La sécurité est essentielle pour contrer la hausse de déplacements au Soudan du Sud
Face à la crise de déplacement de population la plus rapide au monde, Filippo Grandi explique que la paix, l'espoir et le sentiment d'avoir un avenir sont essentiels.
BENTIU, Soudan du Sud – Après que des combats aient éclaté dans sa ville natale dans l’État d’Unity au Soudan du Sud, James Koat, technicien médical stagiaire, a fui vers Bentiu pour trouver un répit temporaire en toute sécurité. Trois années plus tard, il est toujours là, trop effrayé à l’idée de rentrer chez lui.
« J’ai dit à ma famille que je devais m’échapper et aller leur chercher quelque chose à manger, mais une fois arrivé ici, je ne suis jamais reparti », explique-t-il. « Ici, je suis en sécurité ».
Le site où il a cherché refuge est à présent le plus grand au Soudan du Sud, qui accueille plus de 120 000 hommes, femmes et enfants, qui, comme lui, ont fui la violence et la famine croissante, sans cesse plus nombreux.
« J’ai peur de rentrer chez moi, parce que la sécurité et la protection n’y sont pas suffisantes ».
« Regardez autour de nous ici aujourd’hui, au Soudan du Sud lorsque vous leur demandez « pourquoi n’êtes-vous pas chez vous, pourquoi êtes-vous partis de chez vous? » le premier mot qui revient toujours c’est la « peur », explique le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, pendant une visite en fin de semaine au site.
« J’ai peur de rentrer, parce que la sécurité et la protection n’y sont pas suffisantes ».
Selon un rapport statistique publié aujourd’hui par le HCR, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, à la fin 2016, on dénombrait 65,6 millions de personnes déracinées, soit le nombre le plus élevé depuis la fondation du HCR en 1950.
Le nouveau facteur le plus important a été le Soudan du Sud l’an dernier, le plus jeune pays au monde, où l’échec désastreux des efforts de paix en juillet dernier a contribué au déplacement de 739 900 personnes à la fin de l’année. À mesure que le conflit et la famine se sont intensifiés, ce nombre a flambé pour atteindre 1,87 million aujourd’hui.
« Sans sécurité, cela ne sert à rien », explique Filippo Grandi, après avoir rencontré des familles de déplacés au site de protection des civils et discuté avec elles de leurs besoins. « Le thème de la sécurité est très présent ici ».
« Je suis reconnaissante parce que mes enfants et moi sommes en sécurité et nous aurons une maison et un bon endroit pour dormir ».
En raison de la violence qui fait rage à l’extérieur et de la surpopulation massive du site, le HCR et ses partenaires humanitaires éprouvent des difficultés à satisfaire les besoins essentiels tels que l’eau, la nourriture et les soins médicaux.
Pendant sa présence à Bentiu, le Haut Commissaire a également visité un nouveau site où des centaines de personnes déplacées ont reçu de petites parcelles de terre pour y construire des abris permanents, ainsi que des trousses de matériel, contenant notamment des lampes à énergie solaire, des ustensiles de cuisine et du savon.
Anjelina fait partie des personnes déplacées qui vivent ici, elle a fui son foyer avec ses trois enfants il y a deux ans, et s’est installée dans un premier temps dans l’un des sites de protection. Il y a deux semaines, elle et ses enfants sont arrivés dans ce nouveau site. Elle explique qu’elle est pleine d’espoir pour la première fois depuis des années.
« Je suis reconnaissante parce que mes enfants et moi sommes en sécurité et nous aurons une maison et un bon endroit pour dormir », dit-elle.
Il est prévu d’étendre le programme et d’ouvrir des sites similaires partout dans le pays afin d’apporter de l’aide et de l’espoir à des millions de personnes déplacées, même si l’espoir et l’argent font cruellement défaut.
« Dans cette situation, nous essayons de leur fournir non seulement une aide vitale, mais aussi le sentiment qu’ils ont un avenir », explique le Haut Commissaire. « C’est-ce qui leur manque le plus. Non seulement aux réfugiés et personnes déplacées internes du Soudan du Sud, mais aux près de 66 millions de personnes déracinées dans le monde ».
« Dans cette situation, nous essayons de leur fournir non seulement une aide vitale, mais aussi le sentiment qu’ils ont un avenir ».
Avant la guerre, James faisait des études pour devenir technicien de laboratoire, mais comme pour des millions d’autres personnes, le conflit a mis sa vie et ses rêves en attente.
« Je veux que le Soudan du Sud retrouve la paix, afin que les gens puissent retrouver une vie normale, retourner à l’école et reprendre leurs activités économiques normales », explique-t-il.
Filippo Grandi, qui se trouve dans le pays africain pour une visite de trois jours qui l’a également amené dans la capitale, Juba, explique que si l’assistance est actuellement nécessaire de toute urgence, la paix est la seule solution durable pour les millions de personnes déplacées du Soudan du Sud et à cause de tous les plus grands conflits du monde.
« Nous devons être capables de faire à nouveau la paix », explique-t-il. « Partout où je vais, les gens crient d’une même voix : « Nous voulons la paix, nous voulons la paix ».
Filippo Grandi prévoit de lancer un appel fort pour renforcer les efforts de paix au sommet de la solidarité pour les réfugiés organisé en Ouganda cette semaine. Ce sommet réunira environ 500 participants, notamment des chefs de gouvernement, des représentants des Nations Unies et des institutions financières, et des organisations non gouvernementales.