L’histoire de René Sibomana, Sénégal

Photo by: Mariama Mary Fall-Diaw

Photo de UNHCR/Mariama Mary Fall-Diaw/2014.

“Beaucoup de livres, de documentaires, retracent le génocide du Rwanda. Moi j’y étais, personne ne me l’a raconté; je l’ai vécu. Je suis un livre.” Ce sont les mots de René Sibomana, réfugié rwandais au Sénégal, marié à une Burundaise et père de quatre enfants. Comme près des deux millions de Rwandais qui ont fui leur pays lors du génocide d’avril 1994, René a été séparé des membres de sa famille pendant plusieurs semaines, chacun empruntant un chemin différent, sans aucune nouvelle.

“Deux de mes enfants, âgés de 12 et 13 ans à l’époque, ont fui pendant plusieurs jours vers le Burundi. Les deux autres, 6 et 9 ans, étaient bloqués à Kigali avec leur mère. Ils se sont fondus dans la masse lors du départ général, rejoignant la frontière congolaise à pieds. Quant à moi, je me suis replié au Nord, à Goma, où j’ai pu retrouver les miens un mois après les évènements” relate-t-il. “C’était dur mais je pense que mes enfants ont quand même été chanceux: les enfants rencontrés pendant la fuite avaient vu tant d’horreurs qu’une fois au Congo, même quand certaines organisations voulaient les placer dans des familles, ils n’étaient pas en mesure d’accepter l’affection d’une mère “artificielle” à cause du niveau de souffrance vécu. Beaucoup ont été abandonnés ou ont vu leurs parents tués sur le chemin de l’exil,” poursuit René.

Au moment du génocide, René faisait partie du Réseau International de Scoutisme. Ses nombreux contacts et son expérience professionnelle lui ont permis de travailler à Goma pendant deux ans aux côtés du HCR, du CICR et de l’UNICEF comme partenaire. Il subvenait ainsi aux besoins de sa famille qui avait été accueillie à Dakar quelques mois après leur fuite, en juillet 1994, par un ami sénégalais. Cet homme déterminé ne s’est jamais apitoyé sur son sort. “Ma famille était privilégiée par rapport à la majorité des réfugiés que j’ai rencontrés et ce qui m’a différencié des autres, c’était ma résilience.” René définit cette résilience comme la force de savoir accepter sa situation et en tirer profit, essayer de trouver une solution “une chanson, un jeu, une prière peut aider à construire sa résilience. Il faut aussi résoudre ses problèmes intérieurs avant d’accepter une aide quelconque. Quand on est méfiant, on voit le mal partout.”

René a rejoint sa famille au Sénégal en 1996 et deux ans après, il a fondé l’ONG Action Jeunesse Environnement pour continuer à travailler avec les enfants défavorisés. Selon lui, Les enfants réfugiés ne sont pas différents des enfants nationaux que son organisation encadre dans les quartiers pauvres. “Ils vivent souvent des situations plus difficiles que les réfugiés et n’ont pas d’institutions comme le HCR pour les appuyer. Il faut donc arrêter de se plaindre et trouver le moyen d’améliorer son quotidien.”

 

Texte de Mariama Mary Fall-Diaw/2014.


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