Grâce au réseau Papillons, Benedicia a reconstruit sa vie

Benedicia

Benedicia Benancia. Photo de UNHCR/L. Zanetti/2014

Le dispositif d’épargne des Papillons aide les femmes déplacées à reconstruire leur vie

Quand les affrontements ont éclaté entre groupes armés rivaux dans son village de la province de Valle de Cauca située dans l’ouest de la Colombie en 2001, Benedicia Benancia et ses sept jeunes enfants ont fui par bateau. “Nous devions fuir les fusillades autour de nous. C’était immédiat. Nous nous sommes enfuis en courant pour sauver nos vies”, se souvient-elle. Benedicia a trouvé refuge dans la maison d’un proche dans la vie portuaire délabrée de Buenaventura. Elle a trouvé un refuge – mais aucune échappatoire à la violence.

Alors que le pays compte 5,7 millions de personnes déracinées par le conflit, Buenaventura connait l’un des taux de violence et de déplacement les plus élevés en raison de l’escalade de la violence entre groupes armés illégaux. Les femmes sont malheureusement souvent leurs cibles. Les groupes violentent les femmes et les enfants pour montrer leur pouvoir et leur force. Les femmes sont torturées, violées ou assassinées pour se venger entre rivaux armés. “Avec d’autres personnes, j’ai fui la violence, mais nous avons également trouvé la violence ici”, déclare Benedicia.

Vivant dans un quartier où les fusillades sont courantes et où les guerres de territoire liées à la drogue entre groupes armés illégaux rivaux peuvent contraindre les habitants à se terrer parfois pendant plusieurs jours, Benedicia affirme que les habitants gardent le silence pour survivre. Mère célibataire, Benedicia se battait pour subvenir aux besoins de sa famille et pour les maintenir en sécurité. Elle avait trouvé du travail comme femme de ménage et bien que son employeur lui donne de la nourriture pour chez elle, sa situation familiale restait précaire – jusqu’au jour où elle a découvert les Papillons, un réseau de défense des droits de la femme.

Une voisine, Maritza Yaneth, l’a présentée au groupe – une étape qui a changé sa vie. “Quand j’ai rencontré Benedicia il y a quelques années, elle était dans une situation désespérée. Je lui ai parlé des Papillons et je l’ai encouragée à participer à nos ateliers et à nous rejoinder”, explique Maritza.

Grâce aux Papillons, Benedicia a repris le contrôle de sa vie et a pu éviter d’être aspirée dans la spirale de la violence et de l’extorsion qui était devenue une réalité quotidienne à Buenaventura. “Grâce au réseau, j’ai des amis. Je me sens soutenue. Je ne me sens jamais seule”, déclare la femme de 53 ans.

Les niveaux extrêmes de pauvreté combinés à la violence exacerbent la vulnérabilité des femmes et des enfants. A Buenaventura, selon les estimations, plus de 80% des personnes vivent dans la pauvreté et 20% vivent dans l’extrême pauvreté – avec moins de 2 dollars par jour. Pour aider les familles pauvres (comme la sienne) à gagner des forces et de l’indépendance, Benedicia a pris en charge un dispositif de nourriture et d’épargne initié et géré par les Papillons. Il est mis en œuvre dans plusieurs quartiers pauvres de Buenaventura. Le dispositif est devenu vital pour elle et il constitue un filet de sécurité pour de nombreuses autres familles qui auraient pu être contraintes de fuir en raison de la violence et de l’intimidation.

Chaque semaine, Benedicia récolte un peu d’argent et un kilo de riz auprès de chacun des 24 membres du dispositif dans son quartier. « Je note tout dans ce carnet », explique-t-elle, en montrant une liste de noms et de chiffres. Plusieurs fois par an, Benedicia retourne dans les maisons délabrées des membres du dispositif pour donner à chacun d’eux une part du riz et de l’argent collectés. Le dispositif, connu parmi les membres des Papillons sous le nom de « chaine alimentaire », a littéralement sauvé la vie de Benedicia et d’autres femmes qui sont les seuls soutiens de leurs familles et n’ont pas accès aux comptes bancaires. La chaine alimentaire fournit une source régulière de soutien dans un endroit où les emplois se font rares.

“Certaines femmes utilisent l’argent qu’elles économisent pour payer les factures et même les tickets de bus pour faire des courses. D’autres, quand elles reçoivent le riz, préparent une grosse dose avec du poisson et la mettent au congélateur [pour l’utiliser plus tard]“, explique Benedicia. L’indépendance financière renforce ces femmes et leur donne la capacité de faire face aux défis de la vie quotidienne à Buenaventura. Pour Benedicia, la chaine alimentaire lui a permis de trouver finalement le refuge sûr qu’elle recherchait :

“J’avais l’habitude de dormir sur un sol terreux, mais grâce à la chaine [alimentaire] j’ai réussi à construire la maison que vous voyez aujourd’hui. Je n’aurais pas pu mettre de côté sinon”, déclare-t-elle.

Treize ans après avoir été déracinée, le Gouvernement colombien a récemment reconnu que Benedicia était une déplacée interne. Mais Benedicia est remplie d’espoir : « Mon rêve est de posséder une petite ferme où je pourrais faire pousser ce dont j’ai besoin dans la campagne environnante et vivre en paix », affirme-t-elle.


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