Les résultats préliminaires de l’enquête sur la vulnérabilité à l’insécurité alimentaire des ménages au Niger font ressortir plus de 4 millions de nigériens affectés (sévère et modéré) et 7 autres millions sont à risque sur l’ensemble du territoire. Toutes les zones abritant les réfugiés maliens et nigérians sont touchées (les régions de : Tillaberi, Tahoua ,Diffa et Niamey). Les proportions des populations dans ces zones qui nécessitent une assistance alimentaire à très court terme varient entre 21 et 46%. Cependant le département de Ouallam (région de Tillaberi) qui abrite le camp de réfugiés de Mangaizé est le plus exposé du pays avec plus 50% de population affectée. Ce département est suivi par le centre urbain de Niamey avec une proportion d’environ 46%.
Troupe musicale Assalim dirigée par M. Salim pendant une prestation à Niamey le 19 août 2013
Question : Pouvez-vous nous expliquer dans les quelles conditions vous avez entrepris votre voyage retour vers le Mali ?
Je suis rentré au Mali avec toute ma famille le 12 novembre dernier, avec mes deux épouses et nos 13 enfants. En plus de nos bagages, nous avons aussi emporté douze chèvres avec nous. Le convoi est parti à 9h du matin et nous sommes arrivés à 16h à Menaka. Le trajet s’est fait sans encombre, sans contrôle à la frontière. Nous sommes passés par Anderboukane, quelques familles sont descendues et nous avons continué jusqu’à Ménaka. Nous étions 93 familles en tout dans un convoi de 11 camions. Il pouvait y avoir jusqu’à 10 familles par camion. Les transporteurs étaient des Nigériens qui maîtrisaient bien la route. On a payé 555.000 FCFA par camion, en se cotisant à plusieurs familles.
Question : Racontez-nous un peu votre arrivée au pays, ce que vous avez ressenti, ce que vous avez trouvé ?
Depuis le 12 avril 2012, date de mon arrivée au Niger, je n’étais pas retourné au Mali. A la vue de Menaka, de notre maison, les enfants ont failli sauter du camion tellement ils étaient contents de retrouver leur terre natale. Moi-même j’étais très heureux, le pays m’avait manqué. J’ai fait le tour de la ville, j’ai trouvé que la ville reprenait vie, il y avait du monde. A notre arrivée, nous avons retrouvé l’équipe d’ACTED qui a procédé à une distribution générale de vivres (riz, semoule, nébé) à toutes les familles. Quand ils ont appris notre retour, des connaissances, des proches des villages environnants sont venus et continuent de nous rendre visite. Nous avons rencontré le Maire, et quelques autres ONGs comme MDM, IRC, GRIFA, et aussi le CICR. Les services publics fonctionnent, la Mairie travaille, la Préfecture travaille pour tout ce qui concerne l’état-civil, l’administration. L’autre jour, il y avait une grande réunion sur l’administration territoriale pour identifier les sites principaux avec la présence des chefs de sites, de factions, de villages etc…Plus de 1000 sites ont été répertoriés dans la zone. Mes enfants vont à l’école, le centre santé, les pharmacies fonctionnent, tout me parait en ordre. Sauf la situation économique qui ne s’est pas améliorée, le temps passe et les gens ne font rien. Moi-même j’ai déposé mon CV avec une ONG mais je n’ai pas eu de suite jusqu’à présent. Il nous faudrait travailler pour acheter des briques, des tôles et réhabiliter nos maisons et subvenir aux besoins de nos familles.
Question : Quels sont vos projets futurs ?
J’ai l’espoir de trouver du travail, et de retrouver une vie normale à Menaka. Mais je dois dire que les réfugiés rapatriés auront besoin d’un appui alimentaire et d’un appui sur l’habitat.
Question : Que gardez-vous de votre expérience en tant que réfugié au Niger ?
A mon arrivée à Ménaka, je me suis senti conforté dans ma décision de rentrer au pays et de laisser le Niger. Le Niger a été très accueillant, et j’ai eu la chance de vivre une expérience très riche en participant avec ma troupe au festival international de Mr. Alphadi, je n’oublierai jamais cela. Mais ce qui est sûr, c’est qu’un artiste n’a pas de frontière, et je n’écarte pas la possibilité un jour de revenir au Niger, mais en tant qu’artiste cette fois !
M. Salim, ancien réfugié du camp de Abala est directeur de la troupe musicale traditionnelle Touareg “Assalim”. Cet interview a etait réalisé le 16/01/2014 par téléphone.