Une femme macédonienne baptisée « Ange des réfugiés » par les voyageurs sur la « route des Balkans »

Articles d'actualité, 3 août 2015

© HCR/N. Spasenoski
L'aide n'est jamais complète sans un sourire. Lenche Zdravkin avec des réfugiés à la gare de Gevgelija.

GEVGELIJA, Macédoine (Ancienne République yougoslave de Macédoine, ARYM), 30 juillet (HCR) Des réfugiés épuisés marchent sans rien hormis un sac à dos le long des rails. Certains portent de jeunes enfants hagards cramponnés à leur buste. Des femmes enceintes avancent sous la canicule, combattant la fatigue, les ampoules, et surtout le chagrin d'avoir perdu leur patrie.

Lenche Zdravkin a été témoin de ces scènes pour la première fois il y a deux ans, lorsque des flux d'étrangers ont commencé à passer à côté de chez elle, à quelques mètres des voies de chemin de fer qui relient le sud au nord de son pays, l'ex-République yougoslave de Macédoine (ARYM).

Lenche, 48 ans, responsable administrative et financière d'une chaine locale de télévision, vit avec son mari et deux garçons à Veles. Cette ville, située au cœur de l'artère migratoire appelée « route des Balkans », est empruntée depuis deux ans par un nombre toujours plus important de réfugiés au cours de leur terrible odyssée les menant de Grèce, à travers l'ex-République yougoslave de Macédoine et la Serbie, vers la Hongrie, porte d'entrée vers leurs destinations souhaitées dans les Etats du nord et de l'ouest de l'UE.

Dès que Lenche a commencé à échanger avec ces voyageurs inattendus et a appris les raisons pour lesquelles ils avaient fui des pays déchirés par la guerre comme la Syrie, l'Iraq et l'Afghanistan et les conditions de leurs longs et périlleux périples, son instinct humain l'a immédiatement incitée à leur venir en aide.

« En les voyant s'effondrer devant chez moi, en les voyant s'évanouir, en voyant leurs jambes gelées pleines de blessures, j'ai fait ce que j'avais à faire. N'importe qui aurait fait la même chose à ma place. La vie humaine n'a pas de prix ».

Avec sa famille, elle a tout d'abord fourni de l'eau, du thé et un peu de nourriture. Comme les groupes devenaient de plus en plus importants, Lenche a dû acheter davantage de pain et même donner toute la nourriture que la famille avait provisionnée pour l'hiver. Lorsque les températures ont grimpé au printemps et que l'eau est devenue une nécessité, Lenche a également commencé à acheter de l'eau. Lorsqu'il est devenu trop cher d'acheter du pain pour les réfugiés, elle a commencé à en fabriquer elle-même.

© HCR/N. Spasenoski
Le sac de Lenche, rempli de vêtements propres et repassés pour bébés et enfants, redonne le sourire à de nombreuses personnes.

Même en faisant tout cela, elle a vite réalisé que c'était insuffisant. « Chaque jour, je me demandais comment je pourrais y arriver le lendemain et comment je pouvais les aider. J'essayais de limiter le budget et d'être pratique », explique-t-elle.

Il a fallu un an et demi avant que ses compatriotes, des organisations et les médias soient au courant de son action humanitaire altruiste. Sa maison est vite devenue un centre humanitaire à Veles. Les habitants l'appellent désormais la « Maison de l'espoir ».

Cela a suscité un élan civique qui a rapidement pris de l'ampleur à travers les médias sociaux et est devenue une initiative d'ampleur nationale, popularisée sous le nom de « Aidez les migrants en Macédoine ».

« Je me suis immédiatement sentie soulagée car l'aide est venue de partout », affirme-t-elle. « En peu de temps, le hall de ma maison s'est transformé en entrepôt ».

Le HCR a également eu connaissance des actions de Lenche et lui a rendu visite pour proposer une aide. « Ils ont vu que j'avais besoin d'aide et, rapidement, des produits comme de l'eau, des biscuits et des colis d'hygiène ont été livrés chez moi », ajoute-t-elle.

Par l'intermédiaire de la Croix-Rouge nationale, le HCR a également assuré la livraison quotidienne de pain fabriqué par la boulangerie voisine au domicile de Lenche.

Afin de trouver une réponse à cet afflux quotidien d'un millier de réfugiés, qui crée une pression considérable sur les capacités d'accueil de cet Etat des Balkans, en juin le parlement macédonien a modifié la législation sur l'asile en vue d'accorder aux candidats à l'asile 72 heures à partir de leur entrée sur le territoire pour circuler légalement, utiliser les transports publics et demander l'asile.

Les réfugiés ne sont plus obligés de se cacher et de marcher de nuit sur des routes dangereuses, sur l'autoroute et le long des voies de chemin de fer, face aux gangs criminels et aux accidents de train, qui ont fait 28 morts au cours des six derniers mois.

Les réfugiés ne passent plus à côté de la maison de Lenche, mais cela n'a en rien altéré sa motivation sincère pour aider les personnes dans le besoin. Presque tous les jours, elle fait le trajet de 110 kms entre chez elle et la ville de Gevgelija située à la frontière avec la Grèce, première étape pour les réfugiés pénétrant dans l'ex-République yougoslave de Macédoine. Elle se fraye un chemin au milieu d'un flot de réfugiés épuisés, affamés et assoiffés qui se reposent dans la gare de Gevgelija, leur distribuant eau, nourriture, produits d'hygiène et couches pour bébés.

« Après tout ce que nous avons enduré, cette femme est comme un ange pour nous », déclare l'un d'entre eux, en la remerciant pour une bouteille d'eau.

Mais Lenche ne voit rien d'extraordinaire dans ses actes : « Chacun de nous pourrait le faire. Parfois, l'argent n'est pas nécessaire pour aider quelqu'un. Il suffit parfois d'un signe ou d'un sourire pour leur donner des forces ».

Histoire rédigée par Ljubinka Brashnarska et Neven Crvenkovi?

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