Deux décennies après la guerre, un programme de logement pour aider des Bosniaques à retrouver un chez-soi

La famille Guta a attendu pendant des années dans les ruines d'un village dévasté. Grâce à un nouveau programme de logement, ils espèrent retrouver un chez-soi et reconstruire leur vie.

La guerre avait forcé Zenid Guta à devenir un déplacé interne dans son propre pays en Bosnie-Herzégovine dans les années 1990. Depuis, il est rentré dans son village mais il vivait dans cet abri de fortune. Il espère retrouver un chez-soi plus sûr, plus solide et mieux chauffé dans le cadre d'un programme régional de logement.  © HCR/N.Lukin

USTIKOLINA, Bosnie-Herzégovine, 2 décembre (HCR) - En 1992, Zenid Guta n'était qu'un adolescent quand la guerre l'a forcé à fuir le village reculé de Ustikolina, niché dans la vallée de la Drina à l'est de la Bosnie-Herzégovine.

Lorsque Zenid, aujourd'hui âgé de 41 ans, est retourné dans son village détruit après la fin de la guerre, il a essayé de reconstruire sa vie. Il a épousé une femme de la région, Adila, âgée de 33 ans, et ils habitent avec leur fils Eldin dans un abri de fortune qu'il a construit avec des matériaux tirés des ruines d'Ustikolina, dans l'espoir de déménager quand la situation s'améliorerait.

Aujourd'hui, après des années d'attente et d'inquiétude, leur horizon pourrait enfin se dégager vers des temps meilleurs.

Le Programme régional de logement - financé par l'Union européenne et appuyé par le HCR, d'autres organisations internationales et des donateurs - prévoit de canaliser des millions d'euros vers les Balkans pour fournir des logements à des dizaines de milliers de personnes déracinées pendant les conflits des années 1990. Beaucoup, comme la famille Guta, avaient perdu leur maison.

Pour la communauté internationale, ce programme est une tentative ambitieuse de lutter contre l'héritage de déplacement forcé qui sévit toujours en Bosnie-Herzégovine, en Croatie, au Monténégro et en Serbie, pour fermer enfin ce chapitre tragique de l'histoire européenne. Mais, pour la famille Guta, le lancement du programme en Bosnie-Herzégovine est plus que la fin d'un épisode. Cette initiative pourrait leur fournir un chez-soi, et une chance pour un nouveau départ.

Les champs de la mort en Bosnie sont silencieux depuis presque 20 ans. Pendant toute cette période, la vie des Gutas a pourtant été une lutte. La cabane que Zenid a construite pour sa famille compte seulement 12 mètres carrés et elle offre un confort très relatif.

La famille est forcée de dormir à même le sol nu et froid, même pendant l'hiver. Pendant des années, ils se sont baignés dans une douche que Zenid a fabriquée, et leur éclairage se compose d'une seule ampoule, alimentée par un câble tendu depuis une maison voisine.

Sans un approvisionnement direct pour l'électricité, le réfrigérateur familial, qui leur a été donné par un généreux donateur, demeure vide et à température ambiante dans un coin de leur abri.

Ces conditions spartiates rythment la vie de Zenid et Adila, et mettent en danger la vie de leur fils Eldin, âgé de cinq ans et de santé fragile. Comme l'économie locale s'est remise de la guerre seulement très lentement, les progrès de la famille Guta ont été entravés par les tentatives de Zenid pour gagner sa vie.

Le chef de famille gagne un peu plus de 10 euros par jour grâce à la cueillette d'herbes et de champignons ainsi que de la coupe de bois. La plupart du temps, les Guta joignent les deux bouts grâce au versement d'allocations familiales par l'État qu'ils reçoivent pour Eldin, et la vente du lait de leurs deux vaches.

Après des années de lutte et de la pauvreté, leurs ambitions demeurent modestes. Zenid a déclaré : « Tout ce que nous voulons, c'est vivre simplement, comme des personnes normales. »

Les Guta pourraient bientôt voir leur rêve se réaliser après l'annonce de l'engagement de 101 millions d'euros pour le Programme régional de logement en Bosnie-Herzégovine. Cette somme sera utilisée afin de construire des maisons pour 5 400 familles identifiées comme étant les plus vulnérables des rapatriés, des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur du pays. Le programme vise à distribuer de l'aide à parts égales entre les Bosniaques, les Serbes et les Croates.

La première phase du programme en Bosnie verra le versement de la somme de 2,4 millions d'euros destinés à construire 170 unités de logement. Andrew Mayne, le Représentant du HCR en Bosnie-Herzégovine, a déclaré que ces fonds donneront dès que possible des maisons en dur aux personnes dans le besoin. « Certaines des familles parmi les plus démunies ont attendu 20 ans ou davantage pour recevoir de l'aide. Les bailleurs de fonds ont été informés de cette situation et ils ont donné généreusement », a déclaré Andrew Mayne.

« Le début de [ce] programme constitue un véritable tournant », a-t-il ajouté. « Aujourd'hui, enfin, ces familles vont voir de nouvelles maisons se dessiner devant leurs yeux. » Les premiers bénéficiaires de Bosnie-Herzégovine seront identifiés avant la fin 2014 et la construction débutera en 2015.

Zenid et Adila espèrent être parmi ceux à recevoir une vraie maison pour commencer une nouvelle vie. Ils sont même propriétaires d'une parcelle de terrain où une maison pourrait être construite. Il s'agit d'une parcelle dans une prairie qu'ils ont achetée il y a quelques années après avoir épargné peu à peu. « Notre seul souhait, c'est de voir notre maison s'élever dans cette prairie », a déclaré Zenid.

Par Neven Crvenkovic à Ustikolina, Bosnie-Herzégovine

Pour en savoir plus sur ce programme de logement : http://www.regionalhousingprogramme.org