L’histoire d’Inas, États-Unis
J’ai fui la Somalie des années 90 suite à la chute du dictateur Siad Barre et après le décès de mon mari. Je suis arrivée en Algérie accompagnée de mes trois enfants en 1998 après un bref passage par la Tunisie. A l’époque, je ne parlais que le Somali. J’ai réussi à trouver un emploi comme femme de ménage pour faire vivre ma famille. J’ai alors confié mes enfants à une femme de ma communauté pendant quelques jours à Oran. A mon retour, j’ai appris que la femme était partie pour le Tchad sans savoir si cette dernière avait pris mes enfants ou les avait laissés. Je n’avais plus aucune trace de mes enfants. Je me suis battue sans relâche pour essayer de les retrouver. J’ai frappé à toutes les portes pendant de longues années mais en vain.
Je voulais offrir le meilleur à mes enfants. Mais je me suis retrouvée dans un cauchemar. Entre temps, j’ai essayé de refaire ma vie. J’ai eu deux enfants, Karim et Meriem. Mais je n’arrêtais pas de penser à mes enfants perdus. Je les cherchais partout, tous les jours, j’imaginais à quoi ils doivent ressembler après autant d’années. Je me demandais s’ils allaient me reconnaître. En 2010, le HCR m’a mise en contact avec son partenaire, l’association SOS Femmes en détresse. L’association m’a beaucoup soutenue. Ils avaient un réseau de contacts très large. Petit à petit, j’ai repris confiance en moi et je sentais que mon infime espoir reprenait le dessus. Par la ténacité de cette association qui m’a accompagnée dans mes recherches, j’ai pu retrouver Iqbal ma fille. Je n’avais pas revu Iqbal depuis plus de quinze ans. Elle a tellement grandi. J’ai appris qu’elle a été adoptée par une famille algérienne. Je suis tellement fière d’elle. Elle passe son baccalauréat cette année.
L’association a réussi par la suite à retrouver mon fils qui a lui aussi été adopté par une famille algérienne. Mais je reste sans aucune information en ce qui concerne mon troisième enfant. Le HCR a soumis mon dossier à la réinstallation en 2011. Le gouvernement américain a accepté cette demande et me voilà sur le point de commencer une nouvelle vie. On est le 27 janvier 2014. Je suis heureuse d’une part de pouvoir construire un avenir pour mes enfants. Mais je suis très triste de quitter l’Algérie. Mon fils est peut-être toujours quelque part ici. Je m’envole vers un nouveau pays, mais je garde l’espoir de pouvoir réunir autour de moi, un jour, tous mes enfants.
Texte de S. Amirat/2014.