VIH/SIDA : Le conflit en République centrafricaine interrompt le traitement
Mais une réfugiée sud-soudanaise, par son mari aujourd'hui défunt, a accès gratuitement aux médicaments vitaux via une organisation de l'église à Bangui.
BANGUI, République centrafricaine, 3 septembre (HCR) - Le conflit a forcé Nayo à fuir son pays natal, le Soudan du Sud, en quête d'un refuge en République centrafricaine voisine. Mais cela n'a pas empêché cette réfugiée âgée de 58 ans de recevoir le traitement médical qui la maintient en vie.
« Les combats m'ont forcée deux fois à quitter le Soudan du Sud vers la République centrafricaine : une première fois quand j'étais encore petite fille et une autre fois à l'âge adulte», déclare-t-elle au HCR. « J'aimerais bien revoir mon pays, même s'il est en proie à la guerre. Mais je suis fatiguée de courir. Je suis vieille et trop malade », ajoute-t-elle avec résignation.
Nayo fait partie des dizaines de milliers de personnes en République centrafricaine, y compris des réfugiés, qui vivent avec le VIH. Toutefois, alors que d'autres luttent pour accéder à un traitement médical, elle a accès gratuitement aux médicaments vitaux via une organisation de l'église à Bangui, la capitale de la République centrafricaine déchirée par le conflit.
Quand un groupe inter-agences mené par l'UNICEF avait compilé les résultats de la toute dernière enquête en 2010, la prévalence du VIH à travers le pays était de 4,9%, soit l'un des taux les plus élevés en Afrique centrale et occidentale. Les femmes et les personnes vivant en milieu urbain sont particulièrement à risque. La plupart de ces personnes ont contracté la maladie par des partenaires hétérosexuels.
Nayo a été infectée par son mari. « Nous étions dans un camp de réfugiés à Mboki [à l'est de la République centrafricaine près de la frontière avec la République démocratique du Congo], quand il est tombé malade», se souvient-elle.
« Des rumeurs circulaient dans le camp comme quoi il était atteint du SIDA, mais il ne l'a jamais admis. Nous avons été de plus en plus ostracisés et mon mari a refusé le traitement. Il est mort dans un hôpital ici à Bangui [en 2004] et c'est à ce moment-là que j'ai découvert que j'étais malade également », explique encore Nayo.
Jusqu'en 2012, au démarrage du cycle actuel du conflit, le HCR a aidé les réfugiés infectés par le virus. Ils ont reçu une aide financière mensuelle et une assistance médicale, ainsi qu'une aide alimentaire via le Programme alimentaire mondial.
Un jour, une base de données essentielle contenant des informations sur ces patients a disparu des bureaux du HCR et de ses partenaires lorsqu'ils ont été pillés en 2013. De nombreux établissements de santé ayant traité les personnes vivant avec le VIH avec des médicaments rétroviraux ont été saccagés et le personnel médical a été contraint de fuir. De plus, la distribution de ces médicaments hors de Bangui a été perturbée, ce qui a affecté les soins médicaux aux réfugiés dans des zones rurales reculées.
« Le système de santé du pays a presque été complètement brisé, alors qu'il était déjà très faible. Ceci a considérablement réduit l'accès au traitement pour les personnes vivant avec le VIH », explique Heinz Henghuber, un consultant du HCR dans le domaine de la santé.
La situation s'est encore aggravée après l'escalade spectaculaire de la violence en décembre 2013. L'accès aux soins est devenu encore plus difficile, avec un risque croissant de développer une résistance aux médicaments du fait de l'interruption fréquente du traitement. L'instabilité a également affecté les programmes de sensibilisation dans un pays où est très répandue la discrimination contre les personnes vivant avec le VIH.
En réponse, le HCR a récemment achevé un processus de vérification qui lui permettra de reconstruire sa base de données et de reprendre une assistance complète en milieu urbain au bénéfice des réfugiés et des demandeurs d'asile vivant avec le VIH en République centrafricaine.
Dans le cadre de son rôle dans la prise d'initiative sur les soins en cas d'urgence pour les personnes vivant avec le VIH, le HCR aide également à identifier et à prioriser les besoins de toutes les personnes infectées par le virus du VIH ou malades du SIDA en République centrafricaine, pour assurer qu'elles reçoivent régulièrement un traitement antirétroviral vital.
Dans cet objectif, le personnel du HCR analyse et compile les rapports et les statistiques publiés par les partenaires nationaux, les organisations non-gouvernementales, d'autres agences des Nations Unies ainsi que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
Pour Nayo, qui a également subi des violences sexuelles et qui a été battue par des miliciens, ce travail effectué par le HCR et ses partenaires est essentiel. Mais elle se tourne vers son église pour trouver la force - et les médicaments - et surmonter les nombreux obstacles auxquels elle doit faire face et continuer à faire face. Elle prie pour vivre encore plusieurs années, pour avoir de la force et pour voir ses petits-enfants grandir.
Par Aikaterini Kitidi à Bangui, République centrafricaine