Quel avenir pour la vache Kouri du Lac Tchad ?



La race bovine Kouri est une espèce endémique au bassin du Lac Tchad. Parmi les races bovines d’Afrique, cette race est intéressante en raison de ses particularités biologiques notamment en termes de résistance aux pathologies tropicales. Elle est aussi à la base d’un système de nomadisme particulier, les éleveurs se déplaçant d’une ile à une autre à la recherche de pâturages. Ses cornes flottantes sont exploitées lors des traversées et constituent une caractéristique unique de cet animal. Sa docilité et sa bonne performance laitière en font aussi un animal très prisé par les éleveurs.

La dégradation de la situation sécuritaire sur le Lac Tchad et son évacuation consécutive font peser de sérieux doutes sur l’avenir de la race Kouri, déjà fragilisée lors des phases naturelles de rétrécissement du lac. La race Kouri ne supporte pas les zones dunaires et arides. En temps normal, les bovins passent neuf mois sur douze sur le lac rejoignant la terre ferme uniquement pendant l’hivernage (saison des pluies), période durant laquelle les pâturages deviennent denses. Au-delà de cette période spécifique, les kouris doivent retourner dans leur environnement naturel, aujourd’hui sans les hommes. Comme Oumarou Arami éleveur Nigérien âgé de 45 ans nombreux éleveurs ont dû abandonner leur troupeau sur le Lac occasionnant des pertes automatiques. Oumarou explique : « avec la crise les éleveurs ont perdu des dizaines de milliers de vaches Kouri détournées par les insurgés mais aussi par des voleurs qui ont profité de l’abandon des animaux par leurs propriétaires. Les vaches sont détournées pour être revendues sur des marchés ou abattues pour être transformées en viande boucanée ». En juillet 2016, l’UNHCR et son partenaire Search For Common Ground réalisaient une enquête sur l’augmentation des tensions communautaires dans la région de Diffa. Cette enquête révélait que pour 81% des personnes interrogées, le « vol de bétail » était la première cause des tensions actuelles Cliquez ici .

Une alternative, précaire tant pour la santé animale que pour la sécurité des éleveurs, est de rester en bord de Lac. Mais la concentration des animaux et le déficit fourrager consécutif à la mauvaise campagne 2015 ont provoqué une perte importante du bétail. La saison des pluies 2016 s’achève aussi sur des déficits considérables au nord du Lac.

Anomalie de production de la biomasse au 1er Octobre 2016


La problématique pastorale reste la grande oubliée dans la réponse humanitaire à Diffa. Mis à part le CICR, peu ou pas d’interventions à la hauteur des besoins et des risques sont mises en place. Les éleveurs sont un pilier essentiel de la vie socio-économique de la région de Diffa. Les accompagner rapidement et de manière profonde reste incontournable.