Le HCR appelle la Colombie à enquêter sur le meurtre de 17 indigènes

Articles d'actualité, 10 février 2009

© HCR/M.-H.Verney
Un enfant de l'ethnie awa en Colombie. Au moins un enfant fait partie des victimes awas qui auraient été assassinés la semaine dernière.

BOGOTA, Colombie, 10 février (UNHCR) Le HCR a demandé mardi une enquête approfondie après les meurtres, la semaine dernière, de 17 indigènes awas dans une région isolée du sud-ouest de la Colombie.

« Nous lançons un appel pressant à toutes les parties impliquées pour qu'elles respectent la législation humanitaire internationale et nous demandons au Gouvernement colombien de remplir ses obligations pour la protection des civils et de prendre des mesures spécifiques pour la préservation des peuples indigènes », a expliqué un porte-parole du HCR.

Selon les premières informations émanant des autorités provinciales et locales, les victimes, deux femmes et un enfant, ont été tuées la semaine dernière sur le territoire collectif des Awas dans la région colombienne de Nariño. Le reste de la population est maintenant extrêmement apeuré, dans un contexte de préoccupations accrues sur un déplacement massif de population dans les jours à venir.

La région, située le long de la rivière Telembi entre les villages de Ricaurte et de Barbacoas, est isolée et extrêmement difficile à atteindre. Dans certaines parties de cette région, il y aussi de nombreuses mines antipersonnel. Selon les premières informations, qu'il n'est pas possible de vérifier pour l'instant, les 17 indigènes ont été assassinés au cours d'une attaque de représailles menée par un groupe armé irrégulier contre la population civile après l'arrivée de forces armées colombiennes.

Le bureau de terrain du HCR à Nariño travaille en étroite collaboration avec la population awa qui, comme de nombreux groupes indigènes colombiens, tente tant bien que mal depuis des années de se tenir à l'écart du conflit interne survenant dans le pays. Les Awas, dans cette partie de Nariño, vivent sur un territoire collectif protégé, mais cela n'a pas empêché les groupes armés d'entrer sur leurs terres.

En conséquence, ils sont victimes de graves violations de leurs droits, notamment une pression constante et des persécutions, des meurtres répétés et le déplacement forcé. Ils ont été contraints à plusieurs reprises de fuir leurs terres ancestrales ces dernières années. Certains ont franchi la frontière pour trouver refuge en Equateur voisin. L'usage des mines antipersonnel par des groupes armés irréguliers sur leur territoire est une autre source de terreur et de déplacement forcé.

Ron Redmond, le porte-parole en chef du HCR, a indiqué aux journalistes à Genève mardi que l'agence pour les réfugiés était « choquée et bouleversée par la nouvelle des meurtres perpétrés et qu'elle exprime ses condoléances à la population awa, réitère son soutien à leurs droits à vivre en paix sur leur propre territoire et réaffirme son engagement à continuer à travailler avec eux. »

« Nous demandons également une enquête urgente et indépendante sur ce drame ainsi que des mesures immédiates et efficaces de prévention, telles qu'esquissées dans une série d'alertes déjà publiées à plusieurs reprises par le Bureau de l'Ombudsman de Colombie pour la région de Nariño. »

Avec 21 000 individus, les Awas constituent le plus important groupe indigène à Nariño, un département qui subit les pires violences et le plus haut niveau de déplacement forcé en Colombie. Durant les deux années précédentes, Nariño a connu plus de 10 % de l'ensemble des nouveaux cas de déplacement forcé dans le pays.

Plus de 300 000 personnes ont été déplacées en Colombie en 2007 et les premiers chiffres de 2008 montrent une tendance similaire, portant le nombre total de personnes déplacées internes enregistrées à plus de 2,8 millions.

Le peuple awa est l'un des 87 groupes indigènes en Colombie. Plus d'un tiers de ces groupes sont en danger d'extinction, majoritairement à cause du conflit armé et du déplacement forcé. Leur survie dépend principalement de leur possibilité de demeurer sur leurs territoires ancestraux et de maintenir leurs liens étroits avec leurs terres. La Constitution colombienne les reconnaît comme des populations ayant des droits particuliers et des besoins spécifiques de protection.

Avec 12 bureaux en Colombie, le HCR travaille avec l'Etat dans ses efforts déployés pour remplir ses obligations dans le domaine de la protection ainsi qu'avec des organisations indigènes à travers tout le pays. Dans le cadre de ces efforts, une campagne menée actuellement alerte l'opinion sur l'importance d'une crise qui risque malheureusement de se poursuivre année après année.

Par Marie-Hélène Verney à Bogota, Colombie

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Colombie : Vivre dans les «barrios»

Après plus de quarante ans de guerre civile, la Colombie recense l'une des plus grandes populations de personnes déplacées au monde. Plus de deux millions de personnes ont été contraintes de fuir leurs maisons ; beaucoup d'entre elles ont quitté des régions rurales éloignées pour aller chercher une sécurité relative dans les villes.

Les familles de personnes déplacées échouent la plupart du temps dans des taudis à la périphérie des grandes villes, où elles vivent dans un grand dénuement. Juste à la sortie de Bogota, des dizaines de milliers de personnes déplacées vivent dans les bidonvilles de Los Altos de Cazuca et de Los Altos de Florida. Les déplacé internes n'ont pratiquement pas accès aux services de santé, d'éducation ou de logement décent. La sécurité est également un problème, des gangs et des groupes armés contrôlant les bidonvilles et prenant souvent pour cible les jeunes.

L'UNHCR travaille en collaboration avec les autorités dans une dizaine de communes à travers la Colombie afin de s'assurer que les droits des personnes déplacées soient respectés, y compris leur accès aux services de base : la santé, l'éducation et la sécurité.

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Les populations indigènes en Colombie

Forcés de fuir la violence sévissant sur leurs territoires, les peuples indigènes en Colombie luttent pour éviter une rupture de leurs liens communautaires et culturels. On compte environ un million de personnes indigènes en Colombie. Elles appartiennent à 80 groupes différents et composent l'un des héritages autochtones les plus riches et les plus variés au monde. Mais le conflit armé interne frappe particulièrement sévèrement ces populations indigènes.

Comme de nombreux Colombiens, les peuples indigènes n'ont souvent pas d'autre choix que celui de fuir leurs terres pour échapper à la violence. Le déplacement forcé est tout spécialement tragique pour eux car ils sont attachés à leurs terres ancestrales par des liens très forts. Souvent leur survie économique, sociale et culturelle dépend de la préservation de ces liens. Selon l'Association nationale indigène colombienne (ONIC), quelque 18 groupes ethniques minoritaires se trouvent en danger réel d'extinction. L'UNHCR travaille avec eux pour les aider dans leur lutte à rester sur leurs terres ou pour reconstruire leur vie quand ils ont été forcés à fuir.

L'UNHCR aide aussi des réfugiés indigènes accueillis dans des pays voisins comme le Panama, l'Equateur, le Vénézuela et le Brésil. L'UNHCR développe une stratégie régionale pour mieux répondre aux besoins spécifiques des populations indigènes durant l'exil.

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Réfugiés invisibles au Panama

La guerre civile en Colombie a forcé des millions de personnes à fuir de chez elles, dont des centaines de milliers qui ont cherché refuge dans d'autres pays de la région.

Au Panama, le long de la frontière avec la Colombie, la région de Darien est recouverte d'une épaisse jungle inhospitalière et accessible uniquement par bateau. Néanmoins, de nombreux Colombiens sont venus jusque-là pour trouver refuge, après avoir fui les groupes armés irréguliers qui contrôlent de vastes territoires de jungle de l'autre côté de la frontière.

De nombreuses familles réfugiées au Darien font partie de minorités éthniques de Colombie - indigènes ou afro-colombiennes - qui ont été particulièrement affectées par le conflit et déplacées en grand nombre. Ces dernières années, un nombre croissant de réfugiés colombiens ont également rejoint la capitale, Panama City.

Environ 12 500 Colombiens relevant du mandat de l'UNHCR se trouvent au Panama, mais beaucoup préfèrent ne pas se faire connaître des autorités et rester cachés. Venir en aide à cette population « invisible » est l'un des plus grands défis que rencontre l'UNHCR non seulement au Panama, mais aussi en Equateur et au Vénézuela.

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La violence sévissant dans plusieurs régions de la Colombie menace l'existence des populations indigènes dans le pays. Voici le témoignage de l'un de ces groupes, les indigènes Tulé.