Renaître de ses cendres
Les bombardements n'ont pas épargné un seul bâtiment à Nikishino, en Ukraine. Pourtant, quelques jours à peine après le cessez-le-feu, les gens revenaient pour commencer à reconstruire.
Les bombardements n'ont pas épargné un seul bâtiment à Nikishino, en Ukraine. Pourtant, quelques jours à peine après le cessez-le-feu, les gens revenaient pour commencer à reconstruire.
Leurs récits:
Nikishino est une ville détruite par le conflit. La ville comptait 900 habitants avant le début des combats dans l'est de l'Ukraine, mais elle s'est retrouvée sur la ligne de front pendant plus de six mois. Aujourd'hui, il ne reste plus grand-chose de la ville. Mais cela n'a pas empêché de nombreux habitants de Nikishino de rentrer chez eux dans les premiers jours qui ont suivi le cessez-le-feu négocié en février.
Comme un squelette de robot géant, dont les veines ont été tranchées et vidées de leur sang, le pylône électrique se dresse dans le brouillard de l'est de l'Ukraine. Il y en a plusieurs sur la route menant à Nikishino. Ils forment une sorte de garde d'honneur de la destruction, avec comme aboutissement une ville en état de désolation presque totale.
Dans la rue, Galina se tient debout comme une sentinelle, le regard fixé vers un avenir incertain. Elle tient deux sacs de plastique à la main; l'un est un sac d'aide humanitaire donné par les agences de l'ONU, l'autre, un sac du grand magasin irlandais Dunnes, contient des effets personnels, récupérés de sa maison détruite. Galina arrive justement de là et elle se dirige vers la maison de sa mère décédée, l'une des rares demeures à ne pas avoir été complètement détruite par le conflit.
« J'ai 65 ans », dit Galina. « Et je tiens à la main tout ce que je possède. »
Reporter depuis des dizaines d'années, j'ai vu les effets de la guerre en Afghanistan, au Moyen-Orient et en Europe de l'Est. Nikishino figure au premier rang des destructions. Aucun bâtiment, aucune demeure n'ont échappé aux combats.
Pourtant, quelques jours à peine après le cessez-le-feu, les gens rentraient en voiture pour commencer à reconstruire. Et lorsque les camions du HCR sont arrivés, chargés de cartons d'aide humanitaire, près de 200 personnes attendaient patiemment; la plupart avaient signé une pétition pour demander aux autorités d'envoyer des équipes spécialisées pour débarrasser les rues et les jardins du village des obus non explosés.
Pourquoi revenir sur les lieux du danger et de la destruction?
Video "Ukraine: Returning and Rebuilding"
Tatiana Leonova se tient debout à côté de son mari, Yuriy, devant la scène de désolation qu'est leur maison. Sa réponse exprime le besoin presque viscéral de rentrer.
« C'est notre patrie. C'est l'endroit où nos grand-mères et nos grands-pères ont vécu. Nous sommes ici depuis 80 ans et nous avons toujours habité dans la même maison. Mon grand-père a survécu à la Seconde Guerre mondiale et il était incapable d'imaginer que cela se produirait un jour, que notre peuple se ferait la guerre. »
À côté, Sergueï, Katia et leur fille, âgée de trois ans, inspectent leur maison. Elle a été endommagée, puis saccagée pendant les combats. Ils ont déjà réparé une partie du toit. Sergueï et Katia ont tous les deux grandi ici; ils parlent de la rivière, de la beauté des lieux et de la pêche en été. Sergueï dit que dès l'arrivée du printemps, ils planteront le potager.
Planter le potager est un autre besoin viscéral. Le désir n'a rien d'esthétique; il s'agit de manger des légumes frais l'été et marinés l'hiver suivant.
D'autres ne sont pas encore rentrés. Trente résidents du village brisé vivent dans un centre d'hébergement collectif situé non loin, à Shakhtarsk. Alexandra Leonova, 91 ans, se souvient de la Seconde Guerre mondiale. « J'avais 18 ans lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté », dit Alexandra. « Mais ce conflit est pire pour moi parce que j'ai tout perdu. Tout a été détruit. »
Nastya, 11 ans, réside aussi dans le centre d'hébergement collectif avec sa maîtresse, Ludmila, qui est âgée de 69 ans. À cause des bombardements, Nastya a raté cinq mois d'école, et elle a vécu pendant plusieurs semaines dans le sous-sol chez elle. « Au début, j'avais vraiment peur, mais, avec le temps, je me suis habituée aux bombardements et aux tirs », dit Nastya. « Je n'ai pas pleuré. »
La résilience est une qualité partagée dans la région. Les habitants vont stoïquement revenir et reconstruire, malgré la peur, exprimée par plusieurs d'entre eux, que les combats reprennent.
Ce dont les habitants ont besoin maintenant pour soutenir leur stoïcisme et leur volonté est une aide et les matériaux qui leur permettront de reconstruire leur village et de recommencer une nouvelle vie.