Deux semaines après la visite du Haut-Commissaire de l’UNHCR a Maine Soroa, un échange avec le Chef Canton s’imposait pour revenir sur cet accueil incroyable.
Honorable Chef de canton, l’accueil réservé au Haut-Commissaire à Maine Soroa a été incroyable. Pourquoi cet accueil ?
Dans la semaine du 23 Novembre 2016, nous avons été informés de la visite du Haut-Commissaire dans la ville de Mainé Soroa. Nous avons convoqué notre comité pour organiser la cérémonie d’accueil et il s’est mobilisé pour organiser les cérémonies avec les moyens que nous lui avons donnés. Chemin faisant, le comité a été accompagné par une équipe de l’UNHCR. Le Lundi 12 Décembre 2016 est une journée gravée dans l’histoire de Mainé-Soroa pour avoir accueilli ces honorables hôtes avec à leur tête Monsieur Filippo Grandi accompagné de Monsieur Lawan Magagi, Ministre de l’Action Humanitaire. Cette grande fête et cet accueil chaleureux ont été à l’honneur pour immortaliser cette grande journée.
Vous êtes montés sur les chevaux ce qui est un symbole fort.
Nous ne montons à cheval que pour des occasions exceptionnelles. L’arrivée du Haut-Commissaire est un événement exceptionnel qui est devenu une cérémonie de fête car un adage Kanuri dit: « les pieds ne vont que là où le cœur aime». Le choix de la ville de Maine-Soroa est un honneur qu’il était nécessaire de marquer: nous et nos administrés à cheval et à dos de dromadaires, habillés en tenues traditionnelles pour les hommes et les plus beaux harnachements pour les animaux et au son de l’algaita avec les you-yous des femmes en habits de fêtes et bien parfumées, marquant des pas de danses traditionnelles. Nous avons exprimé ainsi la joie de toutes nos communautés présentes dans la plus grande discipline.
Cette journée est inscrite dans le livre historique des importants événements du canton. Dans le futur, cette journée sera une référence pour narrer des faits, des dates et autres. La journée du 12 Décembre 2016 témoigne de la cohésion sociale entre les différentes communautés du canton de Maine Soroa et celles du pays voisin du sud (Nigeria).
Vous avez donné le titre honorifique de « Lawan » au Haut-Commissaire. Qu’est-ce que cela signifie et implique ?
Dans l’organigramme de la chefferie traditionnelle, le titre de « Lawan » signifie la bravoure donnée au chef de deuxième dynastie, Bouji Kollomi, le chef historique de Maine Soroa qui a été Lawan. Le titre honorifique de « Lawan » signifie Sous-Chef ou conseiller désigné par le chef de canton. Cette nomination implique une mission que le Chef assigne à cette personne. Il est systématiquement investi visionnaire pour le Chef. Lawan, en kanuri, exprime également celui qui peut générer de la richesse économique. Son rôle est de mobiliser les ressources techniques, financières et humaines comme moyens au service des idées, des projets et du programme du Chef ou du Canton. Il doit aussi développer la cohérence et l’efficience entre les personnes, les écouter et garantir à chacun son intégrité physique et morale. Quatres éléments, symbolise l’intronisation du Lawan comme le veut la coutume : le turban qui signifie la responsabilité ; le sabre signifiant la défense ou la protection ; le couteau pour le partage, l’aide et l’assistance ; le cheval pour la promenade de visite aux administrés du Chef.
Vous avez contribué à l’organisation d’une rencontre entre le Haut-Commissaire et les représentants des autorités traditionnelles Nigérianes. Quel était l’esprit de cette rencontre ?
Depuis que les événements de Boko Haram se sont produits, les communautés de Diffa ne font qu’accueillir à bras ouverts les réfugiés du Nigéria dont un bon nombre vit à Maine Soroa. Les chefs traditionnels du Nigeria ayant les mêmes traditions, comme la coutume le veut, ils prennent part aux manifestations du canton raison pour laquelle ils étaient présents.
La rencontre avec le Haut-Commissaire leur a permis d’exprimer leurs idées et préoccupations, sans barrière, d’écouter le Haut-Commissaire et de prendre notes. Ils ont aussi par la même occasion témoigné de leur reconnaissance au Chef de canton de Maine Soroa et à toutes ses communautés pour avoir accueilli et soulagé plus de 30 000 réfugiés à Maine Soroa.
Les échanges ont été fructueux. Les participants étaient satisfaits de la rencontre. Les points sur l’alimentation, la santé, l’hygiène, l’habitat et l’éducation des enfants réfugiés font aussi partie des préoccupations du Haut-Commissaire. L’ensablement des espaces agricoles a aussi été évoqué comme une préoccupation. Le Haut-Commissaire a promis d’examiner tous ces points et que certains seront soumis à d’autres institutions telle que la Banque Mondiale pour appréciation et action. Cela a été une grande opportunité de nous faire entendre et de transmettre les attentes des communautés.
Quels sont les besoins en interventions essentielles que vous adressez à l’endroit de l’UNHCR et de la communauté humanitaire pour l’année 2017 et quelles sont vos propres perspectives à cet effet?
En matière d’élevage nous comptons aller dans le sens de la redistribution sociale du cheptel. Cela nécessite un besoin d’appui de la part des partenaires techniques et humanitaires dans le domaine. Nous souhaitons dans la ville, la réhabilitation des anciens puits et le fonçage de nouveaux points d’eau tel que déjà lancé par le HCR sur les deux sites d’urbanisation créés à Maine. Nous voulons un appui dans le domaine de la production agricole, et dans le cadre de la santé animale pour apporter un nouveau souffle à nos populations. Comme vous le savez, les saisons hivernales à Diffa sont régulièrement déficitaires. Nous entendons œuvrer avec nos communautés pour agir dans la protection et la restauration de la base productive par l’aménagement de sites. Ensuite, il est nécessaire d’agir dans la reprise des activités de développement entrainant l’occupation des jeunes et des femmes. Egalement, nous souhaitons aller dans le sens de la culture de nos valeurs traditionnelles de tolérance et d’équité dans les rapports et la redistribution des avantages pour préserver la quiétude et assurer la pleine installation de la coexistence pacifique.
On 12 December 2016, the UN High Commissioner for Refugees, Filippo Grandi, visited Diffa region in Niger. Here, the forcibly displaced population is spread across more than 100 sites in a stretch of arable land along the border with Nigeria. He used the opportunity to highlight the importance of data in protecting and assisting more than 250,000 persons (refugees, IDPs, and Niger nationals that returned from Nigeria as a result of conflict).
“Throughout my visit, our team in Diffa provided me with a wide range of information on each site we passed or visited. In Diffa town, a Data Centre on Forced Displacement was established in 2013, funded by UNHCR, and implemented by our partner REACH.
Data is at the heart of good decision-making. Only with accurate information can we make the right decisions on how to support displaced people in Niger and elsewhere. And eventually, we should enable people, including refugees, IDPs, and persons at risk of statelessness, to access their own data – so that they can make informed decisions about their lives and that of their children.
UNHCR has made data collection and analysis a priority for the organization by putting in place a multi-year strategy for the collection and use of good data, placing people - refugees and others - at the centre of these efforts.
We believe that access to information is almost as important as security, food and water when it comes to ensuring protection for the displaced and their families. With accurate information, refugees and other displaced people can be made aware of their rights, where they can receive assistance, the conditions they face, and where they can access safety. UNHCR aims to work with them and share the information we obtain through assessments and evaluations, and also to give them the means to manage their own personal information and protect their identities, and help them become part of the global information community.
We are also working with our partners – states, UN agencies and NGOs, to ensure that data is made available, that it meets the needs for decision-making, and most importantly, is shared in an transparent and responsible way. In that respect, the Diffa Data Centre is an excellent example of UNHCR’s efforts to improve data and information and bring digital empowerment to the people it serves.”
For more information:
http://www.diffa-forced-displacement.info/
http://data.unhcr.org/SahelSituation
Filippo Grandi says Niger sets a strong example through its hospitality for people fleeing conflict in Mali and Nigeria.
DIFFA, Niger – Despite facing high levels of poverty and other development challenges of its own, Niger is playing a key role in sheltering refugees fleeing conflicts in the region, the UN refugee chief said during a visit this week.
The West African country provides asylum and refuge to over 165,000 refugees fleeing conflict and persecution in neighbouring Mali and Nigeria.
“It’s very rare to find a country and a people facing so many challenges – security, economic, climatic - surrounded by unstable neighbours, yet providing refuge and maintaining humanitarian values, despite it all,” UN High Commissioner for Refugees Filippo Grandi said during his first visit.
“I had no hope when I fled Nigeria, but now I feel at home.”
The region of Diffa, in the south-east of Niger, is a perfect example of this solidarity, as expressed by Grandi on a visit to the region to highlight the Nigerian displacement crisis. Since February 2015, Diffa has been under constant threat from Boko Haram.
The numbers of displaced people in the region has skyrocketed in the past year, reaching over 250,000 by last month. This total includes refugees, returning Niger citizens and people forcibly displaced within the country’s borders. What is exceptional about Diffa is the fact that amongst the displaced, just 7,500 are living in a refugee camp. The majority live side by side with the local population, who also face major challenges.
UNHCR, the UN Refugee Agency, provides assistance and protection to people in need, based on their vulnerability, and not just on their status as refugees. In such a dynamic and volatile context, UNHCR has been forced to rethink the way it operates, and to come up with innovative solutions for all.
In its Urbanization Project, UNHCR works hand-in-hand with the local and community authorities, to provide legal access to land for displaced families, while contributing to improving the local economy.
During a visit to the town of Maine Soroa, in the Diffa region, Grandi met with Amina, a 28-year-old Nigerian refugee who had received a parcel of land and a house under the project. “I had no hope when I fled Nigeria, but now I feel at home. I’ve put my daughter in school and I want my family to make our life here.”
To date, over 2,000 families have benefitted from land parcels, whilst the construction of social and sustainable long-term housing began in 2016.
Another such project, which helps not only refugees, but also the local population, is the Gas as Domestic Energy programme. Throughout 2016, over 200,000 of the most vulnerable people across the region of Diffa received gas bottles to use for domestic purposes. UNHCR struck a partnership with a private gas company in Niger to ensure the sustainability of the project.
“If we don’t invest in the future of the children, of the young people, then the risk is that we slide back into insecurity. “
Not only does the use of gas protect the environment, which is essential in the Lake Chad Basin, but it provides multiple other benefits. “The gas has changed a lot of things in our life,” Bintu, a local woman hosting refugees in her home, told Grandi.
The cost of gas refills is far lower than the price of wood, which means people have more money to invest in other areas. Women and girls are also spared having to gather firewood far from home, where they are vulnerable to assault. It also enables girls to spend more time in school rather than on domestic chores.
The High Commissioner, noting that Diffa had been one of the most prosperous regions in Niger, stressed that: “If we don’t invest in the future of the children, of the young people, then the risk is that we slide back into insecurity. We cannot afford that. The people cannot afford that. The authorities cannot afford that.”
During a meeting on Sunday with Niger Prime Minister Brigi Rafini in Niamey, Grandi reiterated, that, “Niger is an example that I assure you I will use around the world.”
For more information go to : http://www.unhcr.org/news/latest/2016/12/584ff3cc4/un-refugee-chief-praises-nigers-help-refugees.html
Le Gouvernement du Niger a fait part à l’UNHCR de sa décision de fermeture définitive de la Zone d’Accueil des Réfugiés (ZAR) maliens de Tazalit. Le 6 octobre 2016 une attaque avait causé le décès de 22 militaires en charge d’assurer la sécurité de la ZAR.
Pour les réfugiés de Tazalit, la relocalisation volontaire vers la Zone d’Accueil d’Intikane est aujourd’hui proposée. Sur le terrain, échanges et sensibilisations auprès des réfugiés de Tazalit et d’Intikane sont en cours. Les discussions se poursuivent entre l’UNHCR et les autorités pour définir les modalités techniques et les actions conjointes pour accompagner la mise en œuvre de cette décision dans la sécurité et la dignité des refugies.
3854 réfugiés maliens sont actuellement présents à Tazalit, 18241 à Intikane.
Les flux migratoires qui traversent le Niger sont aujourd’hui regardés de près mais très souvent la lecture est biaisée par un manque de finesse dans l’analyse. L’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) est particulièrement active au Niger. Giuseppe Loprete en est le chef de mission. Il apparait intéressant de prendre aujourd’hui le temps de profiter de l’expertise de l’organisation pour discuter chiffres, tendances de mouvements et protection internationale.
Mr Loprete, dans le dernier rapport statistique de l’OIM sur les flux migratoires à travers le Niger, nous pouvons voir qu’il a été observé le mouvement de plus de 417,000 personnes depuis le début de l’année. Alors que les débats autour de la pression migratoire sur l’Europe sont à leur paroxysme, ces chiffres sont très souvent repris sans analyse par des acteurs extérieurs. Pouvez-vous nous aider à mieux les appréhender ?
Les flux migratoires traversant le Niger sont divers et complexes. Le Niger étant un Etat Membre de la CEDEAO, espace de libre circulation, voit venir beaucoup de migrants des pays de la CEDEAO. Les routes entre le Niger, l’Algérie, la Libye, le Mali et le Burkina, entre autres, sont des routes de migrations anciennes qui datent de bien avant les pressions migratoires sur l’Europe. Il faut tenir compte du contexte historique quand on observe les flux migratoires.
Il est important de préciser que les observations de l’OIM se concentrent sur deux localités : Arlit et Séguidine, où sont observés les flux dans un sens comme dans l’autre. Il ne s’agit pas ici de contrôle de l’immigration qui relève de l’Etat.
Dans les flux migratoires qu’observe l’OIM on peut distinguer plusieurs ‘catégories’ de migrants.
En ce qui concerne les individus « sortants », il y a premièrement les migrants allant vers la Libye et l’Algérie pour des raisons économiques, afin de travailler sur place ; une migration donc généralement circulaire/saisonnière. Les migrants Nigériens sont principalement dans cette catégorie. Ils suivent une tradition de migration économique circulaire bien établie dans les régions frontalières. Il est assez commun d’aller travailler dans ces deux pays à partir du Niger pendant plusieurs années avant de retourner au Niger. Les personnes effectuant cette migration s’engagent à faire aussi des voyages courts en Libye et en Algérie pour s’approvisionner en marchandises qui sont ensuite revendues au Niger. Selon les observations de l’OIM, 42,000 personnes effectuant ce type de migration circulaire, ont transité les deux points de monitoring des flux depuis février 2016.
Deuxièmement, on trouve les migrants de l’Afrique de l’Ouest allant vers la Libye ou l’Algérie et qui ont souvent l’intention d’aller en Europe. La plupart sont des citoyens de la CEDEAO et peuvent librement circuler au Niger. Cependant la plupart qui entrent en Libye le font sans visa valide et seront ainsi en situation irrégulière. De la frontière Libyenne ils se dirigent vers Tripoli avec l’intention de prendre un bateau allant vers l’Italie. La majorité de ces migrants payent la grande partie de leur voyage dès leur départ d’Agadez, car la difficulté du terrain désertique (absence de routes, climat difficile, manque de réseau téléphonique) fait qu’ils sont dépendants de transport organisé pour arriver en Libye. Ces migrants représentent une grande partie des flux avec 180 000 migrants observés depuis février 2016.
Enfin, les migrants « entrants ». Ce chiffre reflète le nombre de personnes qui sont observées dans les Points de Monitoring des Flux dans le sens Libye-Niger / Algérie-Niger et non les entrées sur le territoire nigérien en général. Il s’agit ici soit des travailleurs Nigériens mentionnés ci-dessus soit des migrants Ouest Africains qui retournent vers leur lieu d’origine. Ces migrants Ouest Africains ont soit travaillé en Libye et la situation actuelle les a incité à partir, soit ils ont avaient l’intention de faire la traversée vers l’Europe mais ont été découragés par les conditions difficiles et parfois violentes en Libye. Selon les observations aux points de monitoring, ce chiffre s’élève à 100 000 personnes.
Au cours des dernières semaines, il apparait dans le rapport statistique que les mouvements se sont drastiquement réduits. Quel en est selon vous l’explication ou les explications?
Les flux migratoires ne sont généralement pas constants. La baisse actuelle peut être expliquée par plusieurs facteurs qui influencent les mouvements des personnes à travers la zone, mais toutes ces explications possibles restent à vérifier. Il faut prendre en compte notamment les tendances saisonnières, l’existence d’une multitude de routes et de réseaux de passeurs ou encore les opérations menées par les autorités pour la mise en œuvre de la loi sur le trafic illicite de migrants ce qui signifie contrôle et arrestation de passeurs présumés.
Mais comme je l’ai mentionné, nous observons les flux sur deux localités depuis le début de l’année 2016, et l’observation sur plus long terme permettra sans aucun doute d’identifier des tendances plus claires.
OIM et UNHCR travaille étroitement dans le cadre du référencement des potentiels réfugiés identifiés dans la région d’Agadez. Au milieu de ces mouvements importants, il apparait que cette catégorie de personnes ne représente qu’une très faible proportion du flux. Moins d’une quinzaine de cas ont été référencés depuis le début mais il reste fort probable que nombreux échappent encore aux deux organisations. Quels sont pour vous les principaux défis à relever pour identifier les personnes qui pourraient bénéficier de la protection internationale et donc réduire pour elles les risques d’une traversée hasardeuse ?
Nous nous félicitons de la coopération établie avec le HCR. Les agents de profilage qui enregistrent les migrants qui demandent l’assistance au retour volontaire au sein de nos centres ont par exemple été conjointement formés par les collègues du HCR et de l’OIM. Aussi, nous avons conjointement adapté les outils de profilage et d’enregistrement des migrants, afin d’assurer une identification des besoins de protection internationale.
Chaque migrant avec qui nous communiquons est informé sur les possibilités de demander la protection et sa situation individuelle est évaluée au moment de l’enregistrement au regard des critères de protection. Comme je l’ai décrit, nous rencontrons avant tout des migrants économiques venants des pays de l’Afrique de l’Ouest comme le confirment nos statistiques. Nous avons depuis le début de l’année référencé 13 personnes qui demandaient la protection internationale, mais celles-ci n’ont soit pas été évaluées comme éligibles en raison de l’absence de réunion des critères pertinents, soit ont décidé d’abandonner leur requête.
La priorité pour l’OIM est donc, selon moi, de continuer le travail de sensibilisation sur les risques de la migration dans des conditions irrégulières et l’existence d’alternatives, en coopération avec tous les partenaires.