - Équipe Burundi; Observatoire de l'action gouvernementale; Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques.

Sites Internet, y compris : Africa Confidential; BBC; Burundi - ambassade à Ottawa, Bureau de l'Ombudsman, Commission nationale indépendante des droits de l'homme, Interpol Burundi, ministère de la Justice; Initiative for Peacebuilding; International Crisis Group; IRIN; Nations Unies - Haut-Commissariat aux droits de l'homme, Refworld; Observatoire de l'action gouvernementale du Burundi; Radio Bonesha; Small Arms Survey.

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