Apatridie au Bénin : Des actes de naissance sont délivrés dans une zone frontalière contestée
Des milliers de personnes demeurent sans document d'identité dans des territoires contestés au Bénin et elles sont donc confrontées au risque d'apatridie. Pour éliminer ce risque, il faut renforcer l'enregistrement des naissances dans les localités frontalières.
NATITINGOU (Bénin), 25 février 2016 (HCR) - Juliette, 10 ans, exhibe avec fierté l'extrait d'acte de naissance que lui a délivré le Président du tribunal de Natitingou, une ville située à 700 kilomètres de Cotonou, la capitale du Bénin.
« Je vais désormais pouvoir aller à l'école ! J'espère pouvoir un jour, devenir institutrice », explique Juliette.
Tout comme Juliette, John vient également de recevoir le précieux document : « C'est la première fois de ma vie que je reçois un document d'identité. Maintenant je sais que j'existe », déclare l'adolescent de 15 ans, ayant participé récemment à une cérémonie de remise d'extraits d'actes de naissance à des populations risquant de devenir apatrides dans le nord du Bénin.
John est né à Kourou-Koualou, une localité située au nord du pays que se disputent le Burkina Faso et le Bénin. Les deux gouvernements ont saisi la Cour internationale de justice en 2009 pour tenter de régler ce litige mais en attendant, de nombreuses personnes, notamment des enfants, sont dépourvus de documents d'identité et courent le risque d'être apatrides.
« Le problème de l'apatridie émerge au Bénin surtout au niveau des zones frontalières », affirme Pépin Glele, le Chef de bureau du HCR au Bénin. « Des populations vivent dans des zones reculées du pays et hors d'accès pour les personnels de l'administration, où il n'existe aucun mécanisme pour enregistrer convenablement les personnes ou établir les déclarations de naissance. Ces populations sont confrontées à des problèmes d'identité car elles n'ont pas de papiers et souvent ne peuvent pas régulariser leur statut devant les tribunaux car c'est trop coûteux ».
C'est donc pour faire face à cette situation et pour respecter ses engagements pris au cours de la Conférence régionale sur l'apatridie qui s'est tenue à Abidjan en Côte d'Ivoire le 25 février 2015, que le Gouvernement du Bénin a adopté un plan d'action pour éliminer le risque d'apatridie.
Avec le soutien du HCR, environ 1730 extraits d'acte de naissance ont été délivrés depuis décembre 2015 aux habitants de cette zone contestée. Plus de mille certificats ont notamment été délivrés à des enfants.
« Nous nous réjouissons de l'appui du HCR qui nous a permis de donner ces documents cruciaux aux enfants », déclare Jean-Pierre Yerima, le Président du Tribunal de Natitingou. « Ils existent désormais et ne devront plus subir les conséquences de ne pas avoir une nationalité, ce qui les empêcherait d'aller à l'école ou d'avoir accès aux services sociaux de base. Grâce à ce travail, les enfants seront rattachés à une nation où ils pourront exercer leurs droits ».
Des milliers de personnes demeurent encore sans document d'identité sur ce territoire contesté et elles sont donc confrontées au risque d'apatridie. C'est pourquoi, selon Pépin Glele, « il faut renforcer l'enregistrement des naissances dans les localités frontalières ».
D'autres conflits territoriaux, entre le Bénin, le Togo et le Nigéria par exemple, ont fait l'objet de règlement pacifique avec la mise en place de commissions mixtes entre ces Etats. « Il est important que des dispositions soient prises pour régler ces situations qui peuvent générer l'apatridie », prévient Pépin Glele.
Par Simplice Kpandji