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Calais : Le HCR a élaboré une feuille de route sur la « jungle »
Articles d'actualité, 17 juillet 2009
CALAIS, France, 17 juillet (HCR) – Les habitants de Calais l'appelle « la jungle ». Ce bidonville se situe parmi les dunes de sable et les ronces aux alentours de Calais. Les abris de fortune constitués de morceaux de carton, de contreplaqué et de lambeaux de plastique y ont poussé comme des champignons. Des centaines de migrants et de demandeurs d'asile, y compris des enfants, vivent ici ou dans des bâtiments abandonnés situés plus près du centre de cette ville portuaire du nord de la France.
Ils viennent de pays lointains : l'Afghanistan, l'Erythrée, l'Iran, l'Iraq, le Soudan, la Somalie et même le Viet Nam. Certains ont voyagé durant des mois, ils ont traversé des montagnes et des déserts. Ils manifestent une certaine réticence à parler avec des étrangers.
Avant de pouvoir concrétiser leur rêve d'une nouvelle vie au Royaume-Uni, ils doivent toutefois franchir un dernier obstacle : un bras de mer large de 34 kilomètres séparant Calais des falaises blanches de Douvres, que l'on aperçoit distinctement par temps clair.
Ils ont entrepris le voyage à ce point périlleux et ils vivent à la dure à Calais pour de multiples raisons. Certains ont des proches au Royaume-Uni. D'autres ont entendu dire qu'il est facile d'y trouver un emploi ou ils veulent y étudier. D'autres encore ont été forcés à fuir leurs pays du fait de persécutions politiques, religieuses et ethniques et ils pourraient être reconnus en tant que réfugiés s'ils avaient la possibilité de demander l'asile.
« On ne peut pas généraliser, chaque cas est différent », a expliqué Marie-Ange Lescure du HCR. Depuis début juin, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés et son partenaire local, France Terre d'Asile, sont présents à Calais pour informer et pour apporter des conseils à des centaines de personnes sur les systèmes et les procédures pour la demande d'asile en France et au Royaume-Uni.
La semaine dernière, les deux organisations ont présenté aux autorités françaises une feuille de route visant à aider à résoudre certains des problèmes posés par l'imbroglio observé à Calais et dans d'autres villes du nord de la France, et pour assister les personnes qui pourraient avoir une crainte légitime de persécution dans leurs pays d'origine.
La feuille de route présente en détail la mission et les activités du HCR à Calais ainsi qu'une série de propositions sur les moyens visant à traiter des cas de demandes d'asile relevant du règlement Dublin II, dans le cadre duquel les demandes d'asile sont traitées dans le premier pays par lequel le demandeur est entré dans l'Union européenne. La feuille de route fait aussi des propositions concrètes sur les mécanismes à mettre en œuvre pour protéger les enfants et les mineurs.
Trouver des informations justes ainsi que des conseils objectifs adaptés à chaque cas n'est toutefois pas chose facile. Les migrants et les demandeurs d'asile potentiels peuvent aisément se perdre parmi un pêle-mêle de rumeurs, de désinformation délibérée et de règlements bureaucratiques qui sont aussi déroutants et intimidants qu'une réelle jungle. Pour ceux qui pourraient avoir besoin d'une protection internationale, les autorités locales ont mis en œuvre des mesures importantes visant à faciliter la procédure de demande d'asile. Depuis avril dernier, on peut désormais déposer une demande d'asile à Calais. Auparavant, les demandeurs d'asile potentiels devaient se rendre à Lille, à environ 100 kilomètres de Calais.
Depuis avril, plus de 120 personnes se sont présentées à un guichet qui a été spécialement ouvert à la sous-préfecture de Calais. Toutefois, malgré la coopération des autorités locales, les demandeurs d'asile sont toujours confrontés à de considérables obstacles bureaucratiques et administratifs.
Par exemple, le règlement Dublin II sur l'Etat responsable du traitement des demandes d'asile affecte un grand nombre de personnes vivant dans des conditions déplorables à Calais. La plupart d'entre elles sont entrées en Europe via la Grèce, un pays où les demandeurs d'asile continuent à être confrontés à de sérieuses difficultés pour accéder à une véritable procédure de demande d'asile.
Afin d'éviter d'être renvoyés en Grèce ou ailleurs, des migrants et des demandeurs d'asile vont jusqu'à brûler le bout de leurs doigts avec des clous chauffés à blanc ou de l'acide sulphurique pour qu'ils ne puissent plus être identifiés via leurs empreintes digitales.
Les passeurs, qui gagnent de l'argent en aidant les migrants et les demandeurs d'asile à atteindre leur destination, donnent souvent de fausses informations à leurs clients. Certains demandeurs d'asile ont indiqué avoir été menacés par les passeurs après avoir déposé une demande d'asile et ils ont dû quitter la « jungle. »
« Les jungles sont contrôlées par les passeurs », a indiqué un bénévole local pour l'aide humanitaire, qui travaille depuis des années à Calais. « Les passeurs contrôlent l'accès aux camions et aux trains. Il y a une semaine, un jeune homme a été poignardé à la hanche pour avoir tenté de monter à bord d'un camion sans payer le passeur. »
Un autre sujet de préoccupation pour le HCR concerne la situation des enfants, dont quelques-uns sont âgés de trois ans. Les enfants arrivent à Calais avec un proche ou, dans certains cas, de leur propre initiative. Ils sont extrêmement vulnérables et ils ont besoin d'une protection spécifique.
« Les enfants sont souvent accompagnés par un passeur qui se fait passer pour un frère plus âgé ou un oncle. Ils utilisent les enfants comme monnaie d'échange pour obtenir davantage d'argent de leurs familles », a déclaré Jean-François Roger de France Terre d'Asile.
Le HCR espère qu'en travaillant en étroite collaboration avec les autorités britanniques et françaises, l'Union européenne ainsi que la société civile et d'autres organisations concernées, une solution pourra être trouvée pour certaines personnes au moins parmi toutes celles qui vivent dans des conditions insalubres et dangereuses à Calais.
Par William Spindler à Calais, France