Une plus grande autonomie pour les réfugiés sahraouis en Algérie

Articles d'actualité, 30 janvier 2014

© HCR/D.Alachi
Deux enfants réfugiés, dans l'un des cinq camps devenus de petites villes, à Tindouf au milieu du désert algérien. Ces camps offrent des opportunités limitées pour la jeunesse sahraouie. Il y manque même de vraies aires de jeux.

TINDOUF, Algérie, 30 janvier (HCR) Cinq camps de la taille de petites villes dans l'ouest du désert algérien accueillent Saleh Sidi Moustafa et des dizaines de milliers d'autres réfugiés sahraouis. Le premier d'entre eux fuyant le conflit qui a déchiré le Sahara occidental est arrivé dans ce vaste lieu une dizaine d'années avant même la naissance de Saleh.

L'horizon s'étendant à l'infini « vous regardez vers la droite et vous trouvez le ciel et l'horizon s'étendant à l'infini », explique Saleh, « vous regardez vers la gauche, c'est la même chose » illustre la frustration et les perspectives limitées qu'éprouvent trop de jeunes Sahraouis.

Saleh fait partie des jeunes Sahraouis qui ont particulièrement bien réussi leur éducation. Il maîtrise l'arabe, l'anglais, l'espagnol et l'allemand ainsi que l'Hassaniya, le dialecte arabe pratiqué par beaucoup au Sahara occidental et en Mauritanie. Saleh a été scolarisé en école primaire dans les camps de réfugiés sahraouis, avant de continuer au lycée en Libye puis à l'université pour un diplôme de littérature anglaise à Alger.

« La seule chose que je veux faire, c'est me rendre utile pour mon peuple et la société sahraouie », explique Saleh. Il a travaillé pendant un an en tant qu'enseignant au camp de Laayoune, où il était payé 40 dollars par mois. « Que puis-je faire avec cette somme ? Elle est dépensée en moins d'une semaine. C'est loin d'être suffisant pour que je puisse subvenir à mes besoins et à ceux de ma famille. Alors j'ai cherché autre chose. »

Comme Saleh, d'autres Sahraouis ayant reçu une éducation à l'étranger trouvent rarement un métier où ils peuvent utiliser leurs compétences. Les camps vivent grâce aux contributions de pays étrangers et la plupart de l'activité économique est informelle, avec de petits marchés disséminés dans les camps. La plupart des réfugiés achètent à crédit.

« Cela fait partie de la culture sahraouie », explique Mohammed, âgé de 24 ans. Il travaille dans un marché au camp d'Awsard. « Je ne peux pas dire 'non' à quelqu'un qui veut manger un peu de pain et de fruits. » Les Sahraouis comme Mohammed luttent pour subvenir à leurs besoins, en développant des entreprises qui semblent ne jamais survivre. Elles apparaissent en un jour et disparaissent aussi rapidement.

Le peu d'opportunités pour travailler mène peu à peu à l'accumulation de la frustration et de désillusions, déclenchant un sentiment d'impuissance et de dépendance à l'aide humanitaire. Selon le directeur d'un centre de formation professionnelle et de production au camp de Dakhla, il devient de plus en plus difficile de motiver les jeunes, que ce soit déjà pour chercher un emploi : ils travaillent deux ou trois semaines, puis ils s'en vont.

« Nous devons organiser des ateliers pour favoriser un changement de comportement », explique Yassine*, qui est superviseur au centre de jeunesse. C'est pour lui le seul moyen de faire comprendre qu'il ne faut pas dépendre d'une aide extérieure. « Nous devons passer d'une mentalité d'assistés à une culture du travail et de la productivité. »

Les jeunes comptent pour environ 60 pour cent de la population de réfugiés sahraouis. Selon les estimations, cette population comprend entre 90 000 à 165 000 personnes. Les réfugiés sahraouis vivent dans l'incertitude, avec des chances très limitées pour mettre en pratique leur éducation et leurs compétences. « Il y a une augmentation de la petite délinquance dans le camp ainsi qu'un taux d'absentéisme de plus en plus élevé à l'école », déplore Yassine. « Les jeunes générations ont un caractère fuyant et nous avons besoin de répondre à leurs besoins dès que possible. »

Récemment, une délégation de 20 représentants de pays donateurs s'est rendue dans les camps de réfugiés sahraouis. Cette mission était organisée par la Représentation du HCR à Alger avec le PAM et l'UNICEF. Des groupes de discussion ont été organisés avec les jeunes hommes et les femmes pour entendre leurs témoignages sur les défis auxquels ils sont confrontés. Un accroissement des opportunités pour l'autonomie a toutefois été souligné.

« Nous demandons à la communauté internationale, y compris les agences d'aide humanitaire et de développement, de travailler ensemble sur une stratégie pour les moyens d'existence qui renforcera la résilience et l'autonomie des réfugiés sahraouis. Ils doivent retrouver la dignité et des perspectives pour leur avenir », a déclaré Ralf Gruenert, le Représentant du HCR en Algérie.

« Nous devons examiner comment acheminer l'aide, tout en développant des structures communautaires. Comment pouvons-nous intégrer des éléments de développement dans des opérations d'aide humanitaire ? » demande Ralf Gruenert. « Notre objectif est d'accroître la résilience des communautés via la créativité pour éviter la dépendance à l'aide et établir une économie autonome. »

Les activités d'autosuffisance pourraient aider à donner du tonus aux jeunes des camps sahraouis, en particulier si elles sont couplées avec la proposition de Yassine sur des initiatives pour changer les comportements. Des personnes comme Saleh ont un rôle important à jouer en tant que représentants dans leur communauté.

« J'ai réussi mes diplômes d'enseignement supérieur pour améliorer mon avenir. Tous n'ont pas cette chance dans les camps. Nous représentons 10 pour cent de la population et il nous incombe de donner un élan à tout le reste de la population », explique Saleh, qui va partir à Francfort pour étudier en Master. « Je reviendrai avec les compétences nécessaires pour aider ma communauté à devenir plus forte. »

* Noms fictifs pour des raisons de protection

Par Dalia Al Achi à Tindouf, Algérie

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Repérés au large des îles Canaries

Malgré des dangers considérables, des migrants en quête d'un avenir meilleur, et des réfugiés fuyant la guerre et les persécutions, continuent à embarquer dans des bateaux de fortune pour des traversées en haute mer. L'un des principaux itinéraires vers l'Europe part de l'ouest de l'Afrique vers l'archipel des Canaries, un territoire espagnol.

Avant 2006, la plupart des migrants irréguliers, empruntant cet itinéraire sur l'océan Atlantique, embarquaient sur des pateras, des bateaux pouvant transporter jusqu'à 20 personnes. Les pateras partaient en majorité depuis le Maroc et le Territoire du Sahara occidental, pour une traversée d'une demi-journée. Les pateras ont été remplacés par des bateaux plus importants appelés des cayucos, qui peuvent transporter jusqu'à 150 personnes. Les cayucos partent depuis des ports situés dans des pays d'Afrique de l'Ouest comme la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Sénégal ou la Sierra Leone. Ils prennent plus de trois semaines pour atteindre les Canaries.

Parmi les 32 000 personnes arrivées dans les îles Canaries, seule une petite proportion d'entre elles (359 personnes) ont demandé l'asile en 2006. En 2007, plus de 500 demandes d'asile ont été déposées aux îles Canaries. Ce chiffre est particulièrement significatif, étant donnée la diminution de 75 pour cent de nombre global des arrivées par la mer en 2007.

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