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En sécurité, mais à peine de quoi se nourrir

Articles d'actualité, 2 juillet 2014

© HCR/C.Fohlen
Des enfants réfugiés se préparent à semer des grains d'arachides au camp d'Amboko dans le sud du Tchad.

CAMP DE REFUGIES DE DOSSEYE, Tchad Au lendemain de son arrivée en provenance de République centrafricaine, pays déchiré par le conflit, Habiba, 24 ans, est tranquillement assise dans un centre d'accueil pour réfugiés situé au sud du Tchad et essaie d'allaiter sa minuscule Ramatou, la plus jeune de ses quatre enfants. Mais le frêle nourrisson de deux mois, bercé dans les bras tout fins d'Habiba, n'obtient aucun aliment de sa mère.

« J'ai donné naissance à ma fille dans les broussailles, au milieu de la forêt », déclare Habiba, elle-même épuisée et décharnée après une marche dangereuse de trois mois pour atteindre la sécurité au Tchad. « Comme je n'avais rien à manger, je n'avais plus de lait ».

Avec son mari et leurs enfants, Habiba a fui Bouguere, en République centrafricaine (RCA) lorsque des hommes armés ont attaqué leur village, tuant aveuglement les civils. Pendant trois longs mois, la famille a traversé la brousse à pied, essayant d'éviter les dangers, dormant à même le sol et recherchant constamment de la nourriture et de l'eau. Ramatou est née un mois après le début du périple.

« Sur le chemin, la faim nous a affaiblis », raconte Habiba. « Les enfants avaient constamment faim. Nous traversions des régions où il n'y avait rien à manger, pas d'eau. Nous marchions pendant des kilomètres pour trouver de l'eau ».

En une fin d'après-midi de mai, la famille a finalement franchi la frontière avec le Tchad, se joignant aux milliers d'autres réfugiés de RCA qui arrivent chaque mois. Depuis janvier, quelque 14 000 réfugiés sont arrivés dans le sud du Tchad, faisant passer le nombre total de réfugiés originaires de RCA vivant désormais dans ce pays à 90 000. Affaiblis, affamés et assoiffés, mais soulagés d'avoir finalement trouvé de l'aide, Habiba et sa famille ont été transférés par les employés du HCR de la frontière vers le camp de réfugiés de Dosseye. Bien qu'ils soient désormais en sécurité, leurs problèmes ne sont pas terminés.

Depuis janvier, le manque de financements a contraint le Programme alimentaire mondial (PAM) à réduire les rations alimentaires de 60% dans les camps de réfugiés au Tchad, dans le cadre de réductions plus larges qui touchent actuellement près de 800 000 réfugiés dans neuf pays africains. Au Tchad, la ration alimentaire quotidienne a subi une baisse drastique, passant de 2 100 calories à 850 kilocalories par réfugié. Au lieu des 13,5 kilogrammes de céréales par réfugié et par mois, la ration s'élève désormais à 4,5 kg. La ration mensuelle de haricots secs, soit 3 kg par réfugié dans le passé, se limite aujourd'hui à 0,9 kg.

Ne disposant pas suffisamment de nourriture, les réfugiés nouvellement arrivés luttent pour survivre. Comme Habiba et sa famille, beaucoup ont marché jusqu'à quatre mois pour atteindre le Tchad. Ils arrivent épuisés, malades et en état de malnutrition.

« Je suis arrivée hier à 15h et je n'ai pas encore vu de médecin », déclare Habiba. « Plus tard, je devrai aller à l'hôpital avec mon bébé pour faire un contrôle ».

Mais lorsque Habiba se rendra dans le centre de santé du camp, elle ne bénéficiera pas de toute l'aide dont elle a besoin. Depuis le début des coupes budgétaires, les stocks de nourriture supplémentaire pour femmes enceintes et allaitantes ont été épuisés au centre. Cette nourriture supplémentaire comprend typiquement des produits de base comme de la farine, du sucre et de l'huile et vise à s'assurer que les mères et les bébés bénéficient d'une nutrition suffisante pendant les périodes critiques avant et après la naissance. Désormais, avec les réductions des rations alimentaires de base ainsi que des suppléments, Habiba et son bébé vont lutter pour survivre.

« Auparavant, le PAM donnait des aliments spécifiques à toutes les mères allaitantes pendant six mois et à toutes les femmes enceintes à partir de leur deuxième semestre de grossesse », déclare Joseph Mounkang, infirmier au centre de santé de Dosseye. « Les suppléments alimentaires consistaient en 200 grammes de farine, 125 grammes de sucre et 25 grammes d'huile par femme et par jour. Cette année, le PAM n'a pas les moyens de continuer et ils ont donc dû supprimer les suppléments alimentaires. Désormais, lorsque les femmes se présentent au centre de santé, nous n'avons rien à leur donner ».

Houriatou Issa, 32 ans, et son fils Amadou, 13 ans, souffrent tous deux de malnutrition sévère et ils sont allés au centre de santé pour obtenir de l'aide. Ne disposant d'aucun stock de nourriture supplémentaire, le centre leur a donné à tous les deux des paquets de Plumpy'Nut, une pâte de cacahouètes contenant du sucre, de l'huile végétale et du lait écrémé en poudre enrichie avec des vitamines et des minéraux. Normalement, le centre ne donne cette pâte qu'aux enfants de moins de cinq ans, explique Joseph Mounkang. Les adultes ont besoin d'autres suppléments.

« J'ai fui avec mon fils », raconte Houriatou. « Nous étions au milieu de la brousse et nous sommes tous les deux tombés malades. Maintenant mon enfant mange un peu de riz et des Plumpy'Nut. Je n'ai pas d'appétit, mais quand je commence à manger des Plumpy'Nut, je reprends un peu d'énergie ».

Les employés du centre de santé disent qu'ils n'aiment pas donner de pâte de cacahouètes aux adultes, mais c'est tout ce qu'ils ont. « C'est la seule solution que nous avons trouvée pour les aider à survivre », déclare Joseph Mounkang. « Nous allons demander au PAM s'ils ne peuvent pas trouver une petite quantité de suppléments alimentaires pour aider ces femmes ».

La pénurie alimentaire met également les réfugiés souffrant du VIH/SIDA, de la malaria et d'autres affections en plus grand danger. Sans une nutrition adéquate, leur traitement et leur guérison sont compromis. « Si les patients ne mangent pas correctement, ils sont sujets aux infections », explique le docteur Mbakaou Ndeingar. « Et ils ne peuvent pas prendre de médicaments sans manger. Les médicaments doivent être pris après les repas pour faciliter leur absorption ».

Par Céline Schmitt dans le camp de Dosseye, Tchad

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