Yvan Guichaoua, est enseignant - chercheur. Sur ce blog, il partageait en Novembre 2015 son analyse autour des mouvements, de leurs causes, de population depuis le Mali et vers le Niger.Lire l'article . La bande frontalière Mali – Niger est une zone particulièrement crisogène. Les récents évènements de Tabareybarey l’ont rappelé.
Dans le monde des ingénieurs de la paix, choisir le nom que l’on donne à un conflit violent, c’est déjà le résoudre en partie. Un conflit labellisé « agriculteurs-éleveurs » se traite par des négociations sur l’usage des ressources naturelles. Une rébellion séparatiste conduit éventuellement à des révisions constitutionnelles (décentralisation, fédéralisme). Les attaques « terroristes » appellent des réponses musclées, car « on ne négocie pas avec des terroristes ».
Le problème est qu’au Sahel, et ailleurs dans le monde, les conflits violents n’ont que rarement une seule dimension. Ils sont enchevêtrés et mobilisent une myriade de protagonistes aux alliances complexes et mouvantes. Leur attribuer un label et, ainsi, suggérer leur mode de résolution exclusif est donc lourd d’erreurs potentielles.
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Les derniers chiffres du recensement de la population déplacée dans la région de Diffa, publié par le Ministère de l’Intérieur, font état de plus de 302,000 personnes réparties sur 60 sites spontanés, villages et sur les deux camps de Kabelawa et Sayam Forage. Ces chiffres incluent les réfugiés, les retournés nigériens et les déplacés internes. En mai 2016, plus de 250,000 avaient été dénombrés.
La zone d’accueil des refugiées d’Intikane (ZAR) est aujourd’hui totalement intégrée dans son terroir d’accueil. Un bon indicateur pour lire cette intégration est celui de la mobilisation des acteurs nationaux autour de la ZAR. C’est actuellement le cas pour l’éducation. L’ONG nigérienne Hed Tamat vient d’apporter une contribution de 6,950,000 CFA (plus de 10,000 euros) pour soutenir la scolarisation des enfants réfugiés et nigériens de l’école d’Intikane. Cet appui est destiné à assurer le paiement des primes de motivation des enseignants et a couvrir une partie des besoins en vivres de la cantine.
Cet appui de l’ONG Hed Tamat est en soit doublement symbolique : comme le confirme le Coordinateur de l’ONG Hed Tamat, il est indéniablement tourné vers le futur: « appuyer l’éducation, c’est appuyer l’avenir. C’est la raison pour laquelle nous nous intéressons de plus en plus à l’éducation sur cette Zone d’Accueil des Réfugiés, en marge des investissements que nous y faisons déjà en matière de soutien aux activités génératrices de revenus» ; Il renverse les habitudes : une structure nationale venant accompagner les efforts d’une organisation internationale faisant face à une réduction drastique de ses fonds pour les réfugiés maliens.
L’éducation dans la zone d’accueil des réfugiés d’Intikane s’apparente à une véritable « succès story ». Avec plus de 1200 élèves, l’école d’Intikane est la plus grande de la région de Tahoua : le taux de scolarisation au primaire des enfants réfugiés d’Intikane est passé de 8% au Mali à 78% au Niger. Mais après 4 ans au Niger, les enfants ont grandi et un nouveau besoin apparait : la continuité vers le secondaire. La Direction Régionale des Enseignements Secondaires de Tahoua vient de faire la demande à son Ministère pour l’ouverture d’un collège dans la localité voisine de Telemces. La mutualisation des efforts se poursuit.
La gestion des déchets dans les camps de réfugiés est souvent un processus inabouti. Afin de maintenir des espaces sains, des activités de collectes et des centres de tris sont mis en place au niveau de chaque camp. Cependant dans un pays comme le Niger où les mécanismes formels de traitement sont inexistants, les déchets s’amoncellent et leur avenir une fois qu’ils quittent le camp reste une grande inconnue.
Pour pallier à cette insuffisance, l’UNHCR et l’ONG GVD Afrique ont depuis mai 2016 enclenché une vaste réflexion incluant au-delà du traitement l’entreprenariat des jeunes. Pour chaque camp de la région de Tillabéry, trois jeunes réfugiés et trois jeunes locaux ont été identifiés et formés dans la gestion et la valorisation des déchets. Les bidons en plastique du camp et des villages d’accueil peuvent devenir aujourd’hui des pavés, et les matières organiques du compost. En parallèle du processus technique de transformation des déchets, les stagiaires ont bénéficié de modules autour de la gestion de petite entreprise collective. Comme Safia, jeune couturière originaire du village de Mangaize, les stagiaires ont rapidement cerné la portée de la formation : « je vois aujourd’hui la possibilité de profiter des déchets que nous jetons dans le village et qui peuvent être recyclés pour nous offrir des revenus. Une fois au village je prendrai mon courage pour sensibiliser mes amies et mes mères’’.
Pour Moussa cette formation est une aubaine afin de casser le cercle vicieux de l’inactivité des jeunes réfugiés dans le camp de Abala : « je pense qu’à partir d’aujourd’hui j’ai retrouvé un boulot. Avec mes amis, nous allons nous mobiliser pour faire la collecte des déchets tant au niveau du camp et que de la ville d’Abala’’.
Pour les jeunes formés la prochaine étape est l’appui en machines pour mettre en place de petites unités de traitement des déchets au niveau des camps et des villages hôtes.
Au Sahel, les recherches ont montré que chez les animaux domestiques la croissance et la reproduction sont surtout affectées par la faible disponibilité et la faible valeur nutritive des pâturages. Quant à la production laitière, son principal facteur limitant est la chaleur. Or, les ligneux à travers l'ombrage offrent un abri propice où les animaux se protègent contre les effets néfastes de la température élevée surtout pendant la saison sèche et chaude. Encore, pendant toute la saison des pluies dans certaines régions du pays, surtout au Sud (où l'espace est exclusivement réservé aux cultures), les animaux, principalement les petits ruminants sont gardés en stabulation et nourris avec le fourrage ligneux. Encore, on constate dans les grandes villes du Niger l'utilisation des Produits Forestiers Non Ligneux pour assurer l'alimentation du bétail. Il s'agit par exemple des feuilles et fruits des espèces comme Faidherbia albida (Gao), Acacia raddiana (kandili en Haoussa et Bisaw en Djerma) qui se vendent sur certains axes routiers et des points à proximité des marchés à bétail.
D'autre part, rappelons que depuis Novembre 2011, le Niger a commencé l'exploitation de son pétrole. Ce qui lui permet de produire jusqu'à 300000 tonnes de gaz butane chaque année. L'utilisation de ce gaz butane permettra sans nul doute la régénération des massifs forestiers et des parcs agro forestiers.
D'autre part, rappelons que depuis Novembre 2011, le Niger a commencé l'exploitation de son pétrole. Ce qui lui permet de produire jusqu'à 300000 tonnes de gaz butane chaque année. L'utilisation de ce gaz butane permettra sans nul doute la régénération des massifs forestiers et des parcs agro forestiers. En effet il y aura moins de pression sur les ressources végétales pour des fins énergétiques car rien qu'à Niamey nous consommons environ 334533.50 tonnes de bois énergie par an. L'environnement se régénère et devient beaucoup plus productif. Ce qui contribue efficacement à l'amélioration de la performance de notre système d'élevage à travers une disponibilité permanente de fourrage frais et une réduction d'investissement important (plus de 3.000.000.000 de FCFA par an) de l'Etat pour l'achat de son de blé et de tourteaux de coton afin de pratiquer un élevage moins performant à cause des intempéries climatiques.
Ainsi, les Nigériens pourront Nourrir les Nigériens de façon durable et les sécheresses ne seront plus synonymes des crises alimentaires ou de famines au Niger.
Il est donc temps que les Nigériens prennent conscience de l'importance écologique et économique de la couverture végétale et réagissent rapidement pour sa régénération et sa protection. Nous devrons impérativement réduire l'abattage des ligneux pour des fins énergétiques et consommer le gaz butane dans les ménages.
De même, le gouvernement nigérien doit poursuivre davantage sa politique énergétique préservatrice de l'environnement pour la durabilité de nos systèmes de production en général et le système d'élevage en particulier. Enfin, nous souhaitons tout lecteur du présent article soit vulgarisateur permanent de cette politique d'utilisation de gaz butane dans son milieu pour un environnement sain et productif.
Moussa Illiassou
Direction Générale de l'Environnement et du Développement Durable
www.lesahel.org
L’accès au gaz domestique est une composante essentielle de la stratégie de l’UNHCR au Niger. Pour en savoir plus cliquez ici
Tel que relayé par les medias internationaux (http://www.rfi.fr/afrique/20160911-niger-mali-attaque-camp-refugies-tabarey-barey ), l’attaque ayant visé un poste de sécurité du camp de Tabareybarey a causé le décès de deux réfugiés, une mère de 3 enfants et un enfant de 5 ans, victimes de balles perdues. Cinq autres réfugiés, dont un dans un état grave, se trouvent actuellement à l’hôpital regional de Tillabéry.
L’UNHCR et les autorités se sont rendues auprès des familles endeuillées et au chevet des blessés. Un dispositif d’accompagnement est d’ores et déjà mis en place. Apres l’attaque de Mangaize en octobre 2014, ce nouvel évènement tragique rappelle une fois de plus que la zone reste particulièrement crisogène.
La problématique des mines et des restes d’explosifs est autant nouvelle qu’entière dans la région de Diffa. Afin de mieux connaitre la situation et rapidement mettre en place des réponses adaptées, l’UNHCR a développé un projet avec la Commission Nationale de Contrôle et de Collecte des Armes Illicites (CNCCAI). Le Capitaine Grema Mahamadou est chargé de la Composante Humanitaire pour la CNCCAI.
Mr Grema, pouvez-vous expliquer le cadre stratégique et opérationnel du projet qui lie la CNCCAI et l’UNHCR ?
Le projet se définit comme un projet à impact rapide sur les aspects de contamination en mines et restes d’explosifs de guerre. Il vise à informer les humanitaires et les populations sur les zones infestées par les mines ainsi que sur les dangers des résidus d’explosifs et de mines. C’est un projet qui s’étend sur neuf mois. Trois ont déjà été écoulés dans le cadre de la phase préparatoire et des premières missions de terrain. Une première cartographie des sites susceptibles de regorger de restes d’explosifs et de mines a aussi été réalisée. Après ce premier travail, nous sommes maintenant dans la phase de rencontre avec les autorités régionales et les responsables des forces de défense pour la mise en œuvre des activités du projet. Un atelier se tiendra à Diffa dans les prochains jours pour discuter des outils d’évaluation des risques et de la mise en place d’un mécanisme de sensibilisation.
Quels sont les méthodes qui seront employées?
Tout d’abord la mise en place de points focaux sur les sites concernés. Nous utiliserons également les radios communautaires dans le cadre des sensibilisations et des panneaux de visibilité seront installés pour matérialiser les zones à risque et les risques eux-mêmes. Une cellule régionale en charge de l’information et du déminage humanitaire sera créée. Elle sera présidée par le Gouverneur et la population civile ainsi que les divisions administratives locales y seront représentées. La cellule aura notamment en charge de recruter et de former les équipes de déminage à travers la CNCCAI.
A quel niveau évaluez vous le risque ?
Pour le moment, il reste impossible d’explorer les zones du lac par conséquent le risque y est d’autant plus élevé car nous ne pouvons donc pas y apporter une solution adéquate. Dans les autres zones, le risque sera réduit sous l’effet de la sensibilisation et de l’information.
Par rapport aux actions que la CNCCAI a pu mener dans d’autres zones du Niger la situation à Diffa a-t-elle des particularités ?
Nous avons vécu l’expérience d’Agadez qui concernait le déminage de mines anti-char. A Madama, au nord de Diffa sur la frontière Libyenne, un deuxième projet de ce type a été conduit par la CNCCAI dans le cadre du déminage des mines anti-personnel de 1945.
Dans les sites touchés par les affrontements dans le sud et sud-est de la Région de Diffa, il est question d’Engins Explosifs Improvisés et restes d’explosifs de guerre. Nous voyons déjà une grande différence. Ces zones peuvent aussi encore être touchées par d’éventuelles attaques et la zone des îles du lac où devra se dérouler une grande partie de l’opération du déminage reste actuellement à haut risque voire même infranchissable. La situation de Diffa est unique en son genre et assez complexe mais nous comptons bien aller de l’avant.
De par cette complexité, il est important de rappeler que l’objectif de ce projet est d’abord d’informer les humanitaires et les populations et de produire une cartographie tous les trois mois qui devra fournir une visibilité des sites infestés. En ce sens, le premier travail est axé sur la sensibilisation. La question de déminage arrivera en temps opportun.
Dans un contexte sécuritaire sensible tel que celui que traverse la région de Diffa, l’accès à l’assistance juridique pour les demandeurs d’asile et les réfugiés présumés d’implication dans des activités en lien avec le terrorisme reste un véritable défi. Ce défi reste d’autant plus complexe quand le nombre des demandeurs d’asile incarcérés atteint un niveau bien au-delà des capacités d’absorption du système d’asile du Niger encore jeune et fragile.
Après plusieurs mois d’échanges et de cadrage, l’Ordre des Avocats du Niger et l’UNHCR viennent de signer une Convention afin de renforcer la qualité et fluidifier l’assistance juridique à destination des réfugiés et demandeurs d’asile incarcérés. Ces derniers bénéficieront dorénavant de l’appui d’avocats mis à leur disposition. L’Ordre des Avocats a aussi nommé un point focal technique spécialement dédié à ce volet.
La signature de cette convention doit s’analyser à travers la lecture plus large d’un environnement de protection globalement favorable au Niger.