Des rescapés des inondations sont déplacés pour la seconde fois au Pakistan
Des dizaines de milliers de déplacés internes et de réfugiés afghans, déjà déracinés du fait de conflits, ont été à nouveau forcés de fuir leurs maisons après les inondations au Pakistan.
Gul Hassan, âgé de 70 ans, ne renonce jamais face à l'adversité. Dans les années 80, le conflit survenant dans son Afghanistan natale l'a forcé à fuir avec sa famille vers le Pakistan voisin, où il a commencé une nouvelle vie dans l'installation de réfugiés de Hajizai, située au bord d'un fleuve dans le nord-ouest du pays.
Toutefois, la semaine dernière, les inondations les plus sévères jamais observées depuis plus de 70 ans au Pakistan ont dévasté son ancienne maison et l'ont forcé à fuir une seconde fois. Pendant six jours, avec ses fils, il a dormi en plein air au bord d'une route, alors que sa femme et ses filles étaient hébergées chez des amis.
« Il était minuit, quand l'eau a soudain commencé à monter », m'a indiqué Hassan récemment lorsque j'ai visité la région dans le cadre d'un programme du HCR pour y distribuer des tentes. Les seules possessions de toute la famille qu'il avait réussi à sauver étaient entassées sous une bâche en plastique sur la chaussée. « Il y a également eu des inondations dans le passé », a-t-il expliqué, mais celles-ci ont été les pires de mémoire d'homme. « C'est un désastre. »
L'eau s'écoule toujours entre les maisons situées à proximité et il pleut à nouveau. Sur un pont voisin, des enfants se sont rassemblés pour regarder le niveau des eaux boueuses monter à nouveau. On décharge des tentes, des batteries de cuisine et d'autres biens de secours depuis des camions du HCR dans une école locale située sur un terrain plus élevé.
Hassan fait partie de la population de plus de 1,5 million de personnes déplacées par les pires inondations que le Pakistan ait connues depuis une génération. Quelque 700 000 personnes parmi cette population, comme Hassan, ont déjà été déplacées par les conflits - en Afghanistan ou au Pakistan même - et, de ce fait, elles se retrouvent sans-abri pour la deuxième fois.
La famille d'Hassan est l'une des 10 000 familles afghanes qui habitent dans l'un des quatre villages de réfugiés détruits par les eaux tourbillonnantes de la crue. Des organisations humanitaires font leur possible pour se rendre auprès des rescapés dans des zones isolées par les inondations car des routes et de nombreux ponts ont été emportés par des glissements de terrain.
Sur la route entre Peshawar et Charsadda, j'ai rencontré Jan Bibi et sa famille. Comme Hassan, elle dort en plein air au bord d'une route située sur un terrain plus élevé. Tout autour de nous, les maisons sont à moitié submergées sous les eaux boueuses de la crue. Elle m'a dit que, lors de la montée des eaux la semaine dernière, elle s'est retrouvée bloquée sous son toit au dernier étage de sa maison durant deux jours. Elle a regardé impuissante la noyade de son troupeau et, de ce fait, la disparation de son moyen d'existence.
« Le niveau de l'eau n'a cessé de monter », m'a-t-elle dit. « J'étais inquiète pour mes (cinq) enfants qui étaient tous blottis près de moi. J'ai pensé que nous allions tous mourir. » Finalement après 48 heures, elle a été secourue par un bateau navigant à proximité. « J'ai eu de la chance car, au moins, je suis vivante et ma famille est avec moi - ce qui n'est pas le cas de tous. »
Miskeen, âgée de 55 ans, est l'une des voisines de Jan Bibi. « J'ai pensé seulement à ma famille et à mes petits-enfants », m'a-t-elle indiqué en se remémorant ce moment d'épreuve. Elle aussi a été bloquée durant deux jours sur son toit avant d'être secourue par bateau et transportée vers un lieu plus élevé. « Je suis retournée voir ma maison. Elle est engloutie sous un mètre de boue ! J'ai perdu toutes mes affaires. » Elle montre de la main toutes les maisons submergées visibles depuis la route où nous nous trouvions. Plus de 1 400 personnes ont péri dans les inondations.
Le HCR a déjà distribué, via les autorités locales, quelque 10 000 tentes, ainsi que d'autres biens de secours. L'organisation est ainsi venue en aide à environ 50 000 personnes dans les régions de Khyber Pakhtunkhwa et du Baloutchistan.
« Nous travaillons en étroite coordination avec le Gouvernement du Pakistan pour fournir des biens de secours aux personnes affectées par les inondations », a indiqué Ahmed Warsame, chef du bureau auxiliaire du HCR à Peshawar, ajoutant que 20 000 tentes supplémentaires ont été commandées.
Par Rabia Ali à Peshawar